17.08.2013 Views

Briefwisseling van Hugo Grotius. Deel 2

Briefwisseling van Hugo Grotius. Deel 2

Briefwisseling van Hugo Grotius. Deel 2

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

57<br />

nuée. Quant au delay, outre qu'il n'y peut avoir de prescription de tels offices,<br />

nommément venant de si bonne part, le vostre en cet égard n'a pas tant besoin<br />

d'excuse comme j'ay d'inestimable regret qu'elle soit fondée sur tel empeschement<br />

que Dieu par sa puissance et bonté fera s'il luy plaist cesser pour un bien, dont<br />

j'espère que le publicq recevra quelque jour autant d'a<strong>van</strong>tage, qu'en mon particulier<br />

je trouve de soulagement en l'usage de vos si Chrestiens remèdes. Vous confessant<br />

ingenuement, qu'apres six vingts jours escoulez, depuis ce coup receu, car desormais<br />

je les conte et ils me sont des années, mon ame s'est trouvée plus susceptible de<br />

vos raisons si solides, puisées de la source de verité, procédantes d'une si sça<strong>van</strong>te<br />

et industrieuse main que la vostre, d'un coeur si bon, et d'une si franche amitié.<br />

Pour la qualité de mon mal je voy que vous en faites un soigneux examen et véritable<br />

jugement, n'obmettant aucune circonstance d'iceluy qu'elle n'ayt son lénitif: ce qui<br />

me fera souvent recourir à la lecture de ceste excellente et rare pièce, laquelle je<br />

rendray beaucoup plus longue à force de la relire, que vous ne l'avez escrite. Et ce<br />

pendant supplieray celuy qui vous a mis au coeur de me donner cette assistance<br />

par si efficacieux arguments, me faire la grace d'en tirer les conclusions et recueillir<br />

des fruits proportionnez à mon grand besoin et à vostre sincere affection envers<br />

moy. Certainement j'avois tousjours appris et creu durant le cours de ma vie, qu'il<br />

faut posséder icy bas comme ne possédant point: et que les vies de ceux, ausquels<br />

Dieu nous associe par les plus estroits liens, ne sont pas mesurées en ce monde<br />

sur le pied de nos désirs et commoditez: mesmes qu'il prendroit mal aux familles,<br />

si ceux qui en sont les principaux appuys leurs estoient soustraits, en mesme instant,<br />

nos retraites de ce val de misères ayans esté bornées à divers jours par la<br />

providence de celuy qui nous y fait passer. Mais ie suis contraint de m'accuser de<br />

m'estre trouvé comme hors d'assiette et d'escrime, quand il m'a fallu venir à la<br />

praticque de ces maximes que l'expérience de tous les siècles a prouvées si<br />

véritables: soit que l'aage dont je de<strong>van</strong>çois de beaucoup celle qui m'a précédé me<br />

persuadast qu'elle me survivroit, bien que ceste raison fust de foible estoffe, soit<br />

que je ne me fusse pas assez vivement représenté, que ce qui arrive tous les jours<br />

à tant d'autres pouvoit bien avenir à moy-mesme, ou bien que sui<strong>van</strong>t nostre erreur<br />

trop ordinaire j'eusse plus esloigné que je ne devois de ma pensée l'accident qui<br />

seul pouvoit da<strong>van</strong>tage troubler le contentement de ma vie. Bref j'avouë avec honte<br />

et regret que ce coup m'ayant surpris, bien qu'il ne le deut pas, m'a si fort estourdi,<br />

que je ne m'en puis encor remetre, et qu'en plusieurs autres tres fascheuses<br />

rencontres et traverses, ayant tasché de paroistre aussi fort qu'un homme, en celle<br />

cy je me suis trouvé presqu'au dessous de l'infirmité d'une femme. C'est pourquoy<br />

je reviens encor à vous dire que tant plus en cette espreuve si rude ay je eu besoing<br />

du conseil et support de mes vrays amys. De vous particulièrement qui m'avez tendu<br />

la main au point que les raisons, qu'elle me fournit, pouvoient aussi tant mieux<br />

opérer en moy, que le mal commençant à prendre son cours avec le temps a receu<br />

quelque peu de trefve, et par conséquent mes sens moins troublez sont devenus<br />

plus capables de donner audience à ce qui est de mon bien. C'est de quoy par celle<br />

cy je vous rends tres-affectionnées graces avec asseurance que tel secours produit<br />

tant meilleur effect sur mon affliction que vous la consolez par expérience et par<br />

affection. Des la naissance de mon mal la personne qui vous est la plus chère ayant<br />

fait à celle que je pleure, comme office de soeur, maintenant je vous suis doublement<br />

tenu de ce que vous adjoustez en mon endroit le vostre, si signalé<br />

<strong>Hugo</strong> de Groot, <strong>Briefwisseling</strong> <strong>van</strong> <strong>Hugo</strong> <strong>Grotius</strong>. <strong>Deel</strong> 2

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!