epistolarum tam ab 10. cal vino quam ad eum - Archive ouverte UNIGE

727 EPISTOLAE 2772—2774 728
quel il faloit. remédier. Toutefois pouroe que la
longueur du temps apporte souvent beaucoup dennuyz,
et que les tentations redoublent, et aussi
pouroe que cest lartifice de Satan et de ses suppostz
8 ) de faire languir les enfans de Dieu, affin
de leur amortir petit a petit le courage, ie nay
voulu différer plus long temps a macquiter dune
partie de mon devoir. Aussi ie ne scay pas sil
plaira a Dieu de vous esprouver plus oultre, car
possible que iusque icy en vous espargnant, il vous
a donne loisir de vous preparer affin que ne fussiez
prinse au desproveu. Car combien que ie ne
doubte pas que naiez tousiours este appareillée a
glorifier son sainct nom, si estce qùil scait traiter
les siens par bonne mesure, aiant tousiours esgard
a leur infirmité. Or, quoy quil en soit, ie mo tiens
asseure que iusque icy vous navez pas e3te sans
sentir son secours evident. . Car combien que les
alarmes naient pas este si rudes du commencement,
comme a ceux qui ont este les primices*) pour
monstrer le chemin au reste, si estce qua la longue
vous feussiez deffaillie cent fois sans estre soustenue
par sa vertu. Parquoy aiant persiste et tenu
bon entre beaucoup de combatz et contreditz, oongnoissez
quil ne vous avoit pas mise en oubly: et
que ceste experience vous face espérer sans doubte
que iusque a la fin il vous sera prochain, et parfera
sa vertu en vous, quelqu'infirmite quil y ait.
le croy que vous avez entendu quil na pas
tenu a nous 6 ) que vous neussiez quelque soulagement
du coste des hommes, mais le commencement
a este si maigre, quil semble que Dieu ne veuille
pas que nul sen mesle que luy. Combien que si
les secons 6 ) font mieux que les premiers, encor
nous fauldra il bien congnoistre quilz nauront este
quinstrumens de sa grace. De faict iay quelque
coniecture, mesme quüz neussent pas meilleur advis
ne conduicte que les aultres, quilz obtiendront
plus. Mais quoy quil en soit, le meilleur est de
se preparer alextremite; car BU ny a que la sortie
pour ce coup, il y aura bien a penser plus que iamais
pour lad venir, pour ce que ceux qui ne se
voudront affranchir du service de Dieu en le quittant,
seront plus estroitement captifz soubz la miserable
servitude de Satan. Parquoy, ma dame et
bien aymee seur, ie vous prie au nom de celuy qui
nous a si chèrement rachetez pour dominer sus
nostre vie et nostre mort, que vous regardiez sur
3) supports Bt.
4) premiers Bt.
5) Allusion au® démarches faites par Budé, Bene etc.
en Allemagne.
6) L'ambassade des princes, qu'il espérait encore voir
s'effectuer.
tout comment vous pourrez achever le cours de
vostre vie en son obéissance. Croiez que vostre
vie mest précieuse, mais ce nest pas a vous ny a
moi de nous dispenser que nous ne préférions a
une centaine de vies lhonneur de celuy auquel nous
devons tout. le diz cecy, pouroe que ie presume
assez quoultre les tentations qui vous pourront venir
au devant, il y aura plusieurs souffletz pour les
allumer, et cependant amortir la crainte de Dieu, si
vous nestiez bien munie au contraire. Or quelques
assaultz 7 ) qui vous soient dressez, quant vous
regarderez non seulement que vault lheritage des
cieux auquel nous sommes appeliez, mais aussi de
quel pris il nous a este acquis, il y aura pour vous
endurcir en une constance invincible : comme a lopposite
nous serons bien tost abbatuz, et grans et
petis, en destornant - nos yeux de la. Principalement
ceux qui ont plus dappuy et darrest en ce
monde, y seront plus tpst retenuz, selon que soubz
umbre de tous les dons par lesquelz Dieu nous attire
a soy, Satan sefforce de nous en eslongner.
Mais ceux qui priseront bien la valeur inestimable
de ce thresor qui nous est offert en lEvangile,
quant le filz de Dieu se donne a nous, auront de
quoy quieter tout ce qui est du monde. Quant
tout est dit 8 ) il ny a Prince ne Roy qui puisse
estre Chrestien, sinon a condition doffrir sa vie et
sa mort en sacrifice a Dieu.
Maintenant, puisquil vous appelle a rendre
tesmoignage a la doctrine ou gist tout vostre bien,
salut et gloire, pensez en premier lieu en quoy vous
luy estes obligee, et si la condition de vous acquiter
est dure et pesante, consolez vous de ce quil ne
requiert rien qui ne retorne a vostre profit. le
scay bien que plusieurs- vous pourront alléguer quil
se vauldroit mieux espargner, que de sabandonner
sans profit, mais en remettant vostre vie a celuy
auquel elle appartient, laissez luy disposer de lissue
qui en adviendra, comme cest a luy de faire fruc-,
tifier tout ce qui procède de nous, pouroe quaultrement
il seroit inutile. En cecy et en tout le
reste, congnoissez que vous estes appellee au combat,
et puis que cest le temps de batailler, armez
vous, selon que la nécessite le requiert, non seulement
en méditant les promesses qui nous doibvent
fortifier iusque au bout, mais aussi en priant le
Dieu de toute vertu vous soustenir par son Esprit,
pour vous rendre plainement victorieuse, comme
vous pouvez estre asseuree que beaucoup vous tiennent
compagnie en telle requeste. Et de ma part
ié le supplie de vous avoir en sa saincte garde,
vous guider en toute prudence, droicture et con-
7) au contraire de quelques assaults Bt.
8) quatre mots omis Bt.