volumnis xxxviii. pars prior. - Archive ouverte UNIGE
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291 ÈPISTOLÀE 153 292<br />
aussi faut il que la votante du Seigneur en soit<br />
faicte et que m'en contente en luy.<br />
Que si i'ay usé de trop grande liberté envers<br />
vous, toutesfoi8 ie n'en ay usé que selon que i'ay<br />
estimé le devoir et office de vraie amitié le requérir<br />
et en la sorte qu'on ne me fera iamais, desplaisir<br />
d'en user envers moy. Certes ie ne vous avois<br />
riens escript pour vouloir vous irriter ne fascher,<br />
encores moins tenter, combien que me reprochez<br />
qu'en vain vous ont par moy esté obieotees tentations.<br />
Ce que aussi vous me improperez ') qu'en ma lettre<br />
i'appelle tenebras Vucem et ne pardonne a la vérité<br />
de Dieu ne a ses serviteurs, quelque assertion que<br />
sans preuve vous en faoiez (combien que ie sache<br />
beaucoup de ténèbres d'ignorance estre en moy et<br />
qu'il me peult advenir comme a autres d'estimer<br />
pour un temps estre lumière ce qui n'est que ténèbres)<br />
ne sera cogneu de personne quelconque qui<br />
verra ma lettre et n'aura le iugement perverti ou<br />
passionné. Cap ie n'ay en icelle rien affermé contre<br />
vous en quoy mesmes les principaulx des vostres<br />
quand ilz en parlent de propoz racis et hors de<br />
contention ne confessent que la vérité est pour moy.<br />
Et ie vous supply, considérez d'esperit non agité si<br />
aucuns, ne s'estans faict preiudice de quelque passion,<br />
voioient et oyoient que vous me faictes tels<br />
reproches a telle cause, s'ilz n'en seroient pas plustost<br />
esmeuz de iuger, ou pour le moins soubsonner que<br />
vous desirez tout ce que vous dictes ou faictes qui<br />
soit selon vostre iugement, bien estre tenu pour<br />
diet et faict de Dieu, a cause de ce seulement 2 ) que<br />
vous le iugez en estre, comme si vostre iugement<br />
ne povoit faillir et ne povoit estre en rien autre<br />
que celluy de Dieu. Et de iuger aussi ou soubsonner<br />
que tout ce qu'en la response que m'avez<br />
faicte vous dictes pour cuyder fere entendre que<br />
vous recognois8ez avoir de l'imperfection et des faultes<br />
et voulez fuir toute presumption de vousmesmes, n'est<br />
diet que pour mieulx vous couvrir et maintenir en ce<br />
que vous faillez et que avez presumption de vousmesmes.<br />
Non pas qu'ilz se persuadent que vous<br />
sentiez estre entièrement parfect et en toutes choses<br />
irrépréhensible, car vostre conscience ne le pourroit<br />
fere, voiant, oultre ce qu'elle a d'experiance la parolle<br />
de Dieu estre si apertement au contraire, mais<br />
parce que, usant de telle amertume parmy la confession<br />
et recognoissance de voz faultes et imperfection,<br />
vous leur bailliez occasion de penser que<br />
estes contant de confesser des faultes legieres que<br />
vous vöiez en vous, a fin que cela vous serve pour<br />
fere estimer que n'en avez point d'autres, et que<br />
mesmes vous vous faictes un bandeau de ceste con<br />
1) reprochez C.<br />
2) sentiment C.<br />
fession pour vous aveugler a ne voir qu'il y ait en<br />
vous autres plus griefves faultes lesquelles vous<br />
soient d'autant plus dangereuses qu'elles ne viennent<br />
du corps mais de l'esperit, aians espeoe et forme de<br />
vertu, et que vous ne les apperceviez, ne vouliez<br />
appercevoir, d'autant que ne poviez ne vouliez estimer<br />
de vous qu'il soit possible qu'elles soient en vous.<br />
Il vous faschera fort de voir ceoy vous estre escript<br />
par moy, mais ne pensez pas tant a l'audace et<br />
liberté que ie prens de le vous escripre que a bien<br />
considérer si ce n'est point vérité et si vostre lettre<br />
avec vostre faict ne mérite pas que ie ne le vous<br />
dissimule. Or i'eusse bien désiré que m'eussiez<br />
respondu d'autre stile que n'avez faict. Et ne falloit<br />
point me respondre ainsi pour garder qu'il ne<br />
me semblast que voulussiez accorder avec moy. Car<br />
si vous n'y poviez ou vouliez accorder, vous eussiez<br />
bien peu en respondant d'autre forme declarer que<br />
vous en discordiez, qui faict que ne puis n'eBtimer<br />
que impacience d'estre reprins de chose que ne<br />
voulez recognoistre en vous estre vice et de me<br />
voir 8 ) mettre en doubte ce que voulez estre tenu<br />
pour résolu vous en a gardé. Car ie voy bien qu'en<br />
vostre lettre vous avez voulu déférer a nostre amitié<br />
et vous tempérer le plus que vous avez peu, toutesfois<br />
ce mal d'impacience (car rayson n'y a que ie<br />
soubsonne autre chose) vous a osté le povoir d'observer<br />
entier office d'amy et vous a forsé de monstrer<br />
en quelque endroict vostre passion. le ne le<br />
ditz pas pour marrisson que a cause de moy i'aie<br />
pour les motz iniurieux qui sont en vostre lettre,<br />
car je ne m'en soucie en rien pour moy et ne m'en<br />
faict mal que pour VOUB et nostre amitié laquelle<br />
neantmoins de mon costé, ie ne lairré de continuer<br />
et entretenir entant que selon Dieu ie pourré, mais<br />
c'est pour le regret 4 ) que i'ay de n'avoir peu recueillir<br />
aucun fruict de vostre response. Car oultre<br />
ce que i'eusse bien voulu qu'eussiez recogneu en<br />
vous estre faulte ce qui l'est, i'eusse aussi bien désiré<br />
puis que vous maintenez vostre vocation au<br />
ministère par vous tenu avoir esté bonne, que m'eussiez<br />
baillé solution aux raisons que comme en passant<br />
ie touché en ma lettre lesquelles me font doubter<br />
du contraire, et que eussiez ensemblemont amené<br />
les raisons que vous dictes avoir plus fermes pour vous<br />
conformer en icelle vocation, le tout sommairement<br />
et en peu de parolles comme ie scé que eussiez<br />
peu, aussi avec la modestie que nostre amitié roqueroit<br />
et qui doibt estre gardée envers ceulx qu'on<br />
estime avoir la crainte de Dieu et volunté d'adhérer<br />
a luy. Et eusse désiré que eussiez ainsi touché hoz<br />
mutuelles raisons sur le faict de vostre vocation au<br />
3) de ne vouloir C.<br />
4) regart C.