GE Biblioth. pub. et univ - Archive ouverte UNIGE
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1219 EPISTOLAE 4061—4062 220<br />
messieurs de Chastillon elle en a prins resolution,<br />
elle a este encores plus difficile à estre persuadée<br />
d'abbatre du tout la papauté, d'autant, comme ie<br />
pense, qu'elle veut pouvoir dire à la roine mere<br />
qu'elle n'a pas abbatue la papauté, pour ne contraindre<br />
les papistes en leur religion, à cause qu'elle<br />
l'a priée par plusieurs l<strong>et</strong>tres de ne l'abbatre pas.<br />
Et ceux qui sont autour d'elle, qui désirent par sa<br />
faveur estre avances en la cour de France, craignent<br />
d'estre reculés s'ils ne l'empeschent a exécuter sa<br />
8aincte entreprinse. Et ceux là ont plus de credit<br />
<strong>et</strong> efficace, pource que ie ne Buis plus guieres appelle<br />
au conseil de tels affaires, comme i'estois par<br />
cydevant, sinon qu'il y ayt quelque chose de laquelle<br />
ils ne se puissent depestrer. Car pource<br />
qu'ils scavent quelle est mon intention ils ne se<br />
soucient plus de m'appeller en ce en quoy ils ne<br />
veulent pas suyvre mon avis. Ils m'estiment trop<br />
violent à abbattre la papauté : <strong>et</strong> cependant ils sont<br />
contraincts de confesser que sans moy ils eussent<br />
beaucoup plus de troubles qu'ils n'ont eu. Car les<br />
Eglises me respectent tellement que quelque naturel<br />
bouillant que ceux de ce pays ayent neantmoins ils<br />
adioustent beaucoup de foy <strong>et</strong> donnent grande authorite<br />
à mon dire : <strong>et</strong> quant à moy ie m'oppose autant<br />
que ie puis aux troubles, <strong>et</strong> suis fort rude censeur<br />
contre ceux de l'Eglise <strong>et</strong> qui les causent. I'ay<br />
plus de difficulté à manier plusieurs ministres<br />
que ie n'ay en tout le reste: lesquels ie desirerois<br />
avoir tant de prudence que ie me puisse conduyre<br />
par eux plustost qu'eux par moy. le crains bien<br />
que quand ie seray parti de ce pays on ne cognoisse<br />
par experience combien ma presence y a proffite<br />
pour empescher les troubles, <strong>et</strong> que la trop grande<br />
aspr<strong>et</strong>é (laquelle par civilité ils appellent zèle) ne<br />
soit trouvée au pris des autres fort grande douceur.<br />
Toutes ces choses augmentent mon désir de<br />
m'en r<strong>et</strong>ourner. Car ie confesse que telles fascheries<br />
me faisoyent tous les coups perdre courage.<br />
Mais en faisant ceste deliberation ie prens un conseil<br />
duquel ie prins l'occasion sur la venue de Mr.<br />
de Briquematé s ) en ce pays. Il avoit charge de<br />
Msgr. l'Amiral de soliciter la roine de Navarre<br />
d'avancer l'évangile avec l'abolition de la papauté.<br />
le l'entendant (car Msgr. l'Amiral <strong>et</strong> Msgr. le cardinal<br />
de GhastiUon m'en avoyent esoript <strong>et</strong> Msgr.<br />
de Briguemaut mesme me communiquoit familièrement<br />
tout) la soliciter 6 peu de l'Evangile que pas un de ses subiects ne luy<br />
faisoyent requeste pour lavancement d'iceluy. le<br />
luy dis que si elle vouloit ie luy en ferois faire requeste<br />
a toutes les Eglises. Mais sa responce fut<br />
maigre en cest endroict. Cependant ie fais par<br />
dessous terre soliciter les Eglises de faire des rer<br />
questes, signées des magistrats qui estoyent de<br />
l'Eglise, à ce que la papauté fust abolie, <strong>et</strong> encores<br />
les Eglises en font tous les iours. Et quant à moy<br />
ie ne faillois pas à soliciter <strong>et</strong> la roine <strong>et</strong> ses conseillers,<br />
avec protestations que si l'Evangile n'estoit<br />
avancé en ce pays qu'il ne tenoit pas à moy, <strong>et</strong> ne<br />
cachois pas que ie le declarerois quand il seroit de<br />
besoin.<br />
Tous en attendes l'issue? Les unes ont obtenu<br />
quelques temples repurgés des idoles, les autres ont<br />
obtenu que / toute l'idolâtrie de papauté en fust<br />
abolie, de sorte qu'il reste bien peu de villes en ce<br />
pays qui ayent la papauté, ou elle ne soit pour la<br />
pluspart abolie, voire mesmes les principales bourgades<br />
<strong>et</strong> beaucoup de villages ont este repurges de<br />
la papauté, <strong>et</strong> cela a esté fait avec telle diversité<br />
que les plus grandes Eglises ont souvent obtenu le<br />
moins <strong>et</strong> les moindres le plus, tellement que ces<br />
beaux conseillers se rendent ridicules à tout le<br />
monde, <strong>et</strong> si ne me scauroyent faire plus grand<br />
honneur, d'autant qu'on scait que ie ne m'en mesle<br />
plus, comme ie confesse que ie ne le cache pas.<br />
Oecy m'avoit fait concevoir quelque p<strong>et</strong>ite espérance<br />
parce qu'il est impossible de racoustrer cela sans<br />
abbattre toute la papauté. Mais elle m'a mis une<br />
difficulté, a savoir qu'elle ne pensoit pas que vous,<br />
ny Mr. de Bese, ny l'Eglise de Geneve fust de mon<br />
avis pour abbattre toute la papauté en ce pays, vu<br />
les conditions des personnes d'iceluy. Car quant<br />
aux autres ministres de ce pays elle pense qu'ils<br />
sont tous guagnés par moy. Elle dit que ce peuple<br />
est non seulement rude mais adversaire de l'Evangile,<br />
<strong>et</strong> que si on leur oste toute la papauté, on les<br />
laissera sans religion, encores qu'on leur face prescher<br />
l'Evangile, à cause qu'ils ne le voudront pas<br />
escouter ny recevoir. Il est vray qu'il y a une<br />
grande rudesse <strong>et</strong> qu'en beaucoup de lieux peu le<br />
recoyvent. Combien que ie le puis comparer à<br />
ceux du pays de Savoye vos circonvoysins, en ce<br />
faict neantmoins il y a deux differences: L'une<br />
qu'ils sont les plus obeissans qu'il est possible,<br />
) de faire son devoir en cest l'autre qu'ils ne sont pas tant ennemis de l'Evan<br />
endroit: ce qu'il fit non moins volontairement que gile, <strong>et</strong> qu'il y a plusieurs cartiers ou il prospère<br />
fidèlement. Il me redisoit les obiections qu'on luy fort bien. Vous pouves aisément voir qu'il ne m'est<br />
faisoit, <strong>et</strong> entre autres que le peuple se soucioit si pas difficile de repousser tout cela: <strong>et</strong> ie luy remonstre<br />
les moyens les plus doux pour y procéder<br />
qu'il est possible. le ne vous reciteray pas au long<br />
5) François de Béarnais, seigneur de Briquemault, cela, fun d'autant que ie serois trop long, <strong>et</strong> il ne vous<br />
des chefs protestants durant Us premières guerres de religion,<br />
ami de Coligny. {Haag II. 130.)<br />
est pas mal aisé de le scavoir, voire beaucoup d'au<br />
6) soucitay? Le Bull<strong>et</strong>in imprime: le solicite. tres qui me sont incognus. Or elle vous en veut