GAVARO - Cindy

- N’approche pas, lui dit-elle, ou je te crève les yeux avec mes ciseaux.
Cette menace n’arrêta pas le bandit qui avançait toujours dans l’obscurité. Il
finit par saisir dans ses fortes mains un poignet mince et frêle.
- Ah, je te tiens ! Tu vas danser !
- C’est toi qui vas danser ! dit une voix mâle.
- Ne serre pas si fort, Bras-Rouge. Je suis dans ta maison, c’est vrai, mais …
- Ce n’est pas Bras-Rouge.
- Puisque ce n’est pas Bras-Rouge, il va y avoir du raisiné parterre, s’écria le
Chourineur. Enlève ta patte !
Au lieu de voir son ordre obéi, le Chourineur sentit se tendre les muscles
d’acier de cette main, qui vint le saisir brusquement à la gorge.
Réfugiée dans le fond du couloir, la Goualeuse avait commencé à monter les
marches; elle s’arrêta pour crier à son défenseur: - Oh, merci, monsieur, mais
je suis en sûreté maintenant; laissez-le et prenez bien garde à vous, c’est le
Chourineur.
On entendit pendant quelques secondes les bruits d’une lutte acharnée.
- Tu veux donc que je t’escarpe ? s’écria le bandit en faisant un violent
effort pour se débarrasser de son adversaire. - Tu vas payer pour la
Goualeuse et pour toi. Si tu ne lâches pas ma cravate, je te mange le nez,
ajouta-t-il d’une voix étouffée.
- J’ai le nez trop petit et tu n’y vois pas clair.
- Alors viens sous le pendu glacé.
- Viens, oui, nous pourrons nous voir dans le blanc des yeux.
Tenant toujours le Chourineur au collet, l’inconnu l’attira jusqu’à la porte et le
jeta dans la rue à peine éclairée par la lueur du réverbère.
Le Chourineur trébucha, mais, se raffermissant aussitôt, il s’élança avec
furie contre l’inconnu, dont la taille mince ne semblait pas annoncer la force
incroyable qu’il déployait.
Quoique de première habileté à la savate, le Chourineur trouva son maître.
L’inconnu lui passa une sorte de croc-en-jambe avec une dextérité
merveilleuse et le renversa deux fois. Le Chourineur revint à la charge en
rugissant de colère.
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