Summaries / Resúmenes - Studia Moralia

344 RÉAL TREMBLAYlivrent aux mêmes injures (cf. Lc 23, 35-38). Il reconnaît ensuitesa faute devant l’innocence de Jésus et, en dépit de la peine qu’ilmérite, il s’abandonne à la puissance salvifique du Crucifié.De ces faits, on peut faire les considérations suivantes. Le“bon larron” ne subit pas le supplice de la croix par suite de saconfession de foi en Jésus. Sa vie de malfaiteur l’y menaitpresque immanquablement. Sous un autre angle cependant, onpeut affirmer exactement le contraire. En attestant la puissancesalvifique de Jésus crucifié et en demandant d’y prendre part, le“bon larron” s’unit à la Croix qui en est la source. Tout endemeurant en apparence la souffrance d’un malfaiteur, sa croixse fusionne avec la Croix du Seigneur 29 . Voilà ce que peut faire“l’amour invincible du Seigneur” (cf. Is 9, 6): faire passer l’hommede l’opposition radicale au Crucifié à la communion la plusprofonde avec lui moyennant une touche divine qui retourne lecœur, le réoriente, sans lui dérober sa liberté. “Jésus, souvienstoide moi, quand tu viendras dans ton royaume” (v. 42). “… Dèsaujourd’hui tu seras avec moi dans le Paradis” (v. 43) 30 .Au protomartyr, le Christ, qui verse son sang pour attester lavérité de l’amour de Dieu pro nobis correspond donc la confessionde foi du “bon larron” devenu croyant qui accepte maintenantde donner sa vie 31 pour montrer au monde qu’auprès deDieu abonde le rachat (cf. Ps 129, 7) ou, avec saint Léon leGrand, que “l’amour (qu’est Dieu) ne peut avoir de bornes,accepté d’être “fait péché pour nous” (cf. 2 Co 5, 21).30L’on ne peut pas ne pas penser ici à la parabole de l’“enfant prodigue”(cf. Lc 15, 11-32) de même qu’à l’attachement que Thérèse de Lisieux portaità ces deux personnages. Sur l’“enfant prodigue”, voir mon étude: Variationsthérésiennes sur le thème de “l’enfant prodigue”, dans StMor 37(1999), 414-429. Quant au “bon larron”, elle en parle à mots couverts en RécréationsPieuses 6, 9v o . 10r o . On se serait attendu à ce qu’elle y pense à l’occasion dela conversion de dernière minute de Pranzini, mais elle interprète le fait à lalumière de la parabole de la “brebis perdue” (cf. Lc 15, 4-7) (Manuscrit A,46r o ). Quoiqu’il en soit de ces précisions, ces deux figures (surtout la première)furent certainement pour elle l’occasion de la découverte émerveilléede la miséricorde sans mesure de Dieu.31Contrairement à la révolte de son compagnon de malheur.32S. LÉON LE GRAND, Dixième Sermon sur le Carême, 3 (SC 49/2, 78).