L'Africa romana - UnissResearch - Università degli Studi di Sassari
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422 Jean-Pierre Laporte<br />
d'un sceptre attesté dans d'anciens textes phéniciens pour des chefs 10caux<br />
ou des <strong>di</strong>eux 82 •<br />
Une interprétation mixte<br />
Nous en arrivons donc à reconnaltre:<br />
- un <strong>di</strong>eu chasseur dans les stèles OÙ l' on voit un cavalier et un petit<br />
acolyte (stèles 1 et 3); ce dernier serait le dé<strong>di</strong>cant, probablement un<br />
chef. De ce fait, les stèles 1 et 3 seraient probablement votives, et par<br />
analogie, les stèles 4, 5, 6, 7 et 8 qui en sont très proches 83 •<br />
- un chef dans le cavalier de Kerfala, qui tient le meme «sceptre» que<br />
le petit personnage des deux stèles précédentes (il devient alors <strong>di</strong>fficile<br />
de <strong>di</strong>stinguer la fonction, honorifique ou religieuse de cet attribut).<br />
L'allure générale du personnage conserve encore celle du <strong>di</strong>eu<br />
des stèles précédentes, meme si le sceptre a remplacé bouclier et javelines.<br />
On rencontre ici les contacts étroits entre les représentations votives<br />
et funéraires, entre l'iconographie des <strong>di</strong>eux et celle des chefs, connus<br />
dans pratiquement toutes les civilisations. Les stèles suivantes montrent<br />
une autre évolution: le passage par assimilation d'une iconographie libyque<br />
pure à une iconographie entièrement importée.<br />
- la stèle funéraire de Toudja, dont la dé<strong>di</strong>cace mentionne expressément<br />
unprinceps, emprunte déjà des formes romaines sous une apparence<br />
encore bien libyque.<br />
-les stèles funéraires d'époque romaine à décor de banquet et de chasse,<br />
d'une iconographie purement gréco-romaine, sont nettement en<br />
faveur parmi les principes libyques locaux de la région au troisième<br />
siècle après J .-C.<br />
82 Un <strong>di</strong>eu de Mactar était peut-etre appelé sceptre de Meskhar (l:Iter Meskar), selon<br />
J.O. FÉVRIER, La grande inscription dé<strong>di</strong>catoire de Mactar, dans «Semitica», t. VI, 1956,<br />
p. 19.<br />
83 Compte tenu de la tendance quasi-universelle à l'appropriation de la figuration <strong>di</strong>vine<br />
pour les chefs, on ne peut malgré tout exc1ure totalement une utilisation funéraire.<br />
Lionel Galand, que je remercie de cette in<strong>di</strong>cation, a noté que l'inscription d'Abizar comporte<br />
les lettres RSY, et y voit une variante probable du groupe RS', auquel il est tenté<br />
d'attribuer une valeur funéraire, compte tenu de sa grande fréquence dans les inscriptions<br />
libyques orientales. Nous y reviendrons dans le futur catalogue des stèles libyques figurées<br />
de Kabylie.<br />
Datation des stèles libyques figurées de Grande Kabylie 423<br />
Les contacts avec le monde punique<br />
Pour ne pas etre définitives, les comparaisons trouvées dans le monde<br />
punique attirent l'attention sur le fait que le monde berbère n'était pas<br />
un monde clos. Il était ouvert sur la Mé<strong>di</strong>terranée, longtemps une mer<br />
punique. Sans tomber dans la phénicomanie, il est indéniable qu'il ne<br />
circulait pas dans le monde libyque que des objets puniques mais aussi<br />
des images, des conceptions, et meme des cultes de meme origine 84 •<br />
Sur la còte kabyle, on écrivait le punique, à Cissi, à Rusuccuru 85 •<br />
Les monnaies émises par les autorités maurétaniennes portent des légendes<br />
puniques 86 •<br />
Compte tenu de la modestie des vestiges et du petit nombre des fouilles,<br />
les vestiges puniques sont rares, mais l'influence punique est meme<br />
attestée de manière spora<strong>di</strong>que à l'intérieur des terres, ainsi à Tigava par<br />
une stèle à inscription latine mais de tra<strong>di</strong>tion néo-punique 87 •<br />
Il parait maintenant plus que problable que les stèles libyques figurées<br />
de Kabylie ont été gravées dans les derniers siècles avant notre ère.<br />
Fondamentalement libyques, elles peuvent témoigner également de contacts<br />
avec le monde punique. Mais comparaison n'est pas raison, et elles<br />
gardent une bonne part de leurs énigmes.<br />
84 Au Ille sièc1e avant J.-C., un dé<strong>di</strong>cant originaire de Thabarbusis, donc en dehors<br />
du domaine punique, élève une stèle dans le tophet de Carthage: Stèle à acrotères (datable<br />
du IIIe-I1e s. avant J.-C.) conservée à la Bibliothéque Nationale, publiée dans C.I.S., I,<br />
309. Elle est dé<strong>di</strong>ée par «Anan, fils de Sha'nan, citoyen de Thabarbusis». Je remercie le<br />
professeur E. Lipinski de ce renseignement.<br />
85 Inscription néo-punique de Dellys: J. CARCOPINO, «BCTH», 1915, p. XCI; R. Dus·<br />
SAUD, «BCTH», 1917, p. CXLVI, 161-163, fig. 1. Inscriptions néo-puniques de Cap Djinet:<br />
J. LECERF, Inscriptions puniques et libyques de Cap Djinet, dans «AIEO», X, 1952,<br />
p. 428-433, fig. J.O. FÉVRIER, La deuxième stèle punique de Cap Djinet, dans «Revue d'Assyriologie»,<br />
1954, p. 86-88. J. MARCILLET-JAUBERT, Musée d'Alger, Inscriptions Iibyques,<br />
dans «Libyca», VIII, 2, 1960, p. 149-157.<br />
86 J. MAZARD, Corpus Nummorum, AMO, 1955, passim.<br />
87 PH. LEVEAU, Recherches historiques sur une région montagneuse de Maurétanie<br />
Césarienne, des Tigava castra à la mer, dans «MEFRA», 89, 1977, l, p. 286, fig. 22 (stèle<br />
de Fulvius Philopater).