L'Africa romana - UnissResearch - Università degli Studi di Sassari

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322 Mustapha Khanoussi tie du Haut Tell nous semble à tout le moins, téméraire. A notre sens, on ne peut parler, tout au plus, que d'une présence militaire; mais en aucun cas d'un système défensif. Par ailleurs, rien dans le contenu de ces épitaphes ni dans leur formulaire n'autorise à leur assigner une datation aussi précise, en l'occurence la période augustéenne. D'ailleurs l'auteur lui-meme en convient, puisque, dans d'autres passages de son livre, il date l'inscription du Kef de la période julio-c1audienne 20 et celle de Dar el Tour du Ier siècle après J ._C.!21. Dans ces conditions, considérer ces épitaphes comme des témoignages indiscutables d'un système défensif d'époque augustéenne revient tout simplement à prendre une hypothèse pour une vérité historique établie. De tout ce qui précède il ressort que, dans l'état actuel de la documentation, le supposé système défensif de la Dorsale tunisienne apparait beaucoup plus comme une conjecture moderne que comme une réalité historique indubitable. Les documents connus ne permettent de parIer que d'une présence militaire. Cette présence ne s'est d'ailleurs pas limitée à la période julio-c1audienne ou au ler siècle, mais elle se trouve attestée jusqu'à la période sévérienne comme il est démontré dans ce qui suit. 2. Durée de la présence militaire dans les Orandes Plaines et les régions voisines Tout d'abord, une iscription de Chemtou 22 noU5 apprend qu'un certain L. Flaminius, citoyen de la colonie de Carthage, entré dans la IIle légion Auguste sous le proconsulat de M. Iunius Silanus Torquatus (35/36 à 38/39) trouva la mort dix-neuf ans plus tard, c'est-à-dire entre les années 54/55 et 57/58, et ses cendres furent enterrées dans la nécropole nord de la patrie du marbre numidique. De Sra Quertane2 3 au sud du Kef, provient une double épitaphe 24 placée sous l'invocation aux dieux Manes indiquée par le sigle D M S, ce qui permet de la dater de la 2e moitié du Ile - lère moitié du IIle siècle. L'une est l'épitaphe de Sex. Iulius l?] f. Rufinus soldat de la IIIe légion Auguste, et l'autre celle de son frère l?] Iu- 20 ID., ibid., p. 266. 21 ID., ibid., p. 266. 22 C/L VIII, 14603. , .23 Sra Wartan est le nom de la région qui s'étend au sud de la ville du Kef. L'endroit precis de la découverte de cette inscription n'a jamais été signalé. 24 C/L VIII, 16333. L'armée romaine dans la région des Grandes Plaines 323 lius Dolnat]us soldat de la 1 ère cohorte urbaine. Enfin, une stèle funéraire de Henchir Msa 2S , à l'ouest de Musti et au nord/nord-ouest de Thaeia (Borj Massaoudi), nous révèle qu'un certain C. Iulius Quintianus, . mi/(es) leg(ionis) III Aug(ustae) p(iae) u(indieis), est décédé à l'age de 26 ans après cinq années -de service. Les surnoms pia uindex portés par la légion permettent de dater ce document du règne de Septime Sévère2 6 • A ces inscriptions connues depuis longtemps s'ajoutent désormais trois découvertes récentes effectuées l'une à Thuburnica, l'autre à Henchir Ouled Ben Abid, à environ 2 km au nord-est de Bousalem (naguère Souk el Khémis) et la troisième à Henchir Ouedka, l'antique Aptuca. 2.1. Thuburnica: stèle funéraire du légionnaire L. Obuleius Stèle monumentale (tav. I) (H. 270 cm; l. 40 cm; ép. 25 cm) à sommet arrondi tai1lée dans du grès jaune d'extraction locale. Sa face principale présente, de haut en bas: a) un reHef plat figurant une rosace à six branches inscrite dans un cercle. b) une niche (h. 59 cm; l. 30 cm) surmontée d'une arcade et encadrée par deux colonnes dotées chacune d'une base et d'un chapiteau. A l'intérieur est représenté en bas-relief un personnage (h. 46,5 cm) vetu d'un habit militaire, debout de face, les pieds de profil à gauche, tenant de la main droite une lance, et de la gauche ramenée sur la poi trine un bouclier rectangulaire (scutum) et un glaive (gladius) (tav. II). c) deux rosaces à six branches chacune. d) l'inscription suivante 27 (tav. III): h.l. 3 cm. L . OBVLCIVS . MIL . LEO III . AVO· > . SALLVST ..... VIX.ANN ..... L(ueius) Obuleius, mil(es) leg(ionis) / (tertiae) Aug(ustae) (centuria) Sallust(ii) / l .... ?] uix(it) ann(is) [ .. .]. «Lucius Obu1cius, soldat de la 3 e légion Auguste dans la centurie de Sallustius, a vécu (tant) années ... ». Le défunt est porteur d'un gentilice inconnu jusqu'ici en Afrique 2S /bid., 15647 = /LTun., 1561. 26 Cf. Y. LE BOHEC, Les marques sur briques et les surnoms de la II/e Légion Auguste, dans «Epigraphica», XLIII, 1981, pp. 127-160. 27 Un paysan qui voulait couper la stèle en deux pour pouvoir la transporter a causé la mutilation de la 3e ligne ainsi que la disparition totale d'une possible 4e ligne.

324 Mustapha Khanoussi et rare en Italie OÙ il n'est attesté qu'à Rome 28 , Civita di Marano (Cupra Maritima, Regio V)29, Urbino (Vruinum Mataurense, Regio VII)30, Ravenne et Rimini (Rauenna et Ariminum, Regio VIII)3l. Ce soldat originaire d'Italie a dfi trouver la mort dans la région de Thuburnica au cours de la première moitié du Ier sièc1e après J .-C. - et peut-etre meme sous le règne d'Auguste - comme l'autorisent à penser l'absence d'invocation aux dieux Manes et le fait que son onomastique ne comporte pas de cognomen. La stèle peut etre considérée comme l'un des plus anciens documents qui mentionnent la legio III Augusta. Elle offre en plus l'intéret de présenter, chose rare sur les monuments funéraires de militaires en Afrique, l'image du défunt avec son armement. 2.2. Henchir Ouled Ben Abid 32 : épitaphe du cavalier gaulois L. Iulius Deui/i f. Niger Stèle taillée dans un ca1caire blanc (tav. IV,a). H. 77 cm; l. 45 cm; ép. 27 cm. H.l. Hg. 1: 5 cm; 2 et 3: 3,5 cm; 4: 4 cm; 5: 3 cm. On lit: L. IVLIVS DEVILI.F .NIGER EQVES.DOMO VIENNA. HEIC SITVS.EST. L(ucius) Iulius / Devili f(ilius) Niger / eques domo / Vienna heic / situs est. «Lucius Iulius Niger, fils de Devilus, cavalier, originaire de Vienne, est enterré ici». C'est donc un nouveau cavalier gaulois de l'armée romaine d'Afrique qui se trouve attesté par le présent texte 33 . Ce Viennois 3 4, fHs d'un 28 C/L VI, 33023 a, 33968 ... ; A.E., 1961, 281. 29 e/L IX, 5325. 30 e/L XI, 6094. 31 Ravennes: e/L XI, 84; Rimini: C/L XL, 400 et 401. 32 AAT 1/50000, fe Souk el Khémis, à peu de distance à l'ouest des n° 89 et 90. 33 Le dernier légionnaire gaulois révélé par l'épigraphie africaine était jusqu'id le Lyonnais M. Licinius Fidelis, cf. A. BESCHAOUCH, «BCTH», n.s., 5, 1969 (1970), pp. 259-268. 34 L. Iulius Niger se trouve ainsi et re le premier Viennois, soldat de la IIIe Légion Auguste que fait connaitre l'épigraphie. L'armée romaine dans la région des Grandes Plaines pérégrin nommé Deuilus 35 , a dfi obtenir la citoyenneté romaine au moment de son enrOlement dans la légion. En effet, bien que le nom de l'unité dans laquelle a servi L. Iulius Niger ne soit pas indiqué, tout porte à penser que c'était la 3e légion Auguste. L'absence d'invocation aux dieux Manes, la non mention de l'age du défunt et la graphie heic pour hic invitent à dater cette stèle des règnes d'Auguste-Tibère ou, au plus tard, des règnes de Caligula-Claude. 2.3. Aptuca 36 : épitaphe du légionnaire L. Volaseina Honoratus Stèle à sommet arrondi taillée dans une pierre ca1caire 37 (tav. IV,b). H. 60 cm; l. 37 cm; ép. 14 cm. Hl. 5,5 - 3 cm. Voici le texte de l'épitaphe: DMS LVOLASEI NAHONOR TVS MILLEG IIIAVGCR SSIPVAXXI HSE D(iis) M(anibus) s(acrum). / L(ucius) Volasei/na Honor(a)/tus, mi­ [(es) leg(ionis) / (tertiae) Aug(ustae) (centuria) Cr(e)/ssi p(ius) u(ixit) a(nnis) XXI (!?) / H(ic) s(itus) e(st). «Aux dieux Manes, consécration. Lucius Volaseina Honoratus, soldat de la IIIe légion Auguste dans la centurie de Cressius, pieux, a vécu 21 (ou 22) anso Il est enterré ici». Le défunt est porteur d'un gentili ce non attesté jusqu'ici dans 1'0nomastique de l'Afrique romaine. L'invocation des dieux Manes par le sigle D.M.S. autorise à dater cette stèle de la 2 e moitié du Ile siècle ou da la Ière moitié du Ille siècle après J .-C. Ces trois nouveaux documents viennent donc corroborer les indications fournies par la documentation déjà connue et confirmer que la pré- 35 A notre connaissance, ce nom se trouve attesté pour la première fois dans le présent document. 36 Henchir Oudka ou Henchir Semmech, AAT 1/50000, fe Souk el Arba, n. 41. 37 Que M.A. Beschaouch qui m'a signalé l'existence de cette stèle et m'a généreusement cédé ses droits d'inventeur trouve id l'expression de ma profonde reconnaissance. 325

324 Mustapha Khanoussi<br />

et rare en Italie OÙ il n'est attesté qu'à Rome 28 , Civita <strong>di</strong> Marano (Cupra<br />

Maritima, Regio V)29, Urbino (Vruinum Mataurense, Regio VII)30,<br />

Ravenne et Rimini (Rauenna et Ariminum, Regio VIII)3l. Ce soldat originaire<br />

d'Italie a dfi trouver la mort dans la région de Thuburnica au cours<br />

de la première moitié du Ier sièc1e après J .-C. - et peut-etre meme sous<br />

le règne d'Auguste - comme l'autorisent à penser l'absence d'invocation<br />

aux <strong>di</strong>eux Manes et le fait que son onomastique ne comporte pas<br />

de cognomen. La stèle peut etre considérée comme l'un des plus anciens<br />

documents qui mentionnent la legio III Augusta. Elle offre en plus l'intéret<br />

de présenter, chose rare sur les monuments funéraires de militaires<br />

en Afrique, l'image du défunt avec son armement.<br />

2.2. Henchir Ouled Ben Abid 32 : épitaphe du cavalier gaulois L. Iulius<br />

Deui/i f. Niger<br />

Stèle taillée dans un ca1caire blanc (tav. IV,a).<br />

H. 77 cm; l. 45 cm; ép. 27 cm.<br />

H.l. Hg. 1: 5 cm; 2 et 3: 3,5 cm; 4: 4 cm; 5: 3 cm.<br />

On lit:<br />

L. IVLIVS<br />

DEVILI.F .NIGER<br />

EQVES.DOMO<br />

VIENNA. HEIC<br />

SITVS.EST.<br />

L(ucius) Iulius / Devili f(ilius) Niger / eques domo / Vienna heic<br />

/ situs est.<br />

«Lucius Iulius Niger, fils de Devilus, cavalier, originaire de Vienne,<br />

est enterré ici».<br />

C'est donc un nouveau cavalier gaulois de l'armée romaine d'Afrique<br />

qui se trouve attesté par le présent texte 33 . Ce Viennois 3 4, fHs d'un<br />

28 C/L VI, 33023 a, 33968 ... ; A.E., 1961, 281.<br />

29 e/L IX, 5325.<br />

30 e/L XI, 6094.<br />

31 Ravennes: e/L XI, 84; Rimini: C/L XL, 400 et 401.<br />

32 AAT 1/50000, fe Souk el Khémis, à peu de <strong>di</strong>stance à l'ouest des n° 89 et 90.<br />

33 Le dernier légionnaire gaulois révélé par l'épigraphie africaine était jusqu'id le Lyonnais<br />

M. Licinius Fidelis, cf. A. BESCHAOUCH, «BCTH», n.s., 5, 1969 (1970), pp. 259-268.<br />

34 L. Iulius Niger se trouve ainsi et re le premier Viennois, soldat de la IIIe Légion<br />

Auguste que fait connaitre l'épigraphie.<br />

L'armée romaine dans la région des Grandes Plaines<br />

pérégrin nommé Deuilus 35 , a dfi obtenir la citoyenneté romaine au moment<br />

de son enrOlement dans la légion. En effet, bien que le nom de l'unité<br />

dans laquelle a servi L. Iulius Niger ne soit pas in<strong>di</strong>qué, tout porte<br />

à penser que c'était la 3e légion Auguste. L'absence d'invocation aux <strong>di</strong>eux<br />

Manes, la non mention de l'age du défunt et la graphie heic pour hic<br />

invitent à dater cette stèle des règnes d'Auguste-Tibère ou, au plus tard,<br />

des règnes de Caligula-Claude.<br />

2.3. Aptuca 36 : épitaphe du légionnaire L. Volaseina Honoratus<br />

Stèle à sommet arron<strong>di</strong> taillée dans une pierre ca1caire 37 (tav. IV,b).<br />

H. 60 cm; l. 37 cm; ép. 14 cm.<br />

Hl. 5,5 - 3 cm.<br />

Voici le texte de l'épitaphe:<br />

DMS<br />

LVOLASEI<br />

NAHONOR<br />

TVS MILLEG<br />

IIIAVGCR<br />

SSIPVAXXI<br />

HSE<br />

D(iis) M(anibus) s(acrum). / L(ucius) Volasei/na Honor(a)/tus, mi­<br />

[(es) leg(ionis) / (tertiae) Aug(ustae) (centuria) Cr(e)/ssi p(ius) u(ixit)<br />

a(nnis) XXI (!?) / H(ic) s(itus) e(st).<br />

«Aux <strong>di</strong>eux Manes, consécration. Lucius Volaseina Honoratus, soldat<br />

de la IIIe légion Auguste dans la centurie de Cressius, pieux, a vécu<br />

21 (ou 22) anso Il est enterré ici».<br />

Le défunt est porteur d'un gentili ce non attesté jusqu'ici dans 1'0nomastique<br />

de l'Afrique romaine. L'invocation des <strong>di</strong>eux Manes par le<br />

sigle D.M.S. autorise à dater cette stèle de la 2 e moitié du Ile siècle ou<br />

da la Ière moitié du Ille siècle après J .-C.<br />

Ces trois nouveaux documents viennent donc corroborer les in<strong>di</strong>cations<br />

fournies par la documentation déjà connue et confirmer que la pré-<br />

35 A notre connaissance, ce nom se trouve attesté pour la première fois dans le présent<br />

document.<br />

36 Henchir Oudka ou Henchir Semmech, AAT 1/50000, fe Souk el Arba, n. 41.<br />

37 Que M.A. Beschaouch qui m'a signalé l'existence de cette stèle et m'a généreusement<br />

cédé ses droits d'inventeur trouve id l'expression de ma profonde reconnaissance.<br />

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