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Luigi Riccoboni, Il liberale per forza / L'italiano ... - irpmf - CNRS

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<strong>Luigi</strong> <strong>Riccoboni</strong> – 73<br />

[19] Après avoir surmonté la grande diffi culté, et imaginé ce qui pouvoit rendre mon caractere<br />

brillant, je voulus encore essayer de plaire à ceux qui n’entendent pas l’italien; et pour y réussir,<br />

il me fallut oublier une partie des regles, et prendre quelques libertez, comme je le fi s par<br />

rapport à l’unité de lieu et à celle de temps, ayant placé mon action tantôt devant la maison et<br />

dans la maison du jaloux, tantôt dans une salle de bal, et tantôt à quelques pas de la ville dans<br />

une maison de campagne; et, pour ce qui est du temps, ayant un peu trop chargé l’action, en<br />

sorte qu’il ne paroît pas tout-à-fait vrai-semblable que dans le cours de vingt-quatre heures<br />

il se puisse passer tant de choses dans une famille, et sur-tout lorsqu’elle se transporte d’un<br />

lieu à un autre.<br />

[20] Cette délicatesse n’a point fait de préjudice à la comedie, puisqu’elle a eu un succès si<br />

heureux que j’en pourrois tirer quelque vanité, si je ne me connoissois moi-même, et si je ne<br />

regardois cette réussite comme une faveur de ma bonne fortune.<br />

[21] Quelques <strong>per</strong>sonnes ont été surprises de voir une comedie sans intrigue amoureuse.<br />

[22] <strong>Il</strong> m’auroit été facile d’y en placer une, mais j’ai consideré que, si je donnois un amant à la<br />

femme du jaloux, je rendrois sa jalousie bien fondée, et par consequent moins ridicule; outre<br />

que le temps employé pour l’intrigue, est autant de temps <strong>per</strong>du pour le caractere.<br />

[23] <strong>Il</strong> n’y a point de doute que cette comedie, si bien reçûe du public, ne dût tout d’un coup<br />

m’éclairer sur la maniere dont je devois travailler dans la suite. [24] Mais nous ne sommes<br />

pas maîtres de notre esprit, ni toujours en état de suivre notre genie. [25] J’entendois à tout<br />

moment bourdonner à mes oreilles, que je devois chercher pour ceux qui n’entendent pas la<br />

langue, des pieces purement de spectacle; et le desir ardent que j’ai de contenter le public me<br />

fi t quelque temps après essayer deux comedies qui avoient fait autrefois sur l’ancien théatre<br />

italien le plaisir de Paris pendant plusieurs mois, et la fortune des comediens. [26] J’ai eu<br />

l’extrême déplaisir de voir tomber ces deux pieces, qui sont Arlequin feint lanterne, et L’apothicaire<br />

ignorant. [27] Ce qui a achevé de me confi rmer dans l’idée que j’avois du genre de comedie<br />

auquel je devois m’attacher; et si dans la suite je m’écarte quelquefois du sentier que je me<br />

suis fait à moi-même, ce ne sera que par obéissance.<br />

[28] Cependant je supplie humblement le public d’accorder à mon jaloux, qui reparoît sur le<br />

théatre, la même indulgence dont il l’a honoré aux premiers representations.<br />

© IRPMF, 2008 – Les savoirs des acteurs italiens, collection dirigée par Andrea Fabiano

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