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Pour - Parkinson Schweiz

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30 PORTRAIT DES PROCHES PORTRAIT DES PROCHES 31<br />

UNE JOURNÉE DANS LA VIE DE HEIDI GROLIMUND<br />

Pendant de nombreuses années, elle a erré de médecin en médecin. Un jour, le diagnostic du syndrome<br />

parkinsonien est tombé. De nouveaux médicaments ont amélioré sa qualité de vie. Aujourd’hui, Heidi Grolimund<br />

mène une vie active. Parfois, elle atteint les limites de ses forces. Toutefois, elle ne se résigne pas et elle tire le<br />

meilleur parti de chaque journée.<br />

H<br />

eidi Grolimund se lève entre six heures et demi et<br />

sept heures du matin. La plupart du temps, elle ressent<br />

immédiatement le besoin de prendre ses médicaments.<br />

Si elle se levait d’un bond, elle se sentirait « comme un<br />

tronc ». Elle reste donc allongée, prend ses cachets et un<br />

verre d’eau sur la table de nuit. Parfois, elle se rendort. Elle<br />

ne se lève aussi tôt que les mardis. Le mardi est consacré<br />

aux groupes de jeux. Depuis 1999, cette femme de 54 ans<br />

anime des groupes de jeux pour les 3 à 4 ans. <strong>Pour</strong> elle, le<br />

mardi est la plus dure des journées. En effet, elle s’occupe<br />

d’un groupe le matin et l’après-midi. À huit heures, elle est<br />

à la maison des œuvres paroissiales. Elle s’accorde une heure<br />

pour se préparer. Les enfants arrivent ensuite. À onze<br />

heures, après le chant, les enfants prennent congé. Heidi<br />

Grolimund a beaucoup de plaisir avec eux. Toutefois, à<br />

midi elle se sent fatiguée, et après le repas qu’elle a pris<br />

avec son mari Bruno, elle s’étend un petit moment. Il la<br />

ramène ensuite en voiture. Elle a encore un peu de temps<br />

pour elle avant que la deuxième réunion de groupe ne commence,<br />

à une heure et demie.<br />

Quand elle rentre tard le soir, la fatigue se fait sentir. « Je ne<br />

peux plus rien faire », dit-elle. « Il n’est pas question que j’accomplisse<br />

des tâches ménagères. » Dans la soirée cependant,<br />

elle reprend le dessus et se rend à sa répétition de chorale.<br />

« Chanter me fait du bien, à la voix comme à l’âme. » Malgré<br />

tout, elle en a conscience : elle en fait déjà trop. À dix heures<br />

et demie, quand elle va se coucher, la plupart du temps elle<br />

« dort déjà avant que sa tête ne repose sur l’oreiller ».<br />

Heide Grolimund a été victime d’un grave accident de la<br />

route à l’âge de 17 ans. Depuis lors, elle est malade. Pendant<br />

de nombreuses années, elle a parcouru un chemin long<br />

et diffi cile, parsemé de changements de diagnostics et de<br />

médicaments. Elle n’a pas toujours trouvé de médecin compétent.<br />

Nombre d’entre eux se sont contentés de hocher la<br />

tête et de lui demander si la drogue ou l’alcool pouvaient<br />

entrer en ligne de compte. Blessée, elle a parfois frôlé le<br />

désespoir. Ce n’est que depuis sept ans environ qu’un syndrome<br />

parkinsonien a été diagnostiqué chez elle. Il ne s’agissait<br />

« pas d’un <strong>Parkinson</strong> typique ». Finalement, le traitement<br />

s’est avéré effi cace et elle a pris connaissance de son<br />

état. Les pires moments étaient passés. « Je vis le jour pré-<br />

sent », dit-elle. Depuis qu’elle prend un autre médicament,<br />

elle se sent renaître. Les peurs l’ont quittée, tout comme les<br />

tremblements. Elle se sent clairvoyante, voit du monde et<br />

prend de nouveau plaisir à vivre.<br />

C’est à son naturel, à sa volonté de fer et à son partenaire,<br />

Bruno, qu’elle doit le fait d’avoir réussi à fonder une famille<br />

et à élever deux enfants dans les périodes diffi ciles. Son<br />

compagnon et elle se connaissent depuis l’enfance. « Il a<br />

toujours cru en moi, n’a jamais douté de moi », affi rme-t-<br />

elle. « Il m’a toujours acceptée telle que j’étais ; je trouve<br />

cela prodigieux. C’est bien la chose la plus essentielle qu’un<br />

conjoint peut nous offrir. »<br />

Heidi Grolimund est une femme active. Elle vit avec une<br />

maladie chronique, et seules les personnes qui la connaissent<br />

le remarquent. <strong>Pour</strong> elle, il est important de rester en<br />

mouvement. Une fois par semaine, elle se rend dans un<br />

groupe de gymnastique. Bien que de nombreux exercices lui<br />

demandent trop d’efforts, elle ne manquerait ce rendezvous<br />

pour rien au monde. Tout le monde est au courant ; on<br />

la laisse tranquille. Elle se sent acceptée, ce qui est essentiel<br />

pour elle. Les femmes de son groupe de marche connaissent<br />

également son état de santé. Elles se rencontrent tous les<br />

jeudis. Heidi Grolimund commence dix minutes plus tôt<br />

que les autres et, après un raccourci, retrouve ses amies en<br />

fi n de parcours. « Elles me respectent, nous prenons du bon<br />

temps », dit-elle. <strong>Pour</strong> elle, l’exercice et le contact social sont<br />

comme une « gorgée à la fontaine de jouvence ». Elle fait<br />

aussi de la randonnée avec Bruno, son mari. Toutefois, elle<br />

ne va plus aussi loin qu’avant depuis bien longtemps. Elle<br />

s’assoit dans le restaurant et attend qu’il ait terminé son<br />

tour. « Nous nous sommes arrangés pour que cela convienne<br />

à tous les deux. »<br />

La plupart du temps, après deux heures de travaux ménagers<br />

elle est « claquée ». Elle accomplit ces tâches selon sa<br />

forme. « Si je ne me sens pas bien, je laisse tout en plan. »<br />

Elle reste alors assise et bricole ou coud des couvertures ou<br />

des oreillers en patchwork. D’autres loisirs et activités l’obligent<br />

à ménager ses forces. Elle travaille dans les œuvres<br />

pour la jeunesse et fait partie de l’équipe dirigeante d’un<br />

groupe d’entraide <strong>Parkinson</strong>. Par ailleurs, elle a ses deux<br />

fi lles, qui sont maintenant adultes. Elle cultive ses liens avec<br />

elles. La relation de confi ance est très importante à ses yeux.<br />

Ainsi, elles partent également en vacances ensemble, comme<br />

aujourd’hui à Adelboden, où nous retrouvons la famille.<br />

Heidi Grolimund a ses règles de vie. Elle sait que sa maladie<br />

progresse et qu’elle la contraint à adapter sa vie en permanence.<br />

C’est le cas pour d’autres personnes également, mais<br />

elle doit être plus réactive. Ses journées sont souvent usantes,<br />

mais elle sait aussi que trop de ménagement ne lui réussit<br />

pas. Elle cherche donc en permanence un équilibre entre<br />

le repos et l’activité. Tous les jours. m<br />

PARLER DE TOUT<br />

La maladie chronique de sa mère fait partie de la vie de<br />

Sarah, la plus jeune des fi lles de Heidi Grolimund. Elle ne la<br />

connaît que sous ce jour. Elle se réjouit d’autant plus qu’elle<br />

se porte mieux depuis quelques années.<br />

our nous autres enfants, il a toujours été parfaite-<br />

P ment normal que notre mère soit malade. » Sarah<br />

Grolimund passe des vacances aux sports d’hiver avec ses<br />

parents dans l’Oberland bernois. Aujourd’hui, elle est redescendue<br />

plus tôt des pistes pour s’entretenir avec nous<br />

de la maladie et du quotidien. Son récit est d’abord hésitant.<br />

Toutefois, elle entre peu à peu dans les détails. Elle<br />

explique à quoi ressemble une enfance avec une mère malade.<br />

« Pendant longtemps, nous n’avons pas su ce qu’elle<br />

avait », déclare-t-elle. « Le fait qu’elle soit malade était suf-<br />

fi sant. » Elle était aussi habituée aux remarques ou aux<br />

questions de ses amis. « Ta mère marche si bizarrement ! »,<br />

entendait-elle souvent.<br />

Pendant longtemps, la famille n’a pas parlé ouvertement de<br />

la maladie. « Autrefois, elle essayait de cacher ses problèmes.<br />

Sa maladie était manifeste, mais nous n’abordions pas le sujet.<br />

» Les enfants tendent à reproduire le modèle parental,<br />

pense-t-elle sommairement. Toutefois, elle se souvient également<br />

que sa mère a toujours été présente pour elle. Elle<br />

n’a jamais mis sa maladie au centre de l’intérêt et ne s’est jamais<br />

lamentée. Quand leur mère n’allait pas bien, les enfants<br />

l’aidaient davantage à la maison. « Cependant, elle a<br />

vraiment toujours pris soin de nous, et je ne me suis jamais<br />

sentie limitée parce que ma mère était malade. »<br />

Aujourd’hui, la jeune femme de 25 ans travaille en tant que<br />

cuisinière dans une maison de retraite et vit dans son propre<br />

appartement. Elle voit sa mère tous les deux jours, mais il<br />

leur arrive de ne pas se voir pendant une semaine. Toutefois,<br />

mère et fi lle restent en contact. Autrefois, la mère veillait sur<br />

sa fi lle ; aujourd’hui la situation semble s’être inversée.<br />

« Quand elle ne donne pas signe de vie, je m’inquiète. »<br />

Sarah admire la grande volonté de sa mère. Elle est fascinée<br />

de voir comment cette jeune femme à la santé très fragile est<br />

partie de chez elle, s’est mariée et a élevé deux enfants. Elle<br />

attribue l’hyperactivité actuelle de sa mère au fait qu’elle ne<br />

va pas bien depuis plusieurs années et qu’elle a dû renoncer<br />

à beaucoup de choses. Sarah pense qu’elle se rattrape peutêtre.<br />

Elle ne sait pas si elle aurait été aussi fonceuse sans sa<br />

maladie. Mais ce n’est que pure spéculation. Il est bien plus<br />

important que sa mère se porte beaucoup mieux aujourd’hui.<br />

Le choix des médicaments pertinents s’est avéré déterminant.<br />

« Depuis qu’elle les prend, sa qualité de vie est bien<br />

meilleure. » Par ailleurs, depuis qu’elle sait qu’elle souffre<br />

d’un syndrome parkinsonien et qu’elle peut accepter cette<br />

maladie, sa mère est plus sûre d’elle et plus active, sans comparaison<br />

avec le passé. Le groupe d’entraide <strong>Parkinson</strong> lui<br />

fait aussi du bien. En effet, depuis qu’elle connaît d’autres<br />

parkinsoniens, elle est à même de mieux évaluer sa situation<br />

et de la relativiser.<br />

Parfois, Sarah se demande si sa mère ne présume pas de ses<br />

forces. Comme l’hiver dernier, quand elle est tombée et<br />

s’est fracturé le bras. Elle ne se ménage pas assez, pense-<br />

t-elle. Après tout, elle ne se rétablit pas aussi vite qu’un individu<br />

sain. Dans la voix de Sarah Grolimund, un mélange<br />

d’inquiétude, de reconnaissance et de sympathie. <strong>Pour</strong> la<br />

mère comme pour la fi lle, la solidarité dans la famille est<br />

fondamentale. « Toutefois, il est essentiel que nous puissions<br />

parler de tout. » m

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