Vazha-Pshavela 150
Vazha-Pshavela 150 Vazha-Pshavela 150
outait avec délice l’herbe aspergée de gouttelettes d’eau sur le flanc de la montagne. Le soleil s’était à demi caché derrière la montagne. Ses rayons pâles prenaient congé des montagnes et des sommets des arbres de la forêt. Dominant son troupeau, un berger revêtu d’un manteau de feutre jouait du chalumeau. Un chien affreux et poilu se tenait à ses côtés. Il suivait d’un œil attentif les déplacements du troupeau, tout en fixant de temps en temps d’un regard affectueux son maître. - Nous voici mal venus dans ces endroits, me dit maman. Tu n’as pas à craindre le berger qui n’a pas d’arme, mais le chien sentira notre odeur et il se peut qu’il se mette à nous poursuivre. Fais demi-tour. Ne le quitte pas des yeux. S’il court vers nous, j’irai au-devant de lui, et tu pourras te cacher dans les herbes. En effet, à notre apparition les moutons s’effarouchèrent et nous fixèrent des yeux. Je me cachai dans les broussailles sans perdre de vue le chien à la queue touffue. Le chien grogna en même temps que les moutons s’effrayèrent. Dressant les oreilles, il s’élança vers nous… Le berger poussa des cris. Je tremblai. Attiré par maman, le chien se dirigea vers elle. Maman glissa, et durant un moment, je la perdis de vue. Les larmes obstruaient ma vue, mon cœur était meurtri. Pauvre maman, si cette maudite bête réussit à s’emparer de toi! Pendant longtemps j’entendis résonner les sabots et les pierres rouler au fond du précipice. Malheur à moi s’il s’est emparé de maman et s’il est en train de la dévorer de ses dents affilées comme des diamants. Le soir arriva. Le berger siffla et rentra les moutons. Le cœur battant, je suivais du regard ses mouvements. Tantôt il frappait les pauvres moutons d’un gros gourdin et tantôt il leur jetait des pierres. L’une d’elles atteignit un petit agneau de mon âge. Le pauvre tomba à la renverse et agita piteusement ses pattes. Le berger gravit la pente et appela son Noiraud. Peu de temps après j’aperçus à l’horizon Noiraud, sa langue ensanglantée pendant de sa gueule, effondré aux pieds de son maître. 26
La frayeur me saisit : s’il se trouvait que sa gueule était tachée du sang de maman ? L’obscurité se fit. On n’entendit plus un bruit. Où était maman ? À supposer qu’elle soit en vie, il se peut qu’elle ne réussisse pas à me retrouver. Peu de temps après j’entendis un bruit assourdi qui ressemblait à la voix de maman. Je lui répondis. Alarmée, maman accourut vers moi. - T’es ici, mon enfant ? N’aie pas peur, ta maman est vivante. Ni le chien, ni le loup ne peuvent rien contre elle… T’es vivant ? me demanda-t-elle. - Je suis vivant, lui répondis-je. Maman me caressa… À qui puis-je adresser mes pleurs et mes supplications ? Qui a le pouvoir de me permettre de regarder encore une fois au fond des yeux de maman, de me replonger dans ses caresses ? Comment faire face à ce chagrin ? Si seulement notre ennemi sanguinaire nous avait tués tous les deux d’un seul coup ? Pourquoi suis-je resté en vie ? La veille, j’avais été heureux d’avoir retrouvé ma consolation pleine de beauté. Qui aurait pu me dire que le lendemain je la perdrais à jamais ? Nous passâmes la nuit à marcher dans les champs. Nous n’avions plus peur. Nous pénétrâmes dans un champ de seigle et nous nous régalâmes. À l’aube nous regagnâmes la forêt. Maudite soit l’aurore de ce jour ! Deux ou trois cerisiers, entourés d’herbe drue, s’élevaient au milieu du champ. Des merles tournoyaient en volée autour d’eux. Une grande animation régnait. Les uns partaient, d’autres venaient s’approvisionner pour leurs petits. Maman me prévint : - Ce n’est pas le moment de se promener. Notre ennemi nous cherche sur le sol mouillé de la pluie. Alors regarde bien de tous les côtés. Ce fut le dernier avertissement de maman. Maman était mal dans sa peau, comme si elle avait le pressentiment de la mort. Elle entamait une feuille sur un arbre, et s’immobilisait aussitôt. Au-dessus de nous, des osiers s’alignaient sur le flanc de la montagne, précédés par trois ou quatre bouleaux élancés. Soudain, comme le tonnerre des cieux, un coup de fusil partit. L’écho de la détonation fit le tour des montagnes et des rochers. Les feuilles des arbres et les 27
- Page 1 and 2: SoTa rusTavelis qarTuli literaturis
- Page 3 and 4: vaJa-fSavela 150 saiubileo krebuli
- Page 5 and 6: Sinaarsi winaTqma..................
- Page 7 and 8: winaTqma vaJa-fSavela aris `geniosi
- Page 9: nawili I Semoqmedis erTi teqsti 9
- Page 12 and 13: genacvale, tyeo! Sen bevrs mSveli,
- Page 14 and 15: kupda da mohyva knavils. imisi xma
- Page 16 and 17: nukris nafexurebi. saSinlad cxeloda
- Page 18 and 19: ogor unda movinelo es javri? neta s
- Page 20 and 21: Vaja-Pchavéla 20 Le récit d’un
- Page 22 and 23: la nature : le bruissement des feui
- Page 24 and 25: Je m’approchai et, pour commencer
- Page 28 and 29: plantes tressaillirent, la fumée s
- Page 30 and 31: enemies. I am still inexperienced;
- Page 32 and 33: “Yes, yes, it's so, my child! As
- Page 34 and 35: from its beak, its shoulders saggin
- Page 36 and 37: oned me, saying: “It’s dangerou
- Page 39 and 40: vaJa—fSavela (literaturuli portre
- Page 41 and 42: gan Tavisi wawali hyavda colad SerT
- Page 43 and 44: naSvils, SemdgomSi cnobil literator
- Page 45 and 46: uli. am garemoebas xeli ar SeuSlia
- Page 47 and 48: asTan ramdenadme Sinaganad dapiripi
- Page 49 and 50: xels da gaxedavda Carglulas xeobas,
- Page 51 and 52: neboda _ mirianaSvilisa magaliTad,
- Page 53 and 54: saqmeebSi unda abandebdes Tavis Tav
- Page 55 and 56: dagvarad rac-ki SegviZlian, romeli
- Page 57 and 58: saqme, cota baCanas diplomatiam da,
- Page 59 and 60: SiT, verc tyismcveli gaivlida. luka
- Page 61 and 62: Tavis mware fiqrebTan: Tavisuflebis
- Page 63 and 64: eliso kalandariSvili bibliuri parad
- Page 65 and 66: velTaod gavrcelebuli modeli Zireula
- Page 67 and 68: mokveTis erT konkretul adaTSi daeWv
- Page 69 and 70: Semdeg sicocxle, aRarc iyo Cemi yof
- Page 71 and 72: TavTan marto darCena. gogoTurisgan
- Page 73 and 74: tipebi individTa sizmrebSi vlindeba
- Page 75 and 76: moweva, aseve RirebulebaTa im siste
outait avec délice l’herbe aspergée de gouttelettes d’eau sur le flanc de la<br />
montagne. Le soleil s’était à demi caché derrière la montagne. Ses rayons pâles<br />
prenaient congé des montagnes et des sommets des arbres de la forêt.<br />
Dominant son troupeau, un berger revêtu d’un manteau de feutre jouait du<br />
chalumeau. Un chien affreux et poilu se tenait à ses côtés. Il suivait d’un œil attentif<br />
les déplacements du troupeau, tout en fixant de temps en temps d’un regard<br />
affectueux son maître.<br />
- Nous voici mal venus dans ces endroits, me dit maman. Tu n’as pas à<br />
craindre le berger qui n’a pas d’arme, mais le chien sentira notre odeur et il se<br />
peut qu’il se mette à nous poursuivre. Fais demi-tour. Ne le quitte pas des yeux.<br />
S’il court vers nous, j’irai au-devant de lui, et tu pourras te cacher dans les<br />
herbes.<br />
En effet, à notre apparition les moutons s’effarouchèrent et nous fixèrent des<br />
yeux. Je me cachai dans les broussailles sans perdre de vue le chien à la queue<br />
touffue. Le chien grogna en même temps que les moutons s’effrayèrent. Dressant<br />
les oreilles, il s’élança vers nous…<br />
Le berger poussa des cris. Je tremblai. Attiré par maman, le chien se dirigea<br />
vers elle. Maman glissa, et durant un moment, je la perdis de vue. Les larmes<br />
obstruaient ma vue, mon cœur était meurtri. Pauvre maman, si cette maudite bête<br />
réussit à s’emparer de toi! Pendant longtemps j’entendis résonner les sabots et<br />
les pierres rouler au fond du précipice.<br />
Malheur à moi s’il s’est emparé de maman et s’il est en train de la dévorer<br />
de ses dents affilées comme des diamants.<br />
Le soir arriva. Le berger siffla et rentra les moutons. Le cœur battant, je<br />
suivais du regard ses mouvements. Tantôt il frappait les pauvres moutons d’un<br />
gros gourdin et tantôt il leur jetait des pierres. L’une d’elles atteignit un petit<br />
agneau de mon âge. Le pauvre tomba à la renverse et agita piteusement ses pattes.<br />
Le berger gravit la pente et appela son Noiraud. Peu de temps après j’aperçus<br />
à l’horizon Noiraud, sa langue ensanglantée pendant de sa gueule, effondré<br />
aux pieds de son maître.<br />
26