sommaire - Hachette

Diderot s’adresse directement au romancier dont
il fait l’éloge, en employant le tutoiement puisqu’il
écrit : « tes ouvrages » (l. 2), « ta lecture » (l. 10),
avant de recourir à la troisième personne dans le
dernier paragraphe. La reprise anaphorique de « il »
à quatre reprises, des lignes 22 à 25, semble ainsi
renforcer le lien privilégié entre le « je » du lecteur
et le « il » de « Cet auteur » (l. 21) qu’il affectionne.
[…]
La rhétorique de l’éloge et le lyrisme de Diderot
mettent donc bien en valeur l’admiration de Diderot
pour l’écrivain anglais, mais lui permettent aussi, en
parallèle, de proposer à ses contemporains français,
un nouveau style de roman, plus en phase avec la
réalité. [= transition vers le II]
Premier paragraphe de la partie II :
C’est par exemple au moyen d’une série de
phrases négatives que Diderot définit les romans
chimériques qu’il ne chérit pas : « Cet auteur ne fait
point couler le sang le long des lambris ; il ne vous
transporte point dans des contrées éloignées… ». À
ces œuvres exotiques ou rocambolesques, il oppose
une définition qui correspond mieux à Richardson
et annonce le roman réaliste : « Le monde où nous
vivons est le lieu de la scène ; le fond de son drame est
vrai ; ses personnages ont toute la réalité possible ;
ses caractères sont pris du milieu de la société… »
(l. 26-29). Les mots « vrai » et « réalité » s’opposent
à « féerie », « Le monde où nous vivons » s’oppose
à « contrées éloignées », le « milieu de la société »
s’oppose à « des sauvages ». Le recours à l’antithèse
souligne bien le désir qu’a Diderot de connaître un
profond changement dans l’écriture romanesque,
appelée à favoriser désormais l’identification du lecteur
aux personnages, comme l’indique ce passage
où le « je » réapparaît fortement : « les passions
qu’il peint sont telles que je les éprouve en moi ; …
elles ont l’énergie que je leur connais…» (l. 31-37).
Diderot attend donc du roman qu’il analyse les passions
humaines, qu’il aide le lecteur à comprendre
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ses propres émotions. Le roman est alors loin de ne
représenter qu’un simple divertissement : il est une
somme de connaissances. […]
Conclusion :
Cet éloge de Richardson met donc bien en évidence
la volonté de Diderot de communiquer au
public français son admiration de lecteur pour ces
romans anglais qu’il souhaite faire mieux connaître.
Toutefois on comprend qu’il s’agit aussi pour lui de
défendre l’idée d’adopter un nouveau modèle de
récit, moins coupé des réalités de la société, donc
plus vrai, mais qui conserve toutefois la liberté et
la part d’imagination propre au roman. C’est de ce
modèle, dont il se disait « possédé », qu’il s’inspirera
lui-même dans son œuvre intitulée La Religieuse,
roman-mémoires où la narratrice offre un témoignage
poignant et révoltant sur les conditions de
vie des femmes enfermées dans les couvents contre
leur volonté. Mais c’est seulement au XIXe siècle
que le genre du roman prendra un essor nouveau
et une ampleur que Diderot n’imaginait pas, avec
de grands cycles narratifs transposant en plusieurs
volumes les rouages complexes de l’histoire contemporaine,
comme La Comédie humaine de Balzac et
Les Rougon-Macquart d’Émile Zola.
5. Relecture attentive
On pourra faire travailler les élèves sur ce corrigé photocopié
:
– observer l’insertion des citations, les transitions, la
structure des paragraphes… ;
– récrire un paragraphe sur un nouvel argument ;
– modifier l’entrée en matière de l’introduction ou l’ouverture
de la conclusion.
Prolongement. Recherche :
– quel est le sens de l’expression « un Lovelace »,
issue d’un personnage de Richardson ?
– les romans de Richardson sont-ils encore beaucoup
lus aujourd’hui ? Pour quelles raisons ?