Léviathan des Nations_fr
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l’instauration de la déesse Raison fut renouvelée et imitée dans toutes les parties de la France où l’on voulut se montrer à la hauteur de la Révolution. Chaumette introduisit le culte de la Raison en ces termes : “Législateurs, le fanatisme a cédé la place à la Raison. Ses yeux louches n’ont pu soutenir l’éclat de la lumière. Aujourd’hui, un peuple immense s’est porté sous ces voûtes gothiques où, pour la première fois, on a entendu la vérité. Là, les Français ont célébré le seul vrai culte, celui de la liberté, celui de la raison. Là, nous avons formé des voeux pour la prospérité des armes de la République. Là, nous avons échangé des idoles inanimées pour la Raison, pour cette image animée, le chef d’œuvre de la nature.”(Thiers, Hist. de la Révolution française, liv. I, p. 260.) Lorsque la déesse fut amenée devant la Convention, le président la prit par la main et dit en se tournant vers l’Assemblée : Mortels, cessez de trembler devant le Dieu que vos prêtres ont créé. Ne reconnaissez plus désormais d’autre divinité que la Raison. Je vous présente sa plus noble et sa plus pure image ; s’il vous faut des idoles, n’apportez plus vos hommages qu’à celle-ci. … Tombe devant l’auguste Sénat de la Liberté, ô voile de la Raison ! …” Après avoir reçu l’accolade du président, l’idole, montée sur un char magnifique, fut conduite, au milieu d’un immense concours de peuple, à la cathédrale Notre-Dame pour y figurer la divinité. Placée sur un autel élevé, elle reçut les adorations de tous les spectateurs.”(Alison, Vol. I, Chap. X..) Cette cérémonie fut suivie d’un autodafé de livres pieux, y compris la Bible.”La Société populaire de la section du Musée entra au Conseil en criant : Vive la Raison ! et, portant au bout d’un bâton les restes d’un livre encore fumant, elle annonce que les bréviaires, les missels, les heures, les oraisons de Sainte- Brigitte, l’Ancien et le Nouveau Testament ont expié, dans un grand feu, sur la place du Temple de la Raison, toutes les sottises qu’ils ont fait commettre à l’espèce humaine.” (Journal de Paris, 1793, numéro 318. Cité par Buchez-Roux, Vol. XXX, p. 200, 201.) Le papisme avait commencé le travail qu’achevait l’athéisme. Les leçons de Rome avaient entraîné la France dans une crise sociale, politique et religieuse qui la précipitait vers la ruine. En parlant des horreurs de la Révolution, certains auteurs en jettent la responsabilité à la fois sur le Trône et sur 1’Eglise. En toute justice, ces excès doivent être attribués à l’Eglise, qui avait empoisonné l’esprit des rois au sujet de la Réforme, qualifiée par elle d’ennemie de la couronne et d’élément de discorde fatal à la paix de la nation. Le génie de Rome avait inspiré les cruautés inouïes et la terrible oppression exercées par l’autorité royale. En revanche, l’esprit de liberté avait marché de pair avec la Parole de Dieu. Partout où 1’Evangile avait été reçu, les yeux s’étaient ouverts. Les chaînes de l’ignorance, du vice et de la superstition, le plus avilissant des esclavages, avaient été brisées. … On s’était 180
mis à penser et à agir en hommes. Ce que voyant, les monarques avaient tremblé pour leur despotisme et Rome s’était empressée d’attiser leurs craintes jalouses. En 1525, le pape disait au régent de France : “Cette forcènerie [le protestantisme] ne se contentera pas de brouiller la religion et de la détruire, mais aussi principautés, lois, ordres et même rangs.”(G. de Félice, Hist, des Protestants de France - 6e éd. - liv. I, Chap. II, p.28.) Quelques années plus tard, le nonce du pape donnait au roi cet avertissement: “Sire, ne vous y trompez pas, les protestants porteront atteinte à l’ordre civil comme à l’ordre religieux. Le trône est en danger tout autant que l’autel. L’introduction d’une religion nouvelle doit entraîner nécessairement un gouvernement nouveau.”(Merle d’Aubigné, Hist. de la Réformation au temps de Calvin, liv. II, Chap. XXXVI.) Et les théologiens de faire appel aux préjugés populaires en déclarant que la doctrine protestante “entraîne les hommes vers des nouveautés et des folies ; qu’elle prive le roi de l’affection de ses sujets et dévaste à la fois l’Eglise et l’Etat.” C’est ainsi que Rome avait réussi à dresser la France contre la Réforme. Les enseignements des Ecritures auraient au contraire implanté dans les esprits et les cœurs des principes de justice, de tempérance, de vérité, d’équité et de bienveillance, principes qui sont la pierre angulaire de la prospérité nationale.”La justice élève une nation.”“C’est par la justice que le trône s’affermit.”“L’œuvre de la justice sera la paix, et le fruit de la justice le repos et la sécurité pour toujours.”(Proverbes 14 : 34 ; 16 : 12 ; Esaïe 32 : 17.) Celui qui est soumis à la loi divine ne faillira pas non plus au respect des lois de son pays. Celui qui craint Dieu “honorera le roi “dans l’exercice de ses attributions justes et légitimes. Les dirigeants de la France ne se doutaient guère, hélas ! des conséquences de leur fatale politique lorsqu’ils prohibèrent les Ecritures et bannirent ses disciples, lorsque, siècle après siècle, des hommes intègres, éclairés, consciencieux, ayant le courage de leurs convictions et la foi qui consent à souffrir pour la vérité, avaient été condamnés aux galères, consumés sur les bûchers ou enterrés vifs dans de sombres cachots. Des myriades d’autres avaient cherché leur salut en passant à l’étranger. Et cela dura deux cent cinquante ans à partir des débuts de la Réforme ! “Il n’y eut peut-être pas une génération de Français, au cours de cette longue période, qui ne fût témoin de la fuite éperdue des disciples de l’Evangile devant la fureur de leurs persécuteurs. Emportant avec eux leurs arts et leurs industries (dans lesquels ils excellaient généralement) , leur intelligence et leur esprit d’ordre, ils allèrent, au détriment de la France, enrichir les pays qui leur donnaient asile.” Si, au cours de ces trois siècles, la main active de ces exilés avait cultivé le sol national ; si leurs talents industriels avaient perfectionné ses usines ; si leur génie créateur avait enrichi sa littérature et cultivé ses sciences ; si leur sagesse avait dirigé ses conseils ; si leur bravoure s’était donné libre carrière sur ses champs de bataille ; si leur équité avait rédigé ses lois et si la religion de l’Evangile avait formé les consciences, quelle ne serait pas, 181
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pas de brouiller la religion et de la détruire, mais aussi principautés, lois, ordres et même<br />
rangs.”(G. de Félice, Hist, <strong>des</strong> Protestants de France - 6e éd. - liv. I, Chap. II, p.28.)<br />
Quelques années plus tard, le nonce du pape donnait au roi cet avertissement: “Sire, ne<br />
vous y trompez pas, les protestants porteront atteinte à l’ordre civil comme à l’ordre<br />
religieux. Le trône est en danger tout autant que l’autel. L’introduction d’une religion<br />
nouvelle doit entraîner nécessairement un gouvernement nouveau.”(Merle d’Aubigné,<br />
Hist. de la Réformation au temps de Calvin, liv. II, Chap. XXXVI.) Et les théologiens de<br />
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hommes vers <strong>des</strong> nouveautés et <strong>des</strong> folies ; qu’elle prive le roi de l’affection de ses sujets<br />
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France contre la Réforme.<br />
Les enseignements <strong>des</strong> Ecritures auraient au contraire implanté dans les esprits et les<br />
cœurs <strong>des</strong> principes de justice, de tempérance, de vérité, d’équité et de bienveillance,<br />
principes qui sont la pierre angulaire de la prospérité nationale.”La justice élève une<br />
nation.”“C’est par la justice que le trône s’affermit.”“L’œuvre de la justice sera la paix, et<br />
le <strong>fr</strong>uit de la justice le repos et la sécurité pour toujours.”(Proverbes 14 : 34 ; 16 : 12 ;<br />
Esaïe 32 : 17.) Celui qui est soumis à la loi divine ne faillira pas non plus au respect <strong>des</strong><br />
lois de son pays. Celui qui craint Dieu “honorera le roi “dans l’exercice de ses<br />
attributions justes et légitimes. Les dirigeants de la France ne se doutaient guère, hélas !<br />
<strong>des</strong> conséquences de leur fatale politique lorsqu’ils prohibèrent les Ecritures et bannirent<br />
ses disciples, lorsque, siècle après siècle, <strong>des</strong> hommes intègres, éclairés, consciencieux,<br />
ayant le courage de leurs convictions et la foi qui consent à souf<strong>fr</strong>ir pour la vérité, avaient<br />
été condamnés aux galères, consumés sur les bûchers ou enterrés vifs dans de sombres<br />
cachots. Des myria<strong>des</strong> d’autres avaient cherché leur salut en passant à l’étranger. Et cela<br />
dura deux cent cinquante ans à partir <strong>des</strong> débuts de la Réforme !<br />
“Il n’y eut peut-être pas une génération de Français, au cours de cette longue période,<br />
qui ne fût témoin de la fuite éperdue <strong>des</strong> disciples de l’Evangile devant la fureur de leurs<br />
persécuteurs. Emportant avec eux leurs arts et leurs industries (dans lesquels ils<br />
excellaient généralement) , leur intelligence et leur esprit d’ordre, ils allèrent, au<br />
détriment de la France, enrichir les pays qui leur donnaient asile.” Si, au cours de ces<br />
trois siècles, la main active de ces exilés avait cultivé le sol national ; si leurs talents<br />
industriels avaient perfectionné ses usines ; si leur génie créateur avait enrichi sa<br />
littérature et cultivé ses sciences ; si leur sagesse avait dirigé ses conseils ; si leur<br />
bravoure s’était donné libre carrière sur ses champs de bataille ; si leur équité avait rédigé<br />
ses lois et si la religion de l’Evangile avait formé les consciences, quelle ne serait pas,<br />
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