Léviathan des Nations_fr
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s’exposaient aux critiques, à la condamnation et à la persécution. " Il faudra, dit l’un d’eux, ou renier la Parole de Dieu, ou... être brûlés." Le roi Ferdinand, représentant de l’empereur à la diète, comprit que, s’il ne réussissait pas à amener les princes à accepter et à soutenir le décret, celui-ci occasionnerait de sérieuses divisions. Et se doutant bien qu’user de la contrainte avec de tels hommes, c’était les rendre plus déterminés encore, il tenta de les persuader, et " supplia les princes d’accepter le décret, les assurant que l’empereur leur en saurait un gré infini " . Ces hommes courageux, s’inclinant devant une autorité supérieure à celle des rois de la terre, répondirent avec calme : " Nous obéirons à l’empereur dans tout ce qui peut contribuer au maintien de la paix et à l’honneur de Dieu. " Sans tenir compte de cette déclaration, le roi annonça enfin, en pleine diète, " que l’édit allait être rédigé sous forme de décret impérial " . Puis il annonça à l’électeur de Saxe et à ses amis qu’ " il ne leur restait plus qu’à se soumettre à la majorité " . Cela dit, il se retira de l’assemblée, sans donner aux réformateurs l’occasion de lui répondre. En vain, ils lui envoyèrent une députation pour le prier de revenir. " C’est une affaire réglée, répondit le roi, il n’y a plus qu’à se soumettre." Bien que le parti impérial sût que les princes chrétiens étaient déterminés à considérer les saintes Ecritures comme supérieures aux doctrines et aux lois humaines, et que là où ce principe était reconnu l’autorité du pape serait tôt ou tard abolie, il croyait que la cause de l’empereur et du pape était la plus forte. Si les réformateurs avaient compté sur le seul secours de l’homme, ils eussent été aussi impuissants que les partisans du pape le supposaient. Mais leur force allait se révéler. Ils en appelèrent " du décret de la diète à la Parole de Dieu, et de l’empereur Charles à Jésus-Christ, le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs " . Sans tenir compte de l’absence de Ferdinand qui n’avait pas respecté leur liberté de conscience, ils rédigèrent et présentèrent sans délai devant l’assemblée nationale la solennelle déclaration suivante : " Nous PROTESTONS par les présentes, devant Dieu, notre unique Créateur, Conservateur, Rédempteur et Sauveur, qui un jour sera notre Juge, ainsi que devant tous les hommes et toutes les créatures, que, pour nous et pour les nôtres, nous ne consentons ni n’adhérons en aucune manière au décret proposé, dans la mesure où il est contraire à Dieu, à sa sainte Parole, à notre bonne conscience et au salut de nos âmes. Quoi ! nous déclarerions, en adhérant à cet édit, que si le Dieu tout-puissant appelle un homme à sa connaissance, cet homme n’est pas libre de la recevoir !… " Ils ajoutaient: Il n’est de doctrine certaine que celle qui est conforme à la Parole de Dieu ; ... le Seigneur défend d’en enseigner une autre ; … chaque texte de la sainte Ecriture devant être expliqué par d’autres textes plus clairs, ce saint Livre est, dans toutes les choses nécessaires au chrétien, facile et propre à dissiper les ténèbres. Nous sommes donc résolus, avec la grâce de Dieu, à maintenir la prédication pure et exclusive de sa 128
seule Parole, telle qu’elle est contenue dans les livres bibliques de l’Ancien et du Nouveau Testament, sans rien ajouter qui lui soit contraire. Cette Parole est la seule vérité ; elle est la norme assurée de toute doctrine et de toute vie, et ne peut jamais ni faillir ni se tromper. Celui qui bâtit sur ce fondement résistera à toutes les puissances de l’enfer, tandis que toutes les vanités humaines qu’on lui oppose tomberont devant la face de Dieu. " Voilà pourquoi nous rejetons le joug qu’on nous impose… En même temps, nous nous flattons que sa Majesté impériale se comportera à notre égard comme un prince chrétien qui aime Dieu par-dessus toutes choses ; et nous nous déclarons prêts à lui rendre, ainsi qu’à vous tous, gracieux seigneurs, toute l’affection et toute l’obéissance qui sont notre juste et légitime devoir. " Cette lecture produisit une vive impression sur la diète. La hardiesse des protestataires étonna et alarma la majorité. L’avenir leur apparut sombre et orageux. Les dissensions, les conflits et l’effusion de sang paraissaient inévitables. Les réformateurs, au contraire, certains de la justice de leur cause, et se reposant sur le bras du Tout-Puissant, étaient remplis d’un courage inébranlable. "Les principes contenus dans cette célèbre Protestation… constituent l’essence même du protestantisme. Elle s’élève contre deux abus de l’homme dans les choses de la foi : l’intrusion du magistrat civil et l’autorité arbitraire du clergé. A la place de ces deux abus, le protestantisme établit, en face du magistrat, le pouvoir de la conscience ; et en face du clergé, l’autorité de la Parole de Dieu. D’abord, il récuse le pouvoir civil dans les choses divines et dit, comme les apôtres et les prophètes : Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. Sans porter atteinte à la couronne de Charles Quint, il maintient la couronne de Jésus-Christ. Mais il va plus loin: il établit que tout enseignement humain doit être subordonné aux oracles de Dieu. " Les protestataires ne prétendaient pas seulement au droit de croire et de pratiquer leur foi, mais aussi à celui d’exprimer librement ce qu’ils estimaient être la vérité ; et ils contestaient aux prêtres et aux magistrats le droit de les en priver. La protestation de Spire s’élevait solennellement contre l’intolérance religieuse et affirmait catégoriquement le droit de tout homme à servir Dieu selon sa conscience. Cette déclaration, bientôt gravée dans des milliers de mémoires, fut enregistrée dans les livres du ciel, d’où aucun effort humain ne pouvait l’effacer. Toute l’Allemagne évangélique adopta la protestation comme l’expression de sa foi. Dans ce manifeste, chacun voyait le présage d’une ère nouvelle et meilleure. L’un des princes dit aux signataires de Spire : " Que le Dieu tout-puissant qui vous a fait la grâce de le confesser publiquement, librement et sans aucune crainte vous conserve dans cette fermeté chrétienne jusqu’au jour de l’éternité. " 129
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Dieu.<br />
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chrétien qui aime Dieu par-<strong>des</strong>sus toutes choses ; et nous nous déclarons prêts à lui<br />
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arbitraire du clergé. A la place de ces deux abus, le protestantisme établit, en face du<br />
magistrat, le pouvoir de la conscience ; et en face du clergé, l’autorité de la Parole de<br />
Dieu. D’abord, il récuse le pouvoir civil dans les choses divines et dit, comme les apôtres<br />
et les prophètes : Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. Sans porter atteinte à la<br />
couronne de Charles Quint, il maintient la couronne de Jésus-Christ. Mais il va plus loin:<br />
il établit que tout enseignement humain doit être subordonné aux oracles de Dieu. " Les<br />
protestataires ne prétendaient pas seulement au droit de croire et de pratiquer leur foi,<br />
mais aussi à celui d’exprimer librement ce qu’ils estimaient être la vérité ; et ils<br />
contestaient aux prêtres et aux magistrats le droit de les en priver. La protestation de<br />
Spire s’élevait solennellement contre l’intolérance religieuse et affirmait catégoriquement<br />
le droit de tout homme à servir Dieu selon sa conscience.<br />
Cette déclaration, bientôt gravée dans <strong>des</strong> milliers de mémoires, fut enregistrée dans<br />
les livres du ciel, d’où aucun effort humain ne pouvait l’effacer. Toute l’Allemagne<br />
évangélique adopta la protestation comme l’expression de sa foi. Dans ce manifeste,<br />
chacun voyait le présage d’une ère nouvelle et meilleure. L’un <strong>des</strong> princes dit aux<br />
signataires de Spire : " Que le Dieu tout-puissant qui vous a fait la grâce de le confesser<br />
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