Magazine CNC printemps 2024
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Vision<br />
d’ensemble<br />
TKTKTKTKTKTKT<br />
Assurer la vitalité de tous<br />
les écosystèmes et espèces indigènes<br />
natureconservancy.ca<br />
WINTER 2021 1
PRINTEMPS <strong>2024</strong><br />
SOMMAIRE<br />
Conservation de la nature Canada<br />
4 Qu’y a-t-il dans un nom?<br />
Inspirons-nous du célèbre « What’s in a<br />
name? » de Shakespeare pour réfléchir aux<br />
noms de certains oiseaux migrateurs.<br />
6 St. Peters Harbour et<br />
Lake Run<br />
Le son des vagues inspire le calme dans<br />
cette réserve de l’Île-du-Prince-Édouard.<br />
7 Un air de <strong>printemps</strong><br />
Nous profitons de l’arrivée du <strong>printemps</strong><br />
pour vous inviter à relever le défi Petits<br />
gestes de conservation de <strong>CNC</strong>.<br />
7 Le pouvoir de la nature<br />
Jessica Burylo, qui est une personne<br />
autiste, s’épanouit lorsqu’elle passe du<br />
temps en plein air.<br />
8 Présents à l’appel<br />
Conserver des zones de biodiversité<br />
représentatives de paysages et d’espèces<br />
non encore protégés est essentiel pour<br />
créer des écosystèmes résilients.<br />
12 Le castor<br />
L’ingénieur aquatique et gestionnaire<br />
de milieux humides par excellence<br />
au Canada.<br />
14 <strong>CNC</strong> à l’œuvre<br />
Protection d’un habitat côtier en C.-B.;<br />
Conservation d’une halte pour les oiseaux<br />
migrateurs en Sask.; Partenariat en N.-É.<br />
16 Terrain d’entente<br />
Margaret Rosling utilise son expérience<br />
en droit autochtone pour concilier intérêts<br />
autochtones et résultats en matière<br />
de conservation.<br />
18 L’abc des prairies<br />
Un projet artistique qui tisse des liens<br />
entre une tradition des Maritimes et le<br />
paysage emblématique des Prairies.<br />
C’est extra!<br />
Visitez magazinecnc.ca pour accéder à du<br />
contenu supplémentaire en lien avec ce<br />
numéro de notre magazine.<br />
Conservation de la nature Canada<br />
365, rue Bloor Est, bureau 1501, Toronto, ON M4W 3L4<br />
magazine@conservationdelanature.ca | Tél. : 416 932-3202 | Sans frais : 1 877 231-3552<br />
Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) est la force rassembleuse au pays pour la sauvegarde de la nature. Par la<br />
conservation permanente de vastes territoires, <strong>CNC</strong> apporte des solutions à la double crise du déclin rapide de la<br />
biodiversité et des changements climatiques. <strong>CNC</strong> est un organisme de bienfaisance enregistré.<br />
Avec la nature, nous créons un monde prospère.<br />
Le magazine Conservation de la nature Canada est offert aux personnes qui appuient <strong>CNC</strong>.<br />
MC<br />
Marque de commerce de La Société canadienne pour la conservation de la nature<br />
FSC MD n’est pas responsable des calculs<br />
concernant l’économie des ressources<br />
réalisée en choisissant ce papier.<br />
Imprimé au Canada avec des encres végétales par Warrens Waterless Printing.<br />
La publication de ce magazine a sauvegardé 29 arbres et 28 827 litres d’eau*.<br />
CGÉNÉRÉ PAR : CALCULATEUR.ROLLANDINC.COM. PHOTO : JENNA RACHELLE. COUVERTURE : DANITA DELIMONT/ALAMY STOCK PHOTO (CYPRIPÈDE TÊTE-DE-BÉLIER).<br />
*<br />
2 PRINTEMPS <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca<br />
natureconservancy.ca
St. Peters Harbour<br />
et Lake Run, Î.-P.-É.<br />
MARIE-MICHÈLE ROUSSEAU-CLAIR : ÉTIENNE BOISVERT; CHELSEA PETERS : SOUNDS LIKE YELLOW PHOTOGRAPHY; ZACK METCALFE : ZACK METCALFE.<br />
Chères amies,<br />
Chers amis,<br />
Au Québec, où je vis et travaille, j’ai l’immense joie de<br />
pouvoir observer des cardinaux rouges depuis la fenêtre<br />
de mon bureau. Cet oiseau chanteur indigène est pour<br />
moi un rappel du rôle des espèces animales et végétales qui nous<br />
sont familières dans nos écosystèmes.<br />
Nous avons tendance à croire que les espèces communes n’ont<br />
pas besoin d’être protégées. Nous pouvons aussi penser que seules<br />
les espèces rares ont besoin de protection. Mais, en réalité, même<br />
les espèces les plus communes ont besoin d’habitats adéquats pour ne<br />
pas éventuellement faire partie de la liste des espèces en péril.<br />
Prenons l’exemple du castor. Cet animal emblématique joue<br />
un rôle essentiel dans l’aménagement des cours d’eau et le maintien<br />
des milieux humides, et ce, à travers le territoire. Comme vous le lirez<br />
à la page 12, les milieux humides, qui sont trop peu nombreux bien<br />
qu’ils soient vitaux pour le castor, doivent être conservés pour que<br />
l’espèce puisse continuer à prospérer.<br />
Dans ce numéro de notre magazine, nous nous penchons sur le R<br />
des principes CARE, qui visent la conservation d’aires Connectées,<br />
Adéquates, Représentatives et Efficaces.<br />
Pour dire les choses simplement, assurer la Représentativité<br />
implique de veiller à ce que les éléments qui composent la nature,<br />
des rivières aux Grands Lacs, et des milieux de prairies aux<br />
écosystèmes côtiers (sans oublier les espèces indigènes qui y vivent),<br />
puissent subsister malgré les bouleversements qui sont à l’origine de<br />
la crise de la biodiversité.<br />
J’espère que les textes abordant la représentativité sous toutes<br />
ses formes, et sur comment elle permet de créer des paysages plus<br />
résilients, sera pour vous une source d’inspiration. Merci de votre<br />
soutien fidèle à la conservation des milieux naturels au Canada.<br />
Avec vous pour la nature,<br />
Marie-Michele Rousseau-Clair<br />
Marie-Michèle Rousseau-Clair<br />
Cheffe de la conservation<br />
Ont collaboré<br />
à ce numéro<br />
Zack Metcalfe est un<br />
journaliste indépendant<br />
et auteur basé à Salmon<br />
Arm (C.-B.). Il a écrit<br />
Présents à l’appel,<br />
en page 8.<br />
Chelsea Peters est<br />
depuis 2015 une<br />
illustratrice indépendante.<br />
Elle habite à<br />
Dundas (Ont.). Par ses<br />
œuvres combinant le<br />
dessin au trait et<br />
l’aquarelle, elle aime<br />
exprimer la beauté de<br />
la nature et cherche<br />
à informer et inspirer.<br />
Elle a illustré les<br />
articles Qu’y a-t-il dans<br />
un nom? p. 5 et Terrain<br />
d’entente p. 16.<br />
conservationdelanature.ca<br />
natureconservancy.ca<br />
PRINTEMPS <strong>2024</strong> 3
D’UN OCÉAN<br />
À L’AUTRE<br />
De tous les oiseaux chanteurs<br />
d’Amérique du Nord, le bruant de<br />
Henslow a le chant le plus court et<br />
le moins complexe. Si nous devions<br />
penser à un nouveau nom pour<br />
cette espèce, le hoquet des prairies<br />
paraît tout à fait approprié.<br />
Qu’y a-t-il dans un nom?<br />
Les oiseaux migrateurs reviennent au pays! Inspirons-nous du « What’s in a name? »<br />
de Shakespeare pour réfléchir à la signification de leurs noms.<br />
Apprendre le nom d’éléments du monde naturel<br />
marque souvent le début d’un engagement envers la<br />
nature. Cela peut mener à de nouveaux passe-temps<br />
que nous pratiquerons toute une vie, et qui demanderont de<br />
créer des listes, faire des croquis, prendre des photos et d’enregistrer<br />
des sons. Tout cela contribuera bien sûr à nous familiariser<br />
avec les espèces qui nous entoure et à mieux les apprécier.<br />
Ce que nous apprend le nom d’une espèce varie, même<br />
quand il question des noms d’oiseaux. Certains ont des noms<br />
descriptifs très utiles. Prenons, par exemple, le carouge<br />
à épaulettes et la paruline à croupion jaune, dont les noms<br />
comportent certaines caractéristiques d’identification.<br />
Dans des cas comme celui de la paruline ou fauvette à<br />
calotte noire (en anglais, Wilson’s warbler) ou du solitaire<br />
de Townsend, les noms font référence à celui d’une personne;<br />
on les appelle « oiseaux éponymes ». En général, ces noms<br />
propres ne nous apprennent rien sur les espèces, mais plutôt sur<br />
leur « découverte » par la science occidentale. Il arrive que les<br />
personnages dont les oiseaux portent le nom soient aujourd’hui<br />
controversés et qu’ils puissent évoquer l’esclavage, le colonialisme<br />
et le racisme.<br />
Récemment, l’American Ornithological Society (AOS) a<br />
décidé de renommer toutes les espèces d’oiseaux éponymes ou<br />
qui ont des appellations non éponymes jugées offensantes ou<br />
péjoratives. Bien que ce ne soit pas le cas pour tous les personnages<br />
historiques qui ont donné leur nom à des oiseaux, l’AOS<br />
estime qu’il est trop difficile de distinguer ce qui est acceptable<br />
de ce qui ne l’est pas. Elle a donc opté pour un processus plus<br />
simple consistant à renommer tous les oiseaux éponymes.<br />
Cette initiative a été saluée comme un excellent moyen de<br />
mieux refléter l’apparence, le comportement ou les besoins en<br />
matière d’habitat des oiseaux, soit en leur donnant essentiellement<br />
des noms qui les célèbrent pour ce qu’ils sont. Renommer<br />
les oiseaux peut aussi démanteler des barrières pour les<br />
personnes qui ont souffert du colonialisme occidental, ce qui,<br />
espérons-le, contribuera à rendre plus accessible et inclusif le<br />
monde naturel, et plus particulièrement celui de l’ornithologie,<br />
pour les personnes et les communautés qui ont souffert de<br />
l’exclusion et du racisme systémiques.<br />
Alors que les oiseaux migrateurs nous arrivent en grands<br />
nombres, voici des informations au sujet de quelques-uns<br />
d’entre eux ainsi que nos suggestions de nouveaux noms.<br />
SATHEESH RAJH RAJAGOPALAN / ALAMY STOCK PHOTO.<br />
4 PRINTEMPS <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
Solitaire de Townsend<br />
Le solitaire de Townsend est un membre de la<br />
famille des grives, souvent perché bien en vue,<br />
comme le moucherolle. Il chante en hiver, probablement<br />
pour défendre les précieuses parcelles<br />
de baies de genévrier dont il se nourrit. Certains<br />
solitaires affectionnent les basses terres en hiver,<br />
dans des villes comme Calgary, en Alberta.<br />
Nouveau nom potentiel : Solitaire du genévrier<br />
Où l’observer? Site Lusicich de <strong>CNC</strong>, bassin versant<br />
Castle-Crowsnest (Alb.)<br />
Bruant de Baird<br />
Ce passereau de taille moyenne, à la queue<br />
relativement courte, se distingue par son plumage<br />
aux rayures jaunes et brunes sur le cou, les ailes<br />
et le dos. Il passe la plupart de son temps au sol,<br />
à la recherche d’insectes et de graines.<br />
Nouveau nom potentiel : Bruant des prairies<br />
d’herbe mixtes<br />
Où l’observer? Plusieurs sites en Saskatchewan,<br />
p. ex., Wideview Complex de <strong>CNC</strong>, région<br />
écologiquement importante du bassin<br />
de la rivière Milk.<br />
Pipit de Sprague<br />
Oiseau discret de la taille d’un moineau, au plumage<br />
brun rayé, et au vol et au chant extraordinaires.<br />
Au <strong>printemps</strong>, les mâles effectuent des parades<br />
aériennes en planant en spirale descendante<br />
au-dessus de leur territoire. Il se camoufle facilement<br />
parmi les plantes des prairies.<br />
Nouveau nom potentiel : Pipit des prairies<br />
Où l’observer? Ranch McIntyre (Alb.) et Aire de<br />
conservation des prairies patrimoniales Old Man<br />
on His Back de <strong>CNC</strong> (Sask.)<br />
Grive de Bicknell<br />
Une espèce rare et en péril, à l’aire de répartition<br />
restreinte. Elle niche dans les forêts de sapins<br />
baumiers denses et de haute altitude. En Nouvelle-Écosse,<br />
on la trouve dans les tourbières et les<br />
landes, ainsi que dans les forêts d’épinettes noires et<br />
de sapins baumiers basses et balayées par le vent.<br />
Bécassine de Wilson<br />
Cet oiseau des marais se cache dans la végétation<br />
dense et, lorsqu’il est dérangé, s’élance dans les airs<br />
en émettant un cri distinctif et en effectuant un vol<br />
en zigzag. Les mâles arborent des plumes caudales<br />
uniques qui, en vibrant, produisent un son grave<br />
lorsqu’ils sont en plein vol.<br />
Bruant de Lincoln<br />
Cette espèce de bruant se caractérise par une<br />
poitrine brun-jaune, un bec court et des rayures très<br />
fines sur la poitrine. Il vit dans les milieux humides et<br />
arbustifs et niche sur ou près du sol. Il a un joli chant<br />
de fauvette, ce qui permet de l’identifier quand il se<br />
cache dans les broussailles.<br />
Nouveau nom potentiel : Grive des marais<br />
Où l’observer? Péninsule nord de l’île du<br />
Cap-Breton (N.-É.)<br />
Nouveau nom potentiel : Bécassine délicate<br />
(inspiré de son nom latin Gallinago delicata)<br />
Où l’observer? Black River Bog et d’autres sites de<br />
<strong>CNC</strong> en N.-É.<br />
Nouveau nom potentiel : Bruant mélodieux<br />
Où l’observer? Réserve naturelle Kingsboro Forest<br />
de <strong>CNC</strong> ( Î.-P.-É.)<br />
ILLUSTRATION : CHELSEA PETERS.<br />
Bruant de Nelson<br />
L’été, on le voit souvent sautiller dans les herbes<br />
des marais salins côtiers de la côte Est du pays. Son<br />
cri « sifflant » caractéristique rappelle le grésillement<br />
d’une goutte d’eau qu’on laisse tomber sur une<br />
poêle chaude. Cette espèce se distingue des autres<br />
bruants par la couleur orange rouille de sa tête et<br />
de son cou.<br />
Nouveau nom potentiel : Bruant à taches grises<br />
Où l’observer? Réserve naturelle de la rivière<br />
Haldimand de <strong>CNC</strong> (Î.-P.-É.)<br />
Mouette de Bonaparte<br />
Cette petite mouette, qui ressemble à une sterne,<br />
se distingue par son vol élégant et flottant. Elle<br />
a d’ailleurs d’abord été classée dans la famille des<br />
sternes avant d’être classée comme une mouette.<br />
Elle a la particularité de nicher dans les arbres,<br />
dans l’écozone boréale du nord du Canada.<br />
Nouveau nom potentiel : Mouette de la<br />
forêt boréale<br />
Où l’observer? Détroit de Northumberland,<br />
comme la réserve naturelle Baie Verte (N.-B.)<br />
Garrot d’Islande (ou de Barrow)<br />
Dans l’Est du Canada, la population de cette espèce<br />
est vulnérable et habite de petites parcelles de terre<br />
le long de la côte atlantique. Ce canard plongeur<br />
trapu aux yeux jaunes niche dans les cavités des<br />
arbres près des lacs d’eau douce peu profonds. Ses<br />
battements d’ailes rapides lui permettent de voler<br />
à travers les forêts denses.<br />
Nouveau nom potentiel : Garrot à croissants<br />
Où l’observer? Sud du Labrador et péninsule nord<br />
de l’île de Terre-Neuve (T.-N.-L.)<br />
conservationdelanature.ca<br />
PRINTEMPS <strong>2024</strong> 5
SUR LES<br />
SENTIERS<br />
Golfe du Saint-Laurent<br />
★<br />
<strong>CNC</strong><br />
★<br />
<strong>CNC</strong><br />
Lac<br />
St. Peters<br />
<br />
N<br />
St. Peters Harbour<br />
et Lake Run<br />
Le son des vagues et la brise fraîche inspirent le calme et la paix<br />
dans cette partie du littoral de l’Île-du-Prince-Édouard.<br />
ESPÈCES À OBSERVER<br />
La réserve naturelle St. Peters Harbour<br />
et Lake Run de Conservation de la nature<br />
Canada (<strong>CNC</strong>) se situe dans le<br />
nord-est de la province. Un chenal de marée<br />
divise la réserve en deux sections ayant chacune<br />
leur point d’entrée. Revitalisez votre<br />
corps et votre esprit sur la plage, entre les<br />
eaux du golfe et les dunes. Vous pouvez<br />
même faire une « saucette » devant ce majestueux<br />
décor de dunes couvertes d’herbes.<br />
Très populaire l’été, ce joyau côtier est<br />
tout aussi intéressant à explorer à d’autres<br />
moments de l’année, en particulier au <strong>printemps</strong><br />
et à l’automne, quand les conditions<br />
climatiques changent l’atmosphère qui y<br />
règne. Demeurez à l’affût des oiseaux de<br />
mer, des plantes rares et des espèces<br />
aquatiques le long de la plage, ainsi que<br />
des milieux humides et des étangs côtiers.<br />
LA DISCRÉTION EST DE MISE<br />
Cet habitat naturel se trouve au sein d’une<br />
Zone importante pour la conservation des<br />
oiseaux (ZICO). Gardez toujours vos animaux<br />
en laisse, car leur présence pourrait déranger<br />
les pluviers siffleurs qui nichent sur la plage.<br />
Aussi, évitez de marcher sur l’habitat fragile<br />
des dunes, puisqu’elles servent de zones<br />
tampons qui protègent des tempêtes les terres<br />
intérieures. Quittez la réserve sans laisser de<br />
traces et en rapportant vos déchets.1<br />
EN SAVOIR PLUS<br />
conservationdelanature.ca/st-peters-harbour<br />
• Balbuzard<br />
pêcheur<br />
• Bécasseau<br />
sanderling<br />
• Honckénye<br />
faux-pourpier<br />
(plante)<br />
• Bécasseau<br />
semipalmé<br />
• Bruant de Nelson<br />
• Choquemort<br />
(poisson du<br />
chenal)<br />
LÉGENDE<br />
Entrée<br />
— Chemin sur la plage<br />
• Cirier de<br />
Pennsylvanie<br />
• Gesse maritime<br />
(plante)<br />
• Pluvier argenté<br />
• Grand chevalier<br />
• Grand héron<br />
• Pluvier siffleur<br />
• Pygargue à tête<br />
blanche<br />
• Sterne pierregarin<br />
• Tournepierre à<br />
collier<br />
HAUT EN BAS : MIKE DEMBECK; MIKE DEMBECK; <strong>CNC</strong>. CARTE : PHILINA CHAN.<br />
6 PRINTEMPS <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
ACTIVITÉ<br />
LES<br />
INDISPENSABLES<br />
PHOTO : CURTIS COMEAU.<br />
Un air de<br />
<strong>printemps</strong><br />
Le <strong>printemps</strong> est une période de renouveau où<br />
l’on observe son environnement avec un regard<br />
neuf et en y remarquant les changements. Les<br />
sons de la nature nous rappellent qu’elle se trouve<br />
souvent plus près de nous qu’on ne le pense.<br />
Alors que les pépiements des oiseaux et les<br />
bourdonnements familiers accompagnent l’arrivée<br />
du <strong>printemps</strong>, <strong>CNC</strong> vous invite à relever son défi<br />
Petits gestes de conservation.<br />
RENCONTRER<br />
SES VOISINS<br />
Apprenez à connaître<br />
la faune et la flore<br />
de votre région, et<br />
connectez-vous encore<br />
plus à la nature qui vous<br />
entoure. Il suffit d’une<br />
application comme<br />
iNaturalist ou d’un<br />
guide de poche pour<br />
identifier les espèces<br />
avec lesquelles vous<br />
partager le territoire.<br />
Pour favoriser la<br />
biodiversité locale,<br />
vous pourriez identifier<br />
les espèces envahissantes<br />
sur votre terrain<br />
et les remplacer par<br />
des plantes indigènes.<br />
NOS ALLIÉS<br />
Les pollinisateurs<br />
indigènes, tels que les<br />
abeilles, les papillons<br />
et d’autres espèces,<br />
contribuent à la vitalité<br />
de nombreux végétaux<br />
qui nous entourent. Les<br />
plantes indigènes de<br />
votre jardin attireront<br />
ces pollinisateurs fidèles.<br />
Vous pouvez assurer<br />
aux abeilles des aires de<br />
nidification en laissant<br />
des branches et des<br />
tiges d’arbres morts<br />
au sol. Vous aimez<br />
bricoler? Votre boîte<br />
à outils et quelques<br />
matériaux suffisent<br />
pour construire un<br />
hôtel pour abeilles!<br />
QUI SE RESSEMBLE<br />
S’ASSEMBLE<br />
Chaque <strong>printemps</strong>, des<br />
milliards d’oiseaux<br />
chanteurs reviennent<br />
au Canada au moment<br />
où sa nature spectaculaire<br />
se réveille. En<br />
plantant des arbres et<br />
des arbustes indigènes,<br />
vous fournirez un<br />
habitat à ces voyageurs<br />
au long cours. Vous<br />
pouvez aussi contribuer<br />
à la science participative<br />
en ajoutant vos<br />
observations sur le site<br />
Web ou l’application<br />
iNaturalist.<br />
Tous ces efforts réunis<br />
contribueront au<br />
bien-être des espèces<br />
sauvages et de leurs<br />
habitats. De votre<br />
balcon, ou cour arrière,<br />
à l’ensemble de votre<br />
collectivité, il n’y a<br />
qu’un pas après tout!<br />
Nos actions collectives<br />
peuvent sans contredit<br />
avoir un impact positif<br />
sur la nature.<br />
EN SAVOIR PLUS<br />
Le pouvoir<br />
de la nature<br />
Jessica Burylo, qui est une personne autiste, s’épanouit<br />
lorsqu’elle passe du temps en plein air.<br />
Que ce soit à la campagne<br />
ou chez moi, à<br />
Edmonton (Alberta),<br />
je ne me déplace jamais sans<br />
mes bouchons d’oreille. Étant<br />
une personne autiste, je ressens<br />
les sons différemment. Certaines<br />
tonalités ou bruits de fond<br />
peuvent vraiment me gêner.<br />
Pour beaucoup, vivre avec<br />
l’autisme c’est vivre des sensations<br />
trop fortes. Mes bouchons<br />
d’oreille sont des filtres qui<br />
me permettent de gérer mes<br />
perceptions sensorielles.<br />
La nature est remplie de<br />
sons; il suffit d’écouter. Même<br />
si le bruit d’une cascade d’eau<br />
peut nécessiter des protections<br />
auditives, être en plein air c’est<br />
plus que ça. Mes activités dans<br />
la nature sont une source de<br />
plaisir unique pour moi, car elles<br />
sont en parfaite adéquation avec<br />
mon autisme.<br />
À bien des égards, la vie<br />
dans la nature correspond à mes<br />
valeurs ainsi qu’à mes besoins en<br />
tant que personne autiste. Portant sur mon dos tout ce dont j’ai besoin, et loin<br />
des pressions sociales, j’apprécie les mouvements continus et répétitifs qui régulent<br />
mon cerveau. Je n’ai qu’à aller où je veux.<br />
J’ai remarqué que les interactions sociales sont différentes à la campagne; plus<br />
ouvertes et simples, mieux adaptées à ma personnalité. Que ce soit en randonnée<br />
dans les Rocheuses ou plus près de chez moi, au parc national d’Elk Island (Alb.),<br />
où je travaille, j’aime les échanges authentiques, qui surviennent quand j’explore ces<br />
lieux impressionnants avec d’autres.<br />
J’ai la chance de pouvoir parler ouvertement de mon expérience personnelle et je<br />
milite pour favoriser l’accès à la nature et à d’autres types d’espaces. Cette passion fait<br />
aussi partie de mon travail. Pratiquer des activités physiques en plein air est important<br />
pour moi : c’est un moyen d’être pleinement moi-même, en tant que personne autiste.<br />
J’éprouve une grande joie lorsque je m’aventure dans un sentier. Qu’il s’agisse<br />
d’apprécier les teintes vertes et brunes du paysage après la pluie ou d’admirer une<br />
épaisse couche de neige dans une atmosphère feutrée et apaisante, je goûte à la<br />
nature d’une manière qui met en évidence tout ce que j’aime dans le fait d’être une<br />
personne autiste.1<br />
conservationdelanature.ca<br />
PRINTEMPS <strong>2024</strong> 7
Prése<br />
Sur l’île du Cap-Breton (N.-É.), Cains Mountain est<br />
un riche exemple de paysage représentatif, grâce<br />
à son type de substrat rocheux, son relief varié et<br />
ses espèces végétales spécialistes.<br />
8 PRINTEMPS <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
nts à l’appel<br />
Conserver des zones de biodiversité représentatives de paysages et d’espèces<br />
non encore protégés est essentiel dans la création d’écosystèmes résilients.<br />
PAR Zack Metcalfe<br />
MIKE DEMBECK.<br />
Le 17 septembre 2014, Sean Blaney, un<br />
botaniste, marchait sur la Lune. Du moins, sur<br />
une surface qui ressemblait à celle de la Lune.<br />
Des étendues couvertes de poussière minérale,<br />
semblable à du gros sel, s’élevaient par endroits pour former<br />
de spectaculaires crêtes et falaises d’albâtre, pour s’effrondrer<br />
à d’autres endroits et créer des grottes, des gouffres et<br />
des cours d’eau souterrains.<br />
Malgré son aspect lunaire, ce paysage était vivant et<br />
peuplé de chauves-souris et d’insectes endémiques dans ses<br />
grottes et ses forêts anciennes enracinées entre ses cratères.<br />
Certains gouffres étaient si profonds que de véritables étangs<br />
de plâtre s’y étaient formés. Au pied des falaises se trouvaient<br />
des milieux humides d’une richesse étonnante. Sean Blaney<br />
se trouvait au cœur de l’île du Cap-Breton, près de Cains<br />
Mountain, et la poussière sous ses bottes était du gypse.<br />
« C’est le gisement de gypse le plus spectaculaire que j’aie<br />
jamais visité », affirme-t-il, et c’est peu dire. En 2014, lui et<br />
ses collègues du Centre de données sur la conservation du<br />
Canada atlantique (CDC CA) ont visité 36 gisements de<br />
gypse en Nouvelle-Écosse : une étude exhaustive pour bien<br />
comprendre les types de vie qui prospèrent sur cette curieuse<br />
roche. Le gypse est en effet remarquable en raison de<br />
ses motifs d’érosion asymétriques et sa contribution à la<br />
chimie des sols, puisqu’il est nutritif pour certains milieux et<br />
nuisible pour d’autres. Sa présence se traduit par une grande<br />
diversité d’habitats sur une surface relativement réduite et<br />
par l’apparition d’une communauté de plantes vasculaires que<br />
l’on ne trouve nulle part ailleurs.<br />
« Le gypse de Nouvelle-Écosse présente un assemblage<br />
d’espèces particulier, explique M. Blaney. Quand on combine<br />
le type de substrat rocheux, les différents reliefs et les espèces<br />
végétales spécialistes qui y vivent, on obtient un environnement<br />
unique au monde. »<br />
Bien que des espèces végétales comme le cypripède tête<br />
de bélier, la boehméria cylindrique, le carex granuleux et<br />
l’éléocharide à tiges rouges poussent ailleurs au Canada,<br />
elles se font de plus en plus rares en Nouvelle-Écosse. Le<br />
conservationdelanature.ca<br />
PRINTEMPS <strong>2024</strong> 9
Il faut s’assurer que notre travail soit<br />
représentatif de ce qui est le plus<br />
important, et de ce qui n’est pas déjà<br />
protégé par d’autres.<br />
Jaimee Morozoff, directrice de programmes à <strong>CNC</strong> en Nouvelle-Écosse<br />
Cypripède tête-de-bélier<br />
fait que tant d’espèces disparates, certaines<br />
issues de forêts tempérées de l’extrême sud<br />
du pays, d’autres du nord de l’Ontario et du<br />
Québec et même quelques-unes du Haut-<br />
Arctique, se trouvent en Nouvelle-Écosse et<br />
presque exclusivement sur des gisements de<br />
gypse est particulier et, à certains égards,<br />
très précaire.<br />
La Nouvelle-Écosse possède davantage de<br />
gypse que toute autre province canadienne<br />
ou État du nord-est de l’Amérique du Nord,<br />
ce qui n’est pas peu dire. À l’échelle de la<br />
province, la couche de substrat rocheux<br />
contenant du gypse ne représente qu’un peu<br />
plus de 5 % de sa masse continentale. De<br />
plus, seule une partie de cette couche est<br />
effectivement du gypse, et ce, principalement<br />
sur des terrains privés non protégés. Bon<br />
nombre des gisements de gypse sont la<br />
propriété de sociétés minières; la Nouvelle-<br />
Écosse fournissant d’ailleurs 75 % du gypse<br />
extrait au Canada.<br />
« Deux espèces de plantes pourraient<br />
avoir disparu (localement) de la province en<br />
raison de l’exploitation du gypse, précise<br />
M. Blaney. La violette du Canada, qui n’a pas<br />
été observée depuis les années 1950, et la<br />
cynoglosse boréale. Je n’ai jamais vu ni l’une<br />
ni l’autre dans la province. Seuls de vieux<br />
documents historiques les mentionnent. »<br />
Des 83 espèces végétales rares identifiées<br />
par l’inventaire du CDC CA en 2014, la plus<br />
forte concentration a été découverte un jour<br />
de septembre à l’ombre de Cains Mountain,<br />
plus précisément dans ses milieux humides.<br />
Blaney et ses collègues ont conclu que la<br />
contribution des dépôts de gypse à la biodiversité<br />
de la province en général, et plus<br />
particulièrement celle située près de Cains<br />
Mountain, était sous-estimée. En effet, moins<br />
de 1 % de la couche de substrat rocheux<br />
contenant du gypse était officiellement protégé<br />
contre l’exploitation minière, ou d’autres<br />
formes d’exploitation. Le rapport final de<br />
M. Blaney et de ses collègues, publié en<br />
2015, a donné à Conservation de la nature<br />
Canada (<strong>CNC</strong>) matière à réflexion.<br />
« Choisir de conserver des terres dans<br />
une nouvelle région est une décision importante<br />
pour nous », rappelle Jaimee Morozoff,<br />
directrice de programmes à <strong>CNC</strong> en Nouvelle-Écosse.<br />
Nos décisions sont régies par<br />
quatre grands principes désignés par l’acronyme<br />
CARE (Connectivité, Adéquation,<br />
Représentativité et Efficacité), un cadre qui<br />
oblige <strong>CNC</strong> à protéger des terres au sein de<br />
réseaux connectés de dimensions adéquates<br />
et en quantité suffisante, plutôt que des<br />
petites parcelles dispersées. L’organisme ne<br />
prend pas à la légère le fait de détourner son<br />
attention des autres projets existants en<br />
Nouvelle-Écosse — notamment ceux de<br />
Port Joli sur la rive sud, de l’estuaire de la<br />
Pugwash ou de l’isthme de Chignectou —<br />
pour s’intéresser à une région moins protégée.<br />
Pour justifier les fonds, le temps du<br />
personnel et les efforts investis à la création<br />
d’un tout nouveau réseau protégé, le territoire<br />
en question doit être représentatif,<br />
c’est-à-dire répondre à l’exigence du cadre<br />
CARE, soit détenir des valeurs de biodiversité<br />
qui n’ont pas encore été protégées par <strong>CNC</strong><br />
ou qui que ce soit d’autre. Cains Mountain<br />
répondait à cette exigence.<br />
« Quand nous nous engageons à conserver<br />
une nouvelle zone, précise Mme Morozoff,<br />
c’est généralement parce qu’il s’y trouve un<br />
élément qui contribuera considérablement à<br />
sa résilience, comme une espèce en péril ou<br />
un écosystème rare. »<br />
Reginal Hill, C.-B.<br />
La colline Reginald, C.-B.<br />
Nulle part ailleurs au pays se trouve une<br />
région où la représentativité en matière<br />
de conservation n’est aussi cruciale que<br />
dans la zone côtière de Douglas de Menzies<br />
dans le sud-ouest de la Colombie-Britannique.<br />
Cette zone biogéoclimatique, qui longe la<br />
mer des Salish et les îles Gulf, est caractérisée<br />
par des hivers doux et humides et des étés<br />
chauds et secs. Elle abrite la plus grande<br />
diversité végétale et la plus grande densité<br />
d’espèces menacées de toutes les zones<br />
biogéoclimatiques de la province. La zone<br />
côtière de Douglas de Menzies accueille<br />
également plus d’espèces d’oiseaux hivernants<br />
que partout ailleurs au Canada. Malgré<br />
cela, elle est dangereusement restreinte,<br />
puisqu’elle ne représente que 0,3 % de la<br />
masse terrestre de la province, en plus de<br />
s’être beaucoup développée.<br />
« Un pourcentage considérable des<br />
terres a été converti à l’agriculture ou coupé<br />
pour la sylviculture, précise Steven Godfrey,<br />
directeur des programmes à <strong>CNC</strong>, pour la<br />
côte Ouest de la Colombie-Britannique. Une<br />
grande partie a aussi été aménagée pour la<br />
construction résidentielle. Nous avons besoin<br />
de logements, certes, mais la conservation<br />
reste essentielle. »<br />
M. Godfrey et ses prédécesseurs ont mis en<br />
place un certain nombre de stratégies pour<br />
protéger des terres dans la zone côtière de<br />
Douglas de Menzies, et ce, depuis les années<br />
1970. Aujourd’hui, plus d’une douzaine de<br />
propriétés y sont conservées et gérées par<br />
<strong>CNC</strong>, en plus de nombreuses parcelles conservées<br />
par l’organisme dans le passé et<br />
TERRANCE KLASSEN / ALAMY STOCK PHOTO. FERNANDO LESSA.<br />
10 PRINTEMPS <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
JON NELSON; ERIN PAUL DONOVAN / ALAMY STOCK PHOTO; MIKE DEMBECK.<br />
transférées depuis pour devenir des parcs<br />
provinciaux ou fédéraux. Outre l’acquisition<br />
de ces propriétés, <strong>CNC</strong> détient 36 accords de<br />
conservation dans le cadre desquels les terres<br />
restent la propriété d’un tiers, tout en bénéficiant<br />
d’une protection juridiquement contraignante.<br />
Ce travail, fait de manière fragmentée,<br />
touche souvent à des lots relativement petits<br />
et fortement morcelés, parce que, dans les<br />
îles Gulf en particulier, c’est ce qu’on trouve.<br />
« Il est vraiment difficile d’assurer la<br />
conservation d’une petite parcelle à la fois,<br />
d’ajouter M. Godfrey. C’est la grande superficie<br />
de la colline Reginald qui rend ce projet<br />
si important. »<br />
Susan Hannon a pris sa retraite à Salt<br />
Spring Island (la plus grande des îles Gulf) il<br />
y a 14 ans, après avoir enseigné 25 ans l’écologie<br />
et la biologie de la conservation à l’Université<br />
de l’Alberta; mais l’oisiveté ne l’a jamais<br />
attirée. Elle a ainsi commencé à travailler<br />
de concert avec des propriétaires pour<br />
conserver la zone côtière de Douglas de Menzies<br />
sur leurs propriétés respectives, et à faire<br />
du travail bénévole pour des organismes<br />
comme le Salt Spring Island Conservancy,<br />
mettant son expérience au service des sites<br />
les plus sauvages de son nouveau chez-soi.<br />
L’un des sites les plus intacts est celui de la<br />
colline Reginald (Reginald Hill), 161 hectares<br />
de terres privées sur la côte sud de l’île.<br />
« C’est un site doté d’une grande diversité<br />
», précise-t-elle; non seulement en ce qui<br />
touche les espèces, mais aussi les fonctions et<br />
les processus écosystémiques. On y trouve<br />
des ruisseaux qui apparaissent au <strong>printemps</strong><br />
et qui coulent aussi en hiver, mais non en été,<br />
et au moins 20 milieux humides, certains saisonnièrement<br />
secs et d’autres inondés toute<br />
l’année. La forêt prend de nombreuses<br />
formes, en fonction de l’aspect et de l’altitude,<br />
et se compose de douglas de Menzies,<br />
d’arbousiers, de thuyas géants et de chênes<br />
de Garry.<br />
« Les écosystèmes de chênes de Garry de<br />
la zone côtière de Douglas de Menzies<br />
abritent à eux seuls plus de 100 espèces en<br />
péril, signale Mme Hannon. » La couleuvre à<br />
queue fine, l’engoulevent d’Amérique, le petit-duc<br />
des montagnes, le vertigo à crêtes<br />
fines (un escargot) et l’hespérie de Prospertius<br />
(un papillon) n’en sont que quelques<br />
exemples, et ce, seulement pour la colline<br />
Reginald. La présence de ces espèces, combinée<br />
au fait que le site était un candidat de<br />
choix pour le lotissement et le développement<br />
immobilier, a convaincu Mme Hannon de faire<br />
appel à <strong>CNC</strong>. « J’ai senti qu’il était temps<br />
d’agir », insiste-t-elle.<br />
Mme Hannon a présenté le dossier à <strong>CNC</strong><br />
en 2020, en exposant en détail la valeur et la<br />
vulnérabilité du site. L’organisme a commencé<br />
à négocier l’achat de la colline Reginald<br />
avec la famille qui possédait le terrain (et en<br />
prenait soin) depuis plus de 40 ans et qui<br />
tenait à ce qu’il soit conservé.<br />
« Il est assez rare de trouver sur un terrain<br />
privé une aussi grande parcelle de ce type de<br />
forêt qui soit non exploitée, fait remarquer<br />
M. Godfrey. Les parcelles de cette taille ont<br />
tendance à être divisées et converties de façon<br />
permanente. C’est Susan qui l’a signalé et<br />
qui a déclenché le processus. »<br />
« C’est un endroit magnifique, ajoute-t-il.<br />
On y trouve de très vieux cèdres, des érables<br />
et des arbousiers massifs. On peut y accéder<br />
à un des points de vue qui permet d’admirer<br />
le sud de la mer des Salish, de nombreuses<br />
îles du sud du Golfe, le mont Baker, le tout au<br />
milieu de chênes de Garry dans un pré au sol<br />
mince et aux affleurements rocheux. »<br />
Créer un réseau résilient<br />
En 2015, quand le rapport du CDC CA sur<br />
les paysages de gypse de Nouvelle-Écosse<br />
a été publié, <strong>CNC</strong> a agi rapidement. De<br />
2016 à 2020, l’organisme a en effet acquis<br />
19 parcelles dans le centre de l’île du<br />
Cap-Breton. Les efforts qui y sont encore déployés<br />
visent à augmenter la représentativité<br />
des caractéristiques écologiques de la<br />
province dans la réserve naturelle Cains<br />
Mountain de <strong>CNC</strong>, qui comprend les terres<br />
que M. Blaney a parcourues en 2014. Ses<br />
500 hectares en font le plus vaste paysage<br />
de gypse protégé de la province. « Il est rare<br />
de documenter un très bon site, et de le voir<br />
entièrement protégé quelques années plus<br />
tard », se réjouit-il.<br />
Le personnel de <strong>CNC</strong>, intéressé par<br />
d’autres sites de la région de Cains Mountain,<br />
est également à la recherche d’écosystèmes<br />
et de caractéristiques écologiques qui<br />
contribuent à accroître la résilience du<br />
paysage à l’échelle régionale. Prenons<br />
les exemples de Port Joli, Port L’Hebert<br />
et Port Mouton, dans le sud-ouest de la<br />
province, qui abritent des populations<br />
de lichens d’importance mondiale, soit la<br />
dégélie plombée et l’érioderme boréal.<br />
Sur l’île Brier, la tourbière de Big Meadow<br />
est l’un des deux seuls sites au pays où<br />
pousse la dryade à feuilles entières.<br />
« Ces petites zones où l’on trouve des<br />
habitats naturels et des espèces présentes<br />
nulle part ailleurs risquent de passer<br />
inaperçues si l’on se concentre uniquement<br />
sur les grands projets, conclut Jaimee<br />
Morozoff. Il faut s’assurer que notre travail<br />
soit représentatif de ce qui est le plus<br />
important, et de ce qui n’est pas déjà protégé<br />
par d’autres. »1<br />
CARE<br />
Vous ne trouverez sûrement pas<br />
étonnant de lire que Conservation<br />
de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) veille<br />
chaque jour sur la nature. Or, pour<br />
que cette nature prospère, les aires<br />
protégées et de conservation doivent<br />
être Connectées entre elles, fournir<br />
des habitats Adéquats, être Représentatives<br />
et gérées de manière<br />
Efficace. Ces principes, réunis sous<br />
l’acronyme CARE, constituent un<br />
cadre internationalement reconnu<br />
dont l’objectif est de soutenir la<br />
création de paysages résilients. Si<br />
les milieux que nous conservons<br />
répondent à ces critères, les paysages<br />
qu’ils composent pourront résister<br />
aux impacts des changements<br />
climatiques et de la perte de biodiversité.<br />
Et nous avons confiance que<br />
cette résilience des paysages nous<br />
permettra de créer un monde<br />
prospère, avec l’aide de la nature.<br />
Concrètement, qu’est-ce que la<br />
résilience? Cela signifie qu’une aire<br />
protégée reflète l’ensemble de la<br />
biodiversité d’une région donnée. Et<br />
pour que cette biodiversité survive à<br />
long terme, les processus écologiques<br />
et évolutifs qui lui permettent<br />
de prospérer doivent être<br />
maintenus. Un système d’aires<br />
protégées dit Représentatif protège<br />
donc la totalité de la biodiversité<br />
d’une région : de la population<br />
d’une seule espèce à des groupes<br />
d’espèces, en passant par des types<br />
d’écosystèmes, comme une prairie<br />
à herbes hautes ou une tourbière<br />
nordique. Ainsi, toutes les caractéristiques<br />
de la biodiversité sont<br />
protégées, et ce, à long terme.<br />
conservationdelanature.ca
PROFIL<br />
D’ESPÈCE<br />
Le castor<br />
L’ingénieur aquatique et gestionnaire de milieux humides par excellence au Canada<br />
ROBERT MCCAW.<br />
12 PRINTEMPS <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
APPARENCE<br />
Le castor est un mammifère<br />
semi-aquatique à la queue en forme<br />
de pagaie et aux incisives<br />
proéminentes. Une épaisse fourrure<br />
noire et brune recouvre son corps<br />
robuste et trapu. Pour imperméabiliser<br />
son pelage, il y applique avec une<br />
griffe double une huile que<br />
sécrète une glande située<br />
près de sa queue.<br />
SEAN FEAGAN/<strong>CNC</strong>.<br />
HABITATS<br />
Au Canada, on trouve le castor dans<br />
les ruisseaux, les rivières, les marais et les<br />
lacs. Véritable ingénieur d’écosystèmes, il<br />
utilise ses incisives acérées pour abattre les arbres<br />
et couper leurs branches pour construire des huttes<br />
et des barrages avec de la boue et des pierres. Les<br />
milieux humides et les étangs qu’il crée profitent à<br />
une grande variété d’espèces, notamment à des<br />
poissons, des amphibiens, des oiseaux et des<br />
insectes. Les barrages de castors ralentissent<br />
le débit d’une rivière lors d’une tempête<br />
et réduisent ainsi les risques<br />
d’inondation.<br />
MENACES<br />
Les menaces qui pèsent sur<br />
cette espèce sont la perte<br />
d’habitat et l‘activité humaine. La<br />
pollution et la contamination de l’eau<br />
peuvent aussi avoir un impact sur son<br />
bien-être, car le castor est sensible<br />
aux changements affectant la<br />
qualité de l’eau.<br />
COEXISTENCE<br />
Le castor peut être un voisin peu<br />
commode. En effet, les étangs qu’il crée<br />
nuisent parfois aux infrastructures situées à<br />
proximité. Heureusement, la coexistence est<br />
possible. Grâce à des outils comme des systèmes<br />
de contrôle du niveau de l’eau, la profondeur de<br />
l’eau d’un étang peut être contrôlée. Le castor<br />
peut ainsi circuler librement à l’intérieur et à<br />
l’extérieur d’un milieu humide, tout en<br />
évitant l’inondation des routes ou<br />
sentiers avoisinants.<br />
• DISTRIBUTION<br />
AU CANADA<br />
Que fait<br />
<strong>CNC</strong> pour<br />
protéger<br />
l’habitat<br />
de cette<br />
espèce?<br />
Collines Beaver,<br />
Alb.<br />
À travers le pays,<br />
<strong>CNC</strong> assure la<br />
conservation de<br />
nombreux sites<br />
représentant un<br />
habitat adéquat pour le<br />
castor. La protection de milieux<br />
naturels où l’espèce est présente peut<br />
contribuer à créer des paysages<br />
résilients qui lui profiteront.<br />
Dans les aires de conservation<br />
comme les collines Beaver, en<br />
Alberta, le castor joue un rôle vital<br />
dans la formation d’habitats<br />
riverains et de milieux humides.<br />
En 2022, à la réserve naturelle<br />
Alfred-Kelly, au Québec, <strong>CNC</strong> a<br />
installé des systèmes de contrôle<br />
du niveau de l’eau pour faciliter la<br />
coexistence entre les infrastructures<br />
humaines et les travaux des castors.<br />
Ce type d’installation profite à<br />
d’autres espèces, comme la tortue<br />
mouchetée. En Outaouais, au<br />
Québec, 90 % de l’habitat de cette<br />
tortue est d’ailleurs composé<br />
de milieux humides créés par les<br />
barrages de castors.1<br />
conservationdelanature.ca<br />
PRINTEMPS <strong>2024</strong> 13
<strong>CNC</strong><br />
À L’ŒUVRE<br />
1<br />
À la rescousse d’un habitat côtier vital<br />
TERRITOIRE DE LA PREMIÈRE NATION KWIAKAH, C.-B.<br />
1<br />
2<br />
MERCI!<br />
Votre appui a permis la réalisation de<br />
ces projets. Pour en savoir plus, visitez<br />
conservationdelanature.ca/nous-trouver<br />
3<br />
À<br />
l’automne 2023, Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) a été invité<br />
par la Première Nation Kwiakah à conserver sur son territoire une<br />
parcelle de terre privée fortement menacée par le développement. Ce<br />
site boisé riverain se trouve à l’entrée du bras Phillips, au centre-sud du littoral de<br />
la Colombie-Britannique, à environ une heure de bateau de la rivière Campbell.<br />
Depuis des millénaires, les peuples autochtones veillent sur ce paysage côtier, et la<br />
vision rigoureuse de la nation Kwiakah en matière d’intendance a permis d’établir<br />
des normes élevées quant à l’entretien à long terme des terres sur l’ensemble de<br />
son territoire.<br />
Seul bémol : ce projet de conservation, d’une superficie de 75 hectares, était<br />
sur le marché et convoité par un autre acheteur privé. Donc, après avoir confirmé<br />
la valeur de conservation du projet et obtenu le financement nécessaire de la<br />
part de partenaires, <strong>CNC</strong> a agi rapidement et a pu en assurer la conservation.<br />
Cette aire de conservation comprend 2 kilomètres de littoral et de nombreux<br />
ruisseaux et cours d’eau, dont profitent le grizzly, le saumon et d’autres espèces<br />
côtières. Autrefois exploitée, sa forêt de douglas de Menzies, de thuyas géants et<br />
de pruches de l’Ouest est maintenant en voie de rétablissement. En conservant<br />
ces terres aujourd’hui, elles pourront se régénérer naturellement au fil du temps<br />
pour créer un écosystème forestier ancien et florissant.<br />
Outre sa valeur écologique, ce site nouvellement conservé représente une précieuse<br />
contribution à la vision de la nation Kwiakah en matière d’intendance de<br />
son territoire. L’établissement de relations et d’un rapport de confiance entre <strong>CNC</strong><br />
et la nation Kwiakah a été l’un des autres résultats de ce projet fructueux. En effet,<br />
cela a permis à l’organisation de continuer à soutenir l’atteinte des objectifs de<br />
conservation de la Nation grâce à d’autres invitations à collaborer et à s’engager.<br />
Pour en savoir plus sur les objectifs de conservation de la nation, visitez<br />
kwiakahconservation.com (en anglais).<br />
MICK THOMPSON/FLICKR.<br />
Grizzly et saumon.<br />
14 WINTER PRINTEMPS 2023<strong>2024</strong> conservationdelanature.ca<br />
natureconservancy.ca
Bécasseaux sanderling, Ranch Mackie, Sask.<br />
Médaillon : Tortue mouchetée.<br />
Une passion<br />
pour la nature<br />
« Ma tante, Helen Salkeld, était dans<br />
tous les sens du terme une véritable<br />
pionnière. Née en 1926, elle<br />
a grandi sur une petite ferme près<br />
de Lucknow, en Ontario, et a été la<br />
première de sa famille à aller à l’université,<br />
où elle a obtenu un diplôme<br />
en biologie.<br />
Elle a ensuite fait carrière comme<br />
entomologiste à la Ferme expérimentale<br />
centrale d’Agriculture et<br />
Agroalimentaire Canada à Ottawa.<br />
Naturaliste dans l’âme, elle a passé<br />
sa vie à prendre soin du monde naturel<br />
qui l’entourait.<br />
JASON BANTLE. MÉDAILLON : RYAN M. BOLTON. ROSEMARY GILLIAT EATON.<br />
2<br />
Conservation d'une<br />
halte migratoire clé<br />
RANCH MACKIE, SASK.<br />
L’agrandissement d’une halte migratoire d’importance<br />
mondiale située sur la berge est du lac<br />
Chaplin marque un jalon important dans la<br />
conservation des milieux de prairies au Canada.<br />
Le projet du ranch Mackie témoigne en effet<br />
d’un profond engagement envers la sauvegarde<br />
des milieux de prairies dans le cadre du Plan<br />
d’action pour la conservation des Prairies de<br />
<strong>CNC</strong>. Totalisant désormais 1 286 hectares, ses<br />
prairies et milieux humides offrent un habitat<br />
à une diversité d’oiseaux de rivage, y compris<br />
le bécasseau sanderling, le bécasseau semipalmé<br />
et le pluvier siffleur.<br />
De plus, ses prairies filtrent l’eau, contribuent<br />
à atténuer les inondations et les sécheresses<br />
et stockent des milliards de tonnes de carbone.<br />
Elles ont toujours nourri les collectivités et<br />
demeurent une pierre angulaire de l’économie<br />
de la Saskatchewan. Ce site conservé par <strong>CNC</strong><br />
a été nommé en hommage à la famille Mackie,<br />
qui en a assuré l’intendance sur plusieurs<br />
générations. Le ranch servira encore au pâturage<br />
du bétail, afin de maintenir les prairies en santé<br />
et soutenir l’économie locale.<br />
3<br />
Partenaires pour la<br />
conservation<br />
SUD-OUEST DE LA NOUVELLE-ÉCOSSE<br />
Avec ses milieux forestiers, ses landes, ses<br />
milieux humides et ses plages sablonneuses,<br />
Kespukwitk représente une zone écologique<br />
diversifiée où vivent près de 70 espèces en péril.<br />
En langue mi’kmaq, « Kespukwitk » signifie<br />
« où la terre prend fin » ou « où le ruissellement<br />
se termine ».<br />
<strong>CNC</strong>, les Premières Nations Mi’kmaq,<br />
des organisations non gouvernementales,<br />
établissements universitaires et ministères<br />
fédéraux et provinciaux travaillent ensemble<br />
dans la région sous le nom de la Kespukwitk<br />
Conservation Collaborative. Ces partenaires<br />
partagent des données probantes, des<br />
ressources et leur expertise, et discutent des<br />
efforts collaboratifs à déployer pour assurer<br />
l’avenir d’écosystèmes entiers au sein de cette<br />
aire naturelle.<br />
Pour en savoir plus, visitez<br />
conservationdelanature.ca/kcc.<br />
En 1954, en compagnie de trois de<br />
ses amies, elle a sauté dans une voiture<br />
et pris la route depuis l’Ontario<br />
pour se rendre en Colombie-Britannique.<br />
Cette extraordinaire aventure<br />
à travers le pays leur a permis de<br />
pique-niquer dans des champs, dormir<br />
à la belle étoile et de faire trempette<br />
dans des lacs et des rivières.<br />
Tante Helen était passionnée de<br />
nature et avait à cœur la conservation.<br />
En 2002, elle a fait don à<br />
Conservation de la nature Canada<br />
de 20 hectares de terres dans l’est<br />
de l’Ontario. Des activités Bénévoles<br />
pour la conservation y ont encore<br />
lieu aujourd’hui!<br />
Précédée par Isobel, sa compagne<br />
de longue date, ma tante nous a<br />
malheureusement quittés en 2020.<br />
En tant que gestionnaire de sa<br />
succession, j’ai pu voir perdurer sa<br />
passion pour la nature, grâce au<br />
don destiné à <strong>CNC</strong> inclus dans son<br />
testament. Je tire une grande fierté<br />
de voir son héritage continuer à<br />
profiter aux espèces végétales et<br />
animales qui lui ont procuré tant<br />
de joie au fil des ans. »<br />
conservationdelanature.ca<br />
~Lorna
UNE FORCE POUR<br />
LA NATURE<br />
Terrain<br />
d’entente<br />
Margaret Rosling utilise son expérience en droit autochtone pour<br />
concilier intérêts autochtones et résultats en conservation.<br />
CHELSEA PETERS.<br />
16 PRINTEMPS <strong>2024</strong><br />
conservationdelanature.ca
argaret Rosling a toujours<br />
cru au pouvoir du hasard.<br />
LUCAS JMIEFF.<br />
Avoir été présentée au légendaire avocat Tom<br />
Berger, quelques années après le début de sa<br />
carrière, a été selon elle un heureux concours<br />
de circonstances. M. Berger, reconnu pour<br />
avoir défendu des revendications territoriales<br />
autochtones novatrices, lui a permis de se familiariser avec le domaine<br />
du droit autochtone et des droits de la personne, dans lequel elle a passé<br />
la majeure partie de sa carrière.<br />
« Mon premier jour de travail avec Tom est vraiment l’un des tournants<br />
de ma vie, rappelle Mme Rosling. Nous avons travaillé ensemble sur de<br />
nombreux litiges autochtones de grande importance, et j’ai appris énormément<br />
de choses sur les peuples autochtones et leurs droits. Cela m’a<br />
profondément transformée. »<br />
Quelques semaines après son entrée en fonction, c’est aussi un hasard<br />
qui a fait qu’elle ne se soit pas apporté à dîner avant sa première visite<br />
à la Première Nation de Blueberry River, dans le nord-est de la Colombie-Britannique.<br />
C’est ainsi qu’elle s’est retrouvée sous une bâche, à partager<br />
de la viande d’orignal bouillie avec une généreuse Aînée.<br />
Cette expérience n’était que le début de plus de 30 années passées<br />
à conseiller et à appuyer des gouvernements autochtones. Ce travail<br />
conduira Mme Rosling loin dans le nord de la Colombie-Britannique,<br />
dans les Prairies, au Yukon et au-delà, et définira sa vie en tant qu’ardente<br />
défenseuse des peuples dont le lien avec la terre est primordial.<br />
« La terre est vraiment au cœur des droits et des titres autochtones,<br />
soit la protection de l’environnement et le maintien de la capacité de ces<br />
peuples de continuer à vivre, travailler et exister sur la terre ainsi qu’à y<br />
pratiquer leur culture. »<br />
Le travail de Mme Rosling en matière de contentieux a culminé avec<br />
l’affaire du bassin hydrographique de la rivière Peel, dans laquelle la<br />
Cour suprême du Canada a annulé le plan arbitraire d’aménagement du<br />
territoire prévu par le gouvernement du Yukon pour la région du bassin<br />
hydrographique de la rivière Peel. Au cours de la dernière décennie, le<br />
travail de Margaret Rosling a évolué vers la pratique de la négociation,<br />
davantage axée sur la collaboration et les solutions, ce qui convient<br />
bien à sa philosophie positive et tournée vers l’avenir. En travaillant pour<br />
le compte de gouvernements autochtones dans le cadre de négociations<br />
importantes, dont de nombreuses portant sur le respect des droits<br />
territoriaux autochtones, elle a pu constater par elle-même l’importance<br />
de travailler main dans la main pour trouver un terrain d’entente.<br />
Il existe à l’heure actuelle de belles perspectives pour que la conservation<br />
et les aspirations autochtones à la réconciliation se rencontrent.<br />
« J’ai eu énormément de chance de participer à de nombreuses<br />
négociations qui ont permis de prendre en compte les intérêts, sur<br />
les terres de la Couronne, de nations autochtones, d’entreprises de<br />
développement des ressources, de gouvernements et d’organismes<br />
environnementaux », explique-t-elle.<br />
C’est cette expertise et cette volonté de trouver des solutions qui l’ont<br />
amenée à établir un lien avec Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>),<br />
après avoir été présentée par une connaissance commune. Autre clin d’œil<br />
aux heureux hasards, ce lien s’est créé à un moment où elle se concentrait<br />
sur la défense des intérêts autochtones et la conservation des terres par la<br />
collaboration et la négociation.<br />
Mme Rosling travaille avec <strong>CNC</strong> en tant qu’experte-conseil depuis 2021.<br />
Elle aide l’organisme dans sa quête de résultats plus ambitieux et créatifs,<br />
en repensant, par exemple, comment il est possible de détenir et de veiller<br />
sur des terres dans un contexte de collaboration. Nancy Newhouse,<br />
Fleurs sauvages, Qat’muk, C.-B.<br />
LE DROIT AUTOCHTONE<br />
Ensemble de lois, élaborées par les tribunaux<br />
et les législatures, qui traitent principalement<br />
des droits constitutionnels uniques des peuples<br />
autochtones, tels que définis à l’article 35 de la<br />
Constitution, et par la relation entre les peuples<br />
autochtones et la Couronne.<br />
vice-présidente de <strong>CNC</strong> pour la Colombie-Britannique,<br />
mentionne que Margaret<br />
Rosling a fourni à l’organisme les connaissances<br />
et la confiance nécessaires pour<br />
mener des projets plus complexes dans la<br />
province, tout en offrant des conseils pour<br />
naviguer dans les méandres du droit et de la<br />
politique autochtones. Ses compétences ont<br />
permis d’engager des pourparlers avec des<br />
groupes qui, à priori, semblent représenter<br />
des intérêts contradictoires : Premières Nations,<br />
sociétés d’exploitation des ressources,<br />
gouvernements et groupes de défense<br />
de l’environnement.<br />
« Ce que j’aime de cette démarche,<br />
c’est qu’elle est collaborative. Elle réunit<br />
les gens autour d’un objectif commun,<br />
insiste-t-elle. L’occasion est des plus propices<br />
actuellement pour réconcilier conservation<br />
et aspirations autochtones. »<br />
Margaret Rosling est enthousiasmée par<br />
ce que l’avenir réserve à la fois aux droits<br />
fonciers autochtones et à la conservation, et<br />
elle est reconnaissante de pouvoir contribuer<br />
à ces changements par son travail. Au cours<br />
des 30 dernières années, elle a pu constater<br />
une évolution, « attendue depuis trop longtemps<br />
», dans la manière dont les droits<br />
des Autochtones et leurs voix sont traités<br />
au pays. Il reste toujours du travail à faire,<br />
mais, selon elle, les choses vont continuer<br />
sur cette lancée.<br />
« Auparavant, nous passions beaucoup<br />
de temps à essayer d’attirer l’attention des<br />
gouvernements, conclut-elle. Aujourd’hui,<br />
les portes s’ouvrent de plus en plus. Le vent<br />
n’a pas fini de tourner. Je pense que le<br />
travail que nous accomplissons ensemble<br />
sera transformateur. »1<br />
conservationdelanature.ca<br />
PRINTEMPS <strong>2024</strong> 17
GRANDEUR<br />
NATURE<br />
L’abc des milieux de prairies<br />
Par Shelly Nicolle-Phillips, crocheteuse de tapis<br />
Les milieux naturels variés de la Saskatchewan, comme ses paysages<br />
vallonnés et ses prairies indigènes, ont toujours marqué<br />
mon imaginaire. Originaire des Maritimes, j’ai traversé le pays<br />
pour m’y établir il y a 22 ans. Encore aujourd’hui, il me reste beaucoup<br />
de choses à voir et à explorer dans la province.<br />
C’est la beauté et le charme des milieux de<br />
Prairies qui ont inspiré mon projet artistique<br />
d’alphabet : 26 lettres crochetées illustrant les<br />
multiples facettes de cet écosystème.<br />
Je n’ai commencé à crocheter des tapis qu’en<br />
2015. Une longue tradition en la matière perdure<br />
dans les Maritimes. Ma défunte grand-mère<br />
maîtrisait d’ailleurs parfaitement cet art.<br />
Mon projet a commencé avec la lettre A pour la<br />
three-flower avens (benoîte à trois fleurs), trouvée<br />
dans l’aire de conservation des prairies patrimoniales<br />
Old Man on His Back (OMB) de <strong>CNC</strong>, un site<br />
emblématique des Prairies que j’ai eu la chance de<br />
visiter récemment.<br />
En arrivant sur le site par une belle journée<br />
d’été avec ma famille, j’ai tout de suite été captivée<br />
par ses vastes prairies ouvertes, qui ne ressemblaient<br />
à rien de ce que j’avais pu voir sur la côte Est. L’environnement<br />
physique et sonore était aux antipodes de l’ambiance de la ville. Au<br />
loin, des merlebleus azurés perchés aux arbres ressemblaient à de<br />
petites boules de Noël bleues scintillantes. De temps en temps, on<br />
pouvait entendre des coyotes japper et hurler. Nous avons même eu<br />
la chance d’apercevoir le troupeau de bisons qui vit en permanence<br />
à OMB! J’ai aussi vu une benoîte à trois fleurs, qui est si minuscule et<br />
délicate. C’est à cet instant que j’ai appris à apprécier et à prendre<br />
conscience de l’activité qui se déroule dans ce<br />
micro-environnement, au sein de ce vaste paysage.<br />
De retour chez moi, inspirée par mon expérience<br />
et les conseils de mes proches sur les espèces des<br />
Prairies, et mieux instruite grâce à des guides<br />
d’identification afin de reconnaître les particularités<br />
de ces espèces, j’ai mis mon crochet à tapis à<br />
l’œuvre. Peu à peu, la montagne de laine qui<br />
couvrait ma table s’est faufilée à travers le canevas<br />
pour devenir mon alphabet. De ce chaos organisé<br />
est née une magnifique œuvre d’art.<br />
En créant et en perfectionnant mon art avec ce<br />
projet, je me suis intéressée de plus près à la vie<br />
dans les Prairies et à ses interconnexions. Je pense<br />
notamment au bison des prairies, une espèce clé<br />
qui crée un habitat dont profitent d’autres espèces<br />
et qui dépend de la santé des milieux de prairies<br />
pour prospérer. À travers mon art, j’espère mettre<br />
en valeur d’autres paysages du pays et la biodiversité d’habitats<br />
uniques, pour encourager leur appréciation et leur conservation.1<br />
Pour voir d’autres œuvres de Shelly Nicolle-Phillips : hookedontheprairies.ca<br />
SHELLY NICOLLE-PHILLIPS.<br />
18 PRINTEMPS <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
La vie sur Terre a changé. Une crise<br />
climatique et le déclin des espèces menacent<br />
aujourd’hui notre mode de vie, et notre<br />
avenir. Mais il y a de l’espoir, puisqu'une<br />
solution se trouve sous nos yeux. Une<br />
solution d’une puissance et d’une ampleur<br />
telle, qu’elle peut remédier à ces menaces.<br />
La nature a toujours été la solution. C’est<br />
notre atout le plus précieux. Elle est source<br />
de vie… Résilience… Guérison et inspiration.<br />
Les vagues qui déferlent et les montagnes<br />
éternelles qui s’élèvent vers le ciel nous<br />
ramènent à la source même de notre<br />
existence. Mais ça n’a jamais été seulement à<br />
propos d’un arbre, d’un ruisseau ou d’une<br />
personne. Nous savons que c’est en unissant<br />
nos forces que nous pouvons créer un<br />
changement réel et tangible.<br />
Conservation de la nature Canada, nous<br />
agissons. Nous collaborons. Nous sommes<br />
architectes du changement. Ensemble, nous<br />
protégeons la nature et son incroyable<br />
capacité à prendre soin de nous et de nos<br />
communautés. Alors, allons-y, unissons-nous<br />
pour conserver, restaurer et veiller sur la<br />
nature. Relevons ce défi. Soutenons tout le<br />
pouvoir de la nature. Pour que la vie sur<br />
Terre puisse non seulement perdurer,<br />
mais prospérer.<br />
aveclanaturecestpossible.ca<br />
conservationdelanature.ca<br />
PRINTEMPS <strong>2024</strong> 19
VOTRE<br />
IMPACT<br />
Soutenir les espèces menacées<br />
Grâce à votre appui, Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) et ses partenaires<br />
ont protégé un corridor naturel dans les municipalités de Ham-Sud et<br />
Ham-Nord, en Estrie (QC). Celui-ci favorise la survie et la résilience d'animaux et<br />
de végétaux de la région, y compris celles d’espèces menacées comme la polémoine<br />
de Van Brunt (une plante). De tels corridors sont vitaux pour faire face<br />
aux changements climatiques, puisqu'ils permettent aux espèces de se déplacer,<br />
se disperser, se reproduire et se nourrir. Les milieux humides et les forêts de<br />
cette région contribuent à y purifier l’eau et l’air, en plus d’êtres d’importants<br />
puits de carbone. D’une superficie de près de 520 hectares, le site conservé fait<br />
partie d’un projet ECOTIERRA auquel participe <strong>CNC</strong> et qui se concentre sur la<br />
valorisation et l’échange de crédits de carbone de haute qualité.<br />
Pour en savoir plus : conservationdelanature.ca/corridor-naturel-ham-sud.<br />
Doubler la<br />
superficie<br />
de la réserve<br />
naturelle<br />
Salmonier<br />
Grâce à vous, la réserve naturelle<br />
Salmonier, sur l'île de Terre-Neuve<br />
(T.-N.-L.), a doublé de taille avec<br />
l’ajout d'un territoire intact composé<br />
de forêt boréale, de landes et de<br />
milieux humides. Ses forêts brumeuses<br />
uniques sont un environnement<br />
humide où prospèrent des<br />
lichens arboricoles rares. Le dense<br />
couvert forestier y abrite plusieurs<br />
oiseaux en péril, comme le bec-croisé<br />
des sapins et le moucherolle à<br />
côtés olive. D’une superficie totalisant<br />
désormais 410 hectares, ce<br />
territoire protège une zone tampon<br />
dont bénéficie la réserve faunique<br />
d’Avalon, en plus de fournir un habitat<br />
vital au caribou des bois, au renard<br />
roux, à des chauves-souris en<br />
hibernation, au castor et au lynx du<br />
Canada. Financé par le Programme<br />
de conservation du patrimoine<br />
naturel du gouvernement du<br />
Canada et par un grand nombre de<br />
donatrices et donateurs, ce projet<br />
témoigne de l’engagement de <strong>CNC</strong><br />
à accélérer la conservation à grande<br />
échelle, et ce, à travers le pays.<br />
LA HALTE STUDIO; DENNIS MINTY.<br />
Merci d’en faire autant pour la nature au Canada!