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Carnet du Cercle LAB #26 – Fraude à l'assurance et nouvelles menaces

Avec une accélération de la digitalisation, la simplification des parcours client mais également un contexte général vecteur de risque, de nouvelles menaces en matière de fraude se développent rapidement et pèsent sur le secteur de l’assurance. Ce carnet s’inscrit dans le cadre des assises de la lutte contre la fraude à l’assurance 2023 organisées conjointement par Talan Consulting et le Cercle LAB. Elles sont l’occasion d’en dresser le panorama et d’envisager quelles contre-mesures mettre en œuvre afin de réduire les risques.

Avec une accélération de la digitalisation, la simplification des parcours client mais également un contexte général vecteur de risque, de nouvelles menaces en matière de fraude se développent rapidement et pèsent sur le secteur de l’assurance. Ce carnet s’inscrit dans le cadre des assises de la lutte contre la fraude à l’assurance 2023 organisées conjointement par Talan Consulting et le Cercle LAB. Elles sont l’occasion d’en dresser le panorama et d’envisager quelles contre-mesures mettre en œuvre afin de réduire les risques.

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AVRIL<br />

2023


P.4<br />

P.6<br />

P.8<br />

P.14<br />

P.18<br />

P.25<br />

P.26<br />

EDITO<br />

Intro<strong>du</strong>ction<br />

I. Les <strong>nouvelles</strong> technologies, le numérique, <strong>et</strong> l’essor des fraudeurs<br />

II. La lutte contre la fraude, les <strong>nouvelles</strong> technologies, <strong>et</strong> le détective privé<br />

III. La fraude a la santé<br />

Conclusion<br />

Contacts


EDITO<br />

EDITO<br />

EDITO<br />

LA CROISÉE DES CHEMINS<br />

4<br />

Fin 2019, un rapport d’information parlementaire sur l’évaluation de la lutte contre la<br />

délinquance financière en France soulignait la forte croissance des faits déclarés ainsi<br />

que « des pratiques frau<strong>du</strong>leuses de plus en plus sophistiquées <strong>et</strong> reposant largement<br />

sur le numérique ». Depuis, la crise sanitaire est venue accélérer la dématérialisation<br />

de la relation client offrant ainsi encore plus d’opportunités aux fraudeurs. Dans ce<br />

contexte, la détection des risques de fraude <strong>à</strong> l’aide de l’IA apporte une réponse<br />

pertinente aux contraintes in<strong>du</strong>ites par la dématérialisation d’importants flux de<br />

données comme dans le domaine de la santé. Par ailleurs, elle a atteint un niveau<br />

de maturité perm<strong>et</strong>tant d’envisager un passage <strong>à</strong> l’échelle. Cependant, force est de<br />

constater que l’in<strong>du</strong>strialisation ren<strong>du</strong>e possible par les <strong>nouvelles</strong> technologies reste<br />

délicate <strong>à</strong> m<strong>et</strong>tre en œuvre <strong>et</strong> implique de repenser les organisations, les processus,<br />

les compétences <strong>et</strong> plus généralement l’approche de la lutte contre la fraude.<br />

Si le numérique constitue une menace grandissante pour les assureurs désormais<br />

confrontés <strong>à</strong> de nouveaux vecteurs <strong>et</strong> modes opératoires de fraude, il est également<br />

porteur d’opportunités. Les assureurs sont arrivés <strong>à</strong> la croisée des chemins. Ils<br />

peuvent continuer <strong>à</strong> subir <strong>et</strong> rester loin derrière<br />

5<br />

FRÉDÉRIC NGUYEN KIM<br />

Senior advisor chez Talan Consulting


INTRODUCTION<br />

INTRODUCTION<br />

INTRODUCTION<br />

Le numérique, un bien ou un mal pour l’assurance ? Un facteur de transformation de<br />

l’in<strong>du</strong>strie, ou le mal <strong>du</strong> siècle ? D’un côté le risque cyber est devenu en dix ans un<br />

péril majeur pour les entreprises, <strong>et</strong> il a fait son entrée dans le code des assurances<br />

en décembre 2022.<br />

« La cyber-menace est désormais perçue comme le risque dominant par les<br />

entreprises de sept des huit pays dans lesquels notre étude a été menée », soulignait<br />

Hiscox dans son rapport 2022 sur la gestion des cyber-risques publié en novembre dernier.<br />

C<strong>et</strong>te fraude a fortement évolué ces dernières années : <strong>du</strong> côté des voleurs, p<strong>et</strong>its<br />

<strong>et</strong> grands fraudeurs, la numérisation des échanges facilite certaines triches. Les<br />

réseaux sociaux perm<strong>et</strong>tent de diffuser les « combines » <strong>et</strong> plus aucune entreprise ni<br />

aucun particulier n’échappe au risque cyber. Du côté des gendarmes, les assureurs, la<br />

donne change considérablement avec l’émergence de nouveaux outils perm<strong>et</strong>tant de<br />

détecter plus facilement des documents falsifiés <strong>et</strong> des comportement atypiques, ce<br />

qui amène <strong>à</strong> identifier davantage de dossiers suspicieux sur lesquels enquêter.<br />

« Les outils ne sont que des outils. On a pu croire que les <strong>nouvelles</strong> technologies<br />

Le numérique, c’est aussi un risque pour toute l’assurance, en ce qu’il perm<strong>et</strong> <strong>à</strong> la<br />

fraude d’évoluer. La fraude identifiée en 2021 reportée <strong>à</strong> l’Association de lutte contre<br />

la fraude en assurance (Alfa) par ses membres s’est établie <strong>à</strong> 521 millions d’euros,<br />

dont 384 millions en IARD. « Les données transmises en assurances de personnes<br />

allaient tout changer en matière de lutte contre la fraude, alors qu’elles sont<br />

des briques additionnelles dans un dispositif plus global. Dans certains cas, les<br />

<strong>nouvelles</strong> technologies <strong>et</strong> les réseaux sociaux peuvent a contrario contribuer <strong>à</strong><br />

diffuser certaines techniques de fraude ! », résume Maxence Bizien, directeur de l’ALFA.<br />

6<br />

ne sont pas suffisamment significatives pour évaluer les enjeux », souligne<br />

l’association. Pour l’IARD, les compagnies se mobilisent <strong>et</strong> se concertent de longue<br />

date pour traquer les fraudeurs puisque l’ALFA est née en 1989 de la collaboration<br />

dans ce domaine <strong>du</strong> GEMA <strong>et</strong> de la FFSA. En assurance de personnes, le réveil a été<br />

plus lent, la fraude a longtemps été un risque négligé, <strong>et</strong> le mouvement d’adhésion<br />

des mutuelles <strong>à</strong> l’Alfa est encore en cours, alors qu’une convention avec la Fédération<br />

nationale de la Mutualité Française (FNMF) dont les adhérents représentent encore<br />

la moitié <strong>du</strong> marché de l’assurance santé, n’a été signée qu’en 2019. Un acteur de<br />

poids comme la MGEN n’a rejoint l’ALFA qu’en 2022.<br />

7


LES NOUVELLES TECHNOLOGIES<br />

I. LES NOUVELLES TECHNOLOGIES,<br />

LE NUMÉRIQUE, ET L’ESSOR DES FRAUDEURS<br />

1. DES ATTAQUES DE PLUS EN PLUS FRÉQUENTES<br />

En une dizaine d’années, le risque cyber est passé d’un spectre brandi par les risk<br />

managers des grandes entreprises auprès de leur direction générale afin de négocier<br />

un budg<strong>et</strong> pour s’assurer, au cauchemar le mieux partagé par les entreprises, mais<br />

aussi les structures <strong>et</strong> administrations publiques, notamment les collectivités<br />

territoriales <strong>et</strong> les hôpitaux, <strong>et</strong> même les particuliers. Dans une entreprise victime<br />

d’une cyberattaque, quasiment tout le monde peut se r<strong>et</strong>rouver au chômage<br />

technique <strong>du</strong> jour au lendemain, <strong>et</strong> les dommages sont importants puisqu’il existe<br />

le plus souvent une indemnisation de la perte d’exploitation lié <strong>à</strong> l’impact de<br />

l’attaque <strong>et</strong> <strong>à</strong> la mise <strong>à</strong> l’arrêt. « Le plus important, c’est l’accompagnement apporté<br />

<strong>à</strong> l’assurance <strong>et</strong> <strong>à</strong> l’accompagnement après l’attaque. L’objectif est d’assurer la<br />

résilience de l’organisation », explique Frédéric Nguyen Kim, senior advisor chez<br />

TalanConsulting.<br />

Le risque cyber, c’est un nouveau terrain de jeu… « Des start-up apportent des<br />

conseils, des tests d’intrusion… d’autres proposent des abonnements <strong>à</strong> des<br />

tentatives de phishing. Cela perm<strong>et</strong> effectivement la sensibilisation au long<br />

cours, qu’il faut entr<strong>et</strong>enir, car il ne faut pas que la vigilance r<strong>et</strong>ombe, mais le plus<br />

important c’est sans doute l’accompagnement <strong>à</strong> la réparation », estime Frédéric<br />

Nguyen Kim. Lorsque le risque survient, il faut en eff<strong>et</strong> si rem<strong>et</strong>tre l’activité en<br />

marche. « De toute manière le cyber criminel parviendra <strong>à</strong> ses fins un jour ou l’autre<br />

<strong>à</strong> ses fins <strong>et</strong> le risque se réalisera. Il faut une solution <strong>à</strong> déployer quand survient<br />

<strong>à</strong> l’entreprise. Dans le domaine de l’assurance cyber, la chaîne de valeur est très<br />

l’attaque », poursuit-il.<br />

8 éten<strong>du</strong>e, car<br />

elle va de la prévention <strong>du</strong> risque<br />

9<br />

LES NOUVELLES TECHNOLOGIES


LES NOUVELLES TECHNOLOGIES<br />

Le risque cyber évolue très vite <strong>et</strong> se transforme, avec la sophistication croissante,<br />

avec les avancées technologiques, <strong>et</strong> la montée en compétence des cybercriminels.<br />

Le phishing <strong>et</strong> la compromission de comptes, où les cybercriminels utilisent des<br />

techniques pour tromper les utilisateurs <strong>et</strong> leur faire divulguer des informations<br />

comme les identifiants associés aux mots de passe sont devenus monnaie courante.<br />

Que celui qui n’a pas eu un message d’alerte sur une campagne de phishing en<br />

se connectant <strong>à</strong> son espace bancaire, mais aussi <strong>à</strong> un site<br />

d’une administration lève le doigt !<br />

La fraude en risque cyber est en perpétuelle évolution <strong>et</strong> en progression constante<br />

<strong>et</strong> il est essentiel de m<strong>et</strong>tre en place des mesures de sécurité solides pour se<br />

protéger contre ces <strong>menaces</strong>. Et <strong>à</strong> la fin, le constat est toujours le même : l’être<br />

humain constitue le maillon faible <strong>du</strong> dispositif de défense. En 2022, 45 % des<br />

entreprises ont subi au moins une cyberattaque réussie selon le Baromètre de la<br />

cybersécurité des entreprises réalisé par OpinionWay pour Cesin en janvier 2023.<br />

LES NOUVELLES TECHNOLOGIES<br />

10<br />

Mi février, le site antai.gouv.fr alertait sur une campagne<br />

de SMS <strong>et</strong> des sites frau<strong>du</strong>leux. « Depuis plusieurs<br />

semaines, des SMS <strong>et</strong>/ou des courriels frau<strong>du</strong>leux<br />

vous proposent de régulariser des amendes impayées<br />

sur des sites pirates ». Début avril, la page d’accueil<br />

<strong>du</strong> site impots.gouv.fr comporte un avertissement <strong>du</strong><br />

même genre : « Attention aux arnaques ! Campagne de<br />

SMS frau<strong>du</strong>leux pour amende impayée : la direction<br />

générale des Finances publiques n’envoie pas de SMS<br />

pour défaut de paiement d’une facture, d’une amende<br />

ou de vos impôts ».<br />

11<br />

D’autres attaques, moins massives, sont beaucoup plus<br />

sophistiquées que l’envoi d’un SMS avec un lien sur<br />

lequel il ne faut pas cliquer. Les criminels font appel<br />

<strong>à</strong> de vrais gens qui passent de vrais coups de fil, pour<br />

envoyer de fausses demandes de paiement en se faisant<br />

passer pour un employé ou un fournisseur légitime<br />

d’une entreprise. Désormais, les attaques traînent en<br />

longueur, <strong>et</strong> les hackers vont prendre le temps de saper<br />

le système en profondeur. Les délais d’attaque s’étirent<br />

couramment sur un ou deux mois, <strong>et</strong> la<br />

<strong>du</strong>rée d’interruption se compte en<br />

semaines.


LES NOUVELLES TECHNOLOGIES<br />

2. UNE ASSURANCE QUI ÉVOLUE, MAIS QUI PEINE À SE VENDRE<br />

Dans l’assurance cyber il y a désormais une double logique : la prévention <strong>et</strong><br />

l’indemnisation. « L’assurance a un rôle <strong>à</strong> jouer car elle est prescriptrice comme<br />

dans tous les risques techniques. « Elle a une logique de prévention : un assureur<br />

ne veut plus assurer un risque trop dégradé <strong>et</strong> celui-ci va donc avoir un rôle capital<br />

dans l’acculturation des entreprises au risque cyber, selon Frédéric Nguyen Kim.<br />

En cas de crise cyber, il y a trois objectifs : gérer la crise <strong>et</strong> communiquer. Il faut<br />

préparer les êtres humains <strong>à</strong> un processus de gestion de crise comme pourrait<br />

être le cas pour un incendie. Il s’agit ensuite de préserver autant que possible la<br />

continuité des opérations, avec des données protégées mais accessibles <strong>et</strong> qui<br />

peuvent fonctionner en mode dégradé sous le meilleur délai. Enfin, il faut savoir<br />

sortir rapidement de la crise », détaille Frédéric Nguyen Kim.<br />

12 13<br />

LES NOUVELLES TECHNOLOGIES<br />

Pour le marché français, les primes qui se sont établies <strong>à</strong> 327 millions d’euros en<br />

2022 selon le récent bilan de France Assureurs, ont explosé de 53 % en un an, <strong>et</strong><br />

les taux de progression sont exponentiels. Mais si l’assurance cyber se développe,<br />

la prévention demeure une priorité, en particulier pour les TPE <strong>et</strong> PME, dont le<br />

taux de couverture très faible, était en 2021 <strong>à</strong> 0,2 %, contre 84% pour les grandes<br />

entreprises, selon l’étude LUCY (LUmière sur la CYberassurance) publiée en juin<br />

2022 par l’AMRAE.<br />

L’assurance <strong>du</strong> risque cyber, donc un nouveau terrain de jeu. Des start-up apportent<br />

des conseils, proposent des tests d’intrusion, d’autres proposent des abonnements<br />

<strong>à</strong> des tentative de phishing… Cela perm<strong>et</strong> effectivement une sensibilisation au long<br />

cours, qu’il faut entr<strong>et</strong>enir, car il ne faut pas que la vigilance r<strong>et</strong>ombe, partant <strong>du</strong><br />

postulat que le maillon faible reste l’humain.<br />

Le champ qui reste <strong>à</strong> explorer reste celui en aval de l’attaque.


LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE<br />

II. LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE,<br />

LES NOUVELLES TECHNOLOGIES,<br />

ET LE DÉTECTIVE PRIVÉ<br />

1. LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE 2.0<br />

Le numérique a multiplié les possibilités d’attaques, mais il a aussi transfiguré la lutte<br />

Les outils d’analyse pour vérifier l’authenticité des documents<br />

présentent effectivement l’avantage d’identifier dès le départ un<br />

dossier d’assuré constitué avec des documents falsifié, pour prévoir<br />

une possibilité de fraude bien en amont.<br />

LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE<br />

contre la fraude, entre la possibilité d’analyser systématiquement certaines données,<br />

de vérifier en masse que des documents ne sont pas falsifiés… . Au nombre des<br />

<strong>nouvelles</strong> méthodes ren<strong>du</strong>es possibles, le « clustering ». C<strong>et</strong>te technique d’analyse de<br />

données consiste <strong>à</strong> regrouper des données similaires en groupes, les «clusters». Ainsi,<br />

on va pouvoir détecter des schémas de comportement supposément frau<strong>du</strong>leux<br />

en regroupant des données sur les demandes d’indemnisation qui présentent des<br />

caractéristiques similaires.<br />

Un nombre anormalement élevé de demandes d’indemnisation provenant d’une<br />

14<br />

même région géographique, avec des types de sinistres similaires va pousser une<br />

équipe antifraude <strong>à</strong> se pencher sur les dossiers afin de voir s’il s’agît d’une fraude<br />

15<br />

avérée.<br />

« Nous récupérons quotidiennement les données de nos clients assureurs, nous les<br />

enrichissons avec des données externes, <strong>et</strong> nous appliquons dessus nos algorithmes<br />

d’intelligence artificielle, ce qui perm<strong>et</strong> d’identifier les cas suspects : par exemple<br />

le fait qu’une personne en arrêt de travail crée dans le même temps une entreprise<br />

selon les données extraites <strong>du</strong> greffe, peut renforcer la suspicion des équipes antifraude<br />

de l’assureur », explique ainsi Benoît Legros, VP Customer Success de Shift<br />

Technology. C<strong>et</strong>te entreprise cherche aussi <strong>à</strong> travailler de plus en plus sur la fraude<br />

documentaire, pour se rapprocher <strong>du</strong> moment de la souscription, en détectant par<br />

exemple pour l’assurance automobile des relevés d’information « trafiqués ».


LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE<br />

2. « LES NOUVELLES TECHNOLOGIES<br />

ET L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE N’ONT PAS ENCORE CHANGÉ<br />

GRAND-CHOSE AU TRAVAIL DE L’ENQUÊTEUR »<br />

technologies <strong>et</strong> l’intelligence artificielle n’ont pas encore changé grandchose<br />

au travail de l’enquêteur où la vérification <strong>et</strong> le facteur humain restent<br />

Je suis devenu enquêteur privé il y a cinq ans. Installé dans la région de<br />

Bordeaux, je travaille sur la fraude <strong>à</strong> l’assurance depuis environ cinq ans, avec<br />

essentiels. Au sein des compagnies, je sais effectivement que de nouveaux<br />

seulement quatre ou cinq compagnies. D’abord, je ne veux pas me consacrer<br />

outils issus de l’intelligence artificielle perm<strong>et</strong>tent d’identifier davantage<br />

seulement <strong>à</strong> l’assurance : je travaille aussi sur des suj<strong>et</strong>s liés <strong>à</strong> la prévention <strong>et</strong><br />

de cas litigieux. Mais justement, il faut derrière des moyens humains pour<br />

16 <strong>à</strong> la détection des addictions (alcool <strong>et</strong> drogues) dans le monde de l’entreprise,<br />

17<br />

continuer d’instruire les dossiers avant qu’ils ne nous soient transmis <strong>à</strong> nous,<br />

<strong>et</strong> je souhaite continuer <strong>à</strong> partager mon temps entre les deux. J’ai abandonné<br />

enquêteurs. Il y a semble-t-il plus de dossiers douteux identifiés, mais cela<br />

l’activité d’enquêteur pour les particuliers <strong>et</strong> les conjoints jaloux !<br />

allonge les délais de traitement <strong>et</strong> de délivrance des missions d’enquêtes.<br />

Par ailleurs, je souhaite continuer travailler en indépendant, en gardant une<br />

certaine liberté, sans recruter d’autres enquêteurs, prenant en charge quatre<br />

ou cinq dossiers par mois.<br />

Pascal Burgueyre<br />

Enquêteur privé APIS 33<br />

Enquêteur assurances certifié ALFA/AFNOR<br />

Il ne faut pas oublier que derrière un dossier de suspicion de fraude, il y a<br />

peut-être une victime qui attend son indemnisation. De mon expérience, sur<br />

dix dossiers, il y a de l’ordre de sept cas de fraude, mais aussi trois dossiers<br />

où la suspicion est <strong>du</strong>e <strong>à</strong> un document apparemment falsifié qui est en fait<br />

authentique, <strong>à</strong> une erreur de déclaration faite de bonne foi, <strong>à</strong> un cas de figure<br />

atypique mais justifié… <strong>et</strong> où l’indemnisation ne doit pas traîner. La règle que<br />

je me suis fixé est donc de traiter un dossier sous un délai d’un mois environ.<br />

Je travaille davantage sur des dossiers d’assurance dommages, comme des<br />

incendies <strong>et</strong> des cambriolages… La proximité de mon lieu de résidence avec<br />

le siège d’un site de vente en ligne fait qu’au nombre de mes missions, on<br />

me demande quelquefois d’aller vérifier sur place l’authenticité de factures.<br />

Lorsqu’il s’agit d’assurance dommages, c’est en fait un travail assez solitaire<br />

<strong>et</strong> indépendant où je me rends sur place pour comprendre la configuration<br />

des lieux, interroger l’assuré pour lever <strong>–</strong> ou pas <strong>–</strong> des doutes, <strong>et</strong> vérifier<br />

des documents <strong>et</strong> des factures. Pour les dossiers de dommages corporels,<br />

je travaille avec d’autres collègues, car il s’agit de filatures <strong>et</strong> de surveillance,<br />

pour voir si le mode de la vie de la victime est conforme <strong>à</strong> ce qu’on peut<br />

attendre par rapport au préjudice subi.<br />

J’ai bien sûr connaissance des combines <strong>et</strong> <strong>nouvelles</strong> fraudes diffusées grâce<br />

aux réseaux sociaux, mais de mon point de vue, le numérique, les <strong>nouvelles</strong><br />

. La détection d’un risque de fraude n’a de valeur que si l’assureur est en<br />

mesure de le traiter. Si le déploiement d’outils <strong>et</strong> démarches de détection <strong>à</strong><br />

l’aide de l’IA a ren<strong>du</strong> possible l’in<strong>du</strong>strialisation de la détection, la question de<br />

l’in<strong>du</strong>strialisation <strong>du</strong> traitement reste entière. A ce jour, la réponse apportée<br />

par les assureurs procède d’une approche capacitaire<br />

(la capacité humaine de traitement allouée <strong>à</strong> c<strong>et</strong>te<br />

activité détermine <strong>et</strong> finalement limite le volume<br />

d’alertes traitées).<br />

LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE


LA FRAUDE À LA SANTÉ<br />

III. LA FRAUDE À LA SANTÉ<br />

1. LA LUTTE DOPÉE AU NUMÉRIQUE<br />

LA FRAUDE À LA SANTÉ<br />

18<br />

L’assurance santé est un terrain de jeu propice <strong>à</strong> la fraude, <strong>à</strong> cause de la fréquence<br />

des remboursements, qui rend le volume de données <strong>à</strong> analyser exorbitant, alors<br />

que le tiers-payant, qui rend le paiement rapide <strong>et</strong> automatique, accentue aussi le<br />

risque de fraude. « Ces dernières années, un des grands enjeux des assureurs santé<br />

a justement été d’in<strong>du</strong>strialiser <strong>et</strong> d’automatiser les processus de règlement. Les<br />

outils de détection in<strong>du</strong>striels apparaissent, mais avec r<strong>et</strong>ard. Une difficulté en<br />

assurance santé vient des délais de règlements qui doivent être brefs. Souvent, la<br />

détection se fait après le règlement <strong>et</strong> le recouvrement n’est pas toujours possible.<br />

L’enjeu actuel est donc de détecter la fraude avant de déclencher le règlement,<br />

tout en gardant un niveau d’expérience client élevé », explique Frédéric Nguyen<br />

Kim.<br />

L’analyse des données perm<strong>et</strong> de détecter des incohérences ou des cas suspicieux.<br />

En optique, les exemples foisonnent : une famille dont tous les membres, y compris<br />

les jeunes enfants, repart de chez l’opticien avec lun<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> lentilles, un assuré qui se<br />

voir prescrire des lun<strong>et</strong>tes avec une correction constante, alors qu’il a été opéré de la<br />

myopie, une personne opérée de la myopie, alors qu’elle n’était pas myope.<br />

19<br />

Depuis environ cinq ans, le marché s’est donc mis <strong>à</strong> utiliser les <strong>nouvelles</strong> technologies,<br />

qui perm<strong>et</strong>tent d’in<strong>du</strong>strialiser le traitement de millions de paiements de prestations.<br />

Mais la technologie ne fait pas tout, car il faut en amont identifier les scénarios de<br />

fraude <strong>et</strong> les modèles de détection <strong>et</strong> en aval vérifier que la fraude est avérée. Mais<br />

une fausse facture bien réalisée nécessite de multiples points de contrôle pour être<br />

identifiée <strong>et</strong> on ne peut matériellement pas contrôler toutes les factures. D’où l’intérêt<br />

des outils/démarches de détection de la fraude documentaire qui ont manifestement<br />

<strong>du</strong> mal <strong>à</strong> se développer au sein des entreprises d’assurances.


LA FRAUDE À LA SANTÉ<br />

2. LA FRAUDE SHOOTÉE AUX RÉSEAUX SOCIAUX<br />

LA FRAUDE À LA SANTÉ<br />

C’est peut-être en assurance santé voire en prévoyance que les réseaux sociaux<br />

recrutent le plus de complices sur les réseaux sociaux, en s’adaptant en temps réel<br />

aux stratégies de détection des assureurs… Les escrocs ne s’y sont pas trompés. Les<br />

années 2021 <strong>et</strong> 2022 ont vu fleurir les « Bon plan mutuelle » sur Snapchat ou TikTok,<br />

proposant <strong>à</strong> qui le souhaite de transm<strong>et</strong>tre ses identifiant <strong>et</strong> code de complémentaire<br />

d’euros pour gagner très vite quelques centaines voire quelques milliers d’euros. . Il<br />

existe également la fourniture de fausses factures via ces réseaux sociaux.<br />

20<br />

C’est le fait de p<strong>et</strong>its arnaqueurs où l’assuré n’a même<br />

pas toujours conscience de participer <strong>à</strong> une fraude <strong>à</strong><br />

l’assurance. Cela peut aussi être une ingénierie sociale<br />

avec une organisation comparable <strong>à</strong> celle des mules pour le<br />

trafic de drogue. Des gens vont prêter leurs numéros de<br />

sécurité sociale <strong>et</strong> d’assuré ainsi que leurs identifiants<br />

<strong>et</strong> rétrocéder la plus grosse part des remboursements<br />

perçus. Au sein de l’équipe de lutte contre la fraude de<br />

Malakoff Humanis, certains collaborateurs ont dans leur<br />

fiche de poste la tâche de scruter les réseaux sociaux<br />

pour débusquer les <strong>nouvelles</strong> combines.<br />

21


LA FRAUDE À LA SANTÉ<br />

3. LE 100% SANTÉ ÉLARGIT L’ACCÈS AUX SOINS, ET À LA FRAUDE<br />

Car en santé, si les combines diffusées sur les réseaux sociaux sont scrutées de<br />

près, il demeure que l’Alfa estime que 80 % <strong>du</strong> volume des fraudes impliquent des<br />

LA FRAUDE À LA SANTÉ<br />

professionnels de santé. « En matière de lutte contre la fraude en assurance santé,<br />

Ces derniers temps, les assureurs s’émeuvent aussi de l’explosion de la triche<br />

le dialogue avec l’assurance maladie obligatoire commence <strong>à</strong> s’instaurer. En eff<strong>et</strong>,<br />

survenue avec la réforme <strong>du</strong> 100% santé. « C’est une simple histoire de volumes <strong>et</strong><br />

complémentaires santé <strong>et</strong> Sécurité sociale avaient tendance <strong>à</strong> concentrer leurs<br />

d’opportunités ! La mise en place a in<strong>du</strong>it un risque de fraude plus important parce<br />

efforts contre la fraude au remboursement de frais de santé selon leur niveau de<br />

que les opportunités de fraude augmentent notamment avec le volume d’actes<br />

prise en charge qui peut être assez différent d’une dépense santé <strong>à</strong> l’autre. Par<br />

<strong>et</strong> <strong>du</strong> fait <strong>du</strong> règlement automatisé en lien avec le caractère obligatoire <strong>et</strong> donc<br />

exemple, si le montant des remboursements en optique est scruté attentivement par<br />

systématisé <strong>du</strong> tiers-payant », indique Christian Acknin, directeur général délégué<br />

les organismes complémentaires, c’est un enjeu moins fort pour le régime obligatoire<br />

adjoint de Santéclair.<br />

qui ne finance qu’une faible part de ces dépenses », ajoute Maxence Bizien.<br />

22<br />

A tel point que Santéclair propose depuis le début de l’année un service antifraude.<br />

C’est une prestation en plus, qui concerne les professionnels de santé en-dehors <strong>du</strong><br />

réseau. Ensuite, Santéclair a développé ses propres algorithmes qui perm<strong>et</strong>tent de<br />

détecter des atypies<br />

23<br />

« La fraude au sein des réseaux de soins, en particulier lorsqu’ils sont fermés comme<br />

celui de Santéclair, est un risque plutôt maîtrisé <strong>et</strong> limité. « Une des premières mesures<br />

est de vérifier systématiquement que le professionnel de santé en est bien un, avant<br />

toute mise en place de conventionnement », rappelle Christophe Acknin. En face, le<br />

professionnel de santé sait que s’il triche, la sanction sera directe <strong>et</strong> immédiate, <strong>et</strong><br />

que l’exclusion <strong>du</strong> réseau le privera <strong>du</strong> flux d’affaires pour lequel il a justement choisi<br />

d’adhérer au réseau.


CONCLUSION<br />

CONCLUSION<br />

CONCLUSION<br />

S’il est indéniable que le numérique fait évoluer la fraude <strong>et</strong><br />

les outils de lutte anti-fraude <strong>à</strong> pas de géant, il est impossible<br />

de dire si le bilan est plutôt positif, ou négatif pour les<br />

assureurs. Oui, le volume de fraude détectée progresse. Mais<br />

comment savoir si cela est dû <strong>à</strong> un nombre de fraudes en<br />

hausse, ou si la détection s’améliore, mais le montant global<br />

de la fraude progresse ?<br />

24<br />

La seule certitude est que la fraude évolue aussi vite que<br />

les usages, <strong>et</strong> que le numérique donne autant de <strong>nouvelles</strong><br />

25<br />

possibilités aux fraudeurs de frauder qu’aux assureurs pour<br />

leur faire la chasse.<br />

Mais dans tous les cas, la collaboration est une arme. Comme<br />

l’Alfa <strong>et</strong> son partage de données <strong>et</strong> d’information a permis<br />

aux assureurs de progresser en assurance dommages, les<br />

autres secteurs de l’assurance doivent aussi amener chacun <strong>à</strong><br />

collaborer, en dehors de son propre champ.


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À PROPOS DU CERCLE <strong>LAB</strong><br />

Talan Consultng est un cabin<strong>et</strong> de conseil en management disposant d’une forte<br />

expertse en assurances. Notre approche <strong>du</strong> conseil est résolument pragmatque <strong>et</strong><br />

sur mesure : pas d’ofre préfabriquée mais nos expériences <strong>et</strong> expertses adaptées <strong>à</strong><br />

vos problématques. Nous écoutons avant de penser <strong>à</strong> des solutons.<br />

Le <strong>Cercle</strong> Lab a pour ambition de nourrir le secteur de <strong>nouvelles</strong> idées. Il s’organise<br />

pour cela autour de 11 clubs thématiques résolument orientés métiers dont les<br />

réflexions menées tout au long de l’année se concrétisent par la publication de 11<br />

publications annuelles.<br />

La complémentarité entre nos expertses méters <strong>et</strong> transverses, <strong>et</strong> les synergies<br />

avec le savoir-faire <strong>du</strong> groupe Talan nous perm<strong>et</strong> d’accompagner les transformatons<br />

Véritables outils d’analyse prospectifs, ces 11 publications annuelles ont pour objectif<br />

26<br />

<strong>et</strong> l’innovaton <strong>à</strong> 360° pour nos clients : méter, managériale, méthodologique <strong>et</strong><br />

de déceler les signaux, sonder les phénomènes <strong>et</strong> témoigner des mouvements qui<br />

technologique.<br />

annoncent les évolutions futures de l’assurance. La co-pro<strong>du</strong>ction de ces cahiers<br />

27<br />

Nous sommes enfn les promoteurs d’un conseil <strong>du</strong>rable en management tant<br />

en termes d’impact de nos interventons que de prise en considératon de leur<br />

dimension RSE.<br />

de tendance perm<strong>et</strong>tent, par conséquent, de disposer d’une vision structurée <strong>et</strong><br />

inspirante <strong>du</strong> secteur. Le <strong>Cercle</strong> <strong>LAB</strong> est ainsi un formidable lieu de n<strong>et</strong>working <strong>et</strong> de<br />

confrontation d’idées pour toutes les familles <strong>du</strong> secteur.<br />

CONTACTS<br />

CONTACTS<br />

FRÉDÉRIC NGUYEN KIM<br />

Senior advisor chez Talan Consulting<br />

frederic.nguyen-kim@talan.com<br />

SÉBASTIEN JAKOBOWSKI<br />

Fondateur de Seroni<br />

sjakobowski@seroni.fr<br />

06.62.45.01.31<br />

FLORIAN DELAMBILY<br />

Rédacteur en chef<br />

de News Assurances Pro<br />

fdelambily@seroni.fr<br />

06.15.43.30.89<br />

CATHERINE MARQUIS<br />

Responsable de la<br />

communication<br />

& de l’évènement<br />

cmarquis@seroni.fr<br />

06.85.44.20.78


CARNET# 26<br />

ÉTUDE<br />

FRAUDE À L’ASSURANCE<br />

ET NOUVELLES MENACES<br />

Avec une accélération de la digitalisation, la simplification des parcours client<br />

mais également un contexte général vecteur de risque, de <strong>nouvelles</strong> <strong>menaces</strong><br />

en matière de fraude se développent rapidement <strong>et</strong> pèsent sur le secteur de<br />

l’assurance. Ce carn<strong>et</strong> s’inscrit dans le cadre des assises de la lutte contre la<br />

fraude <strong>à</strong> l’assurance 2023 organisées conjointement par Talan Consulting <strong>et</strong> le<br />

<strong>Cercle</strong> <strong>LAB</strong>. Elles sont l’occasion d’en dresser le panorama <strong>et</strong> d’envisager quelles<br />

contre-mesures m<strong>et</strong>tre en œuvre afin de ré<strong>du</strong>ire les risques.<br />

EN PARTENARIAT AVEC<br />

REJOIGNEZ-NOUS SUR :<br />

LINKEDIN<br />

<strong>Cercle</strong> <strong>LAB</strong><br />

TWITTER<br />

@<strong>Cercle</strong><strong>LAB</strong><br />

CERCLE <strong>LAB</strong><br />

11 PASSAGE SAINT-PIERRE AMELOT, 75011 PARIS<br />

www.cerclelab.com

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