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LVS mars 2023

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LA VOIX SÉPHARADE

LVSMAGAZINE.COM

53 e ANNÉE

MARS/AVRIL 2023

ADAR-NISAN 5783

ÉDITION SPÉCIALE

ISRAËL: 75 ANS

LA FORCE DE LA SCIENCE

EN ISRAËL

ISRAËL PUISSANCE MONDIALE

EN CYBERSÉCURITÉ

QU’EST-CE QU’ÊTRE SÉPHARADE

EN ISRAËL?


Mes liquidités d’entreprise,

je les gère comme avant ?

Xavier Lalonde

Vice-président régional

xavier.lalonde@bnc.ca

514 299-2622

David-Alexandre Wolf

Directeur commercial PME

davidalexandre.wolf@bnc.ca

438 869-0581

Francis Martel

Vice-président régional

francis.martel@bnc.ca

438 887-9526

Pour vos questions, on est là.

bnc.ca/entreprises


Pessah Cacher Ve Sameah

Maude

Bellemare

Michel

Rizkalla

Anne-Marie

Bavoux

Lionel

Chriqui

Julie

Hardy

Ryan

Mago

Moïra Sinéade

Pierre-Louis

Adjointe

Conseiller

principal

en gestion

de patrimoine

et gestionnaire

de portefeuille

Associée

principale en

gestion

de patrimoine

Conseiller

principal

en gestion

de patrimoine

et gestionnaire

de portefeuille

Associée

en gestion

de patrimoine

Conseiller

en gestion

de patrimoine

et gestionnaire

de portefeuille

Adjointe

Financière Banque Nationale – Gestion de patrimoine (FBNGP) est une division de la Financière Banque Nationale inc. (FBN) et une marque de commerce appartenant

à la Banque Nationale du Canada (BNC) utilisée sous licence par la FBN. FBN est membre de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs

mobilières (OCRCVM) et du Fonds canadien de protection des épargnants (FCPE) et est une filiale en propriété exclusive de la BNC, qui est une société ouverte

inscrite à la cote de la Bourse de Toronto (NA : TSX).


SOMMAIRE

MARS/AVRIL 2023

Mot de la présidente de la CSUQ 5

Édito: Israël fête ses 75 ans 9

DOSSIER SPÉCIAL : LES 75 ANS D’ISRAËL

La force de la science en Israël

10

Israël puissance mondiale en

cybersécurité

12

Aider les non-voyants à s’orienter

16

Israël pépinière de découvertes

biomédicales

20

De Côte-Saint-Luc à la Knesset

22

Rencontre avec Paul Hirschorn,

Consul général d’Israël à Montréal

24

Les origines du conflit

Israélo-palestinien

26

L’histoire diplomatique d’Israël

30

Quelles sont les origines de la vague

populiste qui traverse Israël?

32

Rencontre avec Shlomo Ben-Ami,

ancien ministre des Affaires

étrangères d’Israël

34

Géopolitique: Israël face aux

menaces stratégiques du

Moyen-Orient

36

Le Maroc, Israël et les Juifs

marocains

38

Économie : la « Start-up nation » est

devenue une « Gaz nation »

42

Réflexions rabbiniques sur les 75 ans

de l’État d’Israël

44

Qu’est-ce qu’être Sépharade dans

la société israélienne d’aujourd’hui?

46

Aliyah, vingt ans plus tard

50

Du Maghreb à l’Occident.

Les Juifs marocains entre trois

continents

52

La Bande dessinée israélienne

dans tous ses états

54

Le cinéma israélien d’aujourd’hui

reflet de la maturité d’Israël

58

Rencontre avec Roï Azoulay, un

chef d’orchestre virtuose

62

Israël, terroir gastronomique

64

Regard sur la littérature

israélienne d’expression française

66

La littérature israélienne traduite

dans le monde entier

68

Célébrons tous Yom Hatsmaout

à Montréal

70

Le 125 e anniversaire du premier

Congrès sioniste à Bâle

72

2

SOMMAIRE


PORTRAITS DE JEUNES

Rencontre avec une passionnée de hockey,

Julia Benarroch

76

LA VOIX SÉPHARADE

LVSMAGAZINE.COM

53 e ANNÉE

MARS/AVRIL 2023

ADAR-NISAN 5783

NOMINATIONS

Le Révérend Daniel Benlolo, leader spirituel de

la Marche du Souvenir - Montréal

78

Karen Aflalo, Women leaders in Pharma

79

JUDAÏSME

53 e ANNÉE MARS/AVRIL 2023 ADAR-NISAN 5783 2$

ÉDITION SPÉCIALE

ISRAËL: 75 ANS

LA FORCE DE LA SCIENCE

EN ISRAËL

ISRAËL PUISSANCE MONDIALE

EN CYBERSÉCURITÉ

QU’EST-CE QU’ÊTRE SÉPHARADE

EN ISRAËL?

Pessah et l’impératif moral

80

Book review : The sephardic way in death and

mourning

82

IDENTITÉ ET CULTURE

Samy Elmaghribi : immortel, comme

la musique arabo-andalouse

84

NOS CONSTITUANTES

LECTURES

« Une reine », premier roman de Judith Elmaleh

92

LA CSUQ

La Mission Bar-Mitzvot en Israël

102

Les programmes très populaires des Services

Jeunesse

106

Des élèves de l’École Maïmonide visitent le

Maroc

86

Entrevue avec le Rabbin de la Synagogue

Or Sépharade de Laval, Yehonatan Abitbol

90

112

CARNET DE FAMILLE

LVS MARS/AVRIL 2023

3


COLLABORATEURS/TRICES

KARINE ALLOUL

Pharmacienne, gestionnaire senior dans l’industrie

pharmaceutique

ELIE BENCHETRIT

Secrétaire général de la Fédération sépharade du Canada

CHEF DE LA DIRECTION

Benjamin Bitton

PRÉSIDENTE CSUQ

Karen Aflalo

COPRÉSIDENTS LVS

William Dery

Arielle Sebah-Lasry

RÉDACTEUR EN CHEF

Elias Levy

MARKETING ET COMMUNICATION

Danielle Glanz

OPÉRATIONS

Janice Silverstein

CONCEPTION GRAPHIQUE

Romy Benatar

Wei Song

DANIEL BENLOLO

Révérend et Hazzan de la Congrégation Spanish et

Portuguese

YVAN CLICHE

Chercheur et Fellow au Centre d’études et de recherches

internationales de l’Université de Montréal (CÉRIUM)

ÉRIC YAAKOV DEBROISE

Historien

SYLVIE HALPERN

Journaliste

RABBIN YAMIN LEVY

Rabbin de la Synagogue Beth Hadassah de Great Neck,

New York, chef spirituel et directeur du Maimonides

Heritage Center de Tibériade, Israël.

SONIA SARAH LIPSYC

Collaboratrice senior

VIRGINIE SOFFER

Journaliste et critique littéraire

RÉVISION LINGUISTIQUE ET

CORRECTION D’ÉPREUVES

Martine Schiefer

ANNONCES PUBLICITAIRES

Danielle Glanz

Janice Silverstein

ABONNEMENT

Danielle Kessous

lvsmagazine.com

Wei Song

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9300, boul. Henri Bourassa O. Bureau 100, Saint-Laurent, H4S 1L5

EXPÉDITION POSTALE : Traitement Postal Express inc.

227-E, boul. Brunswick, Pointe-Claire, Québecz H9R 4X5

Convention postale 40011565

Retourner toute correspondance ne pouvant être livrée à :

5151, Côte-Sainte-Catherine, bureau 216, Montréal, Québec, Canada H3W 1M6

Le présent numéro est tiré à 5 000 exemplaires et acheminé par voie postale au Québec,

en Ontario et aux États-Unis. Des exemplaires sont également déposés dans différents

endroits stratégiques à Montréal.

Les textes publiés n’engagent que leurs auteurs. La rédaction n’est pas responsable du

contenu des annonces publicitaires. Toute reproduction, par quelque procédé que ce soit, en

tout ou en partie, du présent magazine, sans l’autorisation écrite de l’éditeur, est strictement

interdite. Reproduction in whole or in part, by any means, is strictly prohibited unless

authorized in writing by the editor.


MOT DE LA PRÉSIDENTE

DE LA CSUQ

Chers membres de notre Communauté,

Israël célèbre cette année ses 75 ans. C’est un grand moment

de liesse et de fierté pour tout le peuple juif. Sept décennies

et demie après sa fondation, Israël est encore confronté à de

sérieuses menaces existentielles. Malgré un environnement

toujours hostile nonobstant des traités de paix signés depuis

2020 avec plusieurs pays arabes dans le cadre des accords

d’Abraham, Israël est aujourd’hui une terre de performances et

de succès.

Au cours de ma présidence du Fonds national juif, Québec (FNJ),

j’ai eu le privilège de voir sur le terrain les nombreuses

réalisations accomplies par Israël dans des domaines clés du

XXI e siècle : les sciences, la médecine, la haute technologie, les

biotechnologies, l’agriculture… Israël excelle dans ces champs

de progrès qui sont en train de façonner le monde de demain.

FNJ a été l’initiateur d’un ambitieux projet visant à élaborer des

solutions pour contrer le réchauffement climatique.

Avec cette édition spéciale de La Voix Sépharade dédiée aux

75 ans d’Israël, la CSUQ s’associe pleinement à cette célébration

qui nous comble de fierté.

Le 26 avril prochain, journée de Yom Hatsmaout, tous les

membres de notre communauté sont conviés à célébrer

dans la joie les 75 ans d’Israël lors du grand rallye annuel qui

se tiendra au centre-ville de Montréal. J’espère de tout cœur

que les Sépharades seront très nombreux à participer à ce

rassemblement majeur qui sera l’occasion d’exprimer notre

entière solidarité avec le peuple d’Israël.

Je tiens à féliciter les organisateurs de la Mission Bar-Mitzvot

en Israël pour leur implication remarquable dans ce noble projet

sociocommunautaire, et en particulier le président, David Peretz,

la vice-présidente, Ninette Rosen, et le président honoraire,

Marcel Elbaz. La campagne de financement en ligne qu’ils ont

lancée à la mi-décembre a été un très grand succès. Celle-ci a

permis de recueillir, en l’espace de trois jours, plus de 180 000 $

qui seront alloués intégralement à ce projet, au bénéfice des

jeunes qui célébreront leur Bar-Mitzvah en Israël et à Montréal.

Merci pour votre grand dévouement communautaire.

En ces temps difficiles où les perspectives économiques

s’assombrissent et où le coût de la vie ne cesse de croître,

de nombreuses familles dans notre communauté font face

quotidiennement à de sérieuses difficultés matérielles. Le

programme Hessed de la CSUQ prodigue chaque année une aide

financière rapide à des centaines de familles nécessiteuses et

en détresse. Je tiens à souligner l’engagement sans faille des

leaders communautaires admirables à la tête de Hessed : Marc

Kakon, fondateur et président de ce programme, Michel Bitton,

président de la campagne de financement 2022-2023, Armand

Afilalo, président du Concert bénéfice de 2022. Hessed a lancé

dernièrement une nouvelle campagne de financement. Objectif :

720 000 $. Traduit numériquement, le mot Hessed correspond au

nombre 72. Une forte valeur symbolique. Les besoins sont de plus

en plus nombreux, criants et urgents. Nous comptons encore une

fois sur la grande générosité des membres de notre communauté

pour que Hessed puisse atteindre ses objectifs et continuer ainsi à

aider des familles très démunies.

Il est indéniable que les jeunes constituent le gage de l’avenir

de notre communauté. Je tiens à remercier les bénévoles et les

professionnels exemplaires des Services Jeunesse de la CSUQ

pour la qualité des programmes qu’ils offrent tout au long de

l’année à nos jeunes. Des programmes qui connaissent un énorme

succès. Le voyage Yahad en Israël, le Camp Kif Kef, l’école de ski

Chéleg… affichent toujours complet. C’est fort encourageant,

poursuivez votre excellent travail.

Le Festival Sefarad de Montréal (FSM) se tiendra du 9 au 22 mai

prochains. Les organisateurs de cette grande manifestation

culturelle s’attellent depuis quelques mois à nous concocter une

superbe programmation qui s’adressera à toutes les catégories

d’âge. Je salue le grand dévouement et le souci permanent de

l’excellence des coprésidents du FSM 2023, Laura Cohen et

Ari Sorek, et des membres très dynamiques de leur équipe.

Coprésidé par deux communautaires admirables, Gérard et Chantal

Bouzaglo, le Festival du Cinéma Israélien de Montréal (FCIM)

sera de retour cet automne avec une programmation variée et de

haut niveau. Les cinéphiles montréalais friands du cinéma israélien

pourront découvrir les œuvres les plus récentes et les plus

percutantes de jeunes réalisateurs très talentueux. Un rendez-vous

à ne pas manquer. En mars dernier, le FCIM a présenté, en partenariat

avec le Festival International Vues d’Afrique, le docudrame

Exodus 91. Un grand succès.

À la fois solennelle et joyeuse, la fête de Pessah n’est pas

seulement un puissant hymne à la liberté, elle est aussi une

histoire d’espérance. Pessah célèbre aussi la résilience face à

l’adversité. Le Seder et la lecture de la Haggadah sont l’un des

moments familiaux les plus marquants dans la tradition juive.

Au nom de toute l’équipe de la CSUQ, je vous souhaite un

Hag Pessah Casher Sameah. Nous vous attendons nombreux pour

célébrer avec vous en personne nos riches et belles traditions lors

de notre soirée de la Mimouna.

Karen Aflalo

Présidente de la CSUQ

LVS MARS/AVRIL 2023

5


JOYEUX

ANNIVERSAIRE

ISRAËL

“ C’est avec joie que nous célébrons la 75 ème anniversaire d’Israël. En tant

que présidente directrice général de la Fondation communautaire

juive de Montréal, je tiens à transmettre mes meilleurs vœux à

tous les citoyens d’Israël, les communautés diaspora, ainsi que tout

peuple qui partage les valeurs de liberté, et de démocratie.

Depuis sa fondation en 1948, Israël a accompli de grandes choses et

a fait preuve d’une détermination sans faille pour construire un avenir

meilleur pour son peuple. C’est un véritable exemple de résilience et

de persévérance, et nous sommes fiers.

En cet anniversaire particulier, nous remercions Israël pour ses

contributions à la communauté internationale et pour son

engagement à faire avancer la justice et la paix. Nous sommes

également fier de notre propre engagement à renforcer les liens

entre nos deux nations.

Ensemble, nous poursuivrons notre travail pour faire avancer les

causes qui nous tiennent à cœur et pour construire un avenir encore

plus brillant pour tous.

Kathy Assayag

Présidente, Directrice Générale

La fondation communautaire juive de Montréal

Contacter

514-345-6414

info@jcfmontreal.org

www.jcfmontreal.org


LA FONDATION COMMUNAUTAIRE JUIVE DE MONTRÉAL LANCE

LE CENTRE D’APPRENTISSAGE

PHILANTHROPIQUE

Vous souhaitez contribuer à un monde meilleur? La Fondation communautaire juive (FCJ) de Montréal peut vous aider à le faire par l’entremise de son nouveau

centre philanthropique, le Centre d’apprentissage philanthropique (CAP), qui sera inauguré lors du mois de mars 2023. Conçu dans le but d’éduquer à la philanthropie

et de renforcer les liens entre les donateurs, les professionnels et les organismes de bienfaisance, le CAP constitue le premier centre en son genre au Canada. Pour en

savoir davantage sur la mission et les activités du CAP, nous nous sommes entretenus avec la présidente-directrice générale de la FCJ, Kathy Assayag.

Journaliste : Merci de m’accorder cette entrevue. Pouvez-vous m’en dire plus sur le CAP et sur les raisons pour lesquelles la FCJ a lancé ce Centre?

Kathy : Je vous en prie, c’est pour moi un grand plaisir de parler de cette initiative – nous en sommes très fiers. Le CAP est unique au Canada et vise à intéresser plus

de gens au monde de la philanthropie et à donner aux organismes de bienfaisance les outils dont ils ont besoin pour être plus efficaces et viables. Avec le CAP, nous

cherchons à soutenir et à développer une approche philanthropique judicieuse et intelligente.

Journaliste : À quel moment le CAP sera-t-il inauguré ?

Kathy : L’inauguration du Centre aura lieu le 30 mars prochain. Nous sommes ravis d’accueillir les conférenciers Scott Harrison, fondateur et directeur de charity:water,

et Anne-Marie Boucher, éminente philanthrope et vice-présidente de la FCJ. M. Harrison et Mme Boucher partageront leurs expériences et connaissances en matière

de philanthropie et, nous l’espérons, fourniront aux participants des outils par lesquels ils pourront déployer des actions susceptibles d’améliorer le bien-être de leur

communauté et de la société en général.

Journaliste : Pourriez-vous nous en dire plus sur les projets futurs du CAP?

Kathy : Absolument – l’inauguration n’est qu’un début. Le CAP proposera des ressources éducatives, des séminaires en présentiel et en ligne, ainsi que des activités de

réseautage, et bon nombre de ces ressources seront accessibles sur notre site Web pour consultation future. La série d’expériences d’apprentissage que nous proposons

par l’entremise du Centre permettra d’initier davantage de personnes à la philanthropie et d’aider les organismes de bienfaisance à être plus efficaces et viables. Au

cours de l’année, nous accueillerons neuf autres conférenciers inspirants, dont Tal Ben-Shahar – sur la science du bonheur, Sarah Lomelin – sur les perturbations de la

philanthropie et Dan Pallota – qui expliquera comment les restrictions imposées aux organismes de bienfaisance minent leur potentiel.

Journaliste : Cela veut-il dire que le CAP est réservé uniquement aux philanthropes?

Kathy : Le CAP s’adressera aussi aux professionnels et aux organismes de bienfaisance. Nous veillerons à ce que le CAP présente des avantages majeurs pour ces derniers.

Journaliste : En quoi précisément est-il pertinent, voire avantageux, pour les professionnels et les organismes d’y participer ?

Kathy : Le CAP a pour but de permettre aux organismes de bienfaisance d’être plus efficace dans leurs campagnes de dons planifiés et de legs et d’être plus viable à

long terme. En partageant les meilleures pratiques en matière de maximisation des dons et de fiscalité avantageuse, cela permet d’obtenir des retombées nettement

plus importantes pour les communautés qu’ils soutiennent.

Pour ce qui est des professionnels, et nous entendons par là les comptables, les avocats, les courtiers en placements ou en assurances, le CAP fournit les ressources dont

ils ont besoin pour entamer une conversation sur les dons de charité avec leurs clients. Nous voulons accroître la participation de ces conseillers de confiance dans la

philanthropie et contribuer ainsi à augmenter les retombées des dons dans la communauté.

Journaliste : Cela semble vraiment utile pour ces groupes. Quels sont les sujets qui seront abordés par les conférenciers et dans les séminaires?

Kathy : Chaque conférencier apporte une perspective unique et ses propres expériences. Nous aurons donc des discussions avec des experts sur des sujets

philanthropiques tels que les questions transfrontalières, l’éthique et la gestion, et l’utilisation efficace de l’assurance-vie, pour n’en citer que quelques-uns. Nous

espérons que les sujets variés donneront aux participants l’occasion de discuter d’idées nouvelles, tout en approfondissant leurs connaissances. Nous voulons que le

CAP renforce, en fin de compte, la philanthropie dans notre communauté et dans la société en général.

Journaliste : Est-ce que la FCJ connaît bien ces sujets?

Kathy : La FCJ est au cœur de la philanthropie judicieuse – notre mission est d’inspirer, de permettre et d’optimiser la philanthropie pour répondre aux besoins croissants

de la communauté juive de Montréal et de la société en général. Nous proposons une panoplie de services spécialisés, notamment la gestion de fonds de dotation, la

planification philanthropique et la planification fiscale. Nous disposons d’une équipe très expérimentée et professionnelle qui peut aider les donateurs à atteindre leurs

objectifs philanthropiques personnels d’une manière fiscalement avantageuse.

Journaliste : Merci beaucoup pour le temps que vous m’avez consacré. Le CAP semble intéressant. Si nos lecteurs veulent en savoir plus sur le CAP ou la FCJ,

comment pourraient-ils vous joindre?

Kathy : Merci de m’avoir donné l’occasion de parler du Centre d’apprentissage philanthropique! Si des particuliers, des professionnels ou des organismes de

bienfaisance veulent en savoir plus sur le CAP et les services offerts par la FCJ, ils peuvent consulter le site Web à l’adresse www.jcfmontreal.org ou nous faire parvenir

un courriel à info@jcfmontreal.org. Nous espérons avoir des nouvelles de certains de vos lecteurs et les aider à réaliser leurs rêves philanthropiques.

info@jcfmontreal.org

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JOYEUX ANNIVERSAIRE ISRAËL!

YOM HULEDET SAMEACH ISRAEL!

HAPPY BIRTHDAY ISRAEL!


ÉDITION SPÉCIALE

ISRAËL FÊTE SES 75 ANS

Israël fête cette année ses 75 ans. C’est encore un État

relativement jeune au regard de l’histoire des nations,

mais son existence puise ses racines dans des temps

immémoriaux, l’époque biblique.

Né d’un pari impossible, grandi dans l’invraisemblable,

Israël est l’incarnation d’un grand mouvement d’espoir

porté par une génération de vaillants et opiniâtres pionniers

qui avaient tout à bâtir.

Malgré un environnement très hostile et la non-résolution

de la question palestinienne, en soixante-quinze ans, Israël

est devenu une grande puissance militaire et économique

qui mérite fortement son surnom : la « Silicon Valley du

Proche-Orient ». Une incroyable success-story qui a

conduit à l’émergence d’une puissance scientifique et

technologique encensée dans le monde entier, la fameuse

« Start-Up Nation ».

L’Israël moderne du XXI e siècle est un chantier social

bouillonnant en construction permanente où rien n’est

figé ni définitif. Ce pays, qui a su intégrer, en l’espace de

quelques décennies, plus de 150 communautés originaires

des quatre coins du monde, est une « idéocratie » où

les débats politiques, sociaux et identitaires font rage

quotidiennement. Le père fondateur de l’État hébreu,

David Ben Gourion, rappelait avec un brin d’ironie que

« le consensus n’a jamais été dans les gènes du peuple juif ».

Cette quête d’un consensus national semble plus urgente

que jamais à un moment charnière de l’histoire d’Israël

où l’esprit du sionisme est contesté dans des pans de la

société israélienne.

Soixante-quinze ans après sa fondation, et en dépit du fait

que la paix avec le monde arabe a connu d’importantes

avancées depuis 2020, avec la signature des accords

historiques d’Abraham, Israël est toujours confronté à

de sérieuses menaces existentielles. N’oublions pas les

velléités génocidaires de l’Iran des Ayatollah : l’annihilation

de l’État juif.

Des menaces lancinantes émanant de l’intérieur pèsent

aussi sur la société israélienne. Deux camps prônant

vigoureusement deux visions antinomiques de l’avenir

d’Israël s’opposent aujourd’hui : l’un, foncièrement attaché

aux valeurs libérales et de justice inhérentes à la

démocratie et désireux de parvenir à un compromis avec

les Palestiniens, l’autre, adepte d’un nationalisme religieux

intransigeant et réfractaire à l’État de droit.

Cette édition spéciale de La Voix sépharade est un

hommage à Israël et aux réalisations gigantesques qu'il a

accomplies dans tous les domaines depuis sa fondation,

en 1948.

Nous vous présentons diverses facettes de ce pays

fascinant et de forts contrastes qui a connu de profondes

mutations au cours des dernières décennies : réalisations

scientifiques, médicales et technologiques; Histoire;

politique, économie; religion; société-Aliyah; littérature;

bande dessinée; cinéma; musique; gastronomie…

Des personnalités israéliennes œuvrant dans ces domaines

ont contribué affablement à cette édition spéciale.

Le réputé historien français Georges Bensoussan revisite

l’histoire du conflit israélo-palestinien.

Le journaliste marocain Jamal Amiar nous livre son regard

sur les relations entre Israël et le Maroc, deux ans après la

signature des accords d’Abraham.

Dans la rubrique « Portraits de jeunes », notre collaborateur,

Yvan Cliche, a interviewé une passionnée de hockey,

Julia Benarroch, 15 ans, qui se distingue notoirement dans

le niveau le plus élevé du hockey féminin au Québec et au

Canada.

Dans la rubrique « Lectures » : une entrevue avec

Judith Elmaleh qui publie son premier roman, Une reine.

Un récit très poignant retraçant la vie hors normes de sa

grand-mère. Une puissante ode à la liberté des femmes.

Je tiens à remercier la très dévouée équipe de professionnels

de LVS et mes formidables collaborateurs(trices) qui ont

œuvré d’arrache-pied pour mener à bon port cette édition

spéciale dédiée aux 75 ans d’Israël. Je vous souhaite de

belles fêtes de Pessah. Hag Sameah.

Elias Levy

elevy@csuq.org

LVS MARS/AVRIL 2023

9


« LA FORCE DE LA SCIENCE EN ISRAËL TIENT DU LIEN

ORGANIQUE ENTRE L’ACADÉMIQUE ET L’INDUSTRIE »

ENTREVUE AVEC LE PROFESSEUR DAN BLUMBERG

PRÉSIDENT DE L’AGENCE SPATIALE D’ISRAËL

YVAN CLICHE

Dan Blumberg, vice-président de l’Université Ben-Gourion

du Néguev, a été nommé en 2022 à la présidence de

l’Agence spatiale d'Israël.

Ce scientifique renommé, docteur en géographie et

en géologie planétaires, œuvre dans une région, Beer

Sheva, en pleine ébullition. L’Université Ben-Gourion

est au cœur de cet élan, inspiré notamment par la

décentralisation récente d’opérations de l’armée

israélienne.

Cette décentralisation vient renforcer le projet de mise

en place du Beer Sheva Innovation District, rassemblant

l’université, fréquentée par quelque 20 000 étudiants,

le parc de haute technologie, où travaillent environ

2 500 personnes, le secteur médical, qui compte environ

4 500 employés, et le campus des télécommunications

de l’armée, où environ 5 000 recrues et soldats de

carrière sont censés servir.

La Voix sépharade a eu le privilège de discuter, par

Zoom, avec Dan Blumberg de l’état de la science en

Israël.

« Avec l’enjeu

climatique, la

communauté

internationale va

de plus en plus

se tourner vers

Israël »

Vous avez récemment été nommé président de l’Agence spatiale

d’Israël. Comment expliquer qu’un petit pays comme Israël se soit

taillé une place dans ce secteur pointu, et quelles sont vos priorités

à court et moyen terme?

Israël a mis en place une agence spatiale en 1983. Un premier

satellite a été lancé en 1988. Quand on a signé la paix avec l’Égypte,

l’accord prévoyait que l’on pourrait surveiller la démilitarisation du

désert du Sinaï. Munis de cette nouvelle capacité, nous avons voulu

la développer, avec la communication par satellite notamment.

Nous nous sommes taillé une place dans le concert des nations

actives dans ce domaine.

Si l’espace était autrefois le domaine réservé de quelques pays

puissants, la situation a changé ces dernières années et devrait

encore évoluer au cours de la prochaine décennie. De plus en

plus de pays s’impliquent dans des missions spatiales, et aussi

des entreprises privées qui lancent leurs propres satellites. Les

technologies sont moins chères et évoluent rapidement.

Nous cherchons à renforcer l’écosystème économique autour de ce

secteur névralgique. D’autant qu’Israël a un rôle à jouer comme le

prouve l’existence d’une firme comme Space Pharma, spécialisée

en médecine spatiale. Le secteur s’élargit et il faut multiplier les

collaborations, notamment pour un petit

pays comme le nôtre qui doit rester en

avant de la parade s’il veut demeurer

pertinent. Je pense à des domaines en

ascension, comme les voyages privés

dans l’espace, les nanosatellites,

l’imagerie. Ce serait bien d’ailleurs

d’établir une coopération avec le Canada,

un acteur significatif dans le domaine

spatial. Il faudrait mettre en place un

mécanisme conjoint de financement de

la recherche.

Dan Blumberg (Crédit : Université Ben-Gourion)

Pouvez-vous nous brosser un portrait

général de l’état de la recherche

scientifique en Israël?

Israël compte une dizaine d’universités,

et je pense qu’on peut dire qu’elles se

débrouillent bien, voire très bien pour la

10

ÉDITION SPÉCIALE


plupart d’entre elles en matière de production scientifique.

Israël a mis en place un écosystème efficace de transfert

technologique entre le monde académique et l’industrie. Un

mécanisme formel facilite ce lien entre le monde académique

et l’industrie, la « vallée de la mort », comme on l’appelle

dans mon milieu : l’Israel Innovation Authority, responsable

des transferts de connaissances. Nous avons dans le pays

une culture entrepreneuriale dynamique, une infrastructure

technologique robuste et une main-d’œuvre hautement

qualifiée. L’innovation est l’une des ressources naturelles les

plus précieuses d’Israël, que nous devons entretenir. Bien sûr,

certains diront qu’on peut mieux faire, et c’est le cas.

Comment expliquer cette relation proche, qui semble mieux

fonctionner qu’ailleurs, entre le milieu universitaire et

l’industrie?

Il y a trois raisons. La première : Israël est une société très

réseautée, connectée. Si vous ne savez pas qu’un chercheur

produit de la connaissance dans un domaine qui vous intéresse,

vous ne pouvez rien entreprendre à ce sujet! Or, la petite taille

du pays et la proximité créée par le service militaire obligatoire

concourent à ce réseautage plus étroit.

La seconde raison : le financement de la recherche scientifique

est souvent dirigé vers le transfert de connaissances, avec

des incitatifs à cette fin.

La troisième raison découle de la nécessité : on a construit ce

pays dans un court laps de temps, de manière un peu isolée.

Les Israéliens ont été amenés à trouver eux-mêmes des

solutions à leurs enjeux.

L’Université Ben-Gourion du Néguev a développé une

expertise touchant la vie humaine dans des zones à

température élevée, et l’utilisation efficiente de l’eau dans ce

contexte. Avec les défis énormes que posent à l’humanité les

changements climatiques, il s’agit d’un enjeu qui concerne

de plus en plus tous les continents. N’est-ce pas là une

occasion intéressante pour votre université et Israël?

Des progrès significatifs ont déjà émergé de la région de

Beer Sheva : l’irrigation goutte à goutte (1) et le dessalement.

Avec l’enjeu climatique, la communauté internationale va de

plus en plus se tourner vers Israël pour en connaître davantage

sur la possibilité de bien vivre en zones chaudes. Les chercheurs

de notre université mènent des recherches interdisciplinaires

pour trouver des solutions au problème de la détérioration

des ressources en eau, pour fournir de l’eau potable pour la

population, pour l’agriculture et l’industrie, grâce à des avancées

dans les technologies de récupération de l’eau.

Les chercheurs de notre université s’attaquent aussi à

développer des techniques de construction avancées et des

matériaux adaptés à la chaleur et au soleil du désert. En

énergie, nous menons des recherches sur l’énergie solaire,

les biocarburants, les nanomatériaux, les réseaux et les villes

intelligentes. Nos recherches mènent déjà à des économies en

matière de consommation d’énergie. Ce ne sont que quelques

exemples.

Quel rôle social joue l’Université Ben-Gourion, située en plein

désert?

Elle joue un rôle central dans l’économie de toute une région. Au

fil du temps, elle a bâti tout un écosystème de collaborations

dans tous les secteurs. Nous avons aussi une histoire, qui aide

à comprendre ce que nous sommes. La région de Beer Sheva

a longtemps été la cour arrière d’Israël. Or, aujourd’hui,

une ville comme Tel-Aviv est peu accessible au niveau du

logement. Beer Sheva est devenue ainsi un pôle d’attraction

pour des gens soucieux d’une carrière prometteuse et d’une

belle qualité de vie. La communauté d’ici est résolue à créer

et à renforcer le contexte d’une communauté dynamique, où

les jeunes pourront venir s’épanouir pas seulement au sein de

notre université, mais aussi dans l’écosystème économique

qui en découle.

La décentralisation des activités des technologies de

l’information et de cybersécurité de l’armée israélienne est

très aidante à cet égard. La clé pour nous sera de travailler

de manière étroite avec ce partenaire. Plus globalement,

nous sommes en mesure d’offrir aux chercheurs et aux

industriels des infrastructures dignes du 21 e siècle, à moindres

frais qu’ailleurs, et avec une proximité entre la recherche et

l’industrie à nulle autre pareille.

David Ben Gourion rêvait de peupler le désert israélien.

Est-ce que ce rêve a été atteint?

Le Néguev constitue 50 % du territoire israélien, mais

seulement 11 % de sa population. Il y a donc encore un écart

entre l’importance numérique de la population que nous

abritons et l’espace dont nous disposons. La mise en place

d’un pôle fort en matière d’innovation crée présentement

un élan important, si bien que, depuis quelque temps, plus

d’étudiants restent ici une fois leurs études complétées. Notre

défi est de renforcer cet écosystème, créer une communauté

vibrante, attractive, et maintenir à long terme le bel élan que

nous vivons présentement.

1. L’irrigation goutte à goutte est un type de système de micro-irrigation qui permet d’économiser l’eau en la laissant s’égoutter lentement jusqu’aux racines des

plantes, soit au-dessus de la surface du sol, soit sous la surface. L’objectif est de placer l’eau directement dans la zone des racines et de minimiser l’évaporation.

LVS MARS/AVRIL 2023 11


ISRAËL PUISSANCE MONDIALE EN CYBERSÉCURITÉ

ENTREVUE AVEC EVIATAR MATANIA, FONDATEUR DU BUREAU

NATIONAL DU CYBER D’ISRAËL

ELIAS LEVY

Fondateur et premier directeur général du Bureau national

du cyber d’Israël, Eviatar Matania a joué un rôle majeur dans

l’élaboration et la mise en œuvre de la politique audacieuse

et visionnaire qui a permis à Israël de devenir, en l’espace de

quelques années, l’une des grandes puissances mondiales en

matière de cybersécurité.

Il raconte cette aventure nationale haletante dans un livre

passionnant et accessible à un public peu familier avec les

notions de la haute technologie, coécrit avec le journaliste

israélien Amir Rapoport : Cyberpower. Israël,

la révolution du cyber et le monde de demain

(Éditions Les Arènes, 2022).

Consultant réputé dans les domaines de la

cybersécurité et de la haute technologie,

Eviatar Matania est professeur à l’Université

de Tel-Aviv, où il dirige le programme

d’Études en sécurité, et professeur associé

à l’Université d’Oxford, en Grande-Bretagne.

Il a accordé une entrevue, par Zoom, à

La Voix sépharade depuis son bureau de

l’Université de Tel-Aviv.

Israël a tout mis en œuvre pour devenir un

leader mondial du cyber.

Le cyber est une nouvelle révolution

industrielle qui est en train de changer

profondément nos vies. C’est la

combinaison de deux notions : sécurité et

haute technologie. Deux champs très imbriqués dans lesquels

Israël se démarque particulièrement par rapport à la plupart

des pays. Mais, Israël ne se serait pas hissé, en l’espace de

dix ans, au rang de cyberpuissance mondiale sans la volonté

politique sans faille de ses gouvernants. Le premier ministre,

Benyamin Netanyahou, a été le principal visionnaire et architecte

de la politique cyber d’Israël. Il a placé celle-ci au cœur de ses

choix stratégiques. Dès 2010, il a compris qu’on entrait dans une

ère nouvelle où la sécurité nationale d’Israël ne pouvait reposer

que sur une politique cyber ambitieuse. Assurer la protection

« Benyamin

Netanyahou a

été le principal

visionnaire et

architecte de la

politique cyber

d’Israël »

civile contre les attaques informatiques, qu’elles viennent

de hackeurs (pirates informatiques) indépendants ou d’États

hostiles à Israël, serait désormais une grande priorité nationale.

Benyamin Netanyahou me confia la mission de mettre en œuvre

une approche stratégique globale du cyber. Il s’engagea à fournir

les efforts nécessaires en matière de structures et de budgets. Il

se fixa aussi un autre objectif de taille : Israël devait devenir l’une

des cinq premières cyberpuissances mondiales. Nous avons

largement gagné ce grand pari.

Les chiffres sur l’économie du cyber en

Israël donnent le tournis.

Personne ne s’attendait à ce que l’objectif

fixé par Benyamin Netanyahou soit atteint

si tôt et avec autant de succès. Israël est

aujourd’hui considéré comme l’une des

principales puissances mondiales dans le

cyberespace, précédé seulement par les

États-Unis. En 2020, Israël (environ 0,1 % de

la population mondiale) a engrangé près

du tiers des investissements mondiaux en

cybersécurité. Cette année-là, au total, ces

investissements ont atteint 3 milliards de

dollars 1 , contre 60 millions de dollars en 2010,

soit cinquante fois plus. Les exportations

israéliennes en cybersécurité ont frôlé

les 7 milliards de dollars, près de 15 %

de l’ensemble des exportations de haute

technologie du pays. Aujourd’hui, 40 % des investissements

privés mondiaux dans le domaine du cyber se font en Israël.

Plusieurs dizaines d’entreprises en cybersécurité étrangères

se sont établies en Israël. Par exemple, en 2015, Microsoft a

créé dans la région de Tel-Aviv trois start-ups dans le domaine

de la cybersécurité. Plus d’un tiers des entreprises appelées

« licornes » (entreprise de haute technologie valorisée à

plus d’un milliard de dollars) opérant dans ce secteur sont

israéliennes. Un exploit sans précédent.

12

ÉDITION SPÉCIALE

1. Dollars américains.


sera forte et stable dans le temps. Mais, au-delà de l’économie,

une puissante industrie de cybersécurité contribue aussi à

répondre concrètement aux exigences sécuritaires d’Israël par le

truchement du développement de solutions novatrices.

Israël a bâti un vaste écosystème cyber mêlant la profondeur

académique, le foisonnement du secteur privé et le savoir-faire

opérationnel de Tsahal.

Le système de cybersécurité national que j’ai eu l’honneur et le

privilège de diriger, de 2015 à 2018, a été le premier du genre dans

le monde. Dans la majorité des pays occidentaux, les partenariats

entre l’État, les entreprises privées et le monde académique sont

perçus avec suspicion. En Israël, le degré de performance du

système de cybersécurité, et du modèle high-tech aussi, repose

au contraire sur une collaboration étroite entre ces trois entités

fondamentales. Tsahal, dont la puissance de défense nationale

est basée sur des systèmes technologiques dernier cri, est le

ciment de ce modèle triangulaire.

Eviatar Matania (Crédit : Éditions Les Arènes)

Israël a bâti un impressionnant écosystème cyber national.

Le concept d’écosystème est issu de la biologie, c’est l’interaction

complexe entre systèmes et sous-systèmes qui constituent un

seul ensemble. Notre objectif était de développer un système

de réciprocité entre divers éléments du monde du cyber

israélien. Notre analyse se

fondait sur le fait qu’Israël

possède deux avantages

comparatifs en matière

de cybersécurité, parce

que, fondamentalement,

celle-ci est axée sur deux

domaines dans lesquels

les Israéliens excellent : la

sécurité et l’informatique,

principalement le software

(les logiciels). Plus les

éléments du système

se nourriront les uns les

autres, plus l’économie de

la cybersécurité d’Israël

Le Néguev est devenu le centre névralgique de la cybersécurité

d’Israël.

En 2012, le gouvernement israélien a pris deux mesures

importantes. La première : créer, dans le parc des industries

de pointe de Beer Sheva, un Centre national de cyberdéfense,

l’équivalent d’un Centre d’intervention d’urgence informatique

(Computer Emergency response Team – CERT –). Deuxième

mesure : aider les sociétés de cybersécurité à s’installer dans

le nouveau parc du Néguev, en allouant des subventions

étatiques pour encourager l’emploi dans ce créneau. L’apport des

universités à ce projet est incommensurable. Elles travaillent

très étroitement entre elles et avec les autres acteurs de

l’écosystème cyber.

Le Centre de recherche de l’Université Ben-Gourion de

Beer Sheva se consacre à l’aspect pratique, applicable, de

la cybersécurité. Le Centre multidisciplinaire de cyber de

l’Université de Tel-Aviv couvre tous les aspects inhérents à

l’ingénierie informatique et aux questions d’économie, de politique

et de droit. L’Université Bar-Ilan de Ramat-Gan a créé un Centre

de recherche qui se consacre à la cryptographie moderne et à

l’hygiène cybernétique. L’Université hébraïque de Jérusalem a

créé un nouveau Centre cyber. Le Centre cyber du Technion de

Haïfa, rattaché au Centre de recherche d’ingénierie informatique

de cette institution, se consacre aux strates inférieures du

cyberespace et à la recherche fondamentale. L’Université de

Haïfa a ouvert un Centre de recherche sur le droit et la politique du

cyber. Des unités technologiques de Tsahal ont été relocalisées

dans le grand parc technologique du Néguev…

LVS MARS/AVRIL 2023 13


Tsahal joue un rôle majeur dans l’écosystème cyber

d’Israël.

Oui. La capacité de faire fonctionner des cybertechnologies,

défensives ou offensives, de comprendre les réseaux

informatiques et leurs structures, de prendre sur le champ

des décisions cruciales, surtout dans le cadre d’une guerre

générale, de comprendre rapidement ce qui est possible

et ce qui ne l’est pas, ce dont il faut s’inquiéter et ce qui

risque d’arriver, tout cela fait désormais partie intégrante

de la formation des officiers de Tsahal. Environ un quart

des officiers professionnels de Tsahal travaillent dans des

divisions technologiques et y restent plusieurs années

après leur service militaire obligatoire. Ils contribuent

ainsi à réduire les carences en cyber des officiers. Ils

produisent un corps d’officiers spécialisés en technologies

de qualité, servant aux côtés des généraux. Mais cela est

insuffisant, car tant que la connaissance approfondie de

la cyberguerre demeure l’apanage d’officiers spécialisés

en technologie formant un groupe distinct du reste de

l’armée professionnelle, le recours au cyberespace à des

fins militaires et défensives demeurera limité. Tsahal, bien

qu’elle ait dans ce domaine plusieurs longueurs d’avance

sur d’autres armées, doit continuer à tabler sur la formation

en cyber de ses cadres supérieurs.

Selon vous, le champ de bataille de demain sera

technologique.

Absolument. Les guerres de demain ne nécessiteront

ni force physique ni un savoir-faire particulier pour

conduire un véhicule, piloter un avion, tirer au canon ou

lancer une roquette. Ce qu’elles requerront avant tout,

c’est une compréhension technologique du cyberespace,

notamment de ses logiciels et de ses algorithmes. Les

soldats de l’ère du cyberespace devront appréhender des

systèmes complexes; maîtriser le décodage; faire preuve

de persévérance pour découvrir des vulnérabilités et

d’endurance pour déjouer des cyberembuscades. Ils seront

des accros à l’informatique, des mathématiciens de premier

ordre, des ingénieurs en logiciels ultra-sophistiqués,

des experts du renseignement en ligne… Désormais, les

armées modernes ont pour mission de former la nouvelle

génération de commandants qui dirigera les soldats de la

cyberguerre.

Nous assistons donc à une redéfinition de la notion de

guerre.

Certainement. Dans le cyber, la notion de temps n’existe

pas ; les attaques sont constantes et multiformes, le conflit

est permanent. Les attaques cyber provoquent des dégâts

immédiats et énormes. Les cibles sont multiples : la Bourse

(New York), les infrastructures énergétiques (Ukraine), les

centrales hydrauliques et les hôpitaux (Israël), les sociétés

pétrolières (Arabie saoudite)… En Israël, le système de

protection du cyber a permis de détecter un bon nombre

d’attaques à temps.

Comment envisagez-vous le futur d’Israël?

Avec un grand optimisme. La sécurité

nationale d’Israël a toujours été le principal

gage du futur de ce pays. Israël revient de très

loin. En l’espace de 75 ans – un laps de temps

bien court dans le long curseur de l’Histoire –

cette petite et audacieuse nation, qui a défié

les prédictions les plus sombres formulées

à son endroit, a accompli des réalisations

gigantesques. La cyberpuissance en matière

de sécurité forgée par Israël est une autre

des grandes victoires remportées par mon

pays au cours de sa jeune histoire. C’est la

poursuite de la grande aventure sioniste à

l’ère des cybertechnologies!

14 ÉDITION SPÉCIALE


L'Université Ben-Gourion du Néguev,

l’Université hébraïque de Jérusalem,

l’Institut de Technologie Technion-

Israël, l’Université de Tel-Aviv et

l’Institut Weizmann des Sciences

se joignent à la CSUQ afin de féliciter

l’État d’Israël lors de son 75 ème anniversaire.

Simon Bensimon, Directeur général, Montréal & Ottawa

bengurion.ca

Nous sommes fiers d’être partie prenante

dans l’avancement, à la pointe du progrès

dans la recherche scientifique, l’innovation,

l’entreprenariat et la créativité de la

« Nation Start-Up ».

Nous sommes engagés dans le

renforcement, à travers le Canada, des

universités israéliennes et des instituts de

recherche de réputation mondiale.

Ayala Davis, Directrice adjointe

cfhu.org

Lynn Garfinkle Etinson, Directrice de la philanthropie

technioncanada.org

Sharon J. Fraenkel,

Chef de la direction, Montréal, Ottawa et les provinces de l’Atlantique

cftau.ca

Ben-Gurion University of the Negev,

the Hebrew University of Jerusalem,

the Technion-Israel Institute of

Technology, Tel Aviv University and

the Weizmann Institute of Science

join the CSUQ in paying tribute to the

State of Israel on its 75 th Anniversary.

We are proud to be an integral part of the

“Start-Up Nation” advancing cutting-edge

scientific research, innovation,

entrepreneurship and creativity.

We are committed to strengthening Israel’s

world-class universities and research

institutes throughout Canada.

Susan Stern, Chef de la direction

weizmann.ca


AIDER LES NON-VOYANTS À S’ORIENTER

ENTREVUE AVEC LE NEUROSCIENTIFIQUE

DANIEL-ROBERT CHEBAT

ELIAS LEVY

Chercheur scientifique chevronné, le Dr Daniel-Robert Chebat,

dont les travaux dans le domaine des neurosciences sont

reconnus internationalement, poursuit ses recherches sur

l’intégration multisensorielle, la substitution sensorielle,

la navigation, la cécité et la plasticité du cerveau dans son

laboratoire de l’Université d’Ariel, sise en Samarie.

Diplômé de l’École Herzliah et du Collège Jean-de-Brébeuf

de Montréal, détenteur d’une maîtrise et d’un doctorat en

neuropsychologie expérimentale de l’Université de Montréal

(UdeM), il a poursuivi des études postdoctorales en

neurobiologie à l’Hôpital Hadassah, affilié à l’Université

Hébraïque de Jérusalem, grâce à une bourse que lui a octroyé

la Fondation Azrieli du Canada.

Durant son postdoctorat, le Dr Daniel-Robert Chebat a mené

ses recherches dans un laboratoire dirigé par un chercheur

renommé, le Dr Amir Amedi, membre de l’Institut de recherche

médicale Israël-Canada. Il est le concepteur d’un outil

scientifique à la fine pointe de la technologie, le EyeCane,

fruit de nombreuses années de recherche au croisement des

neurosciences et du génie informatique, qui capte les images

par le truchement d’une Webcam et transforme celles-ci en

sons grâce à un logiciel très sophistiqué. Cet appareil exploite

la substitution sensorielle par le biais auditif.

Le Dr Daniel-Robert Chebat est actuellement professeur

associé au département de Psychologie de l’Université d’Ariel,

où il dirige le laboratoire de Neuroscience cognitive et visuelle

(Visual and Cognitive Neuroscience Laboratory). Il dirige aussi

un centre de recherche, regroupant plusieurs laboratoires, sur

la navigation et l’accessibilité (Navigation and Accessibility

Research Center). Il organise des conférences internationales

en Israël pour tisser des collaborations scientifiques entre des

chercheurs de différents pays autour de ce sujet de recherche.

Il enseigne aussi, en anglais, dans un récent programme

académique préparatoire au doctorat offert par le nouveau

département de Médecine de l’Université d’Ariel destiné à des

étudiants étrangers qui poursuivent leurs études supérieures

en Israël.

Fondée en 2004, l’Université d’Ariel compte 15 000 étudiants,

vingt-six départements de recherche et d’enseignement,

trois facultés et trois écoles. Les programmes offerts

en sciences, en médecine et en haute technologie sont

reconnus pour leur excellence.

Le Dr Daniel-Robert Chebat a accordé une entrevue à

La Voix sépharade.

Continuez-vous à développer des appareils de

substitution sensorielle pour les personnes aveugles?

Oui. Dans mon laboratoire, nous explorons le potentiel

d’utilisation d’appareils multisensoriels qui pourraient

transmettre plusieurs aspects de l’information visuelle

au moyen de plusieurs sens. Dans le cadre de mes

recherches en neuropsychologie cognitive, je continue

de développer de nouveaux appareils de substitution

sensorielle et de nouvelles approches pour faciliter

les tâches d’apprentissage pour les non-voyants.

Très bientôt, c’est l’Intelligence artificielle (IA), qui est

fonctionnelle déjà dans les téléphones intelligents, qui

réalisera certaines tâches imparties jadis aux appareils

de substitution sensorielle, par exemple des logiciels

capables de faire de la reconnaissance visuelle.

Les appareils de substitution sensorielle vous sont

donc très utiles.

Oui. Nos recherches sur la substitution sensorielle ont

des applications pratiques, par exemple elles peuvent

faciliter la navigation chez des personnes atteintes de

cécité, et théoriques. Nous les utilisons pour découvrir

les mécanismes cognitifs sous-jacents à plusieurs

tâches, et aussi pour impliquer les zones corticales

requises pour accomplir celles-ci. Cela nous permet

d’identifier comment certains mécanismes cognitifs

se développent dans le contexte de la privation

sensorielle, comment la vision (ou son absence)

façonne le cerveau durant le développement de celui-ci,

comment la cécité influence différentes formes de

mémoire ou des tâches motrices. Nous utilisons ces

appareils pour présenter des stimulus à des personnes

aveugles et les aider à réaliser des tâches visuelles.

16

ÉDITION SPÉCIALE


Des personnes atteintes de cécité participent-elles à vos

essais cliniques dans votre laboratoire?

Oui. Mais nous ne travaillons pas qu’avec des non-voyants.

Des personnes atteintes d’une déficience de l’attention ou

d’hyperactivité participent aussi à nos expérimentations.

Des études ont démontré qu’il y a un trouble d’apprentissage

perceptuel chez des personnes qui ont de la difficulté à intégrer

les codes multisensoriels. Les appareils de substitution

sensorielle traduisent des images en informations tactiles ou

auditives. Nous les utilisons pour vérifier si effectivement des

personnes ayant un trouble de l’attention ont réellement une

déficience perceptuelle ou d’apprentissage d’un nouveau sens.

Avez-vous noté de grandes différences entre le milieu de la

recherche scientifique en Israël et son pendant au Canada?

Il y a dix ans, je vous aurais répondu qu’au Canada, on met

beaucoup l’emphase sur l’avancement des connaissances

théoriques (par exemple, en ce qui a trait au fonctionnement

du cerveau) alors qu’en Israël, la priorité est de trouver une

application pratique à nos connaissances théoriques.

Ce n’est plus le cas aujourd’hui, car nous sommes désormais

dans l’ère des collaborations internationales entre des équipes

scientifiques multinationales et multidisciplinaires. Dans le

monde actuel, nous ne pouvons plus faire de la recherche qu’au

niveau théorique, nous devons trouver aussi la façon

d’appliquer les fruits de celle-ci aux problèmes

actuels mondiaux. Aussi bien au niveau théorique

que de l’application pratique des recherches, les

collaborations entre des chercheurs de différents

pays sont la norme qui prédomine aujourd’hui, en

Israël aussi.

Vous partagez donc les résultats de vos travaux

avec des chercheurs scientifiques d’autres pays.

En 2023, dans aucun pays, la science ne

peut progresser en vase clos. Je collabore

étroitement avec des chercheurs de divers pays :

Canada, Inde, États-Unis, France, Belgique… Je

participe à des conférences internationales. Il y a

beaucoup d’étudiants internationaux à l’Université

d’Ariel. Dans mon laboratoire, j’ai deux doctorants

de l’Inde très doués qui travaillent sur des projets

scientifiques de coopération. De jeunes chercheurs

d’autres pays travaillent aussi avec moi. Cette année,

j’ai créé des ponts entre l’Université de Montréal

et l’Université d’Ariel pour que des chercheurs

et des étudiants de maîtrise et de doctorat de

l’Université de Montréal viennent étudier et

poursuivre leurs recherches en Israël, et vice-versa.

Daniel Chebat, son épouse Netzah Saoukane

et leur fils David (Crédit : D. Chebat)

LVS MARS/AVRIL 2023 17


En septembre prochain, je passerai une année

sabbatique à Montréal pour travailler dans le laboratoire

d’un chercheur renommé québécois, pionnier des

Neurosciences visuelles, le Dr Maurice Ptito, professeur

à l’École d’optométrie de l’Université de Montréal, où il

est titulaire de la Chaire Colonel-Harland-Sanders en

Sciences de la vision. Il a été mon directeur de thèse de

doctorat. Les études du Dr Maurice Ptito sur la plasticité

du cerveau chez les personnes aveugles sont reconnues

mondialement. Deux de mes étudiants de maîtrise ou

de doctorat m’accompagneront à Montréal lors de cette

année sabbatique.

Votre Aliyah a été un moment important dans votre vie.

Absolument. J’ai fait mon Aliyah en 2010. C’est la plus

importante et la meilleure décision que j’ai prise dans ma

vie. À ma manière et très humblement, je suis très fier de

participer concrètement au projet sioniste et de contribuer à

l’essor d’Israël avec mes travaux et en formant une nouvelle

génération de jeunes chercheurs.

Parliez-vous l’hébreu quand vous êtes arrivé en Israël?

Mon intégration linguistique fut une épreuve assez

difficile. Je possédais une bonne base en hébreu, acquise

durant mes études dans des écoles juives de Montréal.

Mais la réalité linguistique dans la vie quotidienne

israélienne est tout autre. Je ne suis pas allé à l’Oulpan.

J’ai appris l’hébreu sur le champ, en participant à des

congrès, en conversant avec mes collègues dans

mon laboratoire ou à la cafétéria. Quand tu réalises

que les recherches dans un laboratoire se font en

hébreu et que les discussions avec tes collègues se

déroulent aussi dans cette langue, tu n’as pas d’autre

choix que de t’adapter progressivement à cette réalité

linguistique incontournable. C’est toujours pour moi un

défi d’enseigner en hébreu parce que ce n’est pas ma

langue maternelle. Il m’arrive encore de chercher dans

ma tête des mots en français avant de les traduire et de

les prononcer en hébreu.

Comment envisagez-vous l’avenir d’Israël, qui célèbre

cette année ses 75 ans d’existence?

« Cette année, j’ai créé

des ponts entre

l’Université de Montréal

et l’Université d’Ariel »

Je suis très enthousiaste et très optimiste en ce qui a

trait à l’avenir d’Israël. Les ententes de paix conclues au

cours des deux dernières années entre Israël et plusieurs

pays arabes, dans le cadre des accords d’Abraham,

renforcent davantage mon optimisme. J’espère que cette

paix sera porteuse de projets de coopération scientifique

prometteurs avec les pays arabes signataires de ces

accords. Mon épouse, Netzah Saoukane, une Sabra

éthiopienne, mon jeune fils, David, et moi sommes

heureux et très fiers de vivre dans ce merveilleux pays

qu’est Israël. Quand je vivais à Montréal, j’étais plongé

dans une grande angoisse chaque fois qu’un événement

dramatique se produisait en Israël. Je préfère désormais

vivre cette angoisse sur place.

18 ÉDITION SPÉCIALE


SOIRÉE GALA À MONTRÉAL

Le 30 mai 2023

Célébrant

Sur la route des

épices vers Israël

Chef Yaniv Cohen

« the Spice Detective »

Une performance

musicale inoubliable

Maestro violiniste

Alexandre Da Costa

et ses musiciens

Nous vous souhaitons une joyeuse fête de Pessah

514.731.4400 | www.cmdai.org/galamtl | gala@cmdai.org

Joseph Amzallag

Président national

Arlène Madar Abitan

Vice-présidente nationale

Sidney Benizri

Directeur exécutif national


ISRAËL PÉPINIÈRE DE

DÉCOUVERTES BIOMÉDICALES

KARINE ALLOUL

Depuis sa création en 1948, Israël a été le berceau de percées

scientifiques importantes et une source d’innovations

constantes.

En 2022, avec une population de 9, 95 millions, Israël se hissait

au 2 e rang mondial en attirant le plus d’investissements en

capital-risque par habitant, après Singapour et avant les

États-Unis.

Les innovations israéliennes se font dans plusieurs

domaines fondamentaux : sciences biomédicales,

ingénierie, sciences informatiques,

cybersécurité…

Israël est particulièrement bien

positionné pour combiner ces secteurs

d’activités afin d’arriver à de nouvelles

découvertes dans le domaine médical.

Les Israéliens visent notamment à

développer davantage ce qu’ils appellent

le secteur de la bioconvergence,

créneau d’activité combinant la biologie

et l’ingénierie axé particulièrement sur

le développement des technologies de

la santé 1 .

À titre d’exemple, Israël est reconnu

pour son invention du « PillCam », une

caméra miniature insérée dans une

pilule qui permet de visualiser et de

détecter des maladies et des troubles

gastro-intestinaux. Elle a été inventée

en 1982 par un ingénieur israélien,

Gabriel Idan. Ce dernier a utilisé ses connaissances des

fusées à tête optique pour concevoir, selon les mêmes

principes, une caméra miniaturisée insérée dans une

pilule pouvant se déplacer en prenant et transmettant

des images du système gastro-intestinal en temps réel.

La mise au point de cette technologie a pris seize ans

et sa commercialisation par la société Given Imaging a

débuté en 1998. Cette innovation technologique est venue

révolutionner la façon de diagnostiquer les maladies et les

troubles gastro-intestinaux.

Moins invasive et plus précise, elle remplace en grande

partie les tests à base de baryum radioactif et permet la

visualisation du petit intestin qui n’était pas accessible

auparavant avec les techniques endoscopiques courantes.

Depuis son invention, cette technologie continue d’être

perfectionnée. Elle est aujourd’hui commercialisée dans

plusieurs pays, dont le Canada.

« Israël est très

bien positionné

pour être un joueur

clé sur le plan

international dans

le domaine de la

bioconvergence »

Optimiser les systèmes de santé grâce à la technologie

israélienne du « PillCam »

Plus récemment, cette technologie

commence à avoir des portées sur

l’optimisation du système de santé.

En 2021, alors que la pandémie de

COVID-19 était toujours en cours,

un projet ambitieux a été initié

par Israël et le National Health

System (NHS) du Royaume-Uni :

utiliser la « PillCam » afin

d’accroître la capacité du système

de santé britannique en dépistant

de possibles cancers du côlon

chez des patients à partir de leur

domicile et en permettant ainsi

un premier triage des patients. À

cause de la pandémie, les listes

d’attente en vue de dépister des

cancers du côlon se sont allongées

et de nombreux patients hésitent à se présenter à l’hôpital

pour des tests diagnostiques. Cette collaboration vient

directement aborder un problème d’accès en temps

opportun au système de santé, mis à mal par la pandémie 2 .

Des innovations biomédicales révolutionnaires

D’autres innovations israéliennes se profilent à l’horizon.

Dans les domaines du cancer, de la génomique, des bases

de données et de l’Intelligence artificielle (IA), la société

20

ÉDITION SPÉCIALE


dépendants de la signature

génétique des patients,

ces analyses génomiques

plus poussées peuvent

également faciliter les

décisions médicales quant

au traitement à prescrire.

Créer une rétine artificielle

pour les personnes en perte

de vision

C2i, dont le Centre de recherche et développement est

basé en Israël, à Haïfa, a remporté le Prix du leadership en

innovation technologique de la plateforme nord-américaine

de surveillance du cancer numérique 2022 3 . Cette société

permet une détection plus précoce des cancers grâce à

son système numérique de surveillance de cette maladie.

Traditionnellement, beaucoup de cancers sont détectés

grâce à des IRM médicaux ou des tests sanguins.

Basé sur la technologie de séquençage du génome de

nouvelle génération (New Generation Sequencing - NGS),

le système de C2i permet un séquençage du génome

dans son entier (Whole Genetic Sequencing - WGS). Cette

technique permet de générer et d’analyser plus rapidement

de grands volumes de données génomiques détaillées avec

une méthode exclusive d’enrichissement tumorale basée

sur l’IA qui reconnaît les modèles de cancer spécifiques au

patient. Ce système détecte des signatures génomiques

plus riches à partir de l’ADN tumoral circulant (ADNc) et

couvre tous les gènes.

En élargissant sa portée, ce système peut fournir des

informations basées sur des régions séquencées plus

grandes. Ces innovations technologiques peuvent ainsi

permettre un diagnostic plus précis et plus rapide. De plus,

étant donné que plusieurs traitements personnalisés sont

La société Nano Retina

est une autre entreprise

israélienne, basée à

Herzliya, qui se consacre

à la création d’une rétine

artificielle pour redonner

une vision partielle aux personnes atteintes de maladies

visuelles dégénératives, telle la dégénérescence

maculaire relative à l’âge et à la rétinite pigmentaire,

entraînant de graves pertes de vision. En contournant les

cellules photoréceptrices endommagées et en envoyant

des impulsions électriques au nerf optique, à travers la

couche rétinienne fonctionnelle, une perception visuelle

est redonnée au patient. L’équipe de Nano Retina comprend

des ingénieurs, des ophtalmologues, des physiciens et des

spécialistes de la vision. Il s’agit d’un autre exemple de

collaboration multidisciplinaire dans le but d’arriver à des

solutions novatrices.

Israël est très bien positionné pour être un joueur clé sur le

plan international dans le domaine de la bioconvergence.

À la suite de la pandémie de COVID-19, plusieurs pays, dont

le Canada, veulent accroître leurs connaissances et leur

capacité à innover dans le domaine biomédical. Pour ce

faire, il est aujourd’hui nécessaire de combiner diverses

disciplines. Avec son bassin de chercheurs réputés, ses

universités de renom et son esprit d’entrepreneuriat, Israël

est un terrain fertile pour le développement de solutions

novatrices dans le domaine des technologies de la santé.

RÉFÉRENCES :

1. Bio-Convergence | Israel Innovation (innovationisrael.org.il)

2. https://israelactive.com/israels-medical-achievements/pillcam-and-the-uk-nhs/

3. https://www.businessupturn.com/brand-post/c2i-genomics-applauded-by-frost-sullivan-for-enabling-real-time-cancer-monitoring-using-genomic-datawith-its-c2intelligence-platform/

LVS MARS/AVRIL 2023 21


DE CÔTE-SAINT-LUC À LA KNESSET

ENTREVUE AVEC DAN ILLOUZ, DÉPUTÉ DU LIKOUD

ELIAS LEVY

Le 2 janvier dernier, Dan Illouz a été assermenté

officiellement député du parti Likoud à la Knesset.

Lors des dernières élections législatives israéliennes,

il a concouru à la 33 e position sur la liste des candidats

du Likoud, après avoir décroché la place réservée aux

immigrants lors des primaires de ce parti.

Le Likoud a fait élire 32 députés. D’après un amendement à la

Loi fondamentale d’Israël, inspiré par une loi norvégienne, les

ministres qui ont été élus à la Knesset doivent démissionner

de leur siège et laisser leur place à la première personne

de la liste de leur parti qui n’a pas obtenu un siège lors des

élections. C’est cet amendement qui a permis à Dan Illouz

de faire son entrée au parlement israélien.

« C’est l’un des plus beaux rêves de ma vie qui vient de se

concrétiser », nous a confié d’une voix empreinte d’émotion

Dan Illouz au cours de l’entrevue qu’il a accordée à

La Voix sépharade depuis Jérusalem.

Né à Montréal en 1986, diplômé de l’École Maïmonide et de

l’École Herzliah, Dan Illouz est détenteur d’un diplôme en

droit de l’Université McGill et d’une maîtrise en politique

publique de l’Université hébraïque de Jérusalem. Il a vécu à

Côte-Saint-Luc jusqu’en 2009, année où il a fait son Aliyah.

En Israël, il a occupé diverses fonctions politiques : conseiller

municipal de Jérusalem, sous la bannière du parti Hitorérout

— Tous ensemble pour Jérusalem —; conseiller législatif du

Likoud à la Knesset; conseiller juridique de l’ancien maire

de Jérusalem, Nir Barkat; conseiller auprès de la division

juridique du ministère israélien des Affaires étrangères, où

il a supervisé le volet juridique de la rédaction de plusieurs

traités internationaux.

Il est l’auteur de A Free Nation in Our Land — Une Nation

libre sur notre Terre —, un recueil de ses analyses politiques

qu’il a publiées dans les principaux journaux d’Israël.

Serez-vous à la Knesset le représentant attitré de la

communauté francophone d’Israël?

En tant que député élu de la Knesset, je veux absolument

représenter tous les citoyens d’Israël et pas seulement les

citoyens francophones. C’est la première fois qu’un oleh

francophone est élu lors des primaires du Likoud. Défendre les

intérêts des olim francophones sera l’une des priorités à l’ordre

du jour de mon agenda politique. Mais je m’attèlerai aussi à

défendre deux autres dossiers que je considère très importants :

la mise en œuvre de réformes économiques pour lutter contre

la hausse démesurée du coût de la vie et l’application de la

souveraineté israélienne sur les territoires de Judée et Samarie.

22

Dan Illouz (Crédit : Knesset)

ÉDITION SPÉCIALE

La répartition des portefeuilles ministériels par

Benyamin Netanyahou, qui semble avoir largement favorisé

ses partenaires orthodoxes et d’extrême droite, a suscité

la grogne dans les rangs du Likoud. Partagez-vous cette

frustration exprimée ouvertement par plusieurs députés de

votre parti?

C’est une fausse analyse. Avec 32 sièges dans une coalition

gouvernementale comptant 64 députés, le Likoud ne jouera

certes pas un rôle d’arrière-plan. Des ministères majeurs,

tels que la Défense, les Affaires étrangères ou la Justice,

ont été confiés à des députés chevronnés du Likoud. Ce


n’est pas la première fois que le Likoud bâtit une coalition

avec des partis de droite et orthodoxes. N’oublions pas

que c’est le premier ministre élu, Benyamin Netanyahou,

qui gérera le gouvernement. Une majorité d’Israéliens lui

font grandement confiance. C’est regrettable que des Juifs

vivant dans la diaspora très attachés à Israël soient craintifs

vis-à-vis du nouveau gouvernement. Ils sont victimes

des campagnes de désinformation menées tambour

battant par les détracteurs de Benyamin Netanyahou et

de ses partenaires au sein de la coalition qu’il a formée.

Dans le passé, le Likoud a toujours gouverné de manière

responsable. C’est ce que nous allons continuer de faire.

Vous êtes un partisan invétéré de la réforme du système

judiciaire israélien. Pourquoi ?

Cette réforme judiciaire majeure est nécessaire. Elle

atténuera considérablement la capacité de la Cour

suprême à limiter la latitude d’action de la Knesset, tout en

conférant à ce parlement le droit d’approuver ou de refuser

les nouveaux candidats à la magistrature et d’agir comme

un contrôleur du pouvoir gouvernemental. Cette réforme

limitera également la capacité du procureur général de

l’État à s’immiscer dans le champ politique, en rendant

des avis uniquement consultatifs. Dans le système légal

canadien ou britannique, que j’ai étudié exhaustivement

lors de mes études de droit à l’Université McGill, la notion

de souveraineté parlementaire a toujours primé. C’est

le parlement qui confère sa force aux autres branches :

législative, exécutive. À mon avis, le contrôle judiciaire

n’est pas justifié en Israël parce que ce pays n’a pas une

Constitution. Le système actuel place un contrôle excessif

entre les seules mains des 15 juges de la Cour suprême, qui

peut invalider à sa guise des parties ou l’ensemble des lois

promulguées très démocratiquement par la Knesset en

invoquant une violation des Lois fondamentales d’Israël. Il

est temps de redonner son pouvoir légitime à la Knesset, le

parlement élu par le peuple d’Israël.

La lutte contre l’inflation sera-t-elle l’un des principaux

chevaux de bataille du 6 e gouvernement Netanyahou?

Absolument. Israël est l’un des pays les plus chers au

monde. L’inflation endémique qui frappe de plein fouet

tous les pays a attisé la hausse des prix, qui était déjà

vertigineuse. Très nombreux sont les Israéliens à avoir

beaucoup de difficulté à joindre les deux bouts à la fin du

mois. C’est un grave problème non seulement économique,

mais aussi social. Au cours des vingt dernières années,

grâce à d’importantes réformes économiques, Israël a

bâti une économie très performante dont l’un des moteurs

principaux est le high-tech. C’est pourquoi elle attire de

nombreux investisseurs et entreprises étrangers. Mais, il

faut absolument que les couches les plus défavorisées de

la société bénéficient aussi concrètement des richesses

engendrées par ce modèle économique très libéral. En Israël,

le coût de la vie très élevé s’explique principalement par

l’existence de monopoles qui empêchent l’émergence d’une

libre concurrence. Ces groupes détiennent presque 50 %

du marché agro-alimentaire. Une poignée d’entreprises,

protégées par des régulations insensées, contrôlent les

prix. Il est temps d’éliminer ces barrières protectionnistes

afin de créer un environnement économique compétitif plus

sain et de faire baisser les prix.

En ce qui a trait au dossier israélo-palestinien, vous prônez

la ligne dure.

Soyons réalistes! Nous ne sommes pas à la veille de trouver

une solution au sempiternel conflit israélo-palestinien. Nos

devons continuer à gérer quotidiennement ce contentieux. Le

peuple juif a droit à chaque centimètre de la Terre d’Israël.

N’oublions jamais que notre droit à Tel-Aviv émane des droits

très légitimes que nous avons sur la Judée et la Samarie.

Votre Aliyah a été un moment important dans votre vie.

Après mes études en droit à l’Université McGill, plusieurs

opportunités professionnelles très alléchantes se sont

offertes à moi. J’ai décidé pourtant, à 23 ans, de faire mon

Aliyah. C’est la meilleure décision que j’ai prise dans ma vie.

Je n’aurais jamais connu la femme merveilleuse avec qui je

partage ma vie, mon épouse, une Sabra, Bat El Malka, si je

n’avais pas pris la très sage décision de m’établir en Israël.

Comment envisagez-vous l’avenir d’Israël?

Je suis très optimiste. Les défis auxquels Israël est

confronté aujourd’hui sont infiniment plus petits que ceux

auxquels le pays a fait face il y a 75, 50, ou 30 ans. Israël est

un pays très fort sur les plans économique, technologique

et militaire. À preuve : des pays arabes veulent signer un

traité de paix avec Israël non pas parce qu’ils nous aiment

follement, mais parce qu’ils sont très attirés par les

prouesses économiques et le niveau très impressionnant

des Israéliens dans le domaine de la haute technologie. Le

peuple juif n’a jamais connu dans son histoire une ère aussi

prometteuse, notamment grâce à l’existence d’Israël. Les

accords d’Abraham ont dopé l’optimisme des Israéliens.

J’espère que nous parviendrons prochainement à conclure

un traité de paix avec l’Arabie saoudite. On pourra dire

alors que le conflit qui nous a opposés pendant plusieurs

décennies au monde arabe est bel et bien terminé. Il restera

toujours le conflit israélo-palestinien à régler. Mais les plus

beaux jours d’Israël sont devant nous.

LVS MARS/AVRIL 2023 23


RENCONTRE AVEC PAUL HIRSCHSON

CONSUL GÉNÉRAL D’ISRAËL À MONTRÉAL

SYLVIE HALPERN

Tout souriant dans sa chemise blanche immaculée, le

Consul général Paul Hirschson m’a reçue dans son bureau

minimaliste de Westmount Square à la minute même où

le nouveau gouvernement Netanyahou prêtait serment à

Jérusalem. Mais j’ai bien senti d’emblée que cette entrevue

avec le représentant d’Israël au Québec et dans les

provinces de l’Atlantique serait tout sauf politique.

En poste à Montréal depuis 2021, Paul Hirschson était

naturellement bien plus enclin à parler de son désir de

développer les relations bilatérales entre le Québec et

Israël que d’évoquer les remous politiques de l’heure.

Et comme représentant zélé de son pays, il affichait un

optimisme à toute épreuve.

Rien d’étonnant chez un homme qui a grandi à Johannesburg

dans l’amour de Sion, au sein d’une famille établie depuis

cinq générations en Afrique du Sud, et qui a décidé de faire

son Aliyah à 21 ans.

« L’obsession de l’identité et de la

langue, nous, Israéliens, l’avons

encore plus que le Québec! »

« J’avais toujours été fasciné par l’histoire d’Israël. Et

quand j’ai fait mon sac, je n’ai pas réalisé un rêve : j’ai très

concrètement voulu lier ma vie à ce pays. »

Alors bien sûr, Paul Hirschson a commencé à servir dans

Tsahal puis, pendant une dizaine d’années, il a travaillé dans

le domaine effervescent du high-tech, pilotant de gros

projets, d’abord dans les pays arabes, puis en Europe, en

Afrique et en Asie.

Ça marchait plutôt bien, mais un jour ce père de trois

enfants – qui n’a pas hésité à rester à la maison pendant

six mois, à la naissance de ses jumeaux – a souhaité partir

au loin autrement. En servant son pays. Alors en 2004, il

a quitté le secteur privé pour rejoindre le ministère des

Affaires étrangères où, 15 ans avant la signature des

accords d’Abraham, il a été le premier diplomate israélien

en poste aux Émirats arabes unis.

« Ça m’a permis de renforcer à mon niveau la place d’Israël

à l’étranger, en faisant fructifier ma connaissance du

monde arabe. Les accords d’Abraham n’ont été signés

qu’en 2020, mais c’est vraiment à cette époque que nous

avons commencé à nous parler et à créer de solides ponts

entre eux et nous. »

Ensuite, il y a eu les États-Unis, puis un retour à Jérusalem,

où il a occupé pendant quatre ans le poste de porte-parole

du ministère des Affaires étrangères avant de s’envoler à

nouveau vers l’Afrique, puis les Caraïbes.

Mais aujourd’hui, alors qu’il est pour la première

fois dans nos contrées, quels colombogrammes

ce diplomate pigeon voyageur apporte-t-il au

Québec, lui qui a commencé à apprendre le français

à Dakar – « mais avec l’accent sénégalais »,

précise-t-il –, vécu six ramadans en terres arabes,

passe son temps à boire du café et se sent comme

un poisson dans l’eau à Montréal… même si par

rapport à Israël, il trouve qu’on y conduit un peu

lentement?

D’abord sa sympathie. Au Québec, il a bien sûr

découvert avec plaisir une communauté juive

dynamique et diversifiée.

« Une mosaïque qui me fait penser à celle que nous avons

en Israël, même si évidemment, ce n’est pas avec elle que

nous travaillons le plus. »

Pour insister sur l’importance que son pays accorde au

Canada, Paul Hirschson sort sa mappemonde.

« Aux États-Unis, Israël a huit consulats, en Chine cinq et

en Inde trois, comme au Canada : quelques exemples qui,

au regard de la population, veulent tout dire! Et au sein du

Canada, le développement de nos relations avec le Québec

est particulièrement important. »

24

ÉDITION SPÉCIALE


Quels sont les domaines d’activités et

les secteurs d’expertise d'Israël les plus

susceptibles d’intéresser le Québec :

le high-tech, les biotechnologies, la

cybersécurité, la recherche médicale?

« Nous avons des échanges dans tous ces

domaines, mais ils sont loin d’être aussi

développés qu’ils pourraient l’être, dit-il.

D’ailleurs, je rêve de voir Québec ouvrir une

Délégation générale en Israël parce que moi,

je peux bien frapper à toutes les portes ici,

mais il faut aussi que des Québécois aillent

frapper à toutes les portes chez nous! »

Les sujets d’échanges et les points communs

sont nombreux, assure-t-il.

« À commencer par l’obsession de l’identité et

de la langue : nous, Israéliens, l’avons encore

plus que le Québec! »

Pourtant, s’empresse-t-il aussitôt d’ajouter,

« la véritable langue que parle Israël, ce n’est

pas l’hébreu : ce sont les algorithmes, et dans

tous les domaines. Et c’est ce qui intéresse au

premier plan le gouvernement du Québec et

les entreprises d’ici ».

Preuve à l’appui, selon lui : l’an dernier,

le ministre québécois de l’Économie, de

l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon,

est venu en Israël regarder de près

comment les politiques gouvernementales

ont pu encourager le développement

d’écosystèmes technologiques, à travers des

partenariats entre le monde universitaire, les

entrepreneurs et les pouvoirs publics.

Il y a aussi le domaine culturel.

« Énormément d’artistes israéliens en tous

genres – dont nos DJs qui sont les meilleurs

au monde! – viennent avec beaucoup de succès au

Québec, en particulier à Montréal qui est un hub de

culture. Et moi, même si ce n’est pas de mon ressort,

je rêve de voir plus d’artistes québécois en Israël! »

De même, il est convaincu que l’expertise accumulée

par Israël dans l’intégration de ses immigrants

pourrait servir de modèle au Québec.

« Nous sommes différents, mais nous avons des

points communs. Israël a accueilli depuis des

décennies – moi inclus! – des millions d’immigrants

du monde entier et a prouvé sa capacité à absorber

des gens qui ne parlaient pas la langue hébraïque, le

leur a enseignée et les a intégrés dans l’économie du

Le Consul général d’Israël, Paul Hirschson

(Crédit : Consulat d’Israël à Montréal)

pays. Des délégations viennent en Israël de partout dans le monde

voir comment on s’y est pris. »

Et en retour, qu’est-ce qu’Israël a à apprendre du Québec?

Là, Paul Hirschson m’envoie aussitôt en boutade : « Peut-être un

peu plus de patience au volant! », avant d’évoquer cet art de la

coexistence que maîtrise selon lui le Québec. Surtout à l’heure du

gouvernement Netanyahou VI qu’il résume gravement d’un seul

commentaire : « En Israël, nous n’allons jamais nous haïr. »

LVS MARS/AVRIL 2023 25


LES ORIGINES DU CONFLIT

ISRAÉLO-PALESTINIEN

RÉFLEXIONS DE L’HISTORIEN GEORGES BENSOUSSAN

Historien, spécialiste de l’histoire culturelle de l’Europe des

XIX e et XX e siècles, de l’histoire de la Shoah, du sionisme et

des Juifs du monde arabe, Georges Bensoussan est l’auteur

d’une quinzaine de livres, notamment d’une imposante

Histoire intellectuelle et politique du sionisme, 1860-1940

(Éditions Fayard, 2012) et de Juifs en pays arabes. Le grand

déracinement, 1850–1975 (Éditions Tallandier, 2012. Repris en

Tallandier - Texto poche, 2021).

Il revisite la genèse du conflit israélo-arabe dans son

dernier livre, Les origines du conflit israélo-arabe, 1870–1950,

qui vient de paraître aux Presses universitaires de France

(PUF) dans la Collection « Que sais-je? ».

Georges Bensoussan nous a livré ses réflexions sur les

origines du conflit israélo-palestinien. Il a répondu par

courriel aux questions de La Voix sépharade.

Ces dimensions nationale et religieuse sont connues.

Les origines du conflit montrent deux sociétés que tout

oppose, une société moderne et sécularisée, modelée par

l’esprit des Lumières, face à une société rurale, clanique

et islamique. À ce premier affrontement s’ajoute la

place du Juif dans la civilisation islamique (dhimma), ce

statut de protégé accordé aux Juifs et aux chrétiens qui,

par définition, est un statut de dominé. Cette dimension

modèle les mentalités et rend compte pour partie de

la longévité exceptionnelle de ce conflit, en dépit de

l’étroitesse territoriale et démographique des enjeux. En

dépit aussi d’une réalité historique surinterprétée : en 1948,

750 000 Palestiniens sont condamnés à l’exode même

s’ils demeurent pour 80 % d’entre eux dans les limites de

la Palestine mandataire. Au même moment, la naissance

de l’Inde et du Pakistan conduit sur les chemins de l’exil

plus de dix millions de personnes. L’Allemagne défaite

doit aussi accueillir en quelques années douze millions

de réfugiés condamnés eux aussi à l’exil.

Un conflit vieux de plus de cent ans.

La longue durée du conflit israélo-palestinien incite à

évoquer d’autres explications relatives à sa nature. À

l’aspect national s’ajoute une dimension religieuse qui

s’impose dès le milieu des années 1920 quand le Mufti de

Jérusalem, Amin al Husseini, comprend que le nationalisme

n’a qu’une faible prise sur une société palestinienne rurale

et clanique. La communauté des croyants (Ummat al

Muslimin) est seule à même de mobiliser autour de symboles

forts et d’entretenir la rumeur selon laquelle l’entreprise

sioniste entend reconstruire le Temple juif sur l’esplanade

des mosquées. Deux des trois premières flambées de

violence antisioniste (devenues rapidement antijuives), en

1920 et en 1929, ont pour point de départ la question du Mur

occidental (Kotel) à Jérusalem où les Juifs sont suspectés de

vouloir modifier un statu quo qui leur est très défavorable,

« premier pas » vers la reconstruction du Temple.

Aujourd’hui, personne n’évoque ces

populations et leurs descendants en

termes de réfugiés. Les Palestiniens

sont seuls dans ce cas. 80 ans après le

début du conflit, les descendants des

réfugiés de 1948 cultivent le mythe du

retour, entretenus, nourris, éduqués et

soignés par une agence spécialisée de

l’ONU (UNRWA), créée en 1950 à titre

temporaire. Dans le même temps, près

d’un million de Juifs du monde arabe ont

été poussés à l’exil et spoliés. Devenus

citoyens d’autres États, aucun de leurs

descendants ne réclame le statut de

réfugié ni n’entretient le mythe du retour

vers la maison natale.

26

ÉDITION SPÉCIALE


La solution à deux États, prônée dès 1947 par

l’ONU, est-elle caduque?

En 1947, la solution à deux États, que prônaient

déjà les Anglais dès 1937, paraissait la plus

réaliste. La partie arabe la refuse en 1947. De là,

la guerre et l’exode des Palestiniens.

La solution à deux États demeure encore

pertinente à la condition de revenir à l’origine du

problème. En 1920, la majorité des Palestiniens

parlaient à leur propos de la Syrie du sud

(Suria Al Janoubiyya), avant que les Alliés et la

Société des Nations (SDN) donnent naissance

avec les « mandats » (1922) à cette Syrie

amputée qu’est la « Palestine ». Un peu plus de

100 000 km² regroupant l’État d’Israël actuel,

les territoires palestiniens et le Royaume de

Jordanie. À cette époque, chacun sait que la

« Palestine » (la « Terre sainte » des chrétiens

et l’Eretz Israël des Juifs) est située sur les deux

rives du Jourdain (cf. les douze tribus d’Israël).

En 1922, afin de satisfaire l’une des promesses

faites en 1915 au Chérif de la Mecque, Hussein,

les Anglais séparent la Transjordanie de la

Cisjordanie. L’émirat artificiel ainsi créé est

attribué à l’un des quatre fils de Hussein,

Abdallah. La Palestine est réduite au quart de

sa superficie historique, et c’est alors que le

conflit judéo-arabe devient quasi insoluble quand la perte

de cette réserve foncière enferme Juifs et Arabes dans un

tête-à-tête sanglant à l’intérieur d’un étroit périmètre.

Évoquer la solution à deux États sans revenir à cette

genèse, c’est demeurer prisonnier de l’impasse créée par

les Anglais il y a un siècle. Or, cette solution demeure l’une

des rares portes de sortie de ce conflit à la condition de

prendre en compte les frontières du traité de Sèvres (1920),

ce qui engage la Jordanie dont la population est constituée

Georges Bensoussan (Crédit : Roland Harari)

à 70 % de Palestiniens originaires de l’autre rive.

Mais imaginer un État de Palestine dans la seule

Cisjordanie menacée de surpopulation est une vue de

l’esprit. Enclavé, sans débouché direct sur la mer (hors

Gaza), constellé d’implantations israéliennes, dont

certaines sont de petites villes, ce territoire deviendrait

vite un bouillon de colère, une base d’irrédentisme et

de tensions aux frontières qui risquerait de déboucher

sur une nouvelle occupation israélienne.

LVS MARS/AVRIL 2023

27


Une entente est-elle toujours possible?

Le compromis sur la base des traités de 1920 demeure une

solution bancale, mais le choix est ici entre une mauvaise

et une très mauvaise solution. À la condition de faire

montre d’un réel courage politique, qui implique l’usage de

la force si nécessaire, pour imposer aux deux peuples des

transferts de population basés sur le précédent gréco-turc

de 1922. Parce qu’arrive toujours le moment où la force

militaire, même la plus puissante du monde, se prend à

vaciller, et ce jour-là le temps ne sera plus au compromis,

cette acceptation mature d’une frustration. Les guerres de

religion des XVI e et XVII e siècles en Europe furent la matrice

de cette culture, et ce n’est sans doute pas un hasard si le

XVII e siècle européen est le grand siècle de la pensée qui

ouvrit le chemin des Lumières.

« On peut certes regretter le temps de la marine à voile

et des lampes à huile. Mais hors des réalités, il n’est point

de politique qui vaille », disait le général de Gaulle en 1960,

à la fin de la guerre d’Algérie. Juifs et Arabes pourraient

reprendre ces mots à leur compte, les uns pour accepter

qu’une partie de la légitimité historique de l’État juif

échappe à l’État d’Israël, les autres pour remiser les clés

de leurs maisons perdues et rompre avec la mythologie

victimaire. Le retour à Jaffa et à Ramleh n’aura jamais lieu,

sauf sur un champ de ruines et de cadavres. C’est à partir

de cette réalité qu’il faut négocier, y compris pour les uns

et les autres, la compensation pour les biens perdus.

alors que l'armée britannique est encore en Palestine, les

miliciens arabes attaquent les agglomérations juives et

surtout leur réseau de communications particulièrement

vulnérable. Avec l’invasion le 15 mai 1948 des contingents

envoyés en Palestine par cinq pays arabes, il s’agit cette

fois d’une guerre générale remportée huit mois plus

tard par les Israéliens. L’exode des Palestiniens, marqué

par de très nombreux cas d’expulsion, est d’abord le

résultat d’une guerre où, comme dans tout conflit, les

populations civiles fuient les bombardements et l’arrivée

de l’ennemi. Dans un second temps, les forces israéliennes

empêchent le retour des réfugiés parce qu’elles redoutent,

expliquent-elles, de voir se créer derrière leurs lignes un

« ennemi de l’intérieur » constitué de populations qui

avaient participé en 1947-1948 à la tentative d’étranglement

du futur État juif. Dernière dissemblance : en 1950, 80 %

des réfugiés palestiniens demeurent dans les limites de la

Palestine mandataire tandis que la quasi-totalité des Juifs

du monde arabe vit une rupture totale avec son monde

d’origine.

Peut-on vraiment établir une équivalence entre le drame

vécu par les Juifs des pays arabes et le départ de dizaines

de milliers de Palestiniens de l’État d’Israël naissant, en

1948?

Ces situations sont à la fois différentes et liées. La

naissance d’Israël précipite en effet le départ des Juifs

d’un monde arabe dont les dirigeants multiplient alors les

menaces en présentant « leurs » communautés juives en

otages. De là, les pressions et la violence qui conduisent à

l’exil. C’est là le lien entre les deux situations. Mais sur le

fond les divergences l’emportent.

L’exode des Palestiniens résulte en effet de la guerre

qu’ils déclenchent au lendemain de la décision des

Nations unies partageant le pays. Le 30 novembre 1947,

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« L’HISTOIRE DIPLOMATIQUE D’ISRAËL

REMONTE À L’ANTIQUITÉ »

ELIAS LEVY

étatique sans équivalent dans l’histoire des relations

internationales. Une histoire diplomatique de pays

relativement récents, tels que le Canada ou les États-Unis,

commencerait au moment de leur indépendance. Celle

de pays anciens, tels que la Chine, la Russie ou la France,

devrait remonter très loin dans le passé. Il en va de même

pour Israël, mais le peuple juif fut sans État pendant les

deux tiers de son histoire trimillénaire. D’où ma décision,

ambitieuse mais nécessaire, d’écrire une histoire

diplomatique d’Israël qui remonte à l’Antiquité. On ne saurait

en effet comprendre, à mon sens, la diplomatie israélienne

sans une perspective historique de longue durée et sans

connaître la façon dont les Juifs perçoivent leur rapport aux

nations depuis l’époque biblique.

La politique étrangère israélienne contemporaine a-t-elle

maintenu un credo, ou certains principes, de la diplomatie

d’Israël des temps anciens?

Emmanuel Navon.

(Crédit : Éditions Hermann)

Le politologue israélien Emmanuel Navon est l’auteur

d’un livre magistral retraçant deux mille ans d’histoire

diplomatique du peuple juif et d’Israël, L’étoile et le sceptre

(Éditions Hermann, 2022). La préface est signée par

Isaac Herzog, président d’Israël.

Emmanuel Navon est professeur de relations

internationales à l’Université de Tel-Aviv et à l’Université

Reichman de Herzliya et analyste politique senior à la chaîne de

télévision d’information en continu israélienne I24News.

Il a accordé une entrevue à La Voix sépharade.

Vous rappelez exhaustivement dans votre livre que la politique

étrangère d’Israël n’a pas commencé à la fin du XIX e siècle

avec l’émergence du mouvement sioniste, ni en 1948, avec la

création de l’État hébreu, mais à l’époque biblique.

Écrire une histoire diplomatique d’Israël pose un défi car c'est

un pays à la fois moderne et ancien, avec une discontinuité

Ce credo est résumé dans le titre du livre, inspiré du

verset de la Bible « Une étoile s’élance de Jacob, un

sceptre surgit du sein d’Israël » (Nombres XXIV, 17). Verset

énigmatique qui associe l’étoile – symbole de la foi juive –

à Jacob et le sceptre – symbole de pouvoir – à Israël. Il

s’agit pourtant de la même personne, puisque Jacob fut

renommé Israël après sa lutte contre un assaillant avant

l’aube. Or, ce changement de nom n’est pas définitif :

le texte biblique continue d’employer les deux noms

après que Jacob ait été renommé (contrairement au

cas d’Abraham et de Sarah). Jacob est décrit dans le

texte biblique comme un Athénien et son frère jumeau

Esaü comme un Spartiate (sans que ces adjectifs

n’apparaissent dans la Bible). Ni l’un ni l’autre ne disposait

des deux qualités requises pour perpétuer l’héritage

d’Abraham et d’Isaac : la foi et le pouvoir. Jacob n’est

renommé Israël qu’après avoir prouvé sa capacité et sa

volonté d’utiliser la force pour préserver son message

spirituel, mais l’alternance entre les deux noms indique

qu’il continue d’osciller entre l’étoile et le sceptre. Cette

tension se retouve au travers de l’histoire diplomatique du

peuple juif, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours.

30

ÉDITION SPÉCIALE


Les accords d’Abraham, conclus en 2020 sous l’égide de

l’administration Trump, n’ont-ils pas crédibilisé l’un des

principaux axes stratégiques de la diplomatie israélienne :

la normalisation avec le monde arabo-musulman?

La normalisation entre Israël et les pays du Golfe a

deux raisons principales : la menace iranienne et l’ère

post-pétrolière. Les pays du Golfe partagent la position

d’Israël face à la subversion chiite et au programme

nucléaire de l’Iran. Ils savent que la coopération sécuritaire

avec Israël est incontournable. Par ailleurs, leur modèle

économique rentier est mis à mal par le déclin structurel

des prix du pétrole et la transition énergétique. Ils savent

que la croissance à long terme dépend de l’innovation

technologique et qu’Israël est le pôle de celle-ci. Les pays

arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël ont

également obtenu des contreparties de l’administration

Trump : les Émirats arabes unis ont bloqué le projet israélien

d’annexion de territoires de la Cisjordanie, le Soudan a été

retiré de la liste de pays soutenant le terrorisme et le Maroc

s’est vu reconnaître par les États-Unis sa souveraineté sur

le Sahara occidental. Ces pays ne voulaient plus être les

otages du conflit israélo-palestinien pour bénéficier de

relations sécuritaires et technologiques avec Israël.

La normalisation des relations diplomatiques entre Israël

et le Maroc n’a-t-elle pas une portée très particulière?

Oui, du fait des liens particuliers entre la monarchie

alaouite et le peuple juif. Une grande partie de la

population israélienne est originaire du Maroc, la Mimouna

est devenue une fête nationale (ainsi qu’un événement

incontournable pour les hommes politique israéliens).

Israël et le Maroc coopèrent dans le domaine sécuritaire

contre les jihadistes en Mauritanie et contre les forces

subversives soutenues par l’Algérie et l’Iran dans le Sahara

occidental. Le partenariat entre Israël et le Maroc peut

contribuer à soulager les crises énergétique et alimentaire

aggravées par l’agression russe en Ukraine grâce à la

technologie israélienne et aux atouts du Maroc (plus gros

producteur au monde de phosphates et leader mondial

dans le domaine de l’énergie solaire).

Vous rappelez que les relations entre Israël et la Chine,

qui ont connu un essor important ces dernières années,

sont l’objet de profondes divergences entre Jérusalem

et Washington. Celles-ci pourraient-elles affecter la

relation stratégique israélo-américaine?

de Mao Zedong en 1976 et la politique pragmatique de

Deng Xiaoping à partir de 1979 ont permis une mise

à jour des relations entre la Chine et Israël. Les deux

pays établirent des relations diplomatiques en 1992

et développèrent un partenariat militaire très poussé

– les États-Unis mirent fin à ce partenariat au début

des années 2000, remplacé depuis par des relations

économiques qui ont connu un grand essor. Mais, ces

relations économiques dans le domaine civil posent

problème aujourd’hui aux États-Unis du fait de la rivalité

entre Washington et Pékin et des investissements

chinois dans la technologie et dans les infrastructures

israéliennes. La relation stratégique avec les États-Unis

étant irremplaçable, Israël a dû réduire ses relations

économiques avec la Chine. Quant aux investissements

chinois en Israël, ils sont désormais coordonnés avec les

Américains. Enfin, la montée de la tension géopolitique

entre les États-Unis et la Chine et l’intensification du

soutien chinois à l’Iran ont créé récemment une certaine

distance entre la Chine et Israël.

Comment envisagez-vous l’avenir de la diplomatie

israélienne?

Pour que son avenir soit couronné de succès, et pour éviter

les échecs, la diplomatie israélienne doit tirer la leçon

que lui enseigne son histoire unique : garder un équilibre

difficile entre nos valeurs (symbolisées par l’étoile) et le

réalisme politique (symbolisé par le sceptre). L’ultime

leçon de la fresque historique qui émerge de mon livre est

que les royaumes et les États juifs qui se sont succédé

dans le passé ont réussi sur le plan diplomatique lorsqu’ils

ont allié la fidélité à l’histoire juive et le pragmatisme face

à une réalité internationale changeante. À chaque fois

qu’Israël a voulu se couper de son passé ou faire fi de la

réalité, les conséquences ont été chèrement payées.

C’est un lieu commun de dire que notre avenir dépend de

la connaissance de notre passé, mais c’est également une

vérité.

La version intégrale de cette entrevue est en ligne

sur le site Web de LVS : lvsmagazine.com

Israël développa des relations militaires officieuses avec

la Chine à la fin des années 1970 alors qu’à l’époque ce

pays communiste ne reconnaissait pas Israël et soutenait

activement l’OLP. La rivalité soviéto-chinoise, la mort

LVS MARS/AVRIL 2023 31


QUELLES SONT LES ORIGINES DE LA VAGUE

POPULISTE QUI TRAVERSE ISRAËL?

ENTREVUE AVEC LE POLITOLOGUE ILAN GREILSAMMER

ELIAS LEVY

Benyamin Netanyahou a gagné son grand pari. Le voici de

nouveau premier ministre à la tête du gouvernement le plus

à droite de l’histoire d’Israël. Une coalition gouvernementale

qui comprend une importante frange formée d’élus

politiques d’extrême droite.

La poussée fulgurante de l’extrême droite en Israël a

des origines politiques, mais aussi sociales, explique

le politologue Ilan Greilsammer en entrevue depuis

Jérusalem.

Professeur émérite de Science politique de l’Université

Bar-Ilan, sise à Ramat Gan, et

directeur du département de Science

politique du Collège universitaire

d’Ashkélon, Ilan Greilsammer est un

analyste chevronné de l’actualité

sociopolitique israélienne.

La vague populiste qui déferle sur

l’Occident n’a pas épargné Israël.

Le populisme israélien rejoint

entièrement le populisme européen

ou trumpiste aux États-Unis avec

ses mêmes promesses grossières :

donner carte blanche à la police,

la sécurité personnelle avant tout,

armer les citoyens pour qu’ils se

protègent, expulser les étrangers et les réfugiés, remplacer

les juges libéraux par des juges conservateurs à la main

lourde, etc. Il ne faut pas se le cacher, Otzmat Yehudit, le

parti dirigé par Itamar Ben Gvir, est une formation politique

d’extrême droite avec des tendances fascisantes. Nous

assistons aujourd’hui en Israël à une banalisation de

l’extrême droite.

« Nous assistons

aujourd’hui en

Israël à une

banalisation de

l’extrême droite »

laissés-pour-compte de la société israélienne face à la

bourgeoisie intellectuelle et repue de Tel-Aviv et aux élites

ashkénazes laïques. Il y a un certain nombre de problèmes

dans la société israélienne qui n’ont pas été résolus. En

premier lieu, le problème social qui touche durement des villes

de la périphérie d’Israël : Ofakim, Nétivot, Sdérot, Dimona…

essentiellement peuplées de Juifs orientaux qui vivent très

difficilement, surtout en période de hausse démesurée du

coût de la vie. Ces derniers ont énormément de mal à finir

leur mois avec leur salaire, dans un pays parmi les plus chers

au monde. Il y a un fossé social en Israël

qui est tout à fait réel et qui suscite une

révolte des citoyens les plus pauvres.

Y a-t-il d’autres facteurs qui expliquent

cette poussée de l’extrême droite?

Il y a aussi un grand problème d’insécurité

personnelle en Israël. Dans le Sud, les

Bédouins commettent des exactions à

leur guise : arrêtent des voitures sur les

autoroutes, menacent ou escroquent

des citoyens… Au confluent de tout ça,

beaucoup d’Israéliens traditionnels,

notamment les Juifs originaires des

pays arabes, considèrent que la gauche

ou le centre, Yaïr Lapid ou Benny Gantz,

ont fait une croix, si on peut dire, sur

le caractère juif de l’État d’Israël : s’escriment à changer

le statut des rabbins, de la cacherout, de la conversion

au judaïsme, facilitent l’immigration de personnes qui,

halakhiquement, ne sont pas considérées comme Juifs… La

fusion de tous ces thèmes sulfureux constitue un terreau

extrêmement favorable pour le développement d’une

extrême droite.

Ce phénomène a-t-il une explication rationnelle?

Oui. Depuis longtemps, des fractures sociologiques,

démographiques et idéologiques lacèrent la société

israélienne. Il faut reconnaître que les résultats des

élections du 1 er novembre dernier sont une revanche des

Cinq élections en moins de quatre ans. N’est-il pas temps

de réformer le système politique israélien?

Il y a peu de chances qu’un projet de réforme du système

électoral israélien se concrétise dans un futur proche,

même si celui-ci est justifié. Je vois mal comment une telle

32

ÉDITION SPÉCIALE


réforme pourrait être mise en œuvre puisqu’Israël est un

pays sans constitution. Il faudrait donc que la Knesset

vote en faveur d’un tel changement, par exemple pour

passer de la représentation proportionnelle à un système

majoritaire. Je doute fort que les moyens et petits partis

votent pour cette réforme qui amoindrira certes leur

influence ou les supprimera de la carte électorale. Toute

tentative de réforme du système politique israélien

suscitera une levée de boucliers. Les partis d’extrême

droite, sionistes religieux, ultraorthodoxes, de gauche ou

arabes s’opposeront farouchement à cette réforme car ils

ne veulent pas disparaître de la scène politique. Personne

ne veut scier la branche sur laquelle il est assis. Par contre,

il y a eu de petits changements ces dernières années.

Désormais, le seuil de représentation pour être élu à la

Knesset est de 3,25 % alors qu’au début de la création de

l’État d’Israël il était de 1 %.

Quel regard portez-vous sur les accords d’Abraham?

Les accords d’Abraham nous prouvent deux choses.

Premièrement : le souci des dirigeants arabes pour la

cause palestinienne est minimal. Les dirigeants des

Émirats arabes unis, du Bahreïn, du Maroc… tout en

continuant à clamer leur solidarité indéfectible à l’égard

du peuple palestinien, leur priorité actuelle est de nouer

des liens étroits avec Israël, et plus particulièrement avec

le très performant secteur du high-tech militaire israélien.

Deuxièmement : pour la majorité des pays arabes sunnites

de la région, aujourd’hui, le grand danger, c’est l’Iran. Ceux-ci

se retrouvent avec Israël dans le camp des pays qui

s’opposent fermement à l’influence, au terrorisme et à la

bombe nucléaire de l’Iran.

Mais, force est de constater que les accords d’Abraham

sont une normalisation politique entre les dirigeants

et non entre les peuples. En effet, je ne crois pas que

ces accords aient pris racine dans les populations des

pays arabes signataires de ceux-ci. Nous l’avons vu lors

de la dernière Coupe du monde de football au Qatar.

Les journalistes israéliens qui étaient à Doha pour

couvrir cet événement sportif étaient surpris, je ne sais

pas pourquoi, que des Marocains, des Bahreïniens, des

Dubaïotes, des Soudanais… leur tournent le dos ou les

invectivent en leur reprochant d’être les représentants

d’un pays qui perpètre des crimes abominables contre

les Palestiniens. Ces journalistes croyaient naïvement

que l’enthousiasme suscité par les accords d’Abraham

s’était aussi répandu parmi les populations des pays

arabes ayant adhéré à ce processus de normalisation

politique avec Israël.

Ilan Greilsammer (Crédit : Université Bar-Ilan)

Les pourparlers entre Israël et les Palestiniens sont

au point mort depuis plusieurs années. Avez-vous bon

espoir qu’ils soient relancés dans un futur proche?

Non, car ni les Israéliens ni les Palestiniens ne sont

prêts à les relancer. Il y a un dicton qui dit : « On ne peut

pas amener les chevaux à boire dans l’abreuvoir s’ils

n’ont pas soif. » Il n’y a pas de volonté en Israël, ni chez

les Palestiniens ni dans la communauté internationale,

de faire progresser l’épineux dossier israélo-palestinien.

Les Américains ont d’autres chats à fouetter : la lutte

contre l’inflation, l’Ukraine, la Chine… Les Européens

aussi ont d’autres soucis plus prioritaires : les problèmes

énergétiques, la crise économique, l’immigration

clandestine…

Comment envisagez-vous l’avenir d’Israël?

Je suis sioniste. Ça me fait de la peine de dire ça à un Juif

canadien, mais je ne pense pas qu’il y ait un grand avenir

pour le judaïsme dans la diaspora. En Amérique du Nord,

les statistiques sur les mariages mixtes et l’assimilation

des Juifs sont effarantes. Une frange de la jeunesse juive

américaine ne s’identifie plus du tout à Israël. Si j’étais un

père juif dans la diaspora, je voudrais que mes enfants

et petits-enfants restent Juifs. Je les encouragerai

certainement à faire leur Aliyah. Je suis aussi un sioniste

de gauche qui se soucie beaucoup de l’avenir d’Israël.

Or, le gouvernement d’ultradroite qui dirige désormais

Israël n’est pas une source d’assurance pour beaucoup

d’Israéliens, dont je fais partie. J’espère que nous serons

très nombreux à nous opposer, pacifiquement bien sûr,

aux politiques du 6 e gouvernement Netanyahou.

C’est l’avenir de la démocratie israélienne qui est en jeu.

LVS MARS/AVRIL 2023 33


« LA SOLUTION À DEUX ÉTATS A ÉTÉ ET

CONTINUE D’ÊTRE UNE ILLUSION »

ELIAS LEVY

« La solution à deux États, l’un israélien, l’autre

palestinien, coexistant côte à côte, a été et

continue d’être une illusion. Nous ne sommes

jamais parvenus à matérialiser ce scénario

politique, même à l’époque où il y avait en

Palestine un leader, Yasser Arafat, dont la

signature avait une validité. Il était le seul

dirigeant palestinien à avoir toute la légitimité,

aussi bien politique que révolutionnaire,

pour conclure un accord de paix avec Israël.

Aujourd’hui, dans le camp palestinien, aucun

leader n’a cette légitimité. »

L’ex-diplomate et ancienne figure de la

gauche israélienne, Shlomo Ben-Ami,

est très pessimiste en ce qui a trait à la

mise en œuvre de la solution à deux États

car il considère qu’elle est

« inopérante ».

Il ne caresse plus l’espoir

qu’Israéliens et Palestiniens

parviennent un jour à trancher le

nœud gordien du conflit qui les

oppose depuis plus d’un siècle.

« Ces deux peuples aigris

ne sont jamais parvenus au

point de rencontre qui aurait

réconcilié leurs narratifs

nationaux respectifs. Un accord

de paix n’est pas une question

de justice, mais d’équilibre. Au contraire,

la justice est un obstacle à la paix. Celleci

est un point d’équilibre entre les besoins

respectifs des deux parties antagonistes.

Israéliens et Palestiniens ne pourront obtenir

qu’une justice relative, jamais entière. Ils n’ont

jamais atteint ce point d’équilibre essentiel. »

La Voix sépharade a rencontré

Shlomo Ben-Ami lors de son passage à

Montréal cet automne, où il a été l’invité

de la Fédération sépharade du Canada.

Désormais, dans les deux camps, l’heure

De gauche à droite : M’hamed Ifriquine, Consul général du Maroc à Montréal, Avraham Elarar,

président de la Fédération sépharade du Canada, Paul Hirschorn, Consul général d’Israël à

Montréal, Shlomo Ben-Ami et Amnon Suissa, professeur émérite de l’UQAM, lors d’une conférence

prononcée par M. Ben-Ami à la Bibliothèque publique juive de Montréal (Crédit: Roland Harari)

Rencontre avec

Shlomo Ben-Ami,

ancien ministre des

Affaires étrangères

d’Israël

n’est plus aux compromis, mais à la radicalisation

politique, constate avec une pointe d’amertume

celui qui fut, de 1999 à 2001, ministre des Affaires

étrangères et ministre de la Sécurité publique

d’Israël dans le gouvernement travailliste dirigé

par Ehoud Barak.

Shlomo Ben-Ami, qui fut Ambassadeur d’Israël

en Espagne de 1987 à 1989, a été un acteur de

premier plan dans les négociations israélopalestiniennes.

En 1991, il a été membre de la délégation

israélienne qui prit part à la Conférence de

paix de Madrid. En 2000, il participa activement

aux rondes de négociation aux sommets de Camp David et de Taba, qui se

déroulèrent sous les auspices du président américain Bill Clinton.

Ce Sépharade né à Tanger, au Maroc, qui a fait son Aliyah avec sa famille

en 1955, diplômé en Histoire de l’Université de Tel-Aviv, où il fut professeur

titulaire pendant une trentaine d’années, et de l’Université d’Oxford – où il

obtint son doctorat –, est l’auteur de plusieurs livres remarqués sur l’histoire

de l’Espagne contemporaine et le conflit israélo-arabe.

Dans son dernier livre, ses Mémoires politiques, Prophets without Honor.

The 2000 Camp David Summit and the End of the Two-State Solution, paru en

anglais cet automne aux Éditions Oxford University Press, il relate par le menu

détail son expérience de négociateur aux pourparlers de paix qui se sont tenus

à Camp David en 2000 et nous livre son analyse du conflit israélo-palestinien

et de ses principaux enjeux.

34

ÉDITION SPÉCIALE


Shlomo Ben-Ami est actuellement vice-président du Centre

international de Tolède pour la paix (Espagne), un groupe de

réflexion et d’analyse qui élabore des stratégies de diplomatie

parallèle explorant des pistes potentielles de solutions pour

dénouer des conflits internationaux.

Ce fin analyste de la conjoncture politique moyen-orientale

estime qu’aucun dirigeant israélien ne pourra offrir aux

Palestiniens plus que ce qui leur a déjà été proposé dans le

passé, et qu’ils ont refusé catégoriquement, notamment en

2000, dans le cadre des propositions de paix formulées par

Bill Clinton : le futur État palestinien comprendrait quelque

95 % de la Cisjordanie; en compensation des terres annexées

par Israël, ce dernier céderait 1 % à 3 % de son territoire actuel;

80 % des colons juifs seraient rassemblés dans des blocs de

colonies; les parties arabes de Jérusalem reviendraient aux

Palestiniens…

« Aujourd’hui, une entente honorable et équitable entre les deux

parties est un scénario chimérique parce qu’en Israël et en

Palestine, le panorama politique a radicalement changé. »

Israël est dirigé désormais par un gouvernement d’ultradroite,

souligne-t-il.

« Nous ne sommes pas à la veille de voir émerger dans le

paysage politique israélien un nouveau de Gaulle, un leader

capable de trahir sa paroisse électorale. »

En Palestine, poursuit-il, nous assistons impavides non

seulement à « une radicalisation politique et idéologique

effarante », dont les principaux hérauts sont le Hamas et le

Jihad islamique, mais aussi à « la rupture de l’épine dorsale du

mouvement national palestinien ».

« La jeunesse et les nationalistes palestiniens considèrent le

président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, comme un

traître à la solde d’Israël. Son autorité s’est sérieusement érodée.

Il n’a aucun contrôle sur les groupes armés terroristes palestiniens

qui combattent Tsahal à Jénine et dans d’autres territoires sous

l’égide de l’Autorité palestinienne. Craignant un raz-de-marée

électoral du Hamas, Mahmoud Abbas n’a pas organisé des

élections législatives nationales depuis dix-sept ans. »

D’après Shlomo Ben-Ami, le conflit israélo-palestinien n’est

plus un dossier prioritaire pour le principal médiateur dans la

région, les États-Unis.

« Joe Biden a actuellement un agenda très lourd et des plus

compliqués. Ses principales priorités sont : la lutte contre

l’inflation, la loi sur l’avortement, l’Ukraine, les relations avec la

Chine… La question palestinienne est un dossier très épineux,

désormais secondaire, où tous les présidents américains se

sont heurtés à un mur. Preuve manifeste de ce désintérêt : c’est

la première fois en quarante ans qu’un président américain ne

nomme pas un émissaire spécial pour le Proche-Orient. »

Shlomo Ben-Ami estime qu’il faut retourner à la « solution

jordanienne », c’est-à-dire l’option d’une confédération jordanopalestinienne.

Dans son plan de paix proposé en 1967, après la guerre des

Six Jours, Yigal Allon, ministre des Affaires étrangères et vicepremier

ministre dans le gouvernement de Levi Eshkol, fut

l’initiateur de cette idée. Le défunt Roi Hussein de Jordanie défendit

aussi vigoureusement cette option. Il considérait le mouvement

national palestinien comme une sérieuse menace à la stabilité

politique de son royaume, rappelle Shlomo Ben-Ami.

« Le roi actuel de Jordanie, Abdallah II, ne rejette pas l’option

d’une confédération israélo-palestinienne, mais il a suggéré

aux Israéliens qu’avant d’explorer sérieusement cette voie, ils

négocient avec les Palestiniens la création d’un État autonome

pour ces derniers. »

Il existe une différence de taille entre une fédération et une

confédération, précise l’historien.

Dans le deuxième modèle, ce sont deux États déjà indépendants

qui décident de s’unir au sein d’une nouvelle entité politique.

En 2008, Ehoud Olmert prônait dans son plan de paix un retrait

unilatéral de la Cisjordanie.

« Ce scénario effraya les Jordaniens qui craignaient qu’un retrait

unilatéral d’Israël crée un grand chaos en Cisjordanie et un

exode massif de Palestiniens vers la Jordanie, qui déstabiliserait

le royaume hachémite. Mais, à mon avis, un plan bien élaboré

qui assurerait le plein contrôle de la Jordanie sur la Cisjordanie,

dans le cadre d’une confédération jordano-palestinienne,

redevient une option réaliste. »

D’après Shlomo Ben-Ami, les accords d’Abraham constituent

un « tournant historique majeur » et un « changement de

paradigme radical » dans le conflit israélo-arabe.

« Les pays arabes signataires de ces accords considèrent

que la création d’un État palestinien indépendant n’est plus

une condition sine qua non pour conclure un accord de paix

avec Israël. Les accords d’Abraham ont mis un terme au

conflit israélo-arabe. Nous devons reconnaître que Donald

Trump est entré dans l’Histoire en accomplissant un tour de

force impressionnant dans ce dossier qui paraissait jusque-là

insoluble, où tous ses prédécesseurs avaient échoué. »

Comment Shlomo Ben-Ami envisage-t-il l’avenir d’Israël?

« Je suis très pessimiste à court terme, notamment pour ce qui

est de la possibilité de mettre en œuvre la solution à deux États.

Cependant, je suis optimiste à long terme. Je crois que la société

israélienne a suffisamment d’anticorps pour contrecarrer

une politique de suicide national qui concrétiserait l’annexion

intégrale des territoires palestiniens de la Cisjordanie. Tôt ou

tard, les Israéliens se réveilleront, car cette option funeste les

mènera tout droit à la création d’un État binational judéo-arabe,

où les Juifs finiront par être minoritaires. Je ne crois pas que nos

grands-parents ou parents sont venus en Israël pour que leurs

petits-enfants soient citoyens d’un État judéo-arabe. »

LVS MARS/AVRIL 2023 35


« L’IRAN EST LA SEULE MENACE EXISTENTIELLE

QUI PÈSE AUJOURD’HUI SUR ISRAËL »

L’ANALYSE DU GÉOPOLITOLOGUE MEIR MASRI

« Israël a élaboré un plan

exhaustif d’intervention

militaire frontale et massive

en territoire iranien »

Docteur en géopolitique et maître de conférences à

l’Université hébraïque de Jérusalem, Meir Masri est un

spécialiste reconnu des questions géopolitiques moyenorientales.

Il a représenté Israël dans plusieurs conférences

internationales. Ce parfait arabisant et fin connaisseur du

monde arabo-musulman intervient quotidiennement sur les

grandes chaînes d’information des pays arabes du Golfe.

Meir Masri a analysé pour La Voix sépharade les principaux

enjeux stratégiques auxquels Israël est aujourd’hui confronté.

Il a répondu par courriel à nos questions.

Le programme nucléaire de l’Iran est-il la principale

menace stratégique qui pèse aujourd’hui sur Israël?

C’est la seule menace existentielle qui pèse aujourd’hui sur

Israël. D’une part, l’acquisition par l’Iran islamique de l’arme

suprême entérinerait définitivement son hégémonie sur les

pays arabes du Moyen-Orient. De l’autre, elle rendrait caduc

le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNT),

puisqu’un État membre aura ouvertement et impunément

violé ses engagements. Cela pourrait d’ailleurs avoir pour

conséquence supplémentaire une course à l’armement

nucléaire dans une région hautement inflammable et instable.

Comment Israël se prépare-t-il à un éventuel affrontement

militaire avec l’Iran?

Peu convaincu de l’issue du cercle vicieux des négociations

stériles et sans fin avec Téhéran, Israël a élaboré un plan

exhaustif d’intervention militaire frontale et massive en

territoire iranien, avec un objectif précis : détruire les

capacités nucléaires de la République islamique. Une telle

mission consisterait à anéantir les installations nucléaires

de l’Iran, mais aussi à neutraliser ses systèmes de défense

antiaérienne ainsi qu’un bon nombre de sites militaires afin

de réduire a maxima les capacités de riposte de l’ennemi.

Un budget colossal a été alloué, des manœuvres militaires

d’une ampleur inédite ont été effectuées et des armes

ont été commandées aux États-Unis. Washington a donné

son aval à la livraison à Israël en 2025 de quatre avions

ravitailleurs Boeing nécessaires pour mener une telle

opération militaire. Israël a demandé à ce que cette date de

livraison soit avancée. L’administration Biden s’est même

engagée à défendre Israël s’il venait à subir une riposte

iranienne dans le sillage d’une campagne militaire initiée

par Tsahal sur le sol iranien. Cela signifie clairement que

toute intervention militaire israélienne en Iran impliquerait

nécessairement les États-Unis d’une façon ou d’une autre.

Des forces spéciales israéliennes ont été dépêchées en

Azerbaïdjan, pays limitrophe de l’Iran et véritable plateforme

des renseignements israéliens. Grâce aux traités de paix

dits d’Abraham signés en septembre 2020, des accords de

coopération sécuritaire (touchant notamment à la défense

antiaérienne) et en matière de renseignement ont été

conclus durant les deux dernières années entre Israël et

des pays arabes de la région signataires de ces accords.

Adepte d’une ligne intransigeante face au régime des

ayatollahs, Israël a fait comprendre à la communauté

internationale qu’il ne sera concerné par aucun compromis

qu’il jugera insatisfaisant et que sa liberté d’action restera

intacte, avec ou sans accord. Bref, Jérusalem est déterminée

à arrêter l’Iran – manu militari s’il le faut.

La Syrie est devenue un nouveau terrain d’affrontements

entre Israël et l’Iran. Les escarmouches fréquentes qui

s’y produisent pourraient-elles dégénérer en un nouveau

conflit militaire?

Je ne le pense pas. L’Iran ne dispose pas des ressources

suffisantes qui lui permettraient d’affronter Israël en Syrie

ou, encore moins, depuis la Syrie. De plus, l’espace aérien

de la région sous le joug d’Assad est sous contrôle russe.

Enfin, les Iraniens n’ont pas intérêt à provoquer l’escalade

alors que leur présence est de plus en plus contestée par la

Russie qui cherche à stabiliser la Syrie.

36

ÉDITION SPÉCIALE


Meir Marsri (Crédit : M. Masri)

L’accord signé à l’automne 2022 entre le Liban

et Israël délimitant leur frontière maritime

amoindrira-t-il les velléités belliqueuses du

Hezbollah contre Israël?

Il faut rappeler que le Hezbollah ne bénéficie plus

de la même popularité dont il jouissait il y a dix-sept

ans au pays du Cèdre. Il a pris le Liban en otage. Il

ne s’aventurera pas dans une guerre qui pourrait

lui faire perdre ses acquis. D’autant que le régime

iranien qui le téléguide n’a aucun intérêt à provoquer

des désordres supplémentaires, alors qu’il est aux

abois du fait des sanctions occidentales qu’il subit

et qu’il cherche à tout prix à parvenir à un accord sur

son programme nucléaire.

La guerre avec Israël étant sa raison d’être, le

Hezbollah est le principal perdant de la signature

de cet accord officiel sur le tracé de la frontière

maritime entre Israël et le Liban. Il a tout fait pour

faire échouer les négociations, mais la pression

locale, régionale et internationale a été plus forte.

Sombrant dans une crise économique sans

précédent, le Liban n’avait plus de temps à perdre

pour exploiter son gaz. Naturellement, il s’agit

d’une avancée qui réduit de manière significative

le niveau de tension entre Jérusalem et Beyrouth,

limitant ainsi la marge de manœuvre de la milice

pro-iranienne.

Il faut rappeler que les deux pays ont signé un

traité de paix dans le passé : l’accord du 17 mai 1983

qui avait même été confortablement ratifié par le

Parlement libanais et qui reconnaissait Jérusalem

comme capitale d’Israël. Cet accord a été abrogé

un an plus tard, à l’issue de l’occupation syrienne

du Liban. Il est aussi important de souligner que

les armées d’Israël et du Liban ne se sont jamais

fait la guerre. Lors de la première guerre israélo-arabe de 1948-1949,

la participation du Liban n’a été que symbolique et pas une seule

balle libanaise n’a été tirée en direction du territoire du jeune État

hébreu. Le Liban refusera de soutenir l’effort de guerre arabe en 1967

et en 1973. Et chaque fois qu’Israël est intervenu au Liban, c’était

pour combattre des éléments étrangers à ce pays : l’OLP, l’armée

syrienne, le Hezbollah. Ce sont des faits très méconnus qu’il convient

de souligner pour rappeler que nous avons des amis à Beyrouth et

que le Liban ne constitue pas un bloc monolithique et unanimement

hostile à Israël.

Les affrontements entre l’armée israélienne et des groupes armés

terroristes palestiniens en Cisjordanie se sont multipliés ces

derniers mois. Quelle analyse faites-vous de ce regain de violence?

L’Autorité palestinienne et son président vieillissant traversent une

profonde crise de légitimité. Divisées par les querelles intestines et

gangrenées par la corruption, les institutions palestiniennes issues

des accords d’Oslo sont vacillantes et de plus en plus contestées

par la rue et par une violente opposition islamiste. Naturellement,

le Hamas cherche à profiter de cette situation pour consolider sa

présence dans les Territoires autonomes, poussant Ramallah à la

surenchère.

Toutefois, nous sommes loin de la configuration de l’an 2000. Il ne

faut pas oublier que la seconde Intifada a été voulue et orchestrée

par l’Autorité palestinienne de Yasser Arafat, et qu’elle a été

saluée par le monde arabe. Aujourd’hui, en dépit de sa rhétorique

anti-israélienne, l’Autorité palestinienne lutte contre les groupes

islamistes et coopère avec Israël. Certes, il ne semble pas que nous

allions vers une accalmie, mais je ne pense pas non plus que nous

nous dirigions vers une escalade.

Dans le front sud, une accalmie semble régner à Gaza. Mais le

Hamas et le Djihad islamique ne sont-ils pas en train de renforcer

leur arsenal militaire et de planifier leur prochaine guerre contre

Israël?

Lors de sa dernière opération à Gaza, l’année dernière, Tsahal a réussi

à éliminer en trois jours l’ensemble du commandement suprême

du Djihad islamique dans la bande de Gaza. De plus, des dizaines

d’infrastructures et de bureaux appartenant à cette organisation

terroriste proche du régime iranien ont été réduits à néant. Enfin,

et c’est un point très intéressant, le Hamas n’a pas appuyé le

Djihad islamique et a même conduit les efforts visant à parvenir à

un cessez-le-feu. Cette opération éclair a renforcé la force de

dissuasion d’Israël et drastiquement affaibli la deuxième force

terroriste dans la bande de Gaza. Elle a aussi démontré que face à la

menace du terrorisme, Israël était uni. La coalition gouvernementale

au pouvoir à Jérusalem à ce moment-là s’est montrée unanime.

Le premier ministre, Yair Lapid, a agi de concert avec le chef de

l’opposition, Benyamin Netanyahou. S’il le faut et si sa sécurité

venait à être menacée une fois de plus, Israël n’hésitera pas à mener

une nouvelle opération militaire.

LVS MARS/AVRIL 2023 37


LE MAROC, ISRAËL ET LES JUIFS MAROCAINS

RENCONTRE AVEC LE JOURNALISTE MAROCAIN JAMAL AMIAR

YVAN CLICHE

Dans un ouvrage remarqué et remarquable, Le Maroc,

Israël et les Juifs marocains. Culture, politique, diplomatie,

business et religion (Éditions BiblioMonde, 2022), le

journaliste marocain Jamal Amiar brosse un tour d’horizon

approfondi de la coexistence judéo-musulmane au Maroc

et du rôle des Juifs marocains en Israël.

L’auteur décrit la relation unique liant le Maroc à la

communauté juive originaire du pays. Cette relation, plus

symbiotique et harmonieuse que partout ailleurs dans le

monde arabe, souligne Jamal Amiar, tient notamment au

fait que les Juifs n’ont jamais été incités à partir de leur

contrée natale. Et malgré leur départ, les liens politiques

et humains entre Marocains juifs et musulmans se

sont poursuivis, de manière continue, malgré les lourds

soubresauts politiques au Proche-Orient.

Cette relation, unique, a permis au Maroc de jouer un rôle

central dans la diplomatie relative au conflit israélopalestinien.

Et aussi d’obtenir, en 2020, la reconnaissance

américaine de sa pleine souveraineté sur le Sahara en

échange du rétablissement d’un lien diplomatique avec

l’État hébreu (accords d’Abraham).

La Voix sépharade a pu échanger récemment avec Jamal

Amiar via une séance Zoom Montréal-Tanger.

dans le domaine patrimonial et culturel. En parallèle, j’ai

assisté au fil du temps à la visibilité grandissante de la

culture marocaine en Israël, voire au poids politique de

plus en plus déterminant de la communauté juive d’origine

marocaine dans ce pays.

Le Maroc a rétabli ses relations diplomatiques avec

Israël en 2020, mais pas au rang d’ambassadeur.

Qu’est-ce qui explique selon vous cette prudence du

côté marocain?

Des relations au niveau ambassadeur sont certes

symboliquement très importantes mais, en même

temps, les Marocains et les Israéliens sont des gens très

pragmatiques. Les Marocains jouent de prudence pour ne

pas donner un blanc-seing à l’État hébreu, dans le dossier

palestinien notamment. Rabat veut aussi jauger comment

la situation va évoluer au niveau de l’opinion publique

Qu’est-ce qui explique selon vous ce décollage rapide,

que vous décrivez fort bien dans votre livre, de la relation

israélo-marocaine à la suite de la signature des accords

d’Abraham?

L’intensité de cette relation découle de la longévité et de

la vigueur des liens établis entre les États de ces deux

pays depuis des décennies, mais aussi et surtout entre

les communautés, les peuples. Et ce, malgré la baisse

drastique de la taille de la communauté juive au Maroc.

Celle-ci est passée, pour rappel, de 300 000 personnes en

1948 à environ 3 000 aujourd’hui. Une communauté réduite

certes, mais qui a su se maintenir, voire renaître. Cette

renaissance, je la constate depuis longtemps. La présence

juive au Maroc aurait pu disparaître, mais heureusement,

elle s’est maintenue, contrairement aux autres pays arabes,

38

ÉDITION SPÉCIALE


Jamal Amiar

(Crédit : Éditions BiblioMonde)

« La culture

juive fait partie

intégrante

de l’identité

marocaine »

marocaine. Je vois les choses ainsi :

les Marocains vont de plus en

plus prendre conscience qu’il y a

800 000 de leurs concitoyens en

Israël. Dès lors, la relation entre

les deux pays ne peut que devenir « normale ». Et cette

normalité devrait amener une relation à un plus haut niveau.

Votre livre fait état des liens étroits tissés entre les

élites marocaines et israéliennes sur le plan économique,

universitaire, judiciaire, etc. Mais qu’en est-il au niveau de

la population en général, de ce qu’on nomme ici au Québec

le « monde ordinaire »?

C’est un argument qui est souvent invoqué pour diminuer

l’importance de la proche relation qui existe entre Israéliens

et Marocains. Vous savez, beaucoup d’étudiants provenant

des classes populaires ont étudié la culture juive au Maroc

et ont poursuivi leurs études en Israël. Dans la population

en général au Maroc, la relation avec l’Algérie par exemple

soulève bien plus d’émotion que celle avec l’État hébreu.

De toute manière, dans ce dossier comme dans d’autres, il

y aura toujours des critiques, des oppositions, mais cela ne

doit pas nous empêcher d’avancer de manière constructive.

Vous rappelez à quel point la communauté juive du

Maroc a rapetissé au fil des ans. Comment les Marocains

d’aujourd’hui, et les prochaines générations, pourront-ils

garder un lien étroit avec la culture juive ancestrale

de leur pays? Comment cette exception marocaine

pourra-t-elle être maintenue à long terme?

On m’a souvent posé cette question, et c’est bien normal!

D’une part, la présence juive marocaine, ce n’est pas

uniquement le nombre, c’est aussi la présence culturelle.

Celle-ci est encore bien réelle, bien présente, très riche. Le

patrimoine est là, mais des travaux d’ampleur sont encore

nécessaires, par exemple pour restaurer le patrimoine

existant, dont les mellahs (quartiers

juifs). D’autre part, je mettrais en évidence

ma propre contribution : je ne connais

pas d’autres pays arabes où un non-Juif

aurait pu, comme moi, écrire sans souci

un livre sur la contribution significative

associée à la présence et à la culture

juives dans son pays. Par ailleurs,

comme le signale une personne que

j’ai interviewée dans mon livre, le futur

juif au Maroc sera déterminé en bonne

partie par la relation israélo-marocaine.

Les liens se développent, sur tous

les registres, dans tous les domaines

d’activités. Par exemple, le tourisme est

en hausse, des Marocains se mettent

à l’hébreu pour mieux accueillir les

Israéliens… c’est tout dire.

Votre livre souligne à quel point le Maroc fait figure

d’exception dans sa relation historique avec sa

communauté juive. Pouvez-vous revenir sur cette

singularité.

C’est une exception, et pour une raison très simple : au

Maroc, contrairement à d’autres pays, que ce soit en

Europe ou dans le monde arabe, jamais la condition de

la communauté juive n’a été instrumentalisée à des fins

politiques. Aucun dirigeant n’a cédé à la tentation de pointer

du doigt la communauté hébraïque pour des problèmes

internes ou externes. Le Maroc a aussi accueilli des

réfugiés juifs durant et après la Deuxième Guerre mondiale.

LVS MARS/AVRIL 2023 39


Même durant les périodes d’Aliyah (émigration juive vers

Israël), dans les années 1950, celle-ci a été organisée et

gérée de manière officielle ou officieuse. Ce traitement a

contribué à établir une relation de confiance, permettant

à terme les développements politiques que l’on voit

présentement. Je ne dis pas que tout a été parfait, pas du

tout, mais je trouve dommage que des auteurs, comme

l’historien français Georges Bensoussan, ne jettent qu’un

regard négatif sur cette relation dans son ensemble.

Chose certaine, les Juifs marocains que j’ai rencontrés, et

ce, partout dans le monde, conservent un lien sentimental

très fort avec le Maroc.

Comment entrevoyez-vous la poursuite des relations

Maroc-Israël avec la nouvelle coalition au pouvoir en

Israël, dirigée par Benyamin Netanyahou?

Cette relation est solide, largement capable de résister aux

aléas de la politique israélienne. Elle est très précieuse,

importante, centrale, pour les deux pays. Je suis résolument

convaincu que les échanges israélo-marocains, dans

tous les domaines, continueront à se développer. L’enjeu

palestinien reste bien sûr déterminant, mais Israël ne

souhaite certes pas de ce côté une dégradation de la

situation.

Question d’ordre plus personnel : pourquoi un non-Juif, du

Maroc, s’est autant intéressé, toute sa vie, à la relation

de son pays avec sa communauté juive et à son destin

en Israël?

J’ai grandi à Casablanca et à Tanger. Je me suis intéressé

tout jeune à la politique. Puis, j’ai vu une communauté avec

laquelle j’ai grandi, en toute amitié, partir, quitter le foyer en

même temps qu’on entendait parler que de conflits entre

les Juifs et les Musulmans au Proche-Orient. Cet enjeu m’a

donc immédiatement interpellé, il a suscité ma curiosité.

Après 30 ans d’études sur le sujet, des dizaines d’articles,

un livre, il me reste encore des zones à approfondir, dont la

proximité musulmane marocaine avec la culture juive et

l’attachement des Juifs pour le Maroc. Cela dit, le constat

que je tire de mes recherches est simple : l’héritage juif

fait partie intégrante de la culture marocaine. D’ailleurs,

cela a été reconnu formellement dans la Constitution

du Maroc, en 2011. Cette relation est singulière, riche,

complexe, en évolution, elle doit donc continuer d’être

étudiée. J’espère que mon livre contribuera à la poursuite

des recherches et des enquêtes sur cette question qui est

centrale dans l’identité marocaine.

La demande de denrées alimentaires dans la

communauté a augmenté de 11,5 % l'année dernière.

Grâce à vous, nos efforts en matière de sécurité

alimentaire ont permis d’effectuer plus de 8 200

livraisons de denrées et de produits de première

nécessité à des familles dans le besoin, allégeant

ainsi leurs dépenses quotidiennes et leur permettant

de célébrer les fêtes juives dans la dignité.

D’année en année, notre communauté se mobilise

pour s’assurer que personne n’est laissé pour compte.

Ensemble. Plus forts.

Que jamais.

JOYEUSES FÊTES

DE PESSAH

HAG PESSAH

SAMEACH

ÉDITION SPÉCIALE

Scannez pour savoir comment

la Fédération CJA soutient la

communauté juive


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LA « START-UP NATION »

EST DEVENUE UNE « GAZ NATION »

L’ANALYSE DE L’ÉCONOMISTE JACQUES BENDELAC

Docteur en économie, enseignant, chercheur, directeur

de recherche à l’Institut israélien de sécurité sociale, à

Jérusalem, Jacques Bendelac vit en Israël depuis 1983. Il

est l’auteur de plusieurs livres remarqués sur l’économie et

la société israéliennes, les Arabes d’Israël et les relations

israélo-palestiniennes.

Son dernier livre : Les années Netanyahou. Le grand virage

d’Israël (Éditions L’Harmattan, 2022).

Il a répondu par courriel aux questions de La Voix sépharade.

Israël est en bonne voie de devenir une puissance

gazière régionale. Le gaz révolutionnera-t-il l’économie

israélienne?

La « révolution gazière » en Israël

a déjà commencé! L’exploitation

des gisements gaziers représente

pour Israël des milliers d’emplois et

des flux de revenus considérables;

sans compter l’impact sur

l’environnement, le gaz étant

plus propre que le mazout et le

charbon. Dorénavant, le gaz extrait

des gisements de la Méditerranée

comblera la moitié des besoins

énergétiques du pays, et cette proportion va aller en

augmentant. D’ici à 2025, 75 % de l’électricité israélienne

sera produite à partir du gaz.

C’est une véritable révolution si on se souvient que jusqu’en

2010, Israël était totalement dépendant des importations

pour son énergie. Grâce au gaz local, Israël importe de

moins en moins de carburants de l’étranger, ce qui lui fait

économiser des devises. D’un autre côté, Israël est aussi

devenu exportateur de gaz, ce qui fait rentrer des devises

dans les caisses du pays. L’année dernière, Israël a inauguré

un « fonds souverain » destiné à gérer les revenus dégagés

par le gaz et à les utiliser pour financer de grands projets.

Les retombées du gaz sur l’économie israélienne sont donc

inestimables, notamment en période de crise énergétique

mondiale et d’envolée des prix des carburants.

En devenant une puissance énergétique, capable de suffire

à ses besoins et d’exporter du gaz naturel vers les pays

voisins, Israël renforcera-t-il sa position régionale?

C’est une des principales retombées de l’exploitation du

gaz : Israël s’impose comme une puissance régionale et

la crise énergétique actuelle accélère ce processus. Pour

l’instant, Israël exporte son gaz vers la Jordanie et l’Égypte,

mais la guerre en Ukraine a modifié les relations régionales.

Désormais, l’Europe est devenue un marché potentiel pour

le gaz israélien. La Turquie souhaite faire transiter le gaz

israélien par un gazoduc sis sur son territoire alors que

l’Égypte a commencé à liquéfier le gaz qu’elle achète à

Israël pour le revendre en Europe. Autrement dit, le gaz est

devenu une opportunité

économique pour Israël,

ce qui renforce sa position

géopolitique. Bref, c’est

toute la donne régionale

qui est bouleversée au

plus grand profit d’Israël

qui va en tirer des

bénéfices économiques et

politiques considérables.

Qui aurait pensé que le gaz

puisse être à l’origine d’un accord maritime qu’Israël a signé

avec un de ses principaux ennemis dans la région, le Liban!

Sans compter les accords d’Abraham qui ont développé les

relations économiques avec des pays arabes. En 2021, un

fonds d’investissement des Émirats arabes unis a acheté

22 % du capital du gisement israélien Tamar pour la somme

d’un milliard de dollars.

« D’ici à 2025, 75 % de

l’électricité israélienne sera

produite à partir du gaz »

L’accord signé à l’automne 2022 entre le Liban et Israël

délimitant leur frontière maritime, qui assure la répartition

de précieux gisements gaziers offshore en Méditerranée

orientale, est une première historique. Benyamin

Netanyahou était farouchement opposé à cette entente.

Son gouvernement pourrait-il la résilier?

Théoriquement, l’actuel gouvernement Netanyahou pourrait

annuler l’accord israélo-libanais signé par le gouvernement

42

ÉDITION SPÉCIALE


précédent de Yaïr Lapid, mais je ne crois pas qu’il

prendra le risque de se mettre à dos les États-Unis

et l’Union européenne qui ont beaucoup œuvré pour

finaliser cette entente. C’est vrai que Netanyahou

s’est élevé vigoureusement contre cet accord

maritime; mais en fin diplomate, il comprendra que

celui-ci n’est pas seulement économique, il est aussi

sécuritaire puisqu’il va renforcer l’indépendance

énergétique du Liban et réduire l’influence de l’Iran

dans la région. En fait, Israël s’assure la poursuite

de son exploitation gazière tout en éloignant les

menaces du Hezbollah. Cet accord tire le tapis sous

les pieds du mouvement armé chiite pro-iranien,

renforce la sécurité de l’État juif à sa frontière

libanaise et consolide son économie, ce qui valait

bien quelques compromis de sa part. Certes, Israël

et le Liban resteront deux pays en guerre, malgré cet

accord sur leur frontière maritime. Mais en définitive,

celui-ci bouleverse la géopolitique régionale en

renforçant le gouvernement libanais, en affaiblissant

le Hezbollah et en réduisant la dépendance libanaise

vis-à-vis de l’Iran.

La haute technologie est-elle toujours le moteur

fondamental de la croissance économique d’Israël?

Le secteur de la haute technologie est en perte

de vitesse, je dirais même qu’il a cessé d’être le

moteur essentiel de la croissance de l’économie

israélienne depuis le début des années 2010. Sa

part dans l’emploi, dans les exportations et la

production nationale stagne pour plusieurs raisons :

Israël manque de cerveaux et d’argent alors que la

concurrence internationale se fait plus pressante.

Résultat : les créations de start-ups sont en baisse

et les entreprises israéliennes sont souvent vendues

à des investisseurs étrangers ou délocalisent en

Inde pour trouver de la main-d’œuvre qualifiée.

Le recul de la haute technologie a été parallèle

à la montée du secteur gazier tout au long de la

dernière décennie. Le gaz est en train de remplacer

la haute technologie comme moteur de l’économie

israélienne. Ce phénomène va aller en s’accentuant.

On peut même dire que la « Gaz Nation » est en passe

de remplacer la « Start-Up Nation » ! Certes, les deux

sont liées puisque le secteur de l’énergie est aussi

très technologique. Les innovations israéliennes

contribuent au développement d’autres sources

d’énergie propres dont le pays a tant besoin, comme

le soleil et le vent.

Jacques Bendelac (Crédit : J. Bendelac)

Quels sont les principaux défis de l’économie

israélienne en 2023?

À l’heure du 75 e anniversaire d’Israël, la principale

préoccupation des Israéliens est l’insuffisance

de leur pouvoir d’achat. La lutte contre la hausse

du coût de la vie va être l’un des principaux enjeux

économiques en 2023. Rogné par l’inflation, le

revenu de beaucoup de familles ne suffit plus pour

vivre correctement, surtout si on prend en compte

le prix du logement qui a explosé. C’est pourquoi il

est urgent de revaloriser le salaire minimum (qui n’a

pas bougé en Israël depuis cinq ans) et de relever les

prestations sociales destinées aux familles les plus

défavorisées.

Un autre défi urgent est d’augmenter la participation

au marché du travail des Juifs orthodoxes et

des Arabes; ce sera la seule façon de tirer ces

communautés de la pauvreté tout en améliorant la

productivité du travail qui est encore trop basse en

Israël.

Améliorer les résultats scolaires des petits

Israéliens est un autre défi qui devra figurer en tête

des priorités en 2023.

Mais il y a un autre enjeu majeur auquel Israël

devra faire face prochainement : la lutte contre le

réchauffement climatique. Le pays est largement

en retard sur les autres pays occidentaux. Les

retombées économiques d’une politique climatique

efficace seront considérables.

LVS MARS/AVRIL 2023 43


RÉFLEXIONS SUR LES 75 ANS DE

L’ÉTAT D’ISRAËL

ENTRETIEN AVEC LE RABBIN OURY CHERKI

ÉRIC YAAKOV DEBROISE

« Les 75 ans d’Israël m’inspirent cette réflexion : c’est l’âge

qu’avait Abraham quand il a quitté l’exil pour entrer dans la

Terre de Canaan. Le chiffre 75 symbolise une phase décisive

dans l’évolution du peuple d’Israël. »

Né en Algérie, le Rabbin Oury Cherki a fait son Aliyah en 1972. Il

a effectué ses études rabbiniques à la Yéchiva Merkaz Harav,

à Jérusalem, dirigée par le Rabbin Zvi Yehouda Kook, fils du

Grand Rabbin Abraham Isaac HaCohen Kook.

Il enseigne à la Yéchiva Mahon Meïr, à Jérusalem. Il est aussi

le leader spirituel de la Communauté francophone Beth

Yehouda, sise à Kiryat Moshé, quartier de Jérusalem.

Il est le fondateur de deux importantes institutions

éducatives : Brit Olam – Centre Noahide mondial –, qui

diffuse le noahisme 1 auprès des non-Juifs, et Roch Yehoudi,

une école d’études supérieures dont la mission est de

former des cadres et des intellectuels pour transmettre le

judaïsme et construire des ponts de dialogue avec les laïcs.

En ce qui a trait à sa pensée religieuse, associée souvent, de

« manière réductrice », déplore-t-il, au sionisme religieux,

il tient à préciser qu’il se place sous l’autorité morale et

l’enseignement du Rav Kook et qu’il est un disciple de

Manitou, le Rabbin Léon Yehouda Ashkénazi.

Le Rabbin Oury Cherki est l’auteur d’une vingtaine de livres, dont

le Sidour Bet Melou’ha sur Yom Hatsmaout. Son dernier livre :

Sainteté et nature. Aux racines de la vie (Éditions Ourim, 2022).

Il vit à Jérusalem. Il est marié et père de sept enfants. Un de

ses fils a été assassiné lors d’un attentat terroriste.

Il a accordé une entrevue à La Voix sépharade, par Zoom,

depuis sa résidence à Jérusalem.

Quel regard portez-vous sur la société israélienne de 2023?

Il y a dans la société israélienne un phénomène assez

surprenant. Deux couches se superposent : le conscient et le

subconscient.

Dans le conscient, chacun met en évidence ce qui le caractérise

et le différencie des autres : Sépharades/Ashkénazes, haredim/

sionistes, droite/gauche sur le plan politique... Mais, à l’insu de

toutes ces tendances, une synthèse inévitable se crée.

Le haredi pourra toujours prétendre qu’il n’est pas sioniste,

mais il l’est de facto dans beaucoup de domaines. De même,

la partie de la société israélienne qui se définit comme

« hiloni » pourra toujours affirmer qu’elle est laïque, mais en

vérité elle est orthodoxe. En effet, les hilonim ne fréquentent

pas la synagogue orthodoxe, mais ils ne rejettent pas pour

autant le réformisme ou d’autres courants du judaïsme.

Il y a dans la société israélienne un phénomène de fraternité

qui est diffus et pas toujours reconnu, mais qui est tout à

fait réel.

Le soir de Yom Hatsmaout, nous organisons au Kotel de

Jérusalem une prière avec le Hallel à laquelle participent

quelque 5 000 personnes provenant d’horizons très différents.

Parmi eux : des haredim vêtus à la polonaise qui reconnaissent

aussi que l’État d’Israël correspond à ce que la tradition juive

appelle la Géoula : la délivrance d’Israël.

En Israël, les distinctions entre les différents groupes sont des

marqueurs identitaires incontournables, mais ils ne doivent

pas entraver le dialogue et la compréhension mutuelle entre

ceux-ci. Regrettablement, c’est ce qui arrive trop souvent!

Nous devons dépasser les lignes de brisure et encourager un

dialogue constructif.

Nombreux sont ceux, surtout dans la diaspora, qui

craignent une « théocratisation » d’Israël. Cette crainte

est-elle fondée?

C’est un épouvantail brandi à tort et à travers, mais derrière

celui-ci, il n’y a absolument rien. C’est une coquille vide! Ceux

qui craignent une « théocratisation » d’Israël, ils établissent

bien sûr une analogie avec l’Iran et son régime des Ayatollah,

connaissent très mal le judaïsme et les Juifs. La séparation

entre l’État et la religion est une idée d’origine européenne qui

n’est pas pertinente pour le peuple d’Israël pour une raison

très simple : jusqu’à aujourd’hui, la société israélienne n’a pas

décidé si elle est une religion ou une nation.

En fait, l’identité d’Israël est beaucoup plus complexe et

différente de celle que certains dépeignent aujourd’hui.

Israël est à la fois une identité religieuse, nationale et

universelle. On ne peut pas dissocier l’une de ces trois

composantes cardinales de l’identité d’Israël. C’est ce

qui explique les tensions que nous vivons dans la société

israélienne, mais celles-ci sont constructives.

Certains craignent aussi une remise en cause de la Loi du

retour.

En ce qui a trait à la Loi du retour, depuis une quinzaine

d’années, il y a une anomalie. Beaucoup d’immigrants de

l’ancienne URSS ne sont pas Juifs, selon la Halakha, mais

44

ÉDITION SPÉCIALE


ils bénéficient de la Loi du retour. Un déséquilibre

s’est créé sur le plan sociologique. C’est la raison

pour laquelle on veut modifier cette loi. Il ne s’agit

certes pas de l’annuler totalement, mais de supprimer

la clause dite du « petit-fils », qui permet à une

personne totalement déconnectée du judaïsme, et

même d’obédience chrétienne, de bénéficier de tous

les avantages socioéconomiques offerts par l’État

d’Israël aux nouveaux immigrants. Il s’agit simplement

de rectifier une anomalie.

Quelle est votre position sur la question très délicate

des conversions au judaïsme?

Le problème qui se pose est celui d’un manque de

consensus entre les décisionnaires de la Halakha

chargés des conversions. Ce qui amène parfois à des

décisions aberrantes. Le grand défi : concilier leurs

points de vue, souvent très opposés. Il faut rappeler

que le principe de la conversion repose sur deux grands

fondements : l’appartenance au peuple juif et l’adhésion

aux commandements du judaïsme, les Mitzvot. Il y

a également la solidarité avec l’identité nationale.

Comme le dit Ruth dans Le Livre de Ruth : « D’abord

ton peuple et mon peuple, après seulement ton Dieu et

mon Dieu. » Ça veut dire quoi « Ton Dieu et mon Dieu? »,

demanderont certains candidats à la conversion. Ces

derniers plaideront : « Je veux faire ce que les Juifs font.

Or, je constate que beaucoup de Juifs ne respectent pas

le Shabbat, alors, pourquoi devrais-je le respecter? »

Toute la problématique se situe au niveau de la Halakha.

Y a-t-il des solutions?

À mon avis, les solutions existent et peuvent être appliquées.

Mais pour y parvenir le dialogue est essentiel. En matière de

conversion, on pense souvent que les sionistes religieux sont

laxistes et les haredim très intransigeants. La réalité sur le

terrain met en charpie cette perception. Souvent, dans les

milieux ultra-orthodoxes, un problème de conversion sera réglé

facilement en catimini. Les conversions faites dans l’armée

d’Israël ont été agréées par une éminente autorité rabbinique

difficile à contourner, le Rav Ovadia Yossef. En Israël, décider

de se convertir au judaïsme ou non a des conséquences sur le

plan juridique. C’est pourquoi j’attends des dirigeants politiques

israéliens qu’ils se mêlent un peu plus de la Halakha.

Selon vous, l’étude de la Torah contribue à l’édification

d’une société israélienne plus fraternelle.

Un des fondateurs du mouvement Hashomer Hatzair,

Avraham Hazan, disait : « Moi, je suis un mécréant, mais mes

enfants sont des ignorants. » Ce refus de l’autorité religieuse

cache très profondément la recherche d’une acceptation de

la Torah, non pas parce qu’elle est imposée par la tradition

juive, mais parce qu’elle est reconnue comme un instrument

éducatif d’une grande valeur. La diffusion d’un enseignement

sérieux de la Torah qui dépasserait la petitesse de la vie

Le Rabbin Oury Cherki (Crédit: O. Cherki)

communautaire est nécessaire. Réduire la Torah à la joie

du repas de Shabbat, ce serait trop simpliste. La Torah a

quelque chose à dire à tous les niveaux de l’existence, et

essentiellement au niveau politique étant donné qu’elle est

une doctrine politique de la nation hébraïque sur sa terre.

C’est pourquoi l’étude de la Torah et le développement de

la pensée juive sont essentiels en Israël afin de bâtir une

société plus harmonieuse.

75 ans après la création de l’État d’Israël, le sionisme a-t-il

toujours une raison d’être?

Le sionisme a une finalité universelle qui implique une

recherche du sens véritable des valeurs fondamentales.

Aujourd’hui, l’objectif du sionisme n’est plus de faire fleurir le

Néguev, mais de refleurir une société, on pourrait même dire

une civilisation particulière à Israël. Il s’agit de savoir ce que

nous, Juifs, avons à dire au monde.

1. Un Noahide est celui qui admet le judaïsme comme sa religion sans appartenir à

la nation d’Israël. Pour répondre aux défis des Noahides, le Rabbin Oury Cherki

a écrit deux ouvrages majeurs : Brit Olam, un livre des prières, et Brit Shalom,

une sorte de Choulkhan Aroukh pour les Noahides traduit en 16 langues.

LVS MARS/AVRIL 2023 45


QU’EST-CE QU’ÊTRE SÉPHARADE DANS

LA SOCIÉTÉ ISRAÉLIENNE D’AUJOURD’HUI?

RÉFLEXIONS DE L’ÉCRIVAIN ET PHILOSOPHE AMI BOUGANIM

Né en 1951 dans la ville portuaire marocaine d’Essaouira

(Mogador), l’essayiste, romancier et philosophe

Ami Bouganim est l’un des grands écrivains et intellectuels

contemporains israéliens de langue française. Il est celui

qui a le mieux retracé le déracinement de la communauté

juive marocaine d’Israël ayant fait son Aliyah dans les

années 50 et 60.

Ami Bouganim, qui vit à Netanya

depuis 1970, est l’auteur d’une

cinquantaine de romans, nouvelles

et essais, écrits parallèlement en

français et en hébreu. Son dernier

livre: Le livre violet (Éditions de Mai/

Fondation Matanel, 2023).

Il a nous a livré ses réflexions sur

cette brûlante question identitaire.

Le sépharadisme dans la société

israélienne d’aujourd’hui.

Je reconnais ne suivre ni les recherches rabbiniques ni les

recherches folkloriques sépharades, je ne saurais donc

me prononcer sur celles-ci qui me semblent avoir épuisé

la nostalgie qui les portait. En revanche, nous assistons à

une véritable appropriation, sans récriminations et sans

complexes, de la productivité israélienne par les Orientaux

des deuxième et troisième générations. Leurs contributions

à la recherche médicale, aux sciences astrophysiques,

à la biologie et à l’Intelligence artificielle (IA) sont

prometteuses. Nous assistons également à l’émergence

de nouveaux artistes qui s’inscrivent dans des tendances

mondialistes. Cependant, la classe politique sépharade

reste aussi inintéressante et incompétente que par le passé,

à l’exception notoire des femmes qu’elles soient de droite ou

de gauche – du moins dans les formations non intégristes qui

persistent, elles, à pratiquer une scandaleuse exploitation

de la femme et sa réclusion, légitimée par toutes sortes de

commentaires rabbiniques ou para-rabbiniques.

« En mettant tous les

non-Ashkénazes dans

le même sac oriental, la

question sépharade s’est

totalement diluée »

La « Question sépharade » dans la société israélienne, très

aiguë dans les années 60 et 70, est-elle révolue ?

C’est de moins en moins la « Question sépharade »,

qui n’a plus cours qu’au Canada et dans certains

milieux américains, que la « Question orientale ».

En mettant tous les non-Ashkénazes dans le même sac

oriental, la question sépharade

s’est totalement diluée. On ne

distingue plus entre Sépharades

de Turquie et Sépharades de

Bulgarie, Sépharades du Maroc

(Mégorashim) et Berbères du

Maroc (Toshavim)… La question

est d’autant moins d’actualité que

les militants – culturels, sociaux,

politiques – se sont reconnus

dans cette appellation et s’en

sont réclamés, abandonnant

le riche patrimoine sépharade

d’Espagne, d’Italie et de Turquie à l’Université israélienne,

au point d’avoir l’impression aujourd’hui que ni Maïmonide ni

Moïse de Léon n’ont été Sépharades. C’est, pour le meilleur

et pour le pire, à une expropriation symbolique que s’est

livrée l’Université israélienne. Cela explique que rares

sont encore ceux qui traitent de ce que vous nommez la

« Question sépharade ». Même la communauté française

n’a jamais été à la hauteur de cette question, sinon avec

des maîtres comme Léon Ashkénazi – Manitou – qu’on tire

ces dernières années du côté du Maharal de Prague et du

Rav Kook alors qu’il était un maître du drosh maghrébin.

Même la « Question orientale » n’est plus aussi déterminante

que par le passé. Elle est invoquée dans les disparités

sociales et intellectuelles, elle n’est plus de mise dans

l’armée, la police, les services de sécurité, les services

publics où les Orientaux ont accédé aux plus hauts postes

et ont été investis des plus hautes charges. La voix des

chercheurs orientaux est plus audible que par le passé, ils

46

ÉDITION SPÉCIALE


Ami Bouganim (Crédit : A. Bouganim)

sont davantage sollicités plus sur des questions d’intérêt

général que sur des questions sectorielles.

Je ne sais que penser de cette orientalisation de plus en plus

accélérée dans des domaines d’activité comme la police ou

l’éducation. On peut s’en féliciter comme on peut la déplorer.

En l’absence d’un modèle de société vers lequel s’acheminer,

on ne sait vraiment, malgré mon ton péremptoire, où réside la

bénédiction et où la malédiction.

L’influence politique du parti Shass s’explique-t-elle

encore en grande partie par la lutte de celui-ci contre les

discriminations à l’égard des Sépharades les plus démunis?

C’est en tout cas l’argument de campagne de ce parti qui

n’a œuvré qu’à la promotion d’une nomenklatura rabbinique

sépharade qui calque ses positions et ses convictions sur

celles, pour le moins anachroniques, de leurs parrains et

maîtres ashkénazes. Le Shass pousse la caricature ashkénaze

– vestimentaire, rabbinique, prédicatrice – au ridicule. Il continue

de prendre exemple sur elle, de s’aligner sur des politiques

d’ostracisme (des femmes, des réformés, des homosexuels,

des intellectuels…) et de se garder de dénoncer les politiques

de ségrégation en matière scolaire (on n’admet pas de jeunes

Sépharades dans certains séminaires pour institutrices

ashkénazes) ou maritale (les mariages intercommunautaires

parmi les intégristes seraient mal perçus et mal vécus).

Le Shass se propose en Shamash (bedeau) sépharade de

l’intégrisme ashkénaze le plus obscurantiste. Sans que la

mouvance traditionaliste qui forme la majorité de son électorat

ne s’encombre de ses lubies et de ses lanternes, tant sur le

statut de la femme que sur la nécessité d’allier une vie active à

l’étude de la Torah.

Peut-on parler d’une « renaissance » de la culture sépharade

en Israël – chants liturgiques (piyoutim), musique, cinéma,

théâtre?

Nous assistons à une création musicale qui brouille les limites

entre les communautés. C’est tout Israël qui découvre les

liturgies sépharades et en propose des adaptations qui en

disent long sur la persistance d’une veine religieuse dans

tous les secteurs de la population sans distinction d’origine.

Je ne dirais pas la même chose pour le cinéma marocoisraélien

qui ne s’est pas remis de la disparition prématurée de

Ronit Elkabetz, qui était davantage qu’une actrice. Elle se

disposait à révolutionner le cinéma israélien, à inscrire un

chapitre marocain artistique au palmarès mondial du cinéma.

Je ne m’émeus pas particulièrement du succès des séries

marocaines. On trouve des phénomènes analogues en Turquie, en

Inde, au Bangladesh et dans toutes les contrées où l’on se donne

un cinéma populaire. Le théâtre, comme d’ailleurs le ballet, a

toujours été un modèle de co-créativité intercommunautaire

qui, parce qu’il ne privilégie que la méritocratie, a toujours

réservé un bon accueil aux talents de toutes les communautés.

LVS MARS/AVRIL 2023 47


La normalisation des relations politiques entre Israël et

le Maroc en 2020, dans le cadre des accords d’Abraham,

n’a-t-elle pas revigoré la marocanité des Sépharades

d’Israël, notamment des jeunes, nés dans le pays, qui n’ont

pas le même rapport avec le Maroc que leurs parents?

C’est une normalisation essentiellement militaire. Les

Israéliens, en quête permanente de reconnaissance et de

légitimité, la chargent de tant d’attentes qu’ils risquent d’être

déçus et de déchanter. Je sais que les populations islamisées

marocaines ne s’en accommodent que par la volonté du

Roi Mohammed VI et que les intellectuels marocains sont

toujours aussi réticents que par le passé. Les parents

maroco-israéliens entraînent volontiers leurs proches et

leurs descendants sur les sites où ils prennent leurs racines

et les visites tournent souvent au pèlerinage. Mais les jeunes

Israéliens, toutes origines confondues, ont leurs destinations

de prédilection : elles sont davantage en Amérique du Sud,

en Asie et en Europe qu’en Afrique. Les Juifs du Maroc, qui

ne connaissent pas l’histoire de ce pays ni sa géographie

physique humaine, ne communiquent à leurs descendants

que le cadastre des tombeaux des saints. Je n’ai rien contre,

mais cela devient à la longue morbide.

Je ne sais ce que réserve l’avenir. Les jeunes Israéliens feraient

mieux de redécouvrir le judaïsme d’Espagne et d’Italie plutôt

que d’obscurs textes qui ne parlent qu’aux chercheurs, d’autant

que ce que ces derniers en tirent ne nourrit ni les âmes ni

les esprits, à l’exception des productions poétiques de David

Hassine et de David Elkayyam. La grande production des Juifs

du Maroc remonte à la deuxième moitié du XX e siècle et celleci

s’est déposée en français et en espagnol. Or, elle continue

d’être occultée, tant par les chercheurs que par les amateurs.

Nul n’a entendu parler des œuvres d’un Carlos de Nesry

ou d’un Amram Elmaleh. Ils n’étaient pas sionistes à leur insu

comme la plupart de leurs compatriotes, ils ne méritent pas

d’être cités par de mauvais universitaires.

La question de l’identité sépharade n’a pas été vraiment

traitée ni par les Canadiens ni par les Français, et les

Israéliens se sont contentés de replâtrer une identité

ethnique plutôt qu’une identité culturelle. Je crois savoir ce

qu’est le Juif berbère marocain, le Juif arabo-marocain, mais

je ne sais pas ce qu’est le Juif sépharade marocain.

La version intégrale de cet article est en ligne

sur le site Web de LVS : lvsmagazine.com

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ALIYAH, VINGT ANS PLUS TARD

SYLVIE HALPERN

Le 26 août 2003, ils étaient onze amis montréalais

à faire leur Aliyah ensemble. Tous dans la vingtaine,

tous célibataires et bien résolus à ce que ça marche.

Franck Azoulay était l’un d’eux et il se souvient comme si

c’était hier de leur arrivée. Ils se sont installés à Beer Sheva

dans trois appartements contigus et pendant six mois, ils

ont vécu tout proches.

« On s’est tous créé une deuxième famille et aujourd’hui

encore on se voit tout le temps – pour Shabbat, les Fêtes

juives, les anniversaires… »

Est-ce que Franck a toujours su que sa

vie serait en Israël?

« Absolument pas », dit-il en souriant.

C’est quand, à 22 ans, il a participé en

février 2000 au premier voyage Birthright

que tout a basculé. Lui qui avait six mois

quand ses parents, originaires du Maroc,

ont quitté la France pour Montréal, a

eu la piqûre. Et au retour, il s’est porté

bénévole au Centre Bronfman des

expériences en Israël qui l’a embauché

pour être accompagnateur dans

différents voyages organisés par la

communauté juive de Montréal.

« J’allais en Israël tous les deux mois,

et puis un jour, je me suis dit : les aller-retour, ça suffit et

ma copine, Karine Oiknine, qui est devenue ma femme et la

mère de mes cinq enfants, a opiné. Alors, avec des amis, on

s’est monté un groupe pour se préparer à faire notre Aliyah. »

« Ça n’a pas toujours

été facile notre

intégration en Israël,

mais il y a quand

même eu plus de hauts

que de bas »

La chance de Franck et de ses amis, c’est que deux guides

israéliens francophones qu’ils connaissaient ont répondu à

leurs questions et les ont aidés depuis Israël.

« Ils venaient tous les quatre mois à Montréal, ils nous ont

énormément soutenus. »

Dans leur programme d’intégration, il avait même été prévu

qu’une famille israélienne déménage à Beer Sheva pour

s’occuper du groupe!

Beer Sheva a été la piste

d’atterrissage idéale selon lui : la

ville est jumelée avec Montréal

et à l’époque, c’était une petite

agglomération où plusieurs

professionnels de la municipalité se

sont empressés de les aiguiller.

« Nos guides craignaient que si nous

nous installions dans de grosses

villes comme Jérusalem ou Tel-Aviv,

on se perde et on rate notre

intégration. »

À sa grande déception, Franck a

été dispensé de faire l’armée parce

qu’il avait déjà plus de 25 ans. Mais

il s’est battu.

« Pendant un an, j’ai saoulé le bureau

de recrutement de Tsahal et finalement ils ont accepté que

je fasse un service militaire écourté en machinerie lourde.

Et bien sûr, je fais mes réserves, d’ailleurs avec deux des

copains qui ont fait Aliyah avec moi. »

Pendant un an, ils ont travaillé pour trouver la réponse aux

innombrables questions qui leur passaient par la tête. Où

allaient-ils s’installer en Israël, dans quel genre de ville?

Tous ensemble ou séparément? Qu’est-ce qu’ils feraient

en arrivant : l’Oulpan en groupe ou chacun de son côté?

Est-ce qu’ils partiraient visiter le pays ensemble? Est-ce

qu’ils pourraient bénéficier de services pour les aider à

trouver un emploi?

Ça n’a pas toujours été facile.

« Mais il y a quand même eu plus de hauts que de bas. Il a

fallu partir de zéro, sans avoir trop d’argent, sans maîtriser

la langue, sans avoir encore nos repères, loin de notre

famille et de nos amis de toujours. »

50

ÉDITION SPÉCIALE


Mais Franck et sa femme Karine n’ont jamais

songé à faire marche arrière.

« Nous nous étions préparés mentalement,

ce n’était pas pour rien que nous avions tout

quitté pour Israël. On n’a pas mis notre vie sur

pause en attendant de voir ce que ça allait

donner là-bas, sinon au moindre coup de blues

on aurait tout lâché. »

L’expérience communautaire qu’il avait

acquise au Québec lui a été bien utile sur

place. Quand en 2005, le Comité Canada-Israël

a ouvert un bureau en Israël, Franck a été

recruté pour gérer toutes les missions de

Canadiens de haut rang dans le pays, des

personnalités influentes majoritairement non

juives. Pendant quinze ans, il a organisé leurs

séjours de A à Z, à raison d’une bonne trentaine

de voyages par an. Et un jour, parmi ces

visiteurs de marque, il a piloté Ronnen Harary,

un homme d’affaires de Toronto, fondateur

d’une grosse entreprise de divertissements

pour enfants (Pat’Patrouille, c’est lui!), qui lui a

proposé de diriger la fondation philanthropique

qu’il souhaitait créer en Israël avec entre

Franck Azoulay et sa famille.

1 re rangée, de gauche à droite : son épouse Karine, Ouriel, 10 ans,

Noam, 13 ans, Lea, 15 ans, Éden, 17 ans. Derrière : Yariv, 15 ans, et Franck

(Crédit : F. Azoulay)

autres, le souci d’embellir la Vieille Ville de Jérusalem : le plus

gros projet est de transformer les deux acres du toit qui se trouve

au-dessus du Souk en mini High Line, comme à Manhattan.

Depuis son Aliyah, Franck Azoulay a donné un sens à sa vie. Tout

comme il faisait le dos rond dans les tempêtes de neige, il a appris

à vivre avec les soubresauts politiques israéliens.

« Peu importe le gouvernement, je vais toujours le soutenir, même

si je n’ai pas voté pour. »

Il n’a pas oublié le Québec pour autant et y passe chaque année

ses vacances.

« Je suis resté énormément attaché à Montréal. Depuis 20 ans

que je suis ici, je regarde le matin les résultats des matchs du

Canadien. Et s’ils participent aux séries, je me lève évidemment

dans la nuit! »

LVS MARS/AVRIL 2023 51


DU MAGHREB À L’OCCIDENT

LES JUIFS MAROCAINS ENTRE TROIS CONTINENTS

ENTRETIEN AVEC ITZHAK DAHAN

SONIA SARAH LIPSYC

chercheurs afin de développer et élargir la recherche sur

les communautés juives dans le monde.

Il nous fait l’amitié de répondre à quelques-unes de nos

questions.

Quelle est la singularité de votre livre parmi les ouvrages

consacrés aux communautés juives, en particulier aux

Juifs du Maroc?

Tout d’abord, c’est un Israélien qui écrit sur la diaspora

juive marocaine. Ce point de vue, en lui-même, est original

par rapport à ce qui a déjà été produit dans ce domaine.

Mais surtout, c’est la première fois que l’on parle de la

diaspora juive marocaine dans son ensemble et non pas

seulement en se focalisant sur un pays en particulier.

Cette vue globale du sujet est novatrice en la matière et

indispensable à l’avancée de la recherche. Enfin, et c’est

le point qui me concerne plus spécifiquement, l’auteur ici

n’est pas seulement chercheur, il est aussi impliqué dans

son domaine de recherche. Il est lui-même sujet de la

recherche. Ce double prisme, celui de l’étude et celui du

vécu, enrichit, je pense, cet ouvrage et le rend singulier.

Itzhak Dahan (Crédit : I. Dahan)

L’éducateur, ancien représentant de l’Agence juive, dont

il fut un temps le délégué à Montréal (1992-1995), et

universitaire à Bar-Ilan (Israël), Itzhak Dahan, a publié un

ouvrage remarqué en hébreu sur les Juifs originaires du

Maroc dans le monde, avec l’aide de l’Institut Ben Tsvi

qui œuvre à la connaissance des communautés juives

sépharades et d’Orient.

Il consacre dans ce livre une trentaine de pages à la

communauté sépharade de Montréal, y compris la CSUQ

et le Centre d’études juives Aleph.

Itzhak Dahan est directeur de la branche francophone de

l’Institut de recherches sociologiques sur les communautés

de l’Université de Bar-Ilan, qui rassemble une vingtaine de

Vous soulignez que la communauté juive marocaine

constitue la diaspora la plus importante des Juifs

originaires des Terres d’Islam. Pourriez-vous nous en

dire davantage?

La communauté juive au Maroc en 1948 était de

250 000 âmes, la plus grande communauté des pays

musulmans, avant l’Irak, 130 000 âmes, et l’Iran, 80 000

âmes. Quelque 900 000 Juifs ont quitté les Terres d’Islam

dans la seconde partie du 20 e siècle. La communauté

juive marocaine n’est pas partie dans les mêmes

conditions, parfois dramatiques, qu’ont connues d’autres

communautés juives.

La majorité des Juifs du Maroc ont fait leur Aliyah,

c’est-à-dire qu’ils ont immigré en Israël alors que dans

les années 1965 à 1990, ils se sont plutôt tournés vers

l’Occident. Seule une minorité, à peu près 2 000 personnes,

est restée au Maroc.

52

ÉDITION SPÉCIALE


À quoi seraient dues les disparités économiques ou

en matière de leadership que vous constatez entre

ces communautés juives du Maroc que l’on retrouve

principalement en Europe, en Amérique et bien sûr en

Israël?

Les émigrants juifs marocains ont réussi en un temps très

court, entre quinze à vingt ans, à s’intégrer dans leurs sociétés

d’accueil. Ils sont ainsi passés d’un statut socioéconomique

moyen à un degré plus élevé grâce au bon niveau d’éducation

auquel ils ont eu accès et dans lequel ils se sont investis. Ils

ont évolué dans les professions libérales (médecine, droit...)

en s’installant dans les grandes villes et en bénéficiant des

aides gouvernementales, notamment les bourses d’études,

comme en France. En Israël, en revanche, et particulièrement

dans les villes en voie de développement, l’intégration a

demandé beaucoup plus de temps, et parfois cela se ressent

encore à la deuxième et à la troisième génération.

Comment se caractérise l’héritage de cette communauté

juive d’origine marocaine?

Dans les nouveaux pays d’accueil, les émigrés ont

commencé immédiatement à construire des communautés

et ainsi préserver leur patrimoine religieux, liturgique. Ils ont

construit des synagogues et des structures d’aide sociale. La

langue française qu’ils ont acquise dans leur pays d’origine,

en général dans les institutions de l’Alliance israélite

universelle, les a aidés à s’intégrer dans leur nouvelle

société lorsqu’il s’agissait de pays francophones. C’est pour

cette raison que les difficultés d’intégration ont été bien

moindres que dans d’autres pays. Il faut aussi relever que 15

000 Juifs ont émigré vers l’Amérique du Sud depuis la fin du

19 e siècle et le début du 20 e siècle, notamment au Brésil et en

Argentine, et, après la guerre des Six Jours, l’émigration des

Juifs du Maroc espagnol s’est faite en majorité en direction

du Venezuela. Cependant, aujourd’hui, il en reste très peu

après les crises politiques et économiques qui ont sévi dans

ces pays.

D’un point de vue religieux, les Juifs du Maroc se

reconnaissent majoritairement dans le courant orthodoxe,

parfois même certains d’entre eux dans la sensibilité ultraorthodoxe.

Comment voyez-vous son évolution dans ce

domaine et pourriez-vous nous dire, comme vous le relevez,

pourquoi par exemple, il n’existerait aucune synagogue

libérale ou « conservative » en son sein?

Dans la diaspora, peu de Juifs marocains fréquentent les

communautés libérales ou les mouvements « conservatifs

». La raison est que la culture du pays d’origine au Maroc était

de faire cohabiter tous les différents niveaux de religion dans

la même synagogue. La société juive marocaine n’était

pas fracturée comme dans les pays d’Europe touchés par

la Réforme et les mouvements ultra-orthodoxes.

Cette communauté se singularise par un lien religieux,

culturel et économique relativement fort avec le Maroc.

Pouvez-vous nous donner quelques exemples? En quoi

peut-il être exemplaire ou moteur pour les relations entre

Juifs et Musulmans?

La relation que les Juifs et leur pays d’origine, le Maroc,

entretiennent est particulièrement exceptionnelle en Terre

d’Islam. On peut voir par exemple des Juifs et des Arabes

dans le même groupe musical pour la musique andalouse

et berbère. Aujourd’hui, de jeunes Israéliens chantent de

la musique arabe avec des musiciens arabes, au Maroc

et en Israël, ainsi que dans les capitales européennes,

et c’est devenu naturel. En ce qui concerne les relations

économiques, les Juifs ont des racines dans l’histoire

du royaume marocain depuis des générations car ils ont

toujours tenu un rôle important à la cour royale. Ils jouaient

un rôle clef à la trésorerie royale. Aujourd’hui encore, André

Azoulay, notable de la communauté, est conseiller du roi et

des Juifs. Les Juifs en France, en Amérique et au Canada ont

des projets d’investissements avec le royaume marocain,

et réciproquement. Pour le roi du Maroc, la culture juive

marocaine fait partie intégrante du patrimoine marocain,

et de jeunes Arabes dans les écoles visitent régulièrement

les musées juifs locaux à Casablanca et à Essaouira.

On assiste à un renouveau culturel des communautés

juives sépharades, notamment marocaine, en Israël.

Quelles sont ses manifestations?

Oui, ce renouveau et ce retour aux sources de la 3 e

génération des Juifs marocains se manifestent dans le

domaine de la langue marocaine, de la musique andalouse,

du renouveau du piyout (poème liturgique chanté) et des

chirat habakachot (chants de demandes intégrés tout le

long de l’année dans les prières). Ce renouveau s’exprime

également par l’ouverture de nouveaux centres d’études

en Israël pour sauvegarder la tradition et l’histoire

ainsi que la pensée des grands rabbins du Maroc. Par

exemple, le Beit midrach (Centre d’études juives) Mizrah

ou Maarav avec à sa tête le professeur Moche Amar et

le Rabbin Itzhak Chouraqui. De jeunes juifs d’origine

marocaine ouvrent des sites Internet pour diffuser le

patrimoine juif marocain. De jeunes chercheurs, comme

David Bitton et David Guedj, et chercheuse, comme Michal

Ohana, travaillent sur l’histoire, la culture et l’héritage

spirituel des Rabbins du Maroc.

LVS MARS/AVRIL 2023 53


LA BANDE DESSINÉE ISRAÉLIENNE

DANS TOUS SES ÉTATS

ELIAS LEVY

En Israël, Michel Kichka est une figure majeure du dessin

de presse et de la bande dessinée (BD).

Il nous a parlé, par Zoom, depuis son studio de dessinateur

à Jérusalem de son travail artistique et de la popularité

grandissante que la BD connaît auprès des jeunes

Israéliens.

Né en Belgique, Michel Kichka a fait son Aliyah en 1974.

Il enseigne le dessin à la prestigieuse Académie des

beaux-arts Bezalel, à Jérusalem. Bédéiste talentueux et

illustrateur de livres pour enfants, il signe régulièrement

des caricatures politiques en Israël et dans la presse

internationale. Il a présidé pendant plusieurs années

l’Association des caricaturistes et dessinateurs de presse

d’Israël et est membre de « Cartooning for Peace »

– « Dessins pour la paix » –, une association internationale,

fondée en 2006 par le célèbre caricaturiste français Plantu,

qui regroupe deux cent cinquante dessinateurs de presse

d’une cinquantaine de pays.

Michel Kichka publiera ce printemps un nouveau roman

graphique qui clôturera la trilogie relatant son parcours

de vie. Ses deux précédentes BD autobiographiques,

Deuxième génération. Ce que je n’ai pas dit à mon père

(Éditions Dargaud, 2012), qui retrace en noir et blanc sa

vie profondément imprégnée de l’ombre de l’histoire

tragique de son père, feu Henri Kichka, survivant

d’Auschwitz-Birkenau, et Falafel sauce piquante (Éditions

Dargaud, 2018), où il croque avec brio la société israélienne,

ont connu un grand succès. Il a traduit et adapté du français

à l’hébreu ces deux BD.

Deuxième génération a été adaptée au cinéma par la

réalisatrice Vera Belmont sous le titre « Les secrets de

mon père ». Ce film d’animation a été primé au Festival de

Cannes de 2022 et a fait partie cet automne de la sélection

du Festival du film juif de Jérusalem.

Une nouvelle génération de bédéistes israéliens se

démarque au niveau international.

Bande dessinée pour

les enfants haredim du

bédéiste orthodoxe

Gadi Pollak.

« En Israël, il fut un temps où les auteurs de BD se

comptaient sur le bout des doigts. Mais, depuis une

trentaine d’années, les BD rejoignent un large public et se

sont frayé une place honorable dans la culture populaire

israélienne. Aujourd’hui, des bédéistes israéliens sont

lus dans le monde entier et encensés par les critiques

spécialisés dans le 9 e art », souligne Michel Kichka.

Rutu Modan, qui a été l’élève de Michel Kichka à

l’Académie Bezalel, autrice du roman graphique Exit

Wounds, traduit dans une trentaine de langues, a été la

lauréate de deux prix très prestigieux : le prix d’Angoulême

et le Eisner Prize. Le roman graphique dédié à Anne

Frank de David Polonsky et Ari Folman a été traduit dans

40 pays. Les BD des frères Assaf et Tomer Hanouka font

un tabac dans de nombreux pays…

« Les illustrateurs israéliens produisent des BD d’une

grande qualité. Il y a trente ans, j’ai initié l’enseignement

de la BD à l’Académie Bezalel. Désormais, les écoles d’art

ont compris que la BD est une forme d’expression visuelle

importante qui permet d’aborder une kyrielle de sujets,

notamment ceux d’une brûlante actualité. Chaque année,

de nouveaux talents se distinguent notoirement. »

54

ÉDITION SPÉCIALE


Entrevue avec le caricaturiste

et bédéiste Michel Kichka

En Israël, existe-t-il des éditeurs spécialisés en

BD, comme c’est le cas en France, en Belgique

ou aux États-Unis?

« Non, répond Michel Kichka. Le marché

israélien de la BD est petit. Il faut publier

à l’étranger, de préférence en France ou

aux États-Unis, pour être lu. Des éditeurs

israéliens acquièrent les droits de BD

d’auteurs israéliens après que celles-ci soient

publiées à l’étranger. C’est plus rentable pour

eux d’acheter les droits que de verser des

à-valoir à un dessinateur pendant son travail

de création. »

Les BD sont-elles lues dans le monde orthodoxe israélien?

« Pendant longtemps, les images, la représentativité et la

figuration étaient proscrites dans l’art juif. Aujourd’hui, il y

a une prolifération de BD destinées aux enfants haredim.

Les éditeurs orthodoxes ont compris que pour captiver

l’attention des enfants, ils devaient publier des BD, mais à

condition qu’elles soient avalisées préalablement par les

Rabbins, les seuls aptes à certifier que celles-ci véhiculent

les bonnes valeurs inhérentes à la Torah. S’assurer que ces

BD sont casher. »

Ces BD sont souvent d’une qualité médiocre sur le plan

graphique, estime Michel Kichka.

« Mais il y a quelques bédéistes orthodoxes qui se démarquent

du lot. C’est le cas de Gadi Pollak, auteur d’une cinquantaine

d’albums qui ont connu un grand succès populaire. »

Quand on achète le pain Halah pour le Shabbat à

Méa Shéarim, à l’entrée des boulangeries, il y a deux bacs :

un avec la Parasha de la semaine pour les adultes et un

autre avec la Parasha de la semaine en BD pour les enfants,

a constaté Michel Kichka.

« Les enfants haredim adorent aussi les BD. Les textes juifs

ne sont pas illustrés, à l’exception de la Hagaddah de Pessah

et de la Méguila de Ruth. On dit que la fonction des dessins

dans la Hagaddah est de laisser les enfants éveillés pendant

toute la nuit du Seder. Ils peuvent regarder les images

pendant que les adultes psalmodient leurs bénédictions

Michel Kichka (Crédit : Sylvain Aelion)

et récitent la Hagaddah. Il y a aussi des caricatures dans

certains journaux haredim. »

Quel rôle joue la caricature de presse dans la société

israélienne?

« Israël n’est pas une exception. Nous devons désormais

composer avec un phénomène mondial. Nous sommes

dans une période charnière : entre la fin du monopole de la

presse écrite et le début du monopole de la presse en ligne,

couplée aux réseaux sociaux. Il y a trente ans, pour avoir le

statut de caricaturiste, il fallait être engagé dans un journal.

Les lecteurs et lectrices avaient un rendez-vous quotidien

avec ton dessin. Tout cela a changé. Aujourd’hui, des

journaux font appel à des dessinateurs à titre de pigistes.

D’un autre côté, il y a des dessinateurs et des caricaturistes

très doués qui n’ont pas un organe officiel, mais publient

leurs dessins sur Facebook, Instagram… Ceux-ci circulent

à l’échelle mondiale. Une caricature peut faire 2 millions de

clics sur les réseaux sociaux alors que le plus grand journal

du pays n’est distribué qu’à quelques centaines de milliers

d’exemplaires. C’est un changement majeur dont on n’a pas

encore mesuré toute l’ampleur ni l’impact. »

Être caricaturiste de presse en Israël est-ce un métier ardu,

et même audacieux?

« C’est un métier ardu, mais pas audacieux. C’est ardu parce

que la réalité politique et sociale en Israël est ardue. Mon

travail de caricaturiste n’est pas audacieux parce qu’Israël

LVS MARS/AVRIL 2023 55


est une grande démocratie. Tu ne dois donc faire preuve

d’aucune audace pour dire ce que tu as à dire parce qu’en

Israël, il n’y a pas de censure, on ne limite pas ta liberté

d’expression comme dessinateur. La dernière caricature

censurée remonte à la fin des années 40, à l’époque du

mandat britannique en Palestine. Heureusement, je n’ai pas

connu cette époque. J’ai des collègues qui vivent dans des

pays non démocratiques qui sont très audacieux parce qu’ils

prennent de grands risques quand ils critiquent subtilement

avec leurs dessins des choses qu’ils n’ont pas le droit de

critiquer. Ils sont souvent sévèrement réprimandés. »

Est-ce le cas aussi des caricaturistes de presse

palestiniens?

« J’avais un proche collègue palestinien, Baha Boukhari,

qui vivait à Ramallah, il est décédé l’année dernière de la

COVID-19. Il me disait qu’il pouvait aborder tous les sujets à

condition de ne jamais critiquer les dirigeants de l’Autorité

palestinienne. J’ai un proche ami palestinien, dessinateur

de presse, Khalil Abou Arafeh, qui vit à Jérusalem-Est. Ses

caricatures sont soumises à la censure militaire israélienne.

La censure des caricatures de presse est monnaie courante

dans les pays arabes. Au Maroc, les caricaturistes n’ont

pas le droit de dessiner le roi Mohammed VI. Quand ils font

allusion à ce dernier, ils dessinent une bague en or ! »

Pour Michel Kichka, vivre en Israël, c’est « un grand privilège »

pour un caricaturiste de presse.

« Je me dis souvent que j’ai de la chance de ne pas vivre

en Islande ! Les yeux du monde sont rivés vers Israël, pays

souvent perçu d’une manière tronquée ou binaire. À travers

mes dessins, je m’escrime à présenter une autre image

d’Israël. Ça fait très longtemps que je ne soutiens pas la

politique des gouvernements successifs d’Israël. Les gens

comprennent par mes dessins que j’appartiens au camp

de la paix. Mais je ne cesse de rappeler qu’Israël est une

démocratie où les dessinateurs de presse peuvent s’exprimer

très librement. C’est une chance inouïe que bon nombre de

mes collègues n’ont pas dans leur pays. »

56

ÉDITION SPÉCIALE



« LE CINÉMA ISRAÉLIEN D’AUJOURD’HUI

EST LE REFLET DE LA MATURITÉ D’ISRAËL »

RUDY ABECASSIS

Rudy Abecassis est vidéaste, reporter vidéo et scénariste.

Originaire de Marseille, il a immigré en Israël en 2015. Il vit à

Harish, une ville nouvelle située près de Hadera.

En 75 ans d’existence, l’État d’Israël a atteint une maturité

qui a mis du temps à se dessiner. Ce n’est plus seulement

une terre d’accueil pour les Juifs du monde entier, ou encore

un des pays les plus cosmopolites de la planète, ou bien une

armée qui défend quotidiennement une population qui vit et

survit tant bien que mal. Non, aujourd’hui, Israël vit, existe

et crée progressivement une véritable identité. Sa propre

personnalité.

Dans ce passage au monde adulte, il n’est pas étonnant

de voir la culture israélienne se dessiner. Celle-ci ne se

contente plus de séduire le public local, elle attire de plus

en plus des regards extérieurs.

Le Cinéma, cet Art qui traverse le temps avec une évolution

fulgurante, n’a pas été oublié dans le développement

d’Israël. Il est même le reflet de la maturité du pays. Plus

universel, ne tombant pas systématiquement dans la

démarche politique ou culturelle, ou même religieuse.

Par exemple, le film My boss Charlie, réalisé en 2022 par

Shay Kanot, racontant l’histoire d’un réalisateur de

télévision qui doit tourner une téléréalité au domicile

d’un patron du crime, qui réunit entre autres la vedette

montante de la chanson israélienne, Noa Kirel, n’a rien à

envier aux productions américaines et européennes, tant

par la réalisation, que par le scénario, qui n’a pas vocation

à refléter un pan de la société israélienne ou des conflits

extérieurs. Nous sommes dans du divertissement, de

« Ce sont surtout des

œuvres très critiques

sur le conflit

israélo-palestinien qui

vont se faire remarquer

à l’étranger »

58

ÉDITION SPÉCIALE


La célèbre télésérie israélienne Fauda sur Netflix.

l’action, sans idéologie, et c’est un genre de cinéma qui était

moins fréquent en Israël durant les dernières décennies.

Le public féminin n’est d’ailleurs pas en reste puisque des

comédies romantiques ont vu le jour ces dernières années.

Le film Marrying myself, réalisé en 2020 par Eran B.Y., est à

mi-chemin entre Le journal de Bridget Jones et 27 robes, des

films qui ont fait la belle époque du cinéma occidental dans

la quête de séduction d’un public plus jeune et plus ouvert,

en mettant en avant l’émancipation de la femme.

L’émancipation, c’est aussi celle de la société israélienne, et

il n’y a pas meilleur moyen que la culture pour le démontrer,

et plus précisément le 7 e Art.

Ainsi, on peut voir à travers ces films, entre autres, des

réalisateurs moins engagés, cherchant avant tout à divertir

et à œuvrer pour des messages plus universels.

Le Cinéma israélien ne serait pas ce qu’il est sans ses films

documentaires.

C’est un genre très riche, lié bien sûr à l’histoire du pays, à sa

diversité, à ses conflits et aussi à ses secrets.

Four hours a day est un documentaire inédit, sorti en 2022,

réalisé par une ancienne journaliste, Ayelet Dekel, qui

expose pour la première fois l’histoire de jeunes mères du

Kibboutz devant se plier à l’idéologie du lieu, c’est-à-dire

voir leur progéniture enlevée et placée dans un foyer

pour enfants, où ils ont grandi. Ce traumatisme encore

présent aujourd’hui est ainsi dévoilé dans ce documentaire

inédit, et touche des milliers de mères et leurs enfants.

Des témoignages poignants que découvre la population

israélienne, qui illustrent une critique toujours plus présente

non seulement de la société actuelle, mais de son histoire

aussi.

Il y a aussi des œuvres passionnantes, comme le film

documentaire Desert Tested, sorti en 2020, sur la tentative

de révolution industrielle dans le marché automobile avec la

création de la Susita, cette voiture, dont la coque est en fibre

de verre, qui promettait à l’État d’Israël une reconnaissance

mondiale dans ce domaine.

Le réalisateur Avi Weissblei ne fait pas que raconter cette

belle histoire, qui aurait pu l’être davantage s’il n’y avait pas

eu la désillusion d’un échec pourtant peu envisageable. Ce

documentaire met aussi en avant l’absence d’Israël sur le

LVS DÉCEMBRE MARS/AVRIL 2022 2023 59


marché de l’automobile et ses conséquences

sur l’économie israélienne et le pouvoir d’achat

de la population, obligée d’acheter uniquement

des voitures étrangères.

Côté francophone, la vague d’Aliyah venant

de France étant la plus importante derrière

celles des États-Unis et de la Russie, il est

normal de retrouver des olim français dans

des films, notamment dans le documentaire

La Promise (en hébreu, le titre n’a pas été

traduit, mais écrit comme ça se prononce en

français pour garder la sonorité originale), sorti

en 2017 et porté à l’écran par la réalisatrice

Anat Schwartz. Celle-ci brosse des portraits

de Français venus réaliser leur rêve sioniste à

travers leur montée en Israël.

Forcément plus engagés, les documentaires

ont pour avantage de garder une certaine

authenticité.

Les cinéastes israéliens cherchent aussi

à développer des films plus intimistes,

et touchant davantage à une réflexion

psychologique.

Même si le contexte du film Snowland

est la guerre, sujet très présent dans la

filmographie israélienne, le réalisateur

Jonni Zicoltz évoque des sujets plus humains,

plus sociaux, comme la crise de la quarantaine,

l’amitié, le divorce… et prend ainsi des risques

dans son film, sorti en 2020. Celui-ci a connu

un certain succès auprès de la population

israélienne, mais a été moins bien accueilli à

l’étranger.

Justement, on peut se demander si, aujourd’hui,

le cinéma israélien s’exporte bien?

Si dans le passé, des films comme le célèbre

Valse avec Bachir, qui a récolté plusieurs

prix et nominations et a été lauréat du César

du meilleur film étranger en France, ont fait

connaître le cinéma israélien, le 7 e Art n’est

pas le sujet favori du reste du monde quand on

parle d’Israël.

À l’instar de ce film, ce sont surtout des œuvres

très critiques sur le conflit israélo-palestinien

qui vont se faire remarquer.

Ainsi, lors du Festival de Cannes 2021,

Le genou d’Ahed, du réalisateur Nadav Lapid,

a remporté le prix du Jury. Long métrage très

critique envers la politique israélienne, on a

eu l’impression que ce film a séduit davantage

par l’idéologie qu’il véhicule que par sa mise en

scène.

C’est bien là un point important de la

culture israélienne en général : sa situation

géopolitique la suit malgré elle. Il n’est pas

rare d’y voir du boycott ou du rejet si le thème

principal n’est pas un poil critique envers la

politique ou la société israélienne, ou plus

directement une prise de position en faveur du

peuple palestinien.

On a pu aussi mesurer cette tendance chez

les interprètes, avec notamment l’actrice

Gal Gadot, qui a intégré Hollywood et

l’univers DC Comics en interprétant

Wonder Woman. Même si ces films ont connu

un gros succès, les origines de Gal Gadot

étaient souvent mises en avant.

Dans l’univers des séries, qui est en plein

essor, l’accueil du public est beaucoup plus

évident, avec de gros succès comme Fauda,

série numéro 1 dans plusieurs pays arabes,

mais aussi When heroes fly, The spy, Hatufim,

qui a inspiré la télésérie américaine Homeland,

et encore d’autres qui sont très regardées et

appréciées.

Il y a donc une vraie culture cinématographique

en Israël, pays cosmopolite, polyglotte, où

chacun et chacune peut apporter sa pierre à

l’édifice culturel dont les Israéliens raffolent.

Israël fête déjà ses 75 ans, trois quarts de

siècle, on lui souhaite toujours plus de talents

et de succès dans le Cinéma. À ses 120 ans, et

même plus. Mazal Tov!

60

ÉDITION SPÉCIALE


L’Académie Solomon Schechter offre ses meilleurs

vœux à Israël à l'occasion de son 75 e anniversaire !

www.ssamontreal.org


RENCONTRE AVEC ROÏ AZOULAY

UN CHEF D’ORCHESTRE VIRTUOSE

VIRGINIE SOFFER

À seulement 36 ans, Roï Azoulay a dirigé de prestigieux

orchestres dans le monde entier : l’Orchestre symphonique

de Montréal, l’Orchestre symphonique de Jérusalem,

l’Orpheus Chamber Orchestra de Londres… Il vient

d’achever une série de concerts avec un des meilleurs

orchestres d’Israël, la Camerata de Jérusalem, présentant

un programme original pour plusieurs pianos.

Rencontre avec un surdoué de la musique qui, après avoir

vécu sept années à Montréal, est retourné dans son pays

natal, Israël.

Qu’est-ce qui vous a motivé à retourner en

Israël?

C’était très dur pour moi de quitter Montréal, une

ville que j’aime beaucoup. En 2019, mon rythme

de travail en tant que directeur musical de la

synagogue Shaar Hashomayim ne concordait

pas avec celui de mes ambitions artistiques. Je

sentais que j’arrivais à une véritable maturité

musicale à la suite de mes années d’études très

intenses et de mes nombreuses expériences

professionnelles. Je voulais mettre mes

compétences de chef et ma vision artistique

au service d’un orchestre, car le monde de la

musique marche ainsi. Malheureusement, ce

n’était pas possible à Shaar Hashomayim.

J’ai reçu énormément d’amour de la part de votre

communauté et des musiciens montréalais

avec qui j’ai travaillé. Je pense notamment

à mon regretté mentor, Boris Brott, décédé

l’année passée dans un accident de voiture. Un

lien amical très fort, brisé du jour au lendemain,

m’unissait à ce chef d’orchestre virtuose.

Je sais aujourd’hui que Montréal a contribué à

ma maturité artistique de façon significative.

À votre retour en Israël, vous avez enseigné la musique

aux jeunes.

Oui, j’ai contribué activement à l’éducation musicale auprès

de la jeunesse israélienne dans le Néguev. Je suis retourné

à Dimona, la ville où je suis né et où j’ai grandi, afin de

donner à la nouvelle génération qui étudie la musique les

outils que je ne possédais pas lorsque j’avais cet âge. Ce fut

une expérience fabuleuse.

Les jeunes Israéliens sont-ils attirés par la musique

classique et les orchestres symphoniques?

Israël n’est pas très différent des autres pays :

regrettablement, il y a une perte d’intérêt de la jeunesse

pour la musique classique et les orchestres symphoniques.

Il y a plutôt un manque d’adaptation dans le système

éducatif israélien. Mes enfants apprennent le même

programme que lorsque j’étais gamin. Ce système éducatif

à l’ancienne a du mal à se diriger vers de nouveaux horizons.

Des spécialistes indépendants construisent pourtant

des programmes éducatifs formidables. Mais la grande

machine gouvernementale n’intègre pas encore ces idées.

Quand je passe quelques semaines avec des jeunes

qui écoutent de la musique pop actuelle, j’essaie de

comprendre leurs goûts. Au fur et à mesure, je leur montre

de nouvelles choses et cela fonctionne bien. Ils ne sont

pas fermés d’esprit. C’est simplement qu’on n’arrive pas à

communiquer adéquatement avec eux, cela m’inquiète.

Pouvez-vous nous parler des concerts que vous présentez

actuellement?

De fin février jusqu’à fin avril, j’accompagne l’Orchestre

andalou d’Israël dans le pays pour une série de concerts

avec le groupe Sfataim. Ce groupe, qui s’est formé à

Sderot, a commencé par jouer du rock, puis de la musique

leur rappelant leur enfance au Maroc. En partageant

leur héritage musical marocain, ils ont eu une carrière

couronnée de succès pendant plus de 30 ans. Ils ont arrêté

de jouer pendant un moment. L’Orchestre andalou les a

invités pour un hommage historique.

62

ÉDITION SPÉCIALE


Roï Azoulay (Crédit : Gabriel G. Cohen)

Dans environ trois ans, un nouveau musée unique au monde, le Jewish

Music Hall of Fame, verra le jour en Israël. On vous a approché pour être

membre du comité artistique. Pouvez-vous nous en dire plus?

Le Jewish Music Hall of Fame sera un immense musée qui sera établi à

Petah Tikvah. Il existera aussi numériquement sur Internet. Ce sera en

quelque sorte le Panthéon de la musique et des musiciens juifs, si je puis

m’exprimer ainsi!

Les deux présidents du comité artistique de ce nouveau musée, le

légendaire chanteur israélien Yehoram Gaon et l’acteur/chanteur

israélo-américain Mike Burstyn, m’ont demandé de les aider à

sélectionner des musiciens et des musiciennes qui vont faire partie de

cette institution. Je suis devenu un membre clé du comité parce que je

suis polyglotte et très à l’aise dans de nombreux domaines musicaux.

Je peux ainsi facilement présenter ce projet à des Américains ou à des

personnes d’autres pays souhaitant le soutenir. Je conseille aussi cette

institution par rapport à des aspects éducatifs. Des cours de musique se

concentrant sur la musique juive seront offerts.

La musique juive, justement, comment la définissez-vous? Comment

avez-vous fait pour sélectionner les musiciens juifs de ce panthéon?

Quand on songe à la musique juive, on pense instantanément à la musique

klezmer ou aux chants liturgiques qu’on entend dans des synagogues.

Mais est-ce simplement cela? N’est-ce pas trop réducteur? Pour le

Jewish Musical Hall of Fame, toutes les contributions exceptionnelles

que les Juifs ont réalisées par le passé dans le monde de la musique ont

été prises en compte : celles d’un chanteur, d’un compositeur, d’un chef

d’orchestre, etc.

« Le Jewish Music

Hall of Fame sera un

immense musée qui

verra le jour dans la

ville de Petah Tikvah »

Quel regard portez-vous sur Israël à la veille

de ses 75 ans?

Voici un message qui vient du cœur. J’aimerais

beaucoup voir une politique différente, de la

part de la gauche comme de la droite, avec la

conscience aiguë de travailler ensemble vers

un avenir meilleur, contrairement à ce qu’on a

pu voir au cours des dernières années et qui

m’a profondément déçu.

J’aimerais bien que, lors du 75 e anniversaire

d’Israël, on fasse ce qu’on appelle un

Hesbon Nefesh, c’est-à-dire une introspection,

en se demandant comment il serait possible

d’arrêter tous ces discours haineux, une force

destructrice qui divise notre peuple, en ayant

beaucoup plus de compassion et de respect

les uns envers les autres.

LVS MARS/AVRIL 2023 63


ISRAËL, TERROIR GASTRONOMIQUE

SYLVIE HALPERN

David Kichka se souvient que quand il était enfant à

Jérusalem, où il est né en 1976, on trouvait en tout et pour

tout deux sortes de pains.

« Le pays émergeait de ses premières années de pauvreté,

de la guerre de Kippour. Alors bien sûr, quand j’allais

rendre visite à ma famille en France et en Belgique, j’étais

émerveillé par la richesse de leurs terroirs, leur savoir-faire,

leur culte de la gastronomie! C’est sûr qu’aujourd’hui on ne

trouve pas encore de tout en Israël, mais nous aussi nous

avons commencé à nous y mettre! »

Comme dans tout ce qu’elle

fait, la « Start-up nation »

a effectivement mis les

bouchées doubles en

matière de gastronomie

ces dernières années.

Chefs primés à l’étranger,

multitude de restaurants en

tous genres, pléiade de petits

producteurs et d’artisans

passionnés, la bonne chère

y a le vent dans les voiles.

Et David Kichka est de ces

orchestrateurs culinaires qui s’en réjouissent, même s’il est

convaincu qu’il y a encore beaucoup à faire, déjà au niveau des

pouvoirs publics.

« Les gouvernements successifs israéliens n’en ont que

pour la high-tech et l’immobilier, jusque dans des régions

traditionnellement agricoles, dit-il. Il faudrait valoriser les

agriculteurs et les petits producteurs d’ici au lieu de les

considérer comme un monde à part. C’est quand même

dommage d’avoir de superbes tomates et de voir les grandes

chaînes israéliennes les faire venir de Turquie! »

David Kichka envie un pays comme la France où quelques

semaines après son élection, le nouveau président ne

manque pas de se montrer dans une ferme, au milieu des

vaches ou des champs. Marquant par là toute l’importance

qu’on attache dans ce pays au terroir, à la combinaison

des cultures et du savoir-faire. Et il rêve du jour où, à la

manière du grand chef français Marc Veyrat, on écrira des

livres pour célébrer la cueillette d’herbes sauvages et de

champignons dans une certaine vallée de la Galilée.

« Le Golan, le désert, la Galilée,

les monts de Judée… Chaque

région d’Israël a ses propres

produits, son savoir-faire »

« C’est quand même sur nos terres qu’on trouve les plus

vieux oliviers du monde! », rappelle-t-il.

Il n’y a jamais eu de chefs dans sa famille, mais l’amour de

la bonne table lui a été transmis depuis toujours. Né d’un

père belge – le fameux caricaturiste et bédéiste Michel

Kichka – et d’une mère française, David Kichka a biberonné

à ses doubles origines qui ont attisé sa curiosité et son

envie d’apporter à son tour sa pierre à son jeune pays. Et il

le fait de multiples façons.

On ne trouvera pas David Kichka le bien nommé (en

yiddish, les kishke sont les

intestins!) aux fourneaux,

mais plutôt du côté du

management. C’est ce qu’il

a fait pendant des années

à la direction de grands

restaurants de Tel-Aviv,

notamment dans l’un des

meilleurs, le Raphaël. Il a

aussi lancé une chaîne de

boulangeries et d’épicerie

fine en Israël et a été

propriétaire de plusieurs

restaurants, dont le Pastel, qui existe toujours au Musée

d’art de Tel-Aviv. Et puis il y a sept ans, il a eu envie de tout

arrêter et de promouvoir autrement la gastronomie de son

pays.

Il a été l’initiateur d’un projet fort innovateur visant à

promouvoir les diverses facettes de la gastronomie

israélienne d’aujourd’hui : Creative Gastronomic Experience

(www. davidkichka.com).

Depuis de nombreuses années, David Kichka est un passeur.

Il emmène souvent des chefs israéliens dans des circuits

de tourisme gastronomique en France dans des centres

de villégiature, des hôtels, des restaurants, pour qu’ils

voient de près ce qui s’y mijote. En retour, il accompagne de

grosses délégations de chefs étrangers en Israël, parfois

surpris par les exigences de la cacherout – « Ah bon? Ici

vous ne mettez pas de beurre sur le steak? » –, mais curieux

de découvrir cette cuisine israélienne dont on parle de

plus en plus. Comme à Paris, celle du Shabour du chef

Assaf Granit de Jérusalem, qui a été étoilé au Michelin…

64

ÉDITION SPÉCIALE


David Kichka (Crédit : Stefan Bozic)

Récemment, le fameux chef pâtissier chocolatier français

Pierre Hermé s’est adressé à lui pour le piloter quelques

jours à travers Israël. Et des responsables de la grande

chaîne d’alimentation Carrefour vont bientôt lui demander

d’en faire autant pour mieux saisir le marché israélien.

Il y a deux ans, David Kichka a réalisé une série télé pour la

chaîne documentaire israélienne dans laquelle il a voulu

montrer que même si Israël est un petit pays, il a aussi un

beau terroir et qu’il y a tout lieu d’en être fier.

« Le Golan, le désert, la Galilée, les monts de Judée…

Chaque région a ses propres produits, son savoir-faire. »

Depuis quatre ans, il préside l’Association israélienne

pour la culture gastronomique, un petit regroupement,

comptant quelque deux cents membres, qui organise

régulièrement des rencontres semi-académiques entre

des anthropologues, des sociologues, des historiens de la

nourriture et des chefs.

« Là, on aborde la gastronomie autrement, dans toute sa

richesse, et pas seulement dans le fun des bons repas et

d’Instagram. »

Ce qui le réjouit aussi beaucoup, c’est qu’au premier Festival de la

cuisine israélienne qu’il a organisé avec American Express et où on a

décerné des prix d’excellence, des vingt lauréats qui sont montés sur

scène, seuls huit étaient de Tel-Aviv.

« Pour moi, c’était très important de promouvoir ces jeunes chefs,

ces agriculteurs, ces producteurs artisanaux. Et même si c’est à

Tel-Aviv qu’on trouve les meilleurs restaurants, quelque 70 cuisines

différentes et régionales – juives, arabes, druzes… – ont été

célébrées. »

Dans ce pays où l’on peut manger dehors dix mois par an, rien

d’étonnant à ce que la streetfood soit si développée. Bien sûr,

comme ailleurs, les hamburgers pullulent, mais outre les

traditionnels falafels et shawarmas, les mets proposés se

diversifient. Et si Tel-Aviv, toujours à part, est considérée comme

très vegan-friendly, la consommation de viande reste quand

même importante dans l’ensemble du pays – déjà à cause du

Shabbat et des Fêtes juives.

« Mais, sans que ce soit présenté comme tel, on peut partout

manger végétarien et végan, assure-t-il. En Israël, nous

consommons spontanément beaucoup de légumes et nous en

avons de très bons. »

Bien sûr, il y a encore beaucoup à faire.

David Kichka multiplie les conférences sur les rapports entre l’art

et la gastronomie, le vin et le terroir, et s’emploie à conscientiser

son auditoire à la valorisation des déchets alimentaires.

« Israël est malheureusement très mal placé. Nous jetons encore

plus de 35 % de notre nourriture et le gros des déchets provient

des particuliers. Il nous faut travailler là-dessus, comme ailleurs

dans le monde. »

Le monde et ses influences gastronomiques qui ne sont

évidemment jamais loin.

« Il suffit que le chef du restaurant danois Noma, célébré il y a

quelques années comme le meilleur du monde, sorte un livre

qui fait l’éloge de la fermentation pour que partout des chefs s’y

mettent. »

Mais en contrepoint, souligne-t-il, on célèbre partout l’authenticité

et l’ethnicité. Les Israéliens sont de plus en plus fiers de leurs

origines, qui sont souvent mêlées.

« Nous sommes un pays d’immigrants. Nous avons des chefs

mi-égyptiens, mi-polonais, ukrainiens, irakiens ou moitié

marocains, moitié argentins… qui se mettent à fouiller dans leurs

tiroirs et en sortent des recettes. Ça peut donner des résultats

très intéressants en cuisine! »

LVS MARS/AVRIL 2023 65


REGARD SUR LA LITTÉRATURE ISRAÉLIENNE

D’EXPRESSION FRANÇAISE

RENCONTRE AVEC L’ÉCRIVAIN RAPHAËL JERUSALMY

VIRGINIE SOFFER

Né à Paris, Raphaël Jerusalmy a fait son Aliyah en 1980.

Cet ancien officier du renseignement militaire de Tsahal

est l’auteur de cinq romans remarqués : Sauver Mozart,

La Confrérie des chasseurs de livres, Les obus jouaient à

pigeon-vole, Évacuation et La Rose de Saragosse, tous

publiés chez Actes Sud.

Il a accordé une entrevue à La Voix sépharade.

Comment d’agent du renseignement de Tsahal êtes-vous

devenu écrivain?

Toute ma famille baigne dans les livres depuis toujours.

Mon grand-père était imprimeur-relieur. Mes parents

vendaient des livres anciens. J’en ai également vendu. Le

monde livresque faisait partie de ma vie depuis toujours,

et il ne me restait plus qu’une chose à faire après en avoir

vendu, acheté et réparé : en écrire.

Raphaël Jerusalmy

(Crédit : Sharon Jerusalmy)

Depuis Tel-Aviv, Raphaël Jerusalmy nous parle de la place de la

littérature d’expression française en Israël et de son dernier livre

In Absentia (Éditions Actes Sud, 2022). Un roman bouleversant

d’une concision extrême.

Trois récits déconcertants s’y enchevêtrent. Celui de Saul

Bernstein, un collectionneur d’art juif, qui vit dans le Paris des

années 30 jusqu’au jour où il est déporté à Auschwitz. Celui de

Pierre Delmain, un écrivain communiste interné dans le camp

de Struthof où il achève les déportés à mains nues lorsqu’ils ne

peuvent plus participer aux expériences des nazis. Et les combats

intérieurs que mène Pierre Delmain pour tenter de s’évader des

rêves du temps de la Deuxième croisade, au XII e siècle, qui le

hantent.

Après avoir pris ma retraite militaire de Tsahal, j’ai pu me

consacrer à une de mes passions : jouer avec les mots. Dès

que j’écris une phrase, je regarde dans le dictionnaire, quels

sont les synonymes, s’il n’y a pas de meilleurs mots, etc.

J’ai consacré l’essentiel de ma carrière au renseignement

dans Tsahal, où j’ai connu des moments hors du commun.

Ces moments si forts, si profondément humains,

contredisent ce qu’on dit généralement sur l’humanité,

surtout dans des périodes de conflit.

J’ai souhaité retranscrire ces instants qui sont devenus

ma marotte en littérature : comment la petite histoire

contredit la grande Histoire.

Je n’ai pas décidé du jour au lendemain d'être écrivain! C’est

comme lorsqu’on est au piano et qu’on veut être musicien,

il y a quelques notes qui sortent puis commencent à

former une petite mélodie, et à partir de là, on se retrouve

à écrire toute une chanson, si ce n’est pas une symphonie!

J’ai commencé à écrire quelques lignes qui m’ont plu, j’ai

continué et c’est devenu une histoire alors que je tapotais

sur mon ordinateur dans un café Bobo de Tel-Aviv.

66

ÉDITION SPÉCIALE


Pouvez-vous nous parler de l’atmosphère des cafés où

vous écrivez à Tel-Aviv?

J’aime beaucoup écrire dans des cafés de Tel-Aviv, et je

ne suis pas le seul!

Un jour, une émission de télévision est venue filmer le

café Bobo où je me trouvais. Presque tous les clients

tapotaient sur leur ordinateur. Lorsqu’on m’a demandé

ce que je faisais, j’ai dit que j'écrivais un roman. Mon

voisin écrivait une pièce de théâtre et la personne d’à

côté travaillait sur un script de film.

« Ma marotte en littérature :

comment la petite histoire

contredit la grande Histoire »

Quel est votre regard sur la littérature francophone en

Israël?

De nombreux écrivains israéliens traduits en français

ont un certain succès. Les Israéliens sont extrêmement

friands de littérature française. On traduit aujourd’hui

des textes assez ardus de la littérature française pour

le public israélien qui les adore.

Par contre, il y a peu d’écrivains israéliens qui écrivent

en français. Chez Actes Sud, nous sommes seulement

deux! La littérature francophone en Israël est assez

limitée. Il y a bien quelques Français comme moi qui

écrivent dans la langue de Molière, mais ils ne sont pas

nombreux par rapport aux Israéliens qui écrivent en

hébreu.

Qu’est-ce qui vous a motivé à écrire votre dernier livre,

In Abstentia?

Je n’avais pas l’intention d’écrire un autre livre sur

fond historique de la Shoah jusqu’au jour où j’ai

rencontré la conservatrice du Musée-mémorial

du camp de concentration de Struthof, en Alsace.

J’ignorais jusqu’alors qu’il avait existé un camp de

concentration d’opposants au régime nazi sur le

territoire français actuel.

Elle m’a raconté une histoire abracadabrante. Le

Professeur Hirt, le médecin SS du camp de Struthof,

avait commandé 100 squelettes pour une recherche

qu’il souhaitait effectuer avec la faculté d’anatomie

de Strasbourg. Himmler entendant parler de cette

recherche raciale a passé cette commande funeste

à Auschwitz. Cent personnes juives, hommes et

femmes, ont ainsi été transportées vivantes jusqu’au camp

de Struthof où elles ont été transformées en squelettes.

Je ne voulais pas écrire un nouveau livre sur la Shoah. Mais

cette histoire de squelettes ne me quittait pas. Bien des fois

avant de m’endormir, cette danse macabre défilait dans ma

tête. Je me suis dit alors : je suis obligé d’écrire ce livre.

Maintenant que le livre est sorti, je me dis que je n’aurais

pas dû hésiter. On doit absolument continuer à écrire sur la

Shoah. Surtout aujourd’hui où il y a un problème de devoir

de mémoire. Il y a une nécessité d’entretenir la flamme de

la mémoire pour qu’elle continue à brûler dans notre esprit.

Vous avez vous-même un lien très direct avec la Shoah en

tant que petit-fils de déportés à Auschwitz?

Oui, on oublie souvent combien de Sépharades ont péri dans

les camps de concentration. Ce fut malheureusement le

cas de ma famille paternelle, qui venait de Turquie et avait

immigré en France. Avec ma grand-mère qui s’appelait

Sultana (on peut difficilement avoir un nom plus sépharade!),

ils ont fini leurs jours à Auschwitz. Mon père fut le seul

survivant.

La version intégrale de cette entrevue est en ligne

sur le site Web de LVS : lvsmagazine.com

LVS MARS/AVRIL 2023 67


LA LITTÉRATURE ISRAÉLIENNE

TRADUITE DANS LE MONDE ENTIER

ELIAS LEVY

En 2017, le célèbre écrivain israélien Amos Oz, décédé en

2018, dont les livres ont été traduits en 53 langues, a accompli

un grand tour de force littéraire. La traduction en chinois de

son roman Scènes de vie villageoise (la traduction française

de ce livre est parue aux Éditions Gallimard) a obtenu le plus

prestigieux prix littéraire chinois décerné à la traduction en

mandarin d’une œuvre écrite dans une langue étrangère, en

l’occurrence l’hébreu : le prix Jingdong.

Amos Oz et son traducteur chinois, le Dr Zhong Zhiqing,

se sont partagé ce prix littéraire assorti d’une bourse de

1 million de yuans, soit environ 150 000 $ US.

La même année, le réputé écrivain israélien David Grossman

a été le lauréat de l’un des prix les plus prisés octroyés par

la littérature anglo-saxonne, le Man Booker International

Prize, pour son roman Un cheval entre dans un bar (la

traduction française de ce livre est parue aux Éditions

du Seuil). Il a partagé la bourse de 50 000 livres sterling

de ce prix avec la traductrice britannique de ce roman,

Jessica Cohen.

En 2020, l’écrivaine israélienne Iris Argaman a été la

récipiendaire, pour son livre Bear and Fred, du prestigieux

prix littéraire italien Giovanni Arpino, décerné à une œuvre

littéraire pour des enfants de 6 à 11 ans...

La littérature israélienne continue à rayonner dans les

quatre coins du monde.

Depuis le début des années 90, celle-ci a connu un essor

impressionnant. Aujourd’hui, les œuvres des écrivains

israéliens sont traduites en 72 langues.

The Institute for The Translation of Hebrew Litterature (ITHL)

– Institut pour la traduction de la littérature hébraïque – a

grandement contribué au succès fulgurant que la littérature

israélienne connaît à l’échelle mondiale.

Fondé en 1962, l’ITHL s’est fixé pour mission de promouvoir

les œuvres des écrivains israéliens sur la scène littéraire

internationale en soutenant le processus de traduction de

leurs livres par les plus grands éditeurs mondiaux.

Aujourd’hui, l’ITHL est l’agent littéraire officiel de quelque

400 écrivains israéliens.

Cette institution publique collabore étroitement avec les

éditeurs étrangers ayant acquis les droits de traduction des

œuvres d’écrivains israéliens.

Les auteurs israéliens

sont lus aujourd’hui en

72 langues

Afin de maintenir un haut standard de qualité dans la

traduction d’une œuvre littéraire de l’hébreu à une langue

étrangère, l’ITHL approuve préalablement le choix du

traducteur recommandé par la maison d’édition étrangère

qui publiera l’ouvrage.

L’ITHL abrite dans ses locaux, sis à Tel-Aviv, un Centre

bibliographique et d’archives numériques où sont

répertoriées toutes les informations relatives à plus de

54 000 livres et à leurs auteurs.

L’ITHL, qui représente officiellement plus de 300 écrivains

israéliens dans les plus importantes foires du livre

internationales, organise régulièrement dans de nombreux

pays des conférences et des séminaires sur la littérature

hébraïque. Il publie aussi des catalogues et des périodiques

présentant les œuvres les plus récentes des écrivains

israéliens.

Héritière d’une culture millénaire et de la littérature hébraïque

d’Europe centrale, mais aussi des traditions littéraires

et narratives du Proche-Orient, la littérature israélienne

68

ÉDITION SPÉCIALE


Le célèbre écrivain israélien, feu Amos Oz (Crédit: D. Jochaux-Éditions Gallimard)

est une littérature enracinée et engagée. Les œuvres

puissantes de feu Amos Oz, de feu Avraham B. Yehoshua

ou de David Grossman, pour ne citer que ces derniers,

interrogent inlassablement la liberté de l’individu dans les

entrelacs de la mémoire et de l’Histoire.

Parallèlement à la présence de plus en plus importante

d’auteurs reconnus dans les catalogues des plus grands

éditeurs mondiaux, il est apparu dans les années 90

une nouvelle génération d’écrivains, Orly Castel-Bloom,

Etgar Keret, Yehudit Katzir, Alona Kimhi, Eshkol Nevo,

Ron Barkaï... dont les préoccupations, qui se rapprochent

de celles de leurs confrères américains ou européens, se

détachent de l’expérience singulière de la société israélienne,

de la spécificité de l’histoire d’Israël et de ses problématiques

sociales, religieuses ou ethniques.

La présence de plus en plus remarquée des femmes dans

le paysage littéraire israélien, ainsi que l’apport culturel

des nouveaux immigrants, sont autant de facteurs de

renouvellement de cette littérature très créative.

Par ailleurs, la littérature israélienne compte aussi dans ses

rangs des écrivains arabes très talentueux qui écrivent leurs

livres en hébreu, dont le brillant romancier Sayed Kashua.

Lue aujourd’hui en 72 langues, du cantonais à l’islandais,

en passant par le catalan, l’arabe, le russe, le norvégien,

le pachto – idiome parlé en Afghanistan –... la littérature

israélienne est vouée à un avenir très prometteur.

Pour plus d’informations sur l’ITHL, visitez le Site Web :

www.ithl.org.il

LVS MARS/AVRIL 2023 69


CÉLÉBRONS TOUS

YOM HATSMAOUT À MONTRÉAL

« Nous lançons un vibrant appel à tous

les membres de la communauté juive de

Montréal et à leurs amis non juifs pour qu’ils

se joignent à nous le 26 avril prochain afin

d’exprimer leur pleine solidarité avec le

peuple et l’État d’Israël. Nous célébrerons

dans la liesse le 75 e anniversaire de la

renaissance d’Israël. Malheureusement,

de sérieuses menaces existentielles, et

pas des moindres, continuent de peser

quotidiennement sur ce petit et valeureux

pays. Clamons haut et fort notre appui

indéfectible à ce phare démocratique

qui incarne avec force notre confiance

inébranlable en l’avenir du peuple juif », nous

a dit Amos Sochaczevski, sioniste invétéré.

Amos Sochaczevski, Dado Ben Brith,

Jacques Sabbag et Mike Druckman sont les

coprésidents de la 22 e édition du rallye de solidarité avec

Israël, qui se tiendra le mercredi 26 avril au centre-ville de

Montréal.

Organisé par un organisme indépendant, le Jewish Unity

Partnership, ce grand rassemblement n’a aucune connotation

politique ou idéologique, rappelle Jacques Sabbag.

« Ce n’est pas une manifestation politique, mais un signe

fort de solidarité avec le peuple d’Israël. Ce sera un beau

moment de communion et de fraternité au cours duquel tous

les amis d’Israël, Juifs et non-Juifs, exprimeront tangiblement

leur solidarité à l’égard du peuple israélien, peu importe leurs

obédiences politiques ou religieuses. Il est important de

convaincre vos proches et vos amis de participer au rallye.

Ce sera aussi l’occasion de démontrer aux Montréalais, aux

Québécois et aux Canadiens que nous sommes tous unis

derrière Israël. »

Le rallye de solidarité avec Israël à Montréal est le plus

grand du genre au Canada. Il est le deuxième plus important

en Amérique du Nord, après la marche de solidarité

avec Israël organisée chaque année au centre-ville de

New York, qui attire plus d’un million de personnes – mais

celle-ci n’a pas lieu le jour de Yom Hatsmaout.

« Seuls des bénévoles sont impliqués dans l’organisation

de ce rallye, il n’y a aucun professionnel rémunéré », précise

Mike Druckman.

Le rallye débutera à 11 h du matin. Les participants marcheront

du carré Phillips jusqu’à la place du Canada.

Une soixantaine d’autobus ont été affrétés et transporteront

gratuitement tous ceux et celles qui souhaitent prendre part à

ce rassemblement. Les autobus partiront de différents lieux :

Montréal, Côte-Saint-Luc, Laval, Dollard-des-Ormeaux,

Chomedey… pour se rendre jusqu’au carré Phillips. Des

autobus amèneront aussi les élèves du niveau secondaire

des écoles juives. Les élèves du niveau primaire devront être

accompagnés de leurs parents.

« Chaque année, de plus en plus de jeunes prennent part au

rallye. C’est un signe fort encourageant, car nous tablons

beaucoup sur la relève pour assurer à Montréal la pérennité

de cette célébration très importante pour tous ceux et celles à

qui l’avenir d’Israël tient grandement à cœur. Cette année, de

jeunes adultes très dynamiques et très motivés sont membres

du comité organisateur du rallye », précise Dado Ben Brith.

70

ÉDITION SPÉCIALE


Les organisateurs remercient vivement la Ville de Montréal et

son Service de police (SPVM) pour leur étroite collaboration.

« L’organisation d’une telle manifestation requiert une

logistique et un encadrement sécuritaire très exigeants. La

Ville de Montréal et le SPVM se sont toujours distingués par

leur grand professionnalisme et un esprit de coopération

exceptionnel que nous apprécions grandement », souligne

Mike Druckman.

Les organisateurs tiennent aussi à remercier Karen Aflalo,

présidente de la Communauté sépharade unifiée du Québec

(CSUQ), et Benjamin Bitton, directeur général de cette

institution, pour leur appui indéfectible. La CSUQ transmettra

un message à tous les membres de notre communauté afin

de les encourager fortement à célébrer Israël le 26 avril au

centre-ville de Montréal.

L’année dernière, quelque 8 000 personnes ont participé au

rallye.

À Montréal, Yom Haatsmaout est célébré par tous les

amis d’Israël, Juifs et non-Juifs. Les leaders de plusieurs

communautés, grecque, philippine, haïtienne… et les

représentants du corps diplomatique de plusieurs pays

– États-Unis, France, Allemagne, Grèce, Belgique, Maroc… –

ont été conviés, comme les années précédentes, à se joindre

à la communauté juive de Montréal en ce jour de fête.

Pour plus d’informations, visitez le site Web:

celebrationisrael.ca

« Clamons haut

et fort notre appui

indéfectible à ce

phare démocratique

qu’est Israël »

Amos Sochaczevski

LVS MARS/AVRIL 2023 71


LE 125 e ANNIVERSAIRE DU PREMIER

CONGRÈS SIONISTE À BÂLE

ELIE BENCHETRIT,

SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE LA FÉDÉRATION SÉPHARADE DU CANADA

Le 15 juillet 1904, Max Nordeau 1 écrivait dans L’Écho sioniste:

« Le peuple juif avait produit un homme admirablement

européen et en même temps un Juif enthousiaste, qui avait

la passion du progrès le plus radical et un merveilleux

sens historique, qui était poète et homme d’État pour

l’idée juive; qui était président, orateur, organisateur,

rêveur, homme d’action, prudent où il pouvait, téméraire

où il devait l’être; prêt à tous les sacrifices et même au

martyre en ce qui le concernait, et d’une indulgence, d’une

patience inépuisable pour les autres; fier, noble, plein de

dignité, et modeste pourtant, et fraternel avec les plus

simples et les plus humbles »

Après le premier Congrès sioniste

qui eut lieu à Bâle en 1897,

Theodor Herzl déclara, comme un

défi à tous les pronostics : « À Bâle,

j’ai créé l’État Juif ». Force est de

constater que 126 ans après, alors

que l’État d’Israël fête ses 75 ans

d’existence, les réalisations de cet

État et sa place dans le concert des

Nations ont largement dépassé les

prémisses du rêve sioniste. Malgré les

guerres et les campagnes insidieuses

de nos ennemis, qui pour masquer

un antisémitisme devenu viral et

se donner bonne conscience se déclarent sans complexe

« antisionistes », nos regards restent toujours tournés vers

Jérusalem.

J’ai eu le privilège et l’honneur, à titre de secrétaire général

de la Fédération sépharade du Canada, de me rendre à Bâle

en août dernier en tant que délégué canadien avec mon

président, M. Avraham Elarar, et son épouse, Nicole, afin

d’assister au 125 e anniversaire du premier Congrès sioniste.

« Si vous le voulez,

ce ne sera pas

une légende »

Theodor Herzl

continuons à être partie prenante quant aux destinées

d’Israël et du peuple juif.

Arrivés à Bâle le matin du vendredi 26 août, nous avons été

reçus à notre hôtel par un service d’accueil composé de

jeunes Israéliens, membres de l’équipe organisatrice de cet

événement, de la manière la plus professionnelle qui fut et qui le

resta pendant toute la durée de notre séjour. Après un Chabbat

célébré dans la joie et la bonne humeur, entourés de délégués

venus de partout, nous avons débuté notre programme

d’activités le dimanche 28 au Centre des congrès de Bâle

par un mini-présidium de la Fédération sépharade mondiale

réunissant des délégués mexicains de FESELA (Fédération

sépharade latino-américaine), Alberto

Lévy, Isaac Aspani, le jeune architecte

Enrique Lévy ainsi que le nouveau

président de cette organisation,

M. Gaston Maya Funés, M. André Derhy,

président de la Fédération sépharade

de France, et M. Hayim Cohen,

président de la Fédération sépharade

mondiale, dont le siège central est en

Israël. Cette réunion avait pour but de

revoir et d’actualiser les statuts de

la Fédération sépharade mondiale à

la suite du décès l’an dernier de son

président, M. Nissim Gaon Z’.L’.

Nous avons été honorés lors de ce présidium par la présence de

M. Avraham Duvdevani, président sortant du Congrès sioniste

mondial et actuel président du Fonds national juif (KKL), qui

nous raconta des anecdotes concernant les « aventures »

de son père, feu Baroukh Duvdevani, qui fut un émissaire de

l’Agence juive en Afrique du Nord, et tout particulièrement

en Libye et au Maroc. Il nous fit part de son admiration pour

les réalisations de notre Fédération à l’échelle canadienne et

internationale.

L’expérience, ou plutôt les expériences, que nous avons

vécues et partagées avec quelques-uns des 1 500 délégués

et conférenciers venus des quatre coins de la planète ont

été aussi enrichissantes qu’inoubliables et par-dessus tout

empreintes d’émotion à travers la prise de conscience que

malgré nos différences et notre diversité d’opinions, nous

Il est important de signaler que les mesures de sécurité mises

en place par les autorités de la Confédération helvétique

ainsi que par le Canton de Bâle lors de la tenue du Congrès

ont été dignes de la réputation, du souci de la précision et

de l’excellence suisses. En un mot, il fallait montrer patte

blanche avant de franchir les différents points de contrôle

72

ÉDITION SPÉCIALE


Le président de l’État d’Israël,

Isaac Herzog, s’adressant aux délégués

réunis à Bâle à l’occasion de la célébration

du 125 e anniversaire du premier Congrès

sioniste

(Crédit : Fédération sépharade du Canada)

pour accéder à l’intérieur du Messe Congress Center, où

devait se dérouler le Congrès. Pour la petite histoire, nous

avons appris sur place que l’espace aérien du Canton de

Bâle fut fermé la journée où l’avion du président de l’État

d’Israël, M. Isaac Herzog, devait atterrir. Nous avons tous

été impressionnés par le dévouement, l’amabilité et le

professionnalisme dont les forces de sécurité suisses,

postées aux points névralgiques des lieux où devaient se

dérouler les activités du Congrès, ont fait preuve tout au

long de ces quatre jours avec rigueur certes et… le sourire

en plus!

président-directeur général du réseau des donateurs juifs,

livra une intéressante analyse sur le rôle et les mécanismes

de la collecte de fonds.

Ce serait prendre trop de place ici que d’énumérer le nombre

impressionnant de conférenciers présents et la qualité de

leurs interventions qui, pendant deux jours, ont accaparé

l’attention des délégués. Je voudrais cependant citer

quelques noms qui m’ont marqué en raison de la brillance de

leurs exposés aussi intéressants que percutants. Je pense à

Ce fut le nouveau président du Congrès sioniste mondial,

M. Yaakov Hagoel, qui en début d’après-midi, le 28 août, dans

le San Francisco Hall, donna le coup d’envoi à la plénière

d’ouverture de la Conférence pour souhaiter la bienvenue

aux délégués. Cet acte fut placé sous le thème du

leadership de Herzl et animé par la journaliste vedette de

la télévision israélienne, Hila Korach. Au même moment,

en parallèle dans le Montreal Hall (en l’honneur de la

délégation canadienne, je présume), le célèbre publiciste

Maurice Lévy, président du groupe français Publicis,

présentait aux congressistes l’impact social de Herzl sous

le titre : « Du Tikkoun Olam à la technique pour le Bien. »

Au cours de l’après-midi, les délégués purent suivre

les interventions remarquables et remarquées

d’illustres conférenciers, tels que la Baronne Ariane de

Rothschild, philanthrope célèbre et présidente du conseil

d’administration du Groupe Edmond de Rothschild, du

conférencier vedette, le Dr Micah Goodman, qui mit en

exergue les idéaux de Herzl : changer le passé et changer

le futur. Nous retrouvâmes avec plaisir au cours d’une

table ronde l’historien et ancien professeur à l’Université

McGill, M. Gil Troy, qui réside actuellement en Israël, avec

le Dr Motti Friedman, directeur de recherche à l’Institut

pour le sionisme, et le Rabbin David Wolpe du Temple Sinaï.

Une autre figure connue qui, il y a quelques années fut

directeur général de la Fédération CJA, Andrés Spokoiny,

Avraham Elarar (à droite), président de la Fédération sépharade du

Canada avec Ahmed Mansouri, directeur du Musée de la culture et

des civilisations de Dubaï (Crédit: Fédération sépharade du Canada)

LVS MARS/AVRIL 2023 73


Yossi Cohen, ancien directeur du Mossad, au lieutenant

général Moché Yaalon, ancien chef d’état-major de Tsahal,

qui ont exposé les défis d’Israël en matière de sécurité et de

défense dans le contexte de la menace iranienne, à Danna

Azrieli, présidente du Groupe Azrieli qui traita du problème

complexe mais combien exaltant de vivre le rêve sioniste en

Israël, du Dr Gilad Malach qui nous parla du lancinant problème

de l’intégration ou de l’isolement des ultra-orthodoxes, une

question existentielle pour le futur d’Israël.

La recrudescence de l’antisémitisme à l’échelle mondiale

et les moyens qu’il faut se donner pour contrer ce fléau

fut le thème abordé par Jonathan Greenblatt, présidentdirecteur

général de l’Anti-Defamation League2 depuis 2015,

spécialiste de la lutte contre l’antisémitisme aux États-Unis,

par le Dr Felix Klein, Commissaire du gouvernement fédéral

allemand pour la vie juive et la lutte contre l’antisémitisme.

Une conférence passionnante, devant un nombreux public

mérite une mention particulière, celle du philanthrope et

homme d’affaires canadien M. Sylvan Adams qui, avec brio et

un humour décapant, développa avec de nombreux exemples

concluants ses méthodes originales pour renforcer l’image

globale d’Israël à travers le monde par l’entremise du sport

et de la culture. Et enfin, les interventions enthousiastes et

porteuses d’espoir des représentants d’ONG israéliennes

œuvrant dans l’esprit juif du Tikkoun Olam dans les pays du

tiers-monde afin d’aider des populations fragilisées à sortir

du sous-développement. Des noms à retenir : Sivan Yaari,

fondateur et président d’Innovation Africa, la Dr Kira Radinsky,

inventrice et entrepreneure, présidente et directrice de

Diagnostic Robotics&Scientist, et Adi Altschuler, éducatrice

et entrepreneure sociale, fondatrice de « Krembo Wings », un

mouvement de jeunesse.

La conclusion de ces deux jours intenses et riches en émotions

fut le Gala de clôture qui eut lieu le dimanche 28 août en soirée

au même endroit où, 125 ans auparavant, Theodor Herzl tint son

premier congrès sioniste, le Concert Hall du « Stadt Casino »

de Bâle. Imaginez une immense salle construite au 19 e siècle

et d’une capacité de 1500 places, pleine à craquer et où l’on ne

pouvait accéder que sur invitation et un contrôle minutieux.

La présence du président de l’État d’Israël, M. Isaac Herzog, du

Dr Guy Morin, maire de Bâle, de MM. Yaacov Hagoel et

Avraham Duvdevani, respectivement présidents de

l’Organisation sioniste mondiale et du Fonds national

juif (KKL), à la tribune d’honneur, ainsi que de plusieurs

dignitaires invités, dont le directeur du Musée de la culture

et des civilisations de Dubaï, M. Ahmed Mansouri, portant le

keffieh traditionnel de son pays, ainsi que le chef spirituel

de la communauté druze d’Israël, le Cheikh Moafek Tarif, en

costume d’apparat, ajoutait une touche de solennité à cette

soirée qui restera inoubliable.

Cent vingt-cinq années plus tard depuis ce premier Congrès

où un jeune journaliste idéaliste et rêveur lança l’idée d’un État

pour le peuple juif dans sa terre ancestrale, je peux affirmer

sans crainte de me tromper que l’esprit de Theodor Herzl était

présent et vibrant dans cette même salle où il avait dessiné

les contours de ce pays qu’il ne verrait pas de son vivant, mais

qui lui doit tant. Lorsqu’à la clôture du Gala, plus de mille voix

s’élevèrent à l’unisson pour entonner avec une émotion non

contenue les paroles de l’Hatikvah, « Être un peuple libre sur

notre terre, terre de Sion et de Jérusalem », le rêve, devenu

réalité, prenait tout son sens pour chacun de nous qui eut

cette chance merveilleuse d’être à Bâle ce 29 août 2022.

De gauche à droite: Avraham Elarar, président

de la Fédération sépharade du Canada (FSC),

le Cheikh Moafek Tarif, chef spirituel de la

communauté druze d’Israël, et Elie Benchetrit,

secrétaire général de la FSC

(Crédit : Fédération sépharade du Canada)

1. Médecin franco-hongrois (1849-1923), auteur, critique sociologique et

cofondateur de l’Organisation sioniste mondiale avec Theodor Herzl.

2. L’Anti-Defamation League est une organisation non gouvernementale fondée

par l’organisation B’nai B’rith aux États-Unis.

74


LA VALORISATION DU PATRIMOINE

JUIF DE TÉTOUAN

Les signataires du protocole, de gauche à droite: Salomon Benatar, Alberto Hayon, Avraham Elarar, Younes

Tazi, André Azoulay, Abdellah Ouzitane, Mustapha El Bakkouri et Farid El Bacha. (Crédit: FSC)

La ville de Tétouan au nord du Maroc a accueilli le

11 janvier dernier le 1 er Forum national sur « Le

rôle des Juifs marocains dans l'enrichissement de

la mémoire collective nationale ». Ce forum a été

marqué par le lancement du Centre de recherches

et d'études sur l'histoire des Juifs du Nord du Maroc.

Des personnalités de marque étaient présentes à

cet évènement dont : MM. Mustapha el Bakkouri,

président du Conseil communal de Tétouan, André

Azoulay conseiller de S.M le Roi Mohammed VI,

Abdallah Ouzitane, président fondateur du Centre

d'études et de recherches sur le droit hébraïque

au Maroc, Farid el Bacha directeur de la Chaire de

Droit hébraïque au Maroc à l'Université Mohammed

V de Rabat et Avraham Elarar, président de la

Fédération Sépharade du Canada et grand artisan

de ce rapprochement par l'entremise des relations

culturelles, entre le Maroc, Israël et le judaïsme

marocain.

La signature du protocole. (Crédit: FSC)


RENCONTRE AVEC UNE PASSIONNÉE DE HOCKEY

JULIA BENARROCH, 15 ANS

YVAN CLICHE

Les moments passés sur une patinoire sont toujours

parmi les plus beaux de la semaine pour Julia Benarroch.

L’adolescente de 15 ans de Côte-Saint-Luc, élève en 4 e

secondaire à l’École Maïmonide, Campus Jacob Safra de

Ville Saint-Laurent, entretient une passion pour le sport

chéri des Canadiens depuis les premiers moments où elle a

chaussé des patins, vers l’âge de 8 ans.

À preuve de cette passion, Julia est sur la patinoire presque

tous les jours : la semaine pour les entraînements et la fin

de semaine pour des matchs organisés un peu partout au

Québec.

Sa mère, Nadine Familiant, la transporte quotidiennement

aux arénas et assiste à tous ses matchs.

Julia joue maintenant au niveau le

plus élevé du hockey féminin : pour

les Warriors du Lac St-Louis, une

région qui a vu émerger nombre

de grands talents du hockey

professionnel depuis des décennies.

Récemment, en décembre, elle a

été invitée à un essai en vue de la

constitution d’une équipe masculine

de hockey qui représentera

Montréal aux JCC Maccabi Games,

une compétition pour adolescents

juifs (12-17 ans), qui se tiendra en

Israël à l’été 2023.

« Julia joue maintenant

au niveau le plus élevé

du hockey féminin :

pour les Warriors du

Lac St-Louis »

Gérer son horaire exige bien

sûr beaucoup de discipline de

la part de Julia : il faut jongler

entre les obligations scolaires

et le temps passé sur la glace.

La jeune fille dit apprécier

le soutien de son école, qui

l’accommode au mieux pour

gérer les nombreuses heures

consacrées à son sport.

Sa vie d’athlète impose aussi

quelques sacrifices, dont

par exemple celui de parfois

manquer des fêtes d’amies.

Pour cette évaluation de son potentiel en hockey, un samedi

soir, Julia a affronté des garçons de son groupe d’âge :

des jeunes fort habiles, avec des tirs au but foudroyants,

auxquels elle a fait face avec aplomb. Résultats des tests

d’évaluation : Julia fera partie de l’équipe et ira représenter

Montréal en Israël!

« Très jeune, je me suis mise à regarder le hockey à la télé et

j’ai eu envie d’essayer la pratique de ce sport », raconte Julia.

Une fois inscrite dans une ligue locale, son choix s’est

rapidement porté vers la position la plus stratégique : celle

de gardienne de but. Depuis, elle vit une véritable passion

pour ce sport pratiqué depuis plus de 100 ans au Canada.

Son amour du hockey est si grand que l’adolescente trouve

du temps pour donner, à titre bénévole, des cliniques à de

jeunes gardiens de but.

Quand La Voix sépharade l’a rencontrée, elle arrivait d’une

séance d’enseignement sur l’art de garder les buts d’une

durée de trois heures auprès de jeunes de 7 à 9 ans de

l’est de Montréal. Séance organisée dans le cadre de la

Célébration du hockey féminin Caroline Ouellette, du nom

d’une joueuse du Québec titulaire de quatre médailles

olympiques obtenues entre 1998 et 2018.

76 PORTRAITS DE JEUNES


L’athlète modèle qui l’inspire est le renommé gardien de

but québécois Marc-André Fleury. Un hockeyeur originaire

de Sorel, actif au niveau professionnel depuis 2003, avec

près de 1000 matchs en carrière, champion olympique en

2010 avec l’équipe du Canada. Il est aussi récipiendaire de

trois coupes Stanley, trophée emblématique du hockey

professionnel en Amérique du Nord.

La mère de Julia nous montre d’ailleurs une photo de sa fille

avec le légendaire hockeyeur québécois, lors d’un passage

à Montréal. Signe de complicité, Marc-André Fleury a

même posé sa signature sur les jambières qu’utilise Julia.

Comment compose-t-elle avec la pression mentale qui

vient avec la position de gardienne de but? Il est important

de bien gérer ses émotions.

« Après avoir encaissé un but, je pousse la rondelle hors du

filet, je vais donner quelques coups de patin hors de mon

cercle afin de garder ma concentration. Comme gardienne,

tu dois seulement penser au prochain arrêt. »

Une approche qui lui sert bien. Julia savoure

particulièrement un tournoi joué en 2022 dans le cadre de

la Coupe Bélairdirect. Durant un match, elle a fait face avec

succès à sept tirs de barrage. Et, pour le dernier match,

soit la grande finale, elle a blanchi ses opposants dans un

affrontement serré, qui s’est terminé 2 à 0.

Pour la suite de sa vie d’athlète, elle envisage de poursuivre

ses études au cégep, puis à l’université, mais dans une

institution membre d’une ligue organisée de hockey

féminin affrontant d’autres établissements scolaires de

même niveau.

Une nouvelle ligue féminine de niveau professionnel

a débuté en 2023 ses activités en Amérique du Nord.

Elle compte une équipe basée à Montréal, nommée la

« Force de Montréal ». Cette ligue a présentement des

formations à Toronto, à Boston, à Buffalo, au Connecticut,

au Minnesota et au New Jersey.

Quand on lui demande si un jour elle aimerait endosser

l’uniforme de la formation montréalaise, son visage

s’illumine, ses yeux scintillent et elle arbore un large sourire.

Julia Benarroch. (Crédit : Yvan Cliche)

LVS MARS/AVRIL 2023 77


LE RÉVÉREND DANIEL BENLOLO

LEADER SPIRITUEL DE LA DÉLÉGATION DE MONTRÉAL

DE LA MARCHE DES VIVANTS

Le Révérend et Hazan de la Congrégation Spanish et

Portuguese, Daniel Benlolo, est le leader spirituel qui

accompagnera cette année la délégation de Montréal

qui participera, du 16 au 28 avril, à la Marche des vivants

– March of the Living –.

En 2012, il a été l’un des accompagnateurs des délégations

de petites communautés juives du Canada : Ottawa,

Winnipeg, Hamilton… qui se rendirent, dans le cadre de

la Marche des vivants, sur les terroirs où la Shoah a été

perpétrée pendant la Seconde Guerre mondiale.

« Je suis très honoré d’avoir été convié cette année à

accompagner, en tant que leader spirituel et ruah (motivateur,

animateur), la délégation de Montréal qui participera à

la Marche des vivants. C’est une expérience éducative

unique et très bouleversante qui marque un jeune à vie. C’est

certainement la victoire la plus éclatante de la résilience

et de la vie humaine sur la barbarie la plus monstrueuse

commise par des hommes », nous a dit le Révérend Daniel

Benlolo.

Le programme se poursuivra en Israël, où les participants

prendront part aux célébrations de Yom Hatsmaout,

Journée de l’indépendance de l’État juif.

Pour la première fois, un programme éducatif relatant

l’histoire des communautés juives des pays arabes ayant

vécu pendant plus d’un millénaire en Afrique du Nord, au

Moyen-Orient et en Iran, contraintes à l’exil après la création

de l’État d’Israël, en 1948, a été inclus dans le curriculum du

programme de la Marche des vivants. Ces communautés

ont subi dans le monde arabo-musulman les affres

de l’antisémitisme et de la discrimination. Ce nouveau

programme éducatif a été élaboré conjointement avec

le projet mémoriel Sephardi Voices, fondé par l’historien

canado-américain Henry Green.

Cent cinquante-quatre étudiants d’écoles juives et non

juives de Montréal prendront part cette année à la Marche

des vivants.

Au programme : visite des villes et des villages de Pologne

qui étaient autrefois des foyers importants de la vie juive en

Europe centrale, des camps de concentration et des camps de

la mort : Auschwitz-Birkenau, Plaszow, Majdanek, Treblinka…

où six millions de Juifs européens ont été exterminés.

Le point culminant : la Marche des vivants internationale,

effectuée en compagnie de plusieurs milliers de jeunes du

monde entier. Elle a lieu le jour de Yom HaShoah (Journée

du souvenir de la Shoah). Les participants se rendent

d’Auschwitz à Birkenau en empruntant le même trajet que

les victimes de la Shoah ont parcouru il y a 78 ans dans des

conditions inhumaines.

Le Révérend Daniel Benlolo

(Crédit: Congrégation Spanish et Portuguese)

78

NOMINATIONS


KAREN AFLALO

NOMMÉE MEMBRE DU

COMITÉ EXÉCUTIF

DE WOMEN LEADERS

IN PHARMA

Karen Aflalo a été nommée membre du Comité exécutif de

Women Leaders in Pharma – Femmes leaders en Pharma –,

une association regroupant des femmes leaders occupant

des fonctions de haute responsabilité dans l’industrie

pharmaceutique.

Objectifs :

• Donner des outils aux femmes œuvrant dans l’industrie

pharmaceutique afin qu’elles puissent atteindre leur plein

potentiel professionnel.

• Leur permettre de partager leurs expériences, leurs

conseils et les défis auxquels elles font face dans leurs

charges professionnelles.

• Instaurer un environnement convivial où elles pourront

discuter des obstacles auxquels elles se heurtent dans

leur pratique professionnelle et trouver des solutions pour

les surmonter.

• Utiliser les compétences de Women Leaders in Pharma

pour les aider à développer leur sens des affaires, à

faire preuve de courage et d’audace et à influencer le

changement.

• Discuter de problèmes concrets et d’approches pratiques

pour faire face à leurs responsabilités aussi bien dans la

sphère personnelle que dans la sphère professionnelle.

Karen Aflalo a un parcours professionnel riche.

Elle travaille depuis une quinzaine d’années pour la firme

Mead Johnson Nutrition (une division de Reckitt), où elle est

gestionnaire des ventes desservant un large territoire.

Elle est aussi une femme leader pleinement engagée

bénévolement dans diverses organisations communautaires,

où elle a occupé d’importantes fonctions : présidente de la

Communauté sépharade unifiée du Québec (CSUQ) depuis

2022, présidente sortante du Fonds national juif, Québec

(FNJ). Elle est graduée du Wexner Heritage Program, un

prestigieux programme nord-américain de développement

du leadership.

Karen Aflalo est la récipiendaire de plusieurs distinctions

honorifiques majeures que lui a décernées la Fédération

CJA de Montréal en reconnaissance de son engagement

communautaire remarquable.

CLINIQUE D’IMPÔT

LE SERVICE D’AIDE EN IMPÔT : PROGRAMME DES BÉNÉVOLES a pour objectif d’offrir gratuitement

de l’aide aux personnes admissibles qui ne peuvent pas remplir leurs déclarations de revenus et qui n’ont

pas les moyens de confier cette tâche à des professionnels.

Ces services sont offerts gracieusement aux familles qui répondent aux critères du programme.

FÉVRIER ET MARS 2023

Pour plus d’informations

reception@csuq.org | (514) 733-4998

N’oubliez pas

vos formulaires

et relevés


PESSAH ET SON IMPÉRATIF MORAL

RABBIN YAMIN LEVY

Le jour sacré de Pessah est un élément si fondamental de l’expérience théologique

et spirituelle juive qu’il est difficile de choisir par où commencer pour réfléchir sur la

nature, la signification et la portée de cette fête. L’Exode est abondamment évoqué

tout au long du TaNakh, y compris dans la poésie biblique, et il est lié à de nombreux

commandements. Il ne s’agit pas simplement d’un jalon historique : l’Exode annonce

la naissance de la nation juive et il est inscrit dans la mémoire collective du peuple

juif, notamment sous la forme de la Mitzvah de continuer de se souvenir du jour où

nous avons quitté l’Égypte.

« Tu ne dois pas manger de pain levé

avec ce sacrifice; durant sept jours tu

mangeras en outre des azymes, pain de

misère, car c'est avec précipitation que

tu as quitté le pays d’Égypte, et il faut que

tu te souviennes, tous les jours de ta vie,

du jour où tu as quitté le pays d’Égypte. »

(Devarim 16:3)

La sortie d’Égypte devient le symbole

universel de la souffrance humaine à

travers les âges, et ce que nous, en tant

que peuple, faisons de ce souvenir est

une expression de la philosophie et de la

théologie juives, et des valeurs fondatrices

du judaïsme. La grande révolution

du monothéisme ne consistait pas

simplement à remplacer le polythéisme

par la croyance en un Dieu unique. Servir

Hachem implique le respect des normes

éthiques et morales qu’Il exige de nous. La

Torah lie l’Exode aux obligations éthiques

et morales que nous avons envers nos

prochains. Le fait de se souvenir et de

remettre en scène notre souffrance en

Égypte n’est pas anodin. Au contraire,

c’est un rituel riche de sens, qui peut

nous inspirer à nous améliorer, nous,

notre communauté et le monde entier, de

manière noble et créative. La mémoire

de l’Exode rend le cœur plus humble et

entretient notre fidélité envers Dieu :

« Peut-être ton cœur s’enorgueillira-t-il,

et tu oublieras l’Éternel, ton Dieu, qui t’a

tiré du pays d’Égypte, de la maison de

servitude. » (Devarim 8:14)

La Torah établit fréquemment des liens

entre l’esclavage des Hébreux en Égypte

et l’impératif moral qui incombe au peuple

juif de faire preuve de compassion à l’égard

des étrangers et des moins fortunés.

« Rappelle-toi que tu as été esclave en

Égypte et que l’Éternel, ton Dieu, t’en a

affranchi; c’est pour cela que je t’ordonne

d’agir de la sorte. Quand tu feras la

moisson de ton champ, si tu as oublié dans

ce champ une gerbe, ne retourne pas la

prendre, mais qu'elle reste pour l’étranger,

l’orphelin ou la veuve, afin que l’Éternel, ton

Dieu, te bénisse dans toutes les œuvres de

tes mains. » (Devarim 24:18-19)

Cette expérience, profondément ancrée

dans la mémoire nationale du peuple juif,

est un constant rappel de son obligation

envers les moins nantis. La Torah décrit

avec grande précision envers qui les Juifs

doivent manifester un degré particulier

de compassion. Un aspect du Chabbat,

par exemple, devient une expression

hebdomadaire d’empathie envers les

serviteurs en raison de la sortie d’Égypte :

« Mais le septième jour est la trêve de

l’Éternel, ton Dieu : tu n'y feras aucun

travail, toi, ton fils ni ta fille, ton esclave

mâle ou femelle, ton bœuf, ton âne, ni tes

autres bêtes, non plus que l’étranger qui

est dans tes murs; car ton serviteur et ta

servante doivent se reposer comme toi.

Et tu te souviendras que tu fus esclave au

pays d’Égypte, et que l’Éternel, ton Dieu,

t’en a fait sortir d’une main puissante et

d’un bras étendu; c'est pourquoi l’Éternel,

ton Dieu, t’a prescrit d’observer le jour du

Chabbat. » (Devarim 5:13-14)

Nous devons être particulièrement

sensibles au sort de l’étranger parmi

nous :

« Si un étranger vient séjourner avec

vous, dans votre pays, ne le molestez

point. Il sera pour vous comme un

de vos compatriotes, l’étranger qui

séjourne avec vous, et tu l’aimeras

comme toi-même, car vous avez été

étrangers dans le pays d’Égypte. Je

suis l’Éternel, votre Dieu. »

(Vayikra 19:33-34; voir aussi Chemoth

22:21; 23:9)

80 JUDAÏSME


Dans la même veine, mais en termes plus sévères, la Torah déclare :

La Torah dicte aux Hébreux de traiter leurs serviteurs hébreux avec

dignité et humanité en souvenir de leur propre expérience en tant

qu’esclaves en terre d’Égypte :

« Si ton frère, près de toi, réduit à la misère, se vend à toi, ne lui

impose point le travail d’un esclave. C’est comme un mercenaire,

comme un hôte, qu’il sera avec toi; il servira chez toi jusqu’à l'année

du Jubilé. Alors il sortira de chez toi, lui ainsi que ses enfants; il

retournera dans sa famille, et recouvrera le bien de ses pères. Car

ils sont mes esclaves, à moi, qui les ai fait sortir du pays d’Égypte;

ils ne doivent pas être vendus à la façon des esclaves. Ne le régente

point avec rigueur, crains d’offenser ton Dieu! »

(Vayikra 25:39-43; voir aussi Vayikra 25:55)

Lorsqu’un serviteur a rempli sa dette de service, la Torah ordonne de

le libérer en lui donnant des cadeaux et de l’argent pour qu’il puisse

recouvrer son autonomie. Là aussi, la Torah établit un lien entre ce

souci pour les serviteurs endettés et la mémoire nationale de l’Exode.

« Tu ne contristeras point l’étranger ni ne le molesteras, car

vous-mêmes avez été étrangers en Égypte. N’humiliez jamais la

veuve ni l’orphelin. Si tu l’humiliais, sache que, quand sa plainte

s’élèvera vers moi, assurément j’entendrai cette plainte et mon

courroux s’enflammera et je vous ferai périr par le glaive, et alors

vos femmes aussi deviendront veuves et vos enfants orphelins. »

(Chemoth 22:21-24)

Dieu n’a aucune tolérance pour l’oppression des faibles, surtout

lorsqu’elle est pratiquée par ceux qui ont été eux-mêmes victimes

de tyrannie et de cruauté. Dieu interviendra lui-même en faveur

de la veuve, de l’orphelin et de l’étranger, tout comme Il l’a fait en

faveur du peuple juif en Égypte. Il n’est pas surprenant que la sortie

d’Égypte soit devenue le thème central du discours prononcé par

le Cohen Gadol devant les militaires avant la guerre. Pour exhorter

les soldats à ne pas craindre l’ennemi, la Torah inspire ces paroles

au Grand Prêtre :

« Quand tu t’avanceras contre tes ennemis pour leur livrer bataille, et

que tu verras cavalerie et chariots de guerre, une armée supérieure

à la tienne, n’en sois pas effrayé; car tu as avec toi l’Éternel, ton Dieu,

qui t’a fait sortir du pays d’Égypte. » (Devarim 20:1)

Moïse aussi invoque le miraculeux Exode quand il encourage le

peuple avant la conquête de la terre d’Israël.

« Si un Hébreu, ton frère, ou une femme hébreue te sont vendus, ils

te serviront six ans; et la septième année tu les renverras, libres, de

chez toi. Or, en libérant cet esclave de ton service, ne le renvoie pas

les mains vides, mais donne-lui des présents, de ton menu bétail,

de ta grange et de ton pressoir; ce dont l’Éternel, ton Dieu, t’aura

favorisé, fais-lui-en part. Souviens-toi que tu fus esclave au pays

d’Égypte, et que l’Éternel, ton Dieu, t’a affranchi; c'est pourquoi je te

prescris aujourd'hui ce commandement. » (Devarim 15:12-15)

« Peut-être diras-tu en ton cœur : "Ces nations-là sont plus

considérables que moi; comment pourrai-je les déposséder?" Ne

les crains point! Souviens-toi sans cesse de ce que l’Éternel, ton

Dieu, a fait à Pharaon et à toute l’Égypte; des grandes épreuves que

tes yeux ont vues; de ces signes et de ces prodiges, de cette main

puissante et de ce bras étendu, par lesquels t’a émancipé l’Éternel,

ton Dieu. Ainsi fera-t-Il de tous les peuples que tu pourrais craindre. »

(Devarim 7:17-19; voir aussi Devarim 1:29-30)

La façon dont une société juive traite les personnes vulnérables

devient un principe fondamental de gouvernance. La Torah dicte

formellement comment on doit prendre soin de la veuve, de

l’orphelin et de l’étranger :

« Ne fausse pas le droit de l’étranger ni celui de l’orphelin, et ne saisis

pas comme gage le vêtement de la veuve. Rappelle-toi que tu as été

esclave en Égypte et que l’Éternel, ton Dieu, t’en a affranchi; c’est pour

cela que je t’ordonne d’agir de la sorte. » (Devarim 24:17-18)

Pour le peuple juif, la sortie d’Égypte est un tournant décisif,

qu’évoquent les prophètes, les rois, les rabbins, les pères, les

mères et les grands-parents tout au long de notre histoire. Elle

nous rappelle la providence, l’élection, la récompense et la punition

divines, ainsi que l’éternité de notre alliance avec Dieu et de nos

responsabilités morales dans le monde qu’Il a créé.

Texte traduit de l’anglais au français par Yolande Amzallag.

La version originale en anglais est en ligne

sur le site Web de LVS : lvsmagazine.com

LVS MARS/AVRIL 2023 81


THE SEPHARDIC WAY IN DEATH

AND MOURNING

BOOK REVIEW

REVEREND DANIEL BENLOLO

The recently published book, The Sephardic Way in Death and Mourning

(published by Kodesh Press, 2022), by Montreal native, Rabbi Yamin Levy is good

news for the English-speaking Sephardic community. Finally, we have a well

written book that is compassionate, psychologically perceptive, halakhically

precise and Sephardic to-boot. As a member of the clergy of Montreal and

as one who has been personally affected by loss, I find this book to be an

essential guide in navigating the intricate array of questions and emotions that

accompany the loss of a loved one. Rabbi Yamin Levy is clear and he writes in

a voice that is easy to read and accessible. His writing is actually comforting.

Rabbi Levy shows how Halakha, Jewish law and Sephardic Minhag in

particular, serve as a compass for the mourner through the process of grief

in a psychologically sound fashion. The book was written for three different

audiences. The first is the immediate family and possibly the clergy of one

who is about to die. In Jewish law such a person is called a gosses. Rabbi levy

places the entire dynamic and experience of being in the midst of immanent

death in perspective. He even gives advice on ways to help the deceased tie

up loose ends with family and friends before death. He includes the special

prayers that should be recited by the gosses or by someone on his or herbehalf.

These beautiful prayers speak of gratitude and love, repentance before God and

embracing the will of God.

The second audience that this book was written for is those who want to know

the Sephardic laws and traditions associated with death, and mourning. Be it

the mourner or the clergy who is guiding the bereaved. Rabbi Levy has dedicated

his career to preserving the Sephardic heritage and this book is a tribute to that

mission. Too many of our Sephardic coreligionists turn to Chabad or follow the

many Ashkenaz books of Jewish law and tradition in the marketplace. Rabbi

Levy offers us a Sephardic way of grief and mourning. He addresses the difficult

questions associated with the emotional wellbeing of the mourner. How much

is too much mourning and how much is not enough? Here we have a book

that outlines clearly and authoritatively the Jewish law in accordance with

Sephardic rulings and traditions. The healthiest and most appropriate amount

of mourning is to follow the prescribed rules and traditions of our heritage.

Rabbi Levy makes a point to tackling the various Sephardic traditions of the

various Sephardic communities. He identifies the Moroccan community

traditions as well as the traditions of the Syrian, Iraqi, Turkish and western

Sephardic Jews.

Finally, Rabbi Levy’s book is also for

the community which is tasked to

care for their bereaved and help bring

them back to society in a healthy

and nurturing fashion. Rabbi Levy’s

introduction to his book is titled “You

Are Not Alone.” Just those words speak

volumes. “Mourning” writes Rabbi Levy

“is a communal activity.”

It is the responsibility of the community

to come together and pull one of its

fellow members out of the grip of his

or her grief. It is therefore essential

that the laws of Avelut be familiar to

everyone.

82 JUDAÏSME


CIMETIÈRE COMMUNAUTAIRE

Rabbi Levy leaves no stone unturned. He addresses

every facet of the role of the community. How to

care for the mourner, when to visit, and what to

talk about with the mourner. It is the community’s

responsibility to provide the mourners with prayer

services during Shiva. The book goes into great

detail about the various parts of the service that

are recited in the house of mourning and what

parts are omitted, if it is Rosh Chodesh, bringing

a Torah and a range of other issues that require

correct attention.

There is one chapter in this book that can only be

equaled by another book written by Rabbi Levy.

The last chapter deals with miscarriage or the

death of a newborn. Rabbi Levy is the first in the

Jewish world to have written about this subject

at length in his internationally acclaimed book

“Confronting the Loss of a Baby: A Jewish and

Halakhic Perspective.” In this one short chapter

Rabbi Levy reveals what it is like to lose something

that could have been. This too is addressed by

Jewish law.

Nous vous informons que

la Communauté Sépharade Unifiée de Québec

possède un cimetière communautaire

à Beaconsfield avec des lots

à prix très abordables.

Pour toute information, appelez

514-733-4998

The appendix of this book is critical. Rabbi Levy

includes the Kaddish, Viduy, as well as the

various Tehillim that are associated with death

and mourning, memorial prayers, the blessing

before entering the cemetery and the special

BirkatHaMazon in the house of mourning.

Chazak Uvaruch to Rabbi Yamin Levy. May we

only know joy and happiness, and may we see the

coming of Mashiach when the prophet promises

that God will eradicate death from the earth and

wipe away the tears of al those who grieve.

HEVRA KADISHA

de Rabbi Shimon bar Yohaï

Confrérie du dernier devoir

URGENCE?

Appeler M. David Benizri

514-824-7573

LVS MARS/AVRIL 2023 83


IMMORTEL, COMME LA

MUSIQUE ARABO-ANDALOUSE!

SYLVIE HALPERN

2022 fut l’année du centenaire de naissance de

Samy Elmaghribi. 2023, le Festival Sefarad de Montréal

rendra hommage à l’illustre musicien et chanteur avec la

présentation d’un documentaire remarquable retraçant

sa vie et sa carrière artistique exceptionnelle. Produit par

la CSUQ, en partenariat avec la Fédération sépharade du

Canada et le soutien de la Fondation Samy Elmaghribi, ce

documentaire a été réalisé par Mikael Ohana. À travers le

monde, les émules, les fans et les nostalgiques de Samy

Elmaghribi chantent toujours « Ômri ma nenssek ya Mama ».

Sur scène, c’était un crooner, un chanteur de charme à la

Sinatra. Mais le travailleur exigeant et perfectionniste n’était

jamais loin chez Samy Elmaghribi : la musique, il la respectait

comme la Loi, c’était du sérieux! Ces airs qui ont bercé son

enfance comme celles de tous ceux qui l’adoraient, l’héritage

judéo-marocain et andalou d’un monde disparu qu’il avait

l’art de faire instantanément surgir dans l’air de Montmartre,

Jérusalem, Montréal ou Casablanca.

Pour le centenaire de sa naissance, sa fille Yolande Amzallag

– de son vrai nom, Samy était Salomon Amzallag – rêve d’un

grand concert ici ou ailleurs et d’une exposition itinérante à la

mémoire de son père. À en juger par les traces de tous ordres

accumulées dans le salon – belles affiches des années 50

de son orchestre des Samy’s Boys et du cabaret parisien

Au soleil d’Algérie, cassettes, photos et carnets de notes

en tous genres, jusqu’à la thèse de doctorat qui lui a été

consacrée! –, le contenu en sera nourri.

« Il gardait méticuleusement tout », confie-t-elle en souriant.

C’est d’ailleurs bien pour cela qu’en 2014 à Montréal, la

Fondation Samy Elmaghribi a été créée pour pérenniser autant

d’archives, célébrer l’œuvre de l’artiste et à travers celle-ci, ce

patrimoine commun aux Juifs et aux Arabes qui a produit l’une

des plus belles musiques du monde : la musique classique

andalouse dont il était le chantre et l’infatigable amoureux.

Samy était né en avril 1922 à Safi, sur la côte marocaine, le

7 e jour de Pessah. Ce qui n’était pas anodin selon lui : « Je

suis né sous le signe du chant, le jour où le peuple juif est

sorti d’Égypte. Or, d’après la tradition judéo-sépharade, Moïse

a chanté quand les Hébreux ont traversé la Mer rouge. »

Si l’artiste a souvent associé ses six enfants à sa carrière – ils

ont été sa chorale –, il ne s’est guère confié à eux, est-ce par

pudeur?

« J’ai dû fouiller pour reconstituer les éléments de sa vie »,

reconnaît Yolande, sa benjamine qui préside la Fondation.

Il faut bien vivre! Samy était fonctionnaire quand en 1947, un

concours de chant l’a propulsé sur la scène : il s’est mis à

animer des mariages, à chanter dans des cabarets et sur

le Koutoubia, le navire qui assurait la liaison Casablanca-

Marseille…

D’abord comme interprète, bientôt comme auteur-compositeur,

il a enregistré son premier succès, « Loukane Elmlayin »

(« Ah, si j’étais millionnaire »), chez Pathé Marconi. Mais

c’est sous sa propre étiquette, Samyphone, qu’il a endisqué

un large répertoire de chansons populaires qui ont conquis

tout le Maghreb : en conciliant tradition et modernité, sacré

et profane, intime et universel. Aussi universelle que sa

populaire « Ômri ma nenssek ya Mama » (« Jamais je ne

t’oublierai, Maman »), la chanson qu’il a dédiée à sa mère.

Il y avait de l’homme d’affaires en lui.

« Il voyait scrupuleusement à tout, se souvient Yolande : la

mise en scène, l’organisation des tournées, il transportait

même ses musiciens dans sa voiture! Et quand le spectacle

était terminé, il ramenait souvent l’orchestre à la maison,

à la grande joie de notre mère, Messody, qui leur servait

84 IDENTITÉ ET CULTURE


évidemment un de ses festins, même s’il était quatre heures du matin! »

L’Histoire a fait son chemin, mais son fanclub, l’artiste l’a naturellement retrouvé

dans toutes les poches de l’émigration de l’époque, là où il a apporté du soleil

à une communauté dispersée, nostalgique du temps et des sons d’avant. Dans

les cabarets parisiens, où il a côtoyé les

Reinette l’Oranaise, Lili Boniche, Maurice

El Médioni… puis en 1964 en Israël lors

d’une première tournée triomphale, à

New York, et bientôt à Montréal, où il a

déménagé à son tour l’année de l’Expo.

Montréal où justement, la Congrégation

Spanish & Portuguese se cherchait un

nouveau Hazan.

« Mon père a appris cette liturgie nouvelle

pour lui, raconte Yolande. Je le revois

enfermé, en robe de chambre et pas rasé,

à travailler dans sa chambre. C’était un

bosseur, ambitieux et perfectionniste,

et il a réussi le test! » Un test concluant

pendant seize ans pour ce maître cantor

qui en a formé tant, à commencer ici par le

Hazan Daniel Benlolo.

Samy Elmaghribi s’est éteint à Montréal

le 9 mars 2008, deux ans après le dernier

concert qu’il a donné à la Place des Arts,

au Festival du monde arabe.

« Mon père était un passeur et cette

musique, c’était sa vie, dit Yolande. Il

avait une très solide formation classique,

mais ses succès populaires et ses

gassidat ont traversé le temps. D’ailleurs

de jeunes chanteurs reprennent ses

chansons – Benjamin Bouzaglo en Israël,

Sanaa Marahati au Maroc… –, il paraît

même qu’on en a interprété une dans une

boîte de nuit de Casablanca! »

Samy Elmaghribi (Crédit : Fonds d’archives Samy Elmaghribi)

LVS MARS/AVRIL 2023 85


UN VOYAGE MÉMORABLE AU MAROC POUR

LES ÉLÈVES DE L'ÉCOLE MAÏMONIDE

ORGANISÉ EN COLLABORATION AVEC LA CSUQ

En février dernier, une trentaine d’élèves – garçons et filles –

de 3 e et 4 e secondaire de l’École Maïmonide ont participé

à un voyage de retour aux sources au Maroc. C’est la

deuxième fois que ce voyage est organisé en collaboration

avec la CSUQ.

Les élèves de Maïmonide se sont envolés à destination

de Casablanca pour refaire symboliquement à l’envers

la route de l’exil que leurs grands-parents ou parents ont

empruntée il y a plusieurs décennies.

Pour Éric Mechaly, directeur du secondaire de l’École

Maïmonide, ce voyage avait une portée symbolique très

forte.

« C’est une expérience unique, riche en émotions et en

découvertes. Nous avons eu la chance de visiter des villes

comme Marrakech, Casablanca et Fès, où nous avons pu

découvrir la culture et l’histoire de notre pays d’origine sous

un nouvel angle. Nous avons également eu l’opportunité

de rencontrer des membres de la communauté juive

marocaine et de partager avec eux des moments de

convivialité. »

Pour Benjamin Bitton, directeur général de la CSUQ, ce

voyage de retour aux sources au Maroc est une expérience

identitaire et éducative très marquante pour des jeunes de

souche juive marocaine.

« Depuis près de quinze ans, la CSUQ organise des voyages

de retour aux sources, essentiellement au Maroc. Nous

sommes heureux d’avoir pu collaborer une deuxième fois

avec notre constituante, l’École Maïmonide, pour offrir aux

élèves de notre communauté une si belle opportunité de

découvrir leurs origines et de se ressourcer identitairement

dans le pays de leurs aïeux. »

Question itinéraire, il a fallu faire des choix, car l’histoire du

Maroc étant riche, les lieux à voir sont nombreux.

Dès leur arrivée, les élèves ont visité Casablanca, capitale

économique du Maroc.

Deuxième arrêt : Rabat, capitale du Royaume chérifien. Le

groupe a visité le Mausolée Mohammed V. Jacky Kadoch,

président des Communautés israélites de Marrakech et

de Safi, a intercédé auprès des autorités marocaines pour

que les élèves de Maïmonide puissent exceptionnellement

se recueillir sur les tombes des Rois Mohammed V et

Hassan II. Privilège réservé aux chefs d’État et autres

invités de marque. Ils ont visité ensuite la Tour Hassan, le

Mellah (quartier juif), sa vieille synagogue et le palais royal,

en passant par les murs de Mechouar et les anciennes

ruines du Chellah.

À Fès, le groupe a découvert l’histoire de cette ville

impériale, où les Juifs ont laissé une forte empreinte, en

visitant son Mellah et les lieux de résidence d’illustres

maîtres du Talmud, dont Rabbi Yitzhak Elfassi (Rif) et

Rabbi Moshé Ben Maïmon (Maïmonide). Fès abrite l’un des

plus anciens cimetières juifs du Maroc, où sont enterrés

plusieurs lignées de prestigieux rabbins. Les élèves se sont

ensuite recueillis sur la tombe de Lalla Solika, la Juste.

Leur séjour dans cette ville impériale s’est terminé avec la

visite des célèbres synagogues d’Ibn Danan et Ben Sadoun,

en passant par le vieux Fès et son quartier d’artisans et de

teinturiers traditionnels.

En route vers Marrakech, les élèves ont découvert la

somptueuse ville d’Ifrane, les cascades d’Ouzoud, l’un des

plus beaux sites du Moyen Atlas, et Essaouira (Mogador).

À Marrakech, le groupe a sillonné le quartier juif et la

fameuse place Djmaa El Fnaa. Il a trouvé le temps de

s’amuser en faisant un tour en quad dans la palmeraie

avant de passer un beau Chabbat en présence de

Jacky Kadoch.

Pour Laurence Fhima, directrice générale de l’École

Maïmonide, ce voyage été une une grande réussite à tous

les niveaux.

« Nous sommes revenus complètement enchantés. Merci à

la CSUQ pour cette précieuse collaboration. L’organisation,

la planification, la coordination et le choix des activités ont

dépassé toutes nos attentes. »

Pour le Rabbin Yamin Benarroch, directeur des Études

juives, ce voyage a permis aux élèves de « s’ouvrir

pleinement à la mission de l’École Maïmonide qui s’inspire

de la culture et des valeurs sépharades ».

Jacky Kadoch évoque la « forte émotion » que les élèves

ont ressenti lorsqu’ils se sont recueillis près des tombeaux

des Rois Mohammed V et Hassan II.

« Ces élèves de l’École Maïmonide, dont c’était la première

visite au Maroc, ont refait l’Histoire sur les traces de feu

sa Majesté Hassan II. Ils ont réalisé le souhait du défunt

souverain : « Vous êtes et vous serez toujours mes

Ambassadeurs. Vos enfants et petits-enfants seront

toujours les bienvenus chez vous, au Maroc. Hassan II était

86

NOS CONSTITUANTES


un leader visionnaire et avant-gardiste. Aujourd’hui, la

réalité est là. »

Les élèves ont beaucoup apprécié leur découverte des

diverses facettes du Maroc, et tout particulièrement leur

visite des principaux lieux historiques et spirituels juifs de

ce pays.

« Au cours de ces huit jours inoubliables au Maroc, j’ai pu

vivre et assister à tout ce que mes ancêtres ont vécu et

fait à leur époque. Je n’ai jamais pu bien imaginer toutes les

histoires incroyables que mes grands-parents et arrièregrands-parents

m’ont racontées. Ce voyage m’a vraiment

aidé à mieux saisir la profondeur de ces récits », dit Yoan

Amar, étudiant en 3 e secondaire.

Odelia Edery, étudiante en 3 e secondaire, a adoré ce périple

à travers les terroirs où ses ancêtres ont vécu.

« Ça a été le plus beau voyage de ma vie. Celui-ci était

rempli de magnifiques surprises. C’est un grand privilège

d’avoir vécu une expérience aussi enrichissante. »

Crédit : École Maïmonide

© Mr Mrezak photographe du mausolée

LVS MARS/AVRIL 2023

87


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LE RABBIN YEHONATAN ABITBOL

NOUVEAU LEADER SPIRITUEL DE LA CONGRÉGATION

OR SÉPHARADE DE LAVAL

ELIAS LEVY

La Congrégation Or Sépharade de Laval a un nouveau leader

spirituel, le Rabbin Yehonatan Abitbol.

Cette institution cultuelle n’avait pas de rabbin attitré

depuis le départ en 2014 à Gibraltar du Rabbin Moshé Nahon,

qui a assumé cette fonction pendant presque vingt ans.

Pour le Rabbin Yehonatan Abitbol, c’est un retour au bercail.

« Je suis né et j’ai grandi à Laval, où j’ai vécu pendant 25 ans.

Mon père, David Abitbol Z.’L.’, décédé récemment, a été l’un

des principaux bâtisseurs de la Communauté sépharade de

Laval et de la Congrégation Or Sépharade. Je suis optimiste

en ce qui a trait à l’avenir de la Communauté sépharade

de Laval. Celle-ci a un grand potentiel de développement.

De jeunes familles sépharades s’installent de nouveau à

Laval. Je suis très heureux et honoré d’être le Rabbin d’Or

Sépharade, une synagogue à laquelle j’ai toujours été

attaché », nous a-t-il confié.

Le Rabbin Yehonatan Abitbol réside à Côte-Saint-Luc avec

son épouse, la Rabbanit Kerene Twizer, et leurs six enfants.

Il séjournera à Laval le Shabbat et durant les fêtes juives.

Il est aussi Hazan, Sofer et Mohel. Depuis une vingtaine

d’années, il assumait diverses fonctions spirituelles, dont

celle de Hazan, au Kollel du Rabbin Yéhouda Benoliel,

sis à Côte-Saint-Luc. Il a participé à la création de cette

institution d’étude de la Torah. Par ailleurs, il a été

aussi le Hazan du groupe de prière fondé et dirigé par

le Rabbin Bitton, établi dans les locaux de l’école Hebrew

Academy, à Côte-Saint-Luc.

Rafael Anidjar, président de la Congrégation

Or Sépharade, est ravi que le Rabbin Yehonatan

Abitbol soit le nouveau guide spirituel de sa

synagogue. C’est au cours d’une visite au Kollel

du Rabbin Yéhouda Benoliel que ce dernier

lui a fortement recommandé d’embaucher

le Rabbin Yehonatan Abitbol.

« Le Rabbin Yehonatan Abitbol a tous les atouts

pour assumer parallèlement deux fonctions, à nos

yeux, fondamentales : leader spirituel et leader

communautaire. Nous n’étions pas à la recherche

d’un Rabbin excellant seulement en liturgie et dans

le champ de la Hazanout, ce qui est certainement

le cas du Rabbin Abitbol, nous étions aussi en

quête d’un leader spirituel rassembleur qui puisse

redynamiser la vie synagogale à Or Sépharade et

jouer un rôle de mentor auprès des jeunes familles

membres de notre congrégation. Depuis qu’il est

entré en fonction, il s’investit pleinement pour

relancer les activités : cours de Torah, Shabbaton… »

Quelque 90 familles sont membres de la

Congrégation Or Sépharade.

Durant plusieurs années, la Communauté juive de

Laval a été confrontée à un déclin qui paraissait

inéluctable. Mais un vent de renouveau souffle

désormais sur celle-ci, assure Rafael Anidjar.

« De jeunes familles juives s’établissent à Laval,

où le coût des maisons et de la vie est moins cher

qu’à Montréal. Laval est redevenue une destination

attrayante pour les jeunes familles juives. Il y a

90

NOS CONSTITUANTES


Des cours de Guémara et d’études juives sont dispensés à de

jeunes couples; quelque soixante-dix personnes ont participé

à un Shabbaton dont l’invité de marque a été le Rabbin israélien

David Ichay; une cinquantaine de femmes ont participé à un

événement organisé par la Rabbanit Kerene Twizer à l’occasion

de Rosh Hodesh…

Le Rabbin Yehonatan Abitbol

(Crédit : Rabbin Y. Abitbol)

« Les choses commencent à bouger positivement. Nous

espérons tous que nos nouveaux programmes et activités

attireront plus de jeunes », dit le Rabbin Yehonatan Abitbol.

beaucoup de services à Laval : trois

synagogues, un Mikvé, de superbes

centres d’achat, des hôpitaux, un métro…

L’arrivée de jeunes familles suscite un

grand espoir et renforce indéniablement

les assises de notre communauté. »

Le Rabbin Yehonatan Abitbol est optimiste

quant aux perspectives d’avenir de

la Communauté sépharade de Laval.

L’installation de jeunes familles est un

signe des plus prometteurs, souligne-t-il.

Ce dernier caresse le projet de mettre sur pied un Kollel de

nuit, qui, espère-t-il, pavera la voie à la création d’un Kollel de

jour.

À la Congrégation Or Sépharade, bâtie au début des années

80 par des Sépharades marocains de langue et de culture

espagnoles, le rite synagogal et les minhagim prédominants

sont ceux de la tradition religieuse de Tanger, rappelle le

Rabbin Yehonatan Abitbol.

« Pour que les jeunes viennent à notre

synagogue, nous devons leur offrir un

cadre chaleureux et accueillant. Nous

devons aussi leur proposer des activités

éducatives et sociales attrayantes. Nous

tablons beaucoup sur la jeunesse, dont la

présence et l’implication sont le principal

gage de la pérennité d’Or Sépharade. »

LVS MARS/AVRIL 2023 91


« UNE REINE » DE JUDITH ELMALEH

UNE PUISSANTE ODE À LA LIBERTÉ DES FEMMES

ELIAS LEVY

divorcée. En coécrivant avec mon frère

Gad son spectacle D’ailleurs, je lui

ai envoyé quelques notes que j’avais

griffonnées sur notre grand-mère. Et, je

me suis tout à coup lâchée, je me suis

mise à écrire des pages et des pages sur

elle. Gad me dit alors : « Ce n’est pas de

la matière pour mon nouveau spectacle,

mais c’est le sujet du livre que tu veux

écrire depuis belle lurette. »

Quelle est la part de vérité dans ce récit?

C’est une histoire totalement véridique.

Ma grand-mère Mimi a épousé mon

grand-père Yehouda à l’âge de 14 ans. Il en

avait vingt-six de plus, il était déjà marié

avec Saada, qui avait dix ans de plus que

lui et qui était stérile. Il était fou amoureux

Judith Elmaleh (Crédit : Céline Nieszawer-Robert Laffont)

« L’histoire que je raconte dans ce livre

est celle d’une reine, ma grand-mère

Mimi, une petite fille de Casablanca qui

aurait aimé être libre », lance d’entrée

de jeu Judith Elmaleh attablée dans un

café d’Outremont, où elle a accordé une

entrevue à La Voix sépharade.

Le roman très poignant et magnifiquement

écrit qu’elle dédie à sa grand-mère,

Une reine (Éditions Robert Laffont, 2022),

est une puissante ode à la liberté des

femmes.

Auteure, metteuse en scène pour

le théâtre, la télévision et le cinéma

et coautrice avec son frère, le

célèbre humoriste Gad Elmaleh,

des spectacles de ce dernier, Judith

Elmaleh signe un premier roman

très réussi. Une histoire sidérante

de silences lourds familiaux et de

soumission féminine.

Quel a été le déclic de l’écriture de ce

livre?

Je caressais depuis longtemps le

projet d’écrire un roman à relents

autobiographiques relatant les

déboires d’une femme fraîchement

« Ma grand-mère

Mimi m’a

transmis des valeurs

féministes »

d’elle, mais il était inconcevable pour lui de

ne pas avoir une descendance.

Quand et comment avez-vous appris la

vérité sur la vie de votre grand-mère?

Il y a une quinzaine d’années par l’un de

mes oncles qui a narré noir sur blanc

l’histoire de ma grand-mère dans une

espèce de livre intrafamilial destiné à ses

frères et sœurs.

92

LECTURES


porté une

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première

l’honneur.

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ccomplir :

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décrocher

seulement

souffle à

ut est à sa

x femmes.

er le voile

théâtre, la

Votre roman a comme cadre

la communauté juive très

patriarcale du Maroc des

années 1930.

À cette époque, les mœurs

étaient très conservatrices.

Les conventions et les interdits

sociaux régissaient la vie des

communautés. Mon grand-père

a subi la pression intense des

Rabbins, qui autorisaient un

homme déjà marié, mais dont

l’épouse était stérile, à vivre

en bigamie non pas par pur

plaisir, mais par nécessité :

pour avoir des enfants. Une

09/08/2022 11:23 injonction basée sur des écrits

talmudiques. Parfois, un homme décide de divorcer de sa femme

parce qu’elle est incapable de procréer et en épouse une autre.

Dans le cas de mon grand-père, il n’a pas divorcé, il a gardé sa

première femme et en a ajouté une deuxième dans sa vie.

Comment la première épouse de votre grand-père, Saada,

a-t-elle réagi face à cette situation tellement humiliante pour

une femme?

Elle a accepté cette douloureuse « entente », mais elle imposa

une condition non négociable : elle choisirait la future épouse.

Elle a désigné sa jeune nièce de 14 ans, Mimi, parce qu’elle pouvait

avoir ainsi une emprise sur elle. Les parents de ma grand-mère

étaient très pauvres, ils ont vu là une occasion d’assurer un avenir

moins miséreux à leur fille.

Mimi a été mariée de force.

Un après-midi, on l’a habillée avec une robe somptueuse et parée

de bijoux. On lui a fait croire qu’elle allait à une fête de famille. Au

milieu de la soirée, elle a dit à ses parents qu’elle voulait rentrer

à la maison car elle était fatiguée. On lui a rétorqué alors : « Non,

à partir de maintenant, c’est ici chez toi ». Elle venait d’assister

à son mariage, personne ne l’avait prévenue! Aux yeux de sa

famille, il n’y avait rien de malicieux dans ce stratagème, c’était

une obligation édictée par la Loi juive.

La maternité ne fut pas pour elle une sinécure.

Elle a eu sept enfants avec mon grand-père. Elle fut contrainte de

confier les trois premiers à Saada. À la naissance de son quatrième

enfant, mon père, elle se révolta et refusa farouchement que sa

tante s’en occupe. Il fut l’enfant de la transition. Les deux épouses

ont vécu séparément.

L’histoire tragique de Mimi était-elle un sujet tabou dans votre

famille?

Le sujet n’était pas tu de manière austère, il n’était tout simplement

pas évoqué. Dans ma famille, tout le monde rigolait, mais on ne

parlait jamais de ce dossier ostensible, mais jamais traité.

Ce qui est frappant, c’est que votre grand-mère ne s’est jamais

rebellée contre sa famille ni contre sa condition sociale.

Ma grand-mère ne s’est jamais révoltée parce qu'à son époque

une femme totalement soumise ne pouvait s’insurger contre

son sort. Elle vivait par procuration. Cependant, elle nous a

transmis cet esprit de révolte. Elle était bien consciente de ce

que signifiait pour une femme d’être libre, de pouvoir s’assumer

et d’être maîtresse de sa destinée. Elle nous a transmis ce goût

insatiable de la rébellion. Elle a eu cette intelligence. Elle ne

savait ni lire ni écrire, mais elle savait penser. Elle n’avait certes

pas les outils intellectuels pour aller plus loin dans ses pensées,

mais elle portait un regard juste sur sa condition de femme et sur

ce qui se passait dans sa famille, dans son entourage et dans sa

communauté.

Considérez-vous ce livre comme un devoir de mémoire?

Plutôt comme un devoir de transmission. Quand j’ai fini de

l’écrire, j’ai pris conscience à quel point je tenais à transmettre

l’histoire de ma grand-mère à mes enfants. Si je n’avais pas

démêlé moi-même cette histoire taboue et nébuleuse, grâce aux

témoignages que j’ai recueillis auprès de mes oncles et tantes, je

n’aurais jamais pu la leur transmettre.

Votre récit est un vibrant plaidoyer féministe.

Absolument. C’est aussi une forme de reconnaissance à l’égard

de cette femme opiniâtre et résiliente. Mais en deux générations,

les femmes ont fait d’énormes progrès. On ne peut que s’en réjouir.

Moi, aujourd’hui, je bénéficie d’un statut social très différent de

celui dans lequel ma grand-mère fut corsetée.

Mimi avait un sens de l’humour puissant et désarmant qu’elle a

transmis à sa fratrie.

Elle lançait souvent des vannes folles. En matière d’humour, elle

était la référence dans son immeuble, à Casablanca. Pratiquer

l’humour dans ma famille, c’était aussi une question de survie.

Si ça ne rigolait pas, la soirée était foutue! C’était une manière

subtile d’empêcher la mélancolie et les drames d’envahir nos

vies. Dans les réunions familiales, notre grand-mère exigeait de

nous qu’on raconte des blagues, et pas n’importe comment, il

fallait s’y appliquer!

Qu’est-ce qu’elle vous a transmis?

Des valeurs féministes. Elle m’a dit chaque fois que je me suis

mariée : « Si tu n’es pas heureuse, tu t’en vas! » Elle n’a jamais

pu le faire. J’ai divorcé deux fois! J’ai toujours suivi à la lettre ses

conseils judicieux. Mimi est morte il y a quelques années, à l’âge

de 102 ans, à Casablanca.

Vous pourrez lire la chronique littéraire

« Elles et ils ont publié »

de Sonia Sarah Lipsyc sur le site Web de LVS :

lvsmagazine.com

LVS MARS/AVRIL 2023 93


HOMMAGE À

NAÏM KATTAN

L’ÉCRIVAIN

DES PASSAGES ENTRE

L’ORIENT ET L’OCCIDENT

Un partenariat entre

la Fédération sépharade du Canada et

la Communauté sépharade unifiée

du Québec

en collaboration et dans le cadre du

Festival littéraire international de

Montréal Metropolis bleu

avec la participation du

Centre Cummings

Jeudi 27 avril 2023 - 19h

à La Grande Bibliothèque du Québec

(Auditorium)

475, boulevard de Maisonneuve Est

© John Adams

L’écrivain québécois Naïm Kattan, né à Bagdad (Irak) en 1928, décédé à

Paris (France) en 2021, et qui a vécu à Montréal à partir de 1954, fut

sans contredit un formidable passeur entre les cultures juive et

non-juive.

Outre son œuvre, qui compte près de trente titres, empruntant à

différents genres, il laisse le souvenir d’un homme nourri par un

humanisme et des valeurs de paix, de respect pour autrui et de bonté.

Hommage à l’homme des passages, au romancier de l’exil et des

rencontres, qui a fait rayonner l’Orient en Occident.

94 ÉDITION SPÉCIALE

Au programme : Table ronde et témoignages

Participants: Emmanuel Kattan, Pierre Anctil,

Chantal Ringuet

Animation : Sophie Jama

Thé, café, rafraîchissements et pâtisseries

seront offerts

Évènement gratuit et en français

Réservation en ligne:

csuq.ticketacces.net


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à toute la

communauté

ACADÉMIE

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Excellence académique dans un environnement de TORAH.

Venez nous visiter vous serez enchantés. LVS MARS/AVRIL 2023

95


Le Centre Cummings est prêt pour le printemps !

Le début du printemps et l’arrivée

des beaux jours sont l’occasion de se

remettre en forme et de prendre soin de

soi ! C’est donc pour vous que le Centre

a concocté de beaux programmes des

plus énergisants et enrichissants dont

plusieurs sont en personne, tout en conservant

les modes virtuels et/ou hybride

pour votre convenance! Et qui plus est…

certains sont offerts gratuitement grâce

au programme « Québec ami des ainés »

et à nos partenaires.

Le Centre est à l’écoute de ses membres

et répond toujours à leurs attentes. C’est

ainsi que le Club social accueille de plus

en plus de participants de tout horizon.

Il leur offre l’occasion de socialiser, tisser

de nouvelles amitiés et bénéficier de

conseils d’experts dans les domaines

médical, social, politique internationale,

arts, musique, santé mentale et physique

et même de la fiscalité ! La richesse des

programmes du Centre ne s’arrête pas là…

venez les découvrir.

Pour visiter le Centre, choisir ce qui vous convient

ou vous inscrire, il vous suffit d’appeler,

de vous y rendre en personne ou en ligne.

5700, av. Westbury, Montréal, QC

514.343.3510

cummingscentre.org/fr

NOUVEAUTÉ

EN PERSONNE

CLUB SOCIAL

Activités sociales culturelles et

récréatives favorisant des relations

interpersonnelles entre les membres

et l’épanouissement de chacun. Une

panoplie de programmes à découvrir !

Les lundis du 24 avril au 24 juillet

13h30 - 14h30

10 séances - 25 $ membre

Coût additionnel avec repas

NOUVEAUTÉ EN PERSONNE

TANGO

Concepts de base et mouvements

fondamentaux du tango argentin tels

que le cuadrado, la position croisée,

les balanceos et les ochos.

Le cours, qui comprendra la marche

arrière et des pivots, n’est pas adapté

aux personnes à mobilité réduite.

Les jeudis du 15 juin au 3 août

11 h - 12h15 • 8 séances

60 $ Membre

NOUVEAUTÉ

EN PERSONNE

PRÉVENIR ET MAÎTRISER

LES CHUTES

Apprendre à tomber pour qu’une chute

soit sans conséquence repose sur

l’apprentissage de nouveaux réflexes.

Cours de 6 semaines spécialement

conçu pour les aînés afin d’apprendre à

minimiser les blessures lors de chutes

grâce à des techniques simples.

Les jeudis du 11 mai au 15 juin

13 h – 14 h • 6 séances • 60 $

Ce cours n’est pas accessible aux

personnes à mobilité réduite.

POSSIBILITÉS DE BÉNÉVOLAT

EN PERSONNE

• Accueil et information

• Art / Artisanat

• Atelier de menuiserie

• Boutique

• Club de marche

• Club social francophone

• Exercices adaptés/bien-être

• Hôtesse / hôte d’accueil /

visite du Centre

• Jardinage

• Soutien à l’information

sur les programmes

Quand la compassion

rencontre l’action,

la vie est meilleure

MODE VIRTUEL

• Appels amicaux

• Comité Action sociale

• Développement du leadership

• Planification d’événements

• Projets intergénérationnels

• Soutien technique

• Travail de comité

Pour plus d’informations contactez

Sandra Amar au 514.734.1750 ou par courriel

sandra.amar@cummingscentre.org

Centre Cummings 5700, av. Westbury H3W 3E8

cummingscentre.org/fr

96 ÉDITION SPÉCIALE


Programmes en personne gratuits

Le Centre Cummings élabore ses activités pour permettre l’inclusion de toutes les personnes

âgées, indépendamment de leur état de santé, des barrières linguistiques ou de leur isolement.

Programme complet et inscription

cummingscentre.org/fr/qada • 514.343.3510

NOUVEAUTÉ

EN PERSONNE GRATUIT

MÉLODIES MÉMORABLES

Venez réchauffer votre voix et votre

corps lors de ces concerts interactifs en

direct. Explorez des musiques du passé

et d’ailleurs au Centre Cummings le

lundi matin. Réservez votre place!

Les lundis du 24 avril au 31 juillet

11h30 - 12h30

8 séances

NOUVEAUTÉ

EN PERSONNE GRATUIT

CLINIQUE NUMÉRIQUE

Vous avez des questions ou rencontrez

des difficultés avec votre liseuse,

votre tablette, une application de

votre téléphone, une mise à jour ou

la navigation sur Internet? Profitez de

judicieux conseils personnalisés durant

notre nouveau programme offert au

Centre.

Les mercredis 3 mai et 5 juin.

12h30 - 14 h

2 séances

NOUVEAUTÉ

EN PERSONNE GRATUIT

RENCONTRES LITTÉRAIRES

Un nouveau programme* en étroite

collaboration avec la bibliothèque

interculturelle CDN. Présentations de

livres, conversations sur l’écriture et les

petits secrets des auteurs.

Les mercredis

26 avril, 24 mai, 28 juin,

26 juillet, 23 août • 14 h -16 h

*Se déroulant à

la bibliothèque

interculturelle CDN

FONDATION MAURICE POLLACK

CLINIQUE D’EXERCICES ADAPTÉS

Les programmes sont concus pour les personnes post AVC,

atteintes de Parkinson, de SP, MPOC, problèmes orthopédiques

et autres problèmes de mobilité.

« Notre équipe de professionnels est prête à accueillir les

participant.es! » Maria Fragapane, Chef de programme,

Bien-être/Programmes Adaptés.

Pour en savoir plus, appelez 514.734.1840 ou

cummingscentre.org/fr/clinique-exercices-adaptes

NOUVEAUTÉ

EN PERSONNE GRATUIT

USA: PERSPECTIVES

PRÉSIDENTIELLES

Avec Donald Cuccioletta

Les sondages aux États- Unis ne

transpirent pas d’enthousiasme à

l’annonce d’un « retour Biden-Trump ».

À en croire une récente enquête du

New York Times, l’occupant actuel

de la Maison Blanche l’emporterait

à nouveau (44% des voix contre

41%). M. Cuccioletta donnera un

aperçu de son analyse et de ses

« prédilections ».

Mardi 2 mai • 19h30

Congrégation

Or Hahayim.

Inscrivez-vous! 514.343.3510

cummingscentre.org/fr

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vous invitent à

TERBH’ OU OUTSAADOU

22 H

ENTRÉE GRATUITE

ORCHESTRE ORIENTAL

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4894 av. Saint-Kevin

Info : 514 733-4998 reception@csuq.org

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ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

VEUILLEZ RÉSERVER LA DATE

14 JUIN 2023 À 17 H 30

ORDRE

DU JOUR

ÉLECTIONS - RESULTATS

ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

• Mot de bienvenue

• Hymne national canadien

• Ouverture de l’assemblée

• Dvar Torah

• Approbation de l’ordre du jour

• Approbation du procès-verbal de l’AGA du 15 juin 2022

• Approbation du rapport d’activités relatif au PSOC

• Approbation des états financiers au 31 mars 2023

• Désignation des vérificateurs

• Rapport d’activités de la CSUQ

• Rapport moral du président

• Clôture – Hymne national israélien

• Levée de l’assemblée

Centre de conférence Gelber

1 Carré Cummings, Montréal, Québec H3W 1M6

POUR PLUS D’INFORMATIONS

514 733-4998 - info@csuq.org


SERVICES JEUNESSE

Camps

Voyages

Leadership

Activités et Programmation

IDENTITÉ ET CULTURE

Festivals

Événements culturels

LVS - La Voix sépharade

ALEPH - Centre d’études juives

SOLIDARITÉ ET ENTRAIDE

Hessed

CSUQ en action

Mission des Bar-Mitzvot

SERVICES

Constituantes et représentations

Services cultuels

Hevra Kadisha

Cimetière Beth Hahayim


LA MISSION BAR-MITZVOT

EN ISRAËL

PLEINE SOLIDARITÉ AVEC LES ENFANTS

ET LA POPULATION DE BEER SHEVA

La Mission Bar-Mitzvot en Israël est indéniablement l’un

des projets phares de la Communauté sépharade unifiée du

Québec (CSUQ).

À la mi-décembre, en l’espace de trois jours, 180 000 $

ont été amassés dans le cadre d’une campagne en ligne

visant à recueillir des fonds pour ce remarquable projet

sociocommunautaire qui permet chaque année à des

enfants défavorisés de Beer Sheva de célébrer dignement

avec leur famille, au Kotel de Jérusalem, l’un des actes les

plus solennels du judaïsme, leur Bar-Mitzvah. Dorénavant,

des enfants de Montréal célébreront aussi leur Bar-Mitzvah.

« Les 180 000 $ amassés serviront intégralement à défrayer

les coûts de l’organisation de la célébration des Bar-Mitzvot à

Jérusalem et à Montréal. Très nombreux ont été les membres

de notre communauté à avoir répondu avec entrain à notre

appel. Nous les remercions pour leur généreux appui », nous

a dit Marcel Elbaz, président fondateur de cette Mission.

Ce leader communautaire a présidé ce projet pendant une

quinzaine d’années.

Une vingtaine de personnes ont participé, du 12 au 22 mars,

à la 20 e Mission Bar-Mitzvot organisée en Israël par la CSUQ.

Ils ont fait une escale de quelques jours au Maroc, où ils ont

pèleriné des lieux saints. Cinquante Bar-Mitzvot ont été

célébrées au Kotel de Jérusalem.

Les participants à la Mission assument intégralement le

coût de leur voyage et de leur séjour en Israël et parrainent

chacun une Bar-Mitzvah.

Les fonds recueillis servent à financer l’achat des Téfilim,

des Talith, des livres de prières; les cours préparatoires des

futurs Bar-Mitzvah; les coûts de transport -aller et retourde

Beer Sheva à Jérusalem des jeunes et de leurs familles

respectives; la célébration des Bar-Mitzvot au Kotel; la

réception offerte en leur honneur dans une salle de fêtes

de Jérusalem.

« Cette Mission est un très beau cadeau de Dieu. Offrir

avec le cœur à des enfants nécessiteux une paire de

Téfilim, un Talith, un Sidour et la fête que nous organisons

en leur honneur à Jérusalem, c’est un acte merveilleux qui

m’émeut chaque fois profondément. Le sourire radieux que

ces adolescents arborent le jour de leur Bar-Mitzvah est un

moment mémorable qui nous remplit de bonheur. C’est un

grand privilège pour moi de participer chaque année à une

aventure humaine aussi poignante et généreuse », nous a

confié David Peretz, président de la 22 e Mission Bar-Mitzvot

en Israël.

Vice-présidente de cette Mission, Ninette Rosen parle

toujours avec une vive émotion de son fervent engagement

dans celle-ci.

« Participer à ce voyage est l’un des moments les plus

privilégiés de ma vie. J’ai pris part dans le passé à diverses

Missions du leadership en Israël. Nous avons rencontré

le président, le premier ministre et de prestigieuses

personnalités politiques et publiques d’Israël. Mais, aucune

Mission de solidarité avec Israël ne m’a autant marquée que

celle organisée annuellement par la CSUQ. Celle-ci nous

permet de voir concrètement sur le terrain des réalités,

souvent très dures, d’Israël et de vivre des moments d’une

intense émotion qui m’émeuvent profondément: la joie

indescriptible des enfants et de leurs proches, l’atmosphère

des plus fraternelles, l’esprit de solidarité… Une très belle

Mitzvah dans le plein sens du terme. »

Benjamin Bitton, directeur général de la CSUQ, souligne

l’importance de cette Mission pour la Communauté

sépharade de Montréal.

« Ce projet très rassembleur est une grande priorité pour

la CSUQ. Un bon nombre d’enfants dont nous parrainons

la Bar-Mitzvah ne sont jamais sortis de Beer Sheva. Pour

plusieurs, c’est la première fois qu’ils se rendent au Kotel, à

Jérusalem. C’est un moment très marquant dans leur vie. »

Un volet Montréal a été greffé au projet initial. Objectif :

aider des parents de notre communauté dont les revenus

modestes ne leur permettent pas d’offrir à leur enfant une

Bar-Mitzvah digne de ce nom.

102 CSUQ mission.csuq.org


« Nous prévoyons cette année parrainer plusieurs Bar Mitzvot à Montréal : offrir à l’enfant des cours de préparation à sa

Bar-Mitzvah, une paire de Téfilim, un Talith… Afin de préserver la dignité de ces familles nécessiteuses, la plus grande discrétion

sera de mise », précise Benjamin Bitton.

« Cette magnifique Mission de solidarité avec les enfants et les résidents de Beer Sheva m’enthousiasme et m’émeut chaque

fois plus. Nous revenons toujours à Montréal avec le sentiment d’avoir accompli une réalisation très concrète et des plus

gratifiantes. Ce projet communautaire est certainement la plus belle manière d’exprimer notre solidarité inconditionnelle

avec les habitants de Beer Sheva et le peuple d’Israël. Célébrer la

Bar-Mitzvah d’un enfant nécessiteux est l’une des plus belles Mitzvot

dans la tradition juive », dit Sonia Ohnona, dont c’est la treizième

participation à cette Mission.

Cette Mission ne pourrait pas se matérialiser sans « l’ appui généreux et

des plus précieux » de tous les donateurs et donatrices qui la supportent

vigoureusement depuis de nombreuses années, souligne-t-elle.

Dominique Benarroch et sa famille sont très engagés dans ce projet

depuis ses débuts.

« Cette Mission devrait enorgueillir tous les

membres de notre communauté. Elle nous

démontre que, par l’entremise de la Torah, on peut

prodiguer une aide tangible à nos frères et sœurs

confrontés à de grandes difficultés matérielles

et existentielles. Cette Mission est l’expression

par excellence de la notion de fraternité et

de solidarité. Voir le sourire radieux et la joie

indicible de ces enfants provenant de familles

très pauvres, plusieurs sont orphelins, c’est un

magnifique cadeau que l’Éternel nous offre. »

INFO MISSION BAR-MITZVOT : 514 733-4998

info@csuq.org

103


Marc Kakon

Président, Hessed

Karen Afflalo

Présidente, CSUQ

Benjamin Bitton

Chef de la direction, CSUQ

Soutient

les familles dans le besoin

les personnes âgées

vulnérables

les personnes affectées par

la situation économique

la célébration des fêtes juives

Ça coûte

Le saviez-vous ?

1 860 $

1 famille

par mois

pour nourrir

2 adultes

2 enfants

Faites votre part et aidez

2 familles 3 720 $

3 familles 5 580 $

4 familles 7 440 $

5 familles 9 300 $

Cliquez ici pour

DONNER

104 POUR PLUS DE RENSEIGNEMENTS, veuillez contacter : Charlie Oiknine (514) 734 1660 / coiknine@csuq.org


UNE PRODUCTION DE LA

de Montréal

DU 10 AU

23 MAI 2023

UN RENDEZ-VOUS FESTIF

À NE PAS MANQUER !

Toutes les tendances d’une culture

dans un festival

Le sens de la fête, une vitrine de la culture juive,

un rassemblement de toutes les générations et

de toutes les tendances, c’est cela, le Festival

Sefarad de Montréal.

Deux semaines de festivités en

l’honneur de l’anniversaire de l’État d’Israël :

Spectacles de grande envergure avec des artistes internationaux et locaux

Conférences et panels avec des personnalités publiques de grande renommée

Documentaires vibrants sur des personnalités inspirantes

Sourires, rires et fous rires à l’honneur

Chabatton pour les jeunes adultes

À la découverte de l’art !

514 734-1338

Et bien plus encore…!

FESTIVALSEFARAD.CA

SUIVEZ-NOUS SUR


LES PROGRAMMES

TRÈS POPULAIRES DES

Les Services Jeunesse de la CSUQ offrent des programmes qui

connaissent chaque année un très grand succès.

VOYAGE EN ISRAËL YAHAD

Programme très prisé par les jeunes,

Yahad 2023 a affiché complet en moins

de dix minutes! Un nombre record

d’inscriptions.

Des adolescents, garçons et filles,

âgés de 15 à 16 ans, visitent Israël pendant trois semaines. Une

expérience mémorable qui leur permet de visiter les principaux

lieux historiques et spirituels, villes et régions d’Israël, tout en

découvrant les multiples facettes de ce pays fascinant. Au cœur

de ce voyage, les animateurs qui accompagnent les jeunes, qui

connaissent les goûts des ados et ajustent la programmation

en conséquence. Yahad, c’est aussi des amis qui partent à

l’aventure sur les beaux terroirs d’Israël.

CAMP KIF KEF 2022

Programme très populaire qui

rassemble des jeunes de 9 à 16 ans

autour d’activités inédites et de

soirées intenses. Les 27 animateurs

de Kif Kef sont tous des bénévoles

dynamiques et très motivés. Ils

travaillent d’arrache-pied pendant

trois mois pour offrir aux jeunes une

superbe programmation. Le clou du

camp : les journées Maccabiades,

où les participants de différents

âges son répartis dans quatre

équipes pour relever les défis qu’on

leur lance.

106

CSUQ

csuq.org/jeunesse


SEMAINE DE RELÂCHE

Cette année encore, le camp de la Semaine de relâche fut un succès retentissant avec des

inscriptions affichant complet en quelques jours seulement. Du 20 au 24 février dernier, 82 jeunes

de la maternelle à la 6e année ont profité de leur congé scolaire pour se donner à cœur joie aux

activités de la Semaine de relâche. Des sorties excitantes tous les jours – Funtropolis; Zone 15;

Ninja Factory; Glissades sur tubes; Centre des Sciences; Clip n Climb. Les enfants ont adoré !

Les enfants étaient contents et joyeux comme en témoignent les photos

Les parents étaient aussi ravis comme fait foi leurs commentaires

Alicia Barchechat

Merci à tous les moniteurs et organisateurs pour une

excellente semaine de relâche!! Ma fille a passé une

semaine mémorable et a hâte a l’été pour venir au

Camp Benyamin

Rebecca Teboul

Thank you so much for an amazing week. My daughter

had a blast. It was super well organized, safe, great

communication, loved the photo updates and she said

the counsellors were awesome. A big thank you to the

staff for such a fun and great spring break week!

Iashieva Elizaveta

Thank you for the excellent week! My kids enjoyed it

very much. It was very well organized and provided

a very safe environment!! Lots of fun outings.

Thank you!!

Claire Ruimy

Vraiment merci beaucoup à tous. Pour mon fils,

c’était sa première expérience et il en est super

content. Encore bravo pour votre professionnalisme

et votre dévouement pour nos enfants.

Laurence Dahan

Merci à tous pour cette belle semaine, une bonne

organisation où les enfants se sont vraiment amusés

et merci pour les photos !!

Myriam Levy

Merci à tous !!! Superbe semaine BH mes enfants se

sont bien amusés. Les photos sont top !!!

INFO JEUNESSE : Eric Choukroun 514 734-1480 echoukroun@csuq.org Sarah Mimran 514 345-2629 smimran@csuq.org

LVS MARS/AVRIL 2023 107


HOMMAGE AUX BÉNÉVOLES

REMARQUABLES DU

PROGRAMME DE SKI CHÉLEG

Difficile de croire qu’Amélie Gobert n’a que 13 ans. Au bout

du fil, cette adolescente, étudiante en 2e secondaire au

Collège Notre-Dame de Montréal, affiche une maturité et

une assurance étonnantes. Elle nous explique avec entrain

combien elle apprécie son engagement bénévole, à titre de

monitrice, dans le programme de ski Chéleg offert par les

Services Jeunesse de la CSUQ.

« J’ai participé pendant trois ans, en tant que skieuse, à Chéleg.

J’ai adoré l’expérience. Cette année, j’ai décidé de m’impliquer

dans ce programme comme volontaire monitrice. Je prends

les présences, je m’assure que les enfants sont dans le

groupe auquel ils ont été assignés, je les supervise dans le

bus et au pied des pistes de ski avant leur montée, j’organise

la remise des skis et de l’équipement loués, je les surveille

pendant la pause déjeuner, je m’assure qu’ils ne perdent

pas leurs affaires, je réponds aux questions des parents…

Je trouve très « cool » ces sorties en plein air dominicales.

L’ambiance à Chéleg est extraordinaire. Je remercie la CSUQ

et les responsables de ce superbe programme sportif de me

faire confiance », nous a dit Amélie.

Éric Choukroun, directeur des Services Jeunesse de la CSUQ,

ne tarit pas d’éloges à l’endroit de cette très jeune bénévole.

« Amélie a la maturité d’une jeune adulte de 20 ans, tant elle

est sérieuse et responsable. Elle nous aide énormément à

l’école de ski Chéleg. Elle est vraiment un grand atout pour

ce programme. »

Chéleg est un programme de ski très populaire d’une

durée de sept semaines, du 8 janvier au 19 février. Âge des

participants : de 6 à 15 ans.

Cette année, vu le nombre élevé de participants, plus de

100, et à la suite de leur demande insistante, les Services

Jeunesse ont créé deux écoles de ski dans deux centres

différents, Chantecler et le Mont Avalanche, et un Club de

ski itinérant qui permet de découvrir différentes stations

chaque dimanche : Mont-Tremblant, Bromont, Mont Blanc…

Vieux routier du bénévolat dans la Communauté sépharade,

Carl Abitbol est un revenant. Au début des années 80, son père,

feu Élie Abitbol, alors président du Centre communautaire

juif (CCJ), fonda, avec Daniel Malca, le premier Club de ski de

la Communauté sépharade. Carl a participé assidûment à

Chéleg jusqu’au début des années 2000.

« Il y a quelque temps, j’ai croisé par hasard Sarah Mimran,

coordonnatrice des programmes Jeunesse de la CSUQ. Elle

m’a proposé de m’impliquer de nouveau comme bénévole à

Chéleg. J’ai eu à ce moment-là un sacré coup de nostalgie.

J’ai acquiescé à sa demande par fidélité à la mémoire de

mon père Élie et aux belles années de fraternité que j’ai

108 CSUQ

csuq.org/jeunesse


vécues dans ce magnifique programme communautaire.

Chaque dimanche, je me pointe au Décor Décarie à 7 h 30

du matin. J’évalue le potentiel de nos jeunes skieurs, je les

supervise dans le bus, j’accompagne des groupes sur les

pistes… J’adore les enfants. C’est un grand « kiff » pour moi

de me réimpliquer dans un programme communautaire qui

m’a beaucoup marqué durant ma jeunesse. »

Une autre revenante dans l’arène communautaire

sépharade : Sandra Botbol. Très engagée bénévolement

à la CSUQ au début des années 90, où elle avait suivi le

programme de leadership pour les jeunes adultes offert par

cette institution, elle garde de très beaux souvenirs de ces

années d’implication communautaire.

Ce sont ses deux enfants, Kelly, 11 ans, et Eitan, 8 ans,

qui lui ont redonné le goût de se porter à nouveau

volontaire auprès de la CSUQ. Cette année, Sandra Botbol

accompagne chaque dimanche son fils Eitan aux sorties de

ski organisées par Chéleg, où elle s’est jointe à l’équipe des

parents bénévoles.

« Pour moi, c’est un retour au bercail. J’adore ça, d’autant plus

que j’ai l’opportunité de côtoyer des enfants et des parents

très sympathiques. J’encourage les jeunes skieurs et donne

aussi un coup de main aux responsables professionnels de la

CSUQ qui les accompagnent. C’est un grand plaisir pour moi

de travailler étroitement avec Éric Choukroun. Je n’ai jamais

appris à skier quand j’étais jeune. Je ne voulais pas que mes

enfants ratent leur rendez-vous avec ce très beau sport. »

Ancienne secrétaire de direction à la CSUQ, Agnès Castiel a

appris à skier en 2007, en même temps que ses enfants qui

suivaient les classes de ski de Chéleg.

« J’ai grandi en France, où j’ai suivi la Classe de neige, mais

je détestais skier. Au Québec, c’est Éric Choukroun qui

m’a véritablement initié à ce sport magnifique, que j’adore

depuis pratiquer. Il m’a enseigné les premiers rudiments

du ski. Quand il m’a demandé de m’impliquer de nouveau à

Chéleg comme bénévole, je n’ai pas hésité un seul instant.

C’est une expérience très gratifiante. »

Agnès Castiel encourage les enfants sur les pentes de ski.

« Ce qui est formidable et très encourageant, c’est que des

enfants timides très réfractaires à faire du ski au début du

programme finissent par adorer ce sport à la fin de la saison.

Ils n’ont qu’une seule hâte le dimanche : se réveiller très tôt pour

se préparer pour aller rejoindre leurs camarades de Chéleg. »

CAMP KADIMA

Un des derniers programmes à voir le jour des Services

Jeunesse, le Camp Kadima offre aux jeunes ados, terminant

le secondaire 1 et 2, de nouvelles expériences afin qu’ils

aient le meilleur été de leur vie. Deux séjours exceptionnels;

une semaine à Québec et une semaine en Ontario.

En créant des environnements amusants et socialement

confortables, nous encourageons les adolescents à sortir

de leur zone de confort, à se faire de nouveaux amis, à

découvrir leurs passions et à grandir - le programme parfait

pour les adolescents souhaitant développer leur sens de

l’initiative et des responsabilités.

31 juillet au 3 août 2023 – séjour dans la région de Québec.

7 au 10 août 2023 – voyage en Ontario (chutes de Niagara,

Toronto, Ottawa)

INFO JEUNESSE : Eric Choukroun 514 734-1480 echoukroun@csuq.org Sarah Mimran 514 345-2629 smimran@csuq.org LVS MARS/AVRIL 2023

109


CAMP BENYAMIN

Depuis plus de 40 ans, le Camp Benyamin propose un camp

de jour à caractère traditionnel en introduisant de nouvelles

activités plus excitantes les unes que les autres.

• Des activités adaptées à l’âge des enfants.

• Une ambiance où l’imagination est au premier plan.

• Une programmation juive intégrée dans les activités.

• Des sorties excitantes.

• Une thématique unique pour l’été que les jeunes

découvrent et explorent davantage au fil des semaines.

Maternelle à 6 e année

26 juin au 11 août 2023

8 h 30 à 16 h

225 $ / semaine

110 CSUQ INFO JEUNESSE : Eric Choukroun 514 734-1480 echoukroun@csuq.org Sarah Mimran 514 345-2629 smimran@csuq.org


UNE PRODUCTION DE LA

En partenariat avec

Tel Aviv University Canada et

la Fondation de la famille Morris

et Rosalind Goodman

et en collaboration avec

le Consulat Général d’Israël à Montréal

et le Festival International Vues d’Afrique,

l’excellent docudrame Exodus 91 a été présenté

le 14 mars dernier au Cineplex Forum. Ce film a

été suivi d’un Q & R avec Paul Hirschson,

Consul Général d’Israël à Montréal,

Gideon Naim, producteur du film et

Yaffa Tegegne, Défenseure des droits de

l'homme et fille de Baruch Tegegne (z’l), leader

et activiste de la Communauté Éthiopienne.

Date du prochain Festival du Cinéma Israélien de Montréal

DU 25 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2023


CARNET DE FAMILLE

FIANÇAILLES

La CSUQ souhaite un grand Mazal Tov à Alexandre Hazan

et Maya Pisarevsky qui ont célébré leurs fiançailles

le 15 décembre 2022. Toutes nos félicitations à leurs familles

respectives et à notre très chère collègue Danielle Kessous.

Alexandre s’est impliqué au sein des Services Jeunesse

pendant plusieurs années, notamment au Camp Benyamin,

au Voyage Yahad et au Camp Kif Kef. Nous leur souhaitons

tous nos vœux de bonheur.

MARIAGES

Mazal Tov à Jeremy Elbaz et Hadas Brandes pour leur

mariage célébré le 12 juin 2022 à Montréal. Nos plus cordiales

félicitations à leurs parents, Claude Z.’L.’ et Lori Elbaz et Ami

et Pnina Brandes, et à leurs frères et sœurs. Sasha Elbaz,

Lilah et Smadar Brandes.

Nos plus amicales félicitations à Kelly Benizri et

Gal Aharoni qui ont célébré leur mariage en janvier 2023 en

Israël. Mazal Tov aux parents, Sandra et Sidney Benizri et

Miri et Arieh Aharoni. Kelly est la petite-fille de Haim David

Benizri, responsable de la Hévra Kadisha de la CSUQ. Nous

leur souhaitons tous nos vœux de bonheur.

La CSUQ souhaite un grand Mazal Tov à Ilanit Bendayan et

Gil Elbaz qui ont célébré leur mariage le 22 janvier 2023.

Mazal Tov aux parents, Nathalie et David Bendayan et

Keren et Sharon Elbaz. Ilanit et Gil sont impliqués au sein

des Services Jeunesse depuis plusieurs années. Nos plus

cordiales félicitations.

DÉCÈS

C’est avec une profonde consternation que nous

avons appris le décès de Miriam Lia Assouline Z.’L.’

le 19 décembre 2022. Fille adorée de Yohan Assouline et

Louna Kadoch. Sœur extraordinaire de Jacob et Emma. Elle

manquera cruellement à tant de personnes, notamment à

ses grands-parents, à ses oncles, à ses tantes, à ses cousins,

à ses nombreux amis et à notre communauté. Miriam a

marqué tous ceux et celles qui l’ont côtoyée. Elle a apporté

tant de joie et de vie aux personnes qui l’entouraient. Nous

tenons à transmettre à sa famille éplorée nos pensées les

plus affectueuses dans cette douloureuse épreuve.

Une très grande dame nous a quittés le 30 janvier 2023,

Perla Benezra (née Louk) Z.’L.’. Épouse bien-aimée de feu

Albert Benezra Z.’L.’, elle a laissé dans le deuil ses filles et

beaux-fils, Esther, Sonia, Kelly et Sam, Myriam et Ron. Elle

était la grand-mère adorée de Jesse et Robyn, Shane et

Lauren, Alex et Dina, Chloe et Matthew et l’arrière-grandmère

très dévouée de Jake et David. Elle manquera beaucoup

à ses sœurs et frères, à ses neveux et aux autres membres

de sa famille. Elle était la merveilleuse maman de deux

personnalités bien connues et très appréciées dans notre

communauté, la célèbre animatrice de télévision Sonia

Benezra et Esther Benezra, une leader communautaire

remarquable, ancienne présidente du Centre Miriam de

réadaptation pour des personnes ayant une déficience

intellectuelle. La CSUQ tient à leur exprimer ses plus

sincères condoléances.

112

CARNET DE FAMILLE


La famille Paperman

souhaite à toute la communauté

Pesach kasher v’sameach

חג פםח כשר ושמח

Yom Ha'atzmaut sameach

יום עצמאות שמח

Raphaël Ouaknine

POUR TOUTE URGENCE:

(514) 779-8008

3888 RUE JEAN TALON O,

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TÉL: (514) 733-7101

FAX: (514) 733-1775

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Une entreprise familiale, au service de la communauté


La Cayenne Platinum Edition.

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© 2022 Automobiles Porsche Canada Ltée. Contactez Porsche Prestige ou Porsche West Island pour tous les détails.

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