PHOTO : STÉPHANE ISSAURAT54
OLIVIERISSAURATLDRCCONTE D’AUTOMNEIl venait d’arriver dans un petit village demoyenne montagne. Disons « Bagnols sur Siagne». L’endroit était agréable, on y trouvaitune forêt très étendue où dominait le chêne. Al’époque, disons une sorte de Middle Age situéentre un devenir où le monde accélère le rythmeet un passé dans lequel régnait l’immobilisme.Immobilisme dont on trouve encore la trace, notammentdans ces villages éloignés des grandesbourgades. Mais revenons à notre homme. Appelons-leMachin… je sens que ça ne vous plaît pas.Va pour Autophage. Donc Autophage débarquede la charrette. Il a voyagé par voie d’eau jusqu’àMycène, la cité du Trémagnon. Je reconnais quetout ça n’est pas très crédible, mais qu’importe, letitre « Conte d’automne » aurait dû vous mettre lapuce à l’oreille.Sur la place du village, on peut louer unechambre. Bouteffrige, le charretier, l’a dit et Autophagen’en a pas douté. Il fait retomber lamain en bronze, un heurtoir usé par le temps. Unhomme mûr, en bras de chemise et pantalon detoile épaisse, le cheveu ras mais la barbe drue, luiouvre.- C’est pour quoi ? dit-il d’un ton peu affable.Notre voyageur s’explique, ils tombent d’accordpour un Ducat la nuitée. Je vous sens dubitatif,un Ducat ! pour une chambre dans uneauberge miteuse, il ne se mouche pas du coudele paysan. Ce sont de vieux Ducat dont le poidsen argent ne vaut plus que peau de chagrin. Lepays s’est endetté pour la guerre avec les Alamandiensen Gascognie du nord. Le comté deBrinducri a perdu, voilà l’explication.L’introduction est longue et inutile mais çavous pose une ambiance. Voilà Autophage installédepuis peu, il décide de se rendre en forêt. Ila dans l’idée d’imposer une scierie d’envergure,il s’en va donc observer la qualité du bois. Noussommes en été, les oiseaux gazouillent et le soleilse glisse habilement entre les feuilles. Oh là,du calme, je sais bien qu’il s’agit d’un conte d’automne,patience, même à Brinducri, les saisonsalternent et se suivent les unes les autres. L’automnene saurait tarder à pointer le bout du nez.D’ailleurs, il a plu la veille et un petit air vivifianttraverse le plateau. Etes-vous satisfait ? Mêmeque le matin, le soleil commence à lambiner derrièrela ligne de crêtes.Notre ami s’est installé sur une souche pouravaler rapidement un casse-croute préparé par lafemme du loueur. Le pâté est de bonne tenue, lefromage, une pâte à trous appelée « pâte à trous »semble appétissante et le petit vin de pays glissetout seul dans le gosier. Il plonge la main danssa gibecière, mais se fige d’un coup. Un bruissementattire son attention. Près de la rivière, unebelle jeune fille est accroupie. Dans le creux de55