Être rabbin : une profession ? Un sacerdoce - Tribu 12

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14 Social OHR HANNA : UNE MISSION ESSENTIELLE «DONNER À CEUX QUI ONT FAIM, C’EST RECEVOIR DU CRÉATEUR» TALMUD. CETTE DOCTRINE, OHR HANNA EN A FAIT SON EMBLÈME. Tribu 12 : Vous êtes bénévole depuis huit ans de Ohr Hanna. Expliquez-nous ce qu’est cet organisme. Carole Jaïs : Ohr Hanna est fondée en 1984 par le rabbin Jacques Amar, assisté de sa femme Sarah. Ils se sont donnés pour mission d’aider son prochain à Paris et dans la petite couronne en partie grâce à la participation des bénévoles. Les actions de Ohr Hanna sont particulièrement orientées vers les personnes seules et en grande difficulté. T12 : Quelles sont les spécificités de Ohr Hanna ? C.J : Il y en a plusieurs : visiter régulièrement les malades dans les 22 hôpitaux parisiens ou à domicile quand les personnes sont seules, aider aux derniers devoirs pour les personnes qui n’ont pas de famille et aider les orphelins. Il y a aussi des actions vers les personnes démunies et isolées à qui une partie des 480 bénévoles après avoir cherché les repas de chabbat dans une cantine du XIXème arrondissement de Paris vont livrer environ 10 repas par semaine à ces personnes arrivées au seuil de la pauvreté et qui parfois se retrouvent au bord de l’exclusion. J’allai oublier de vous parler des paniers de Pessah. Grâce à des accords avec des épiceries communautaires, 50 bénévoles sont mobilisés pour aider pendant les fêtes à préparer les colis alimentaires ou simplement offrir des bons afin que les personnes puissent eux-mêmes faire leur choix. T12 : Vous me parlez d’actions vers les personnes âgées. Et pour les enfants que faites-vous ? C.J. : Les enfants ne sont pas oubliés surtout ceux qui ont des problèmes sociaux notamment quand la démission des parents les fragilisent et les déséquilibrent. Un grand nombre d’entre eux sont issus de familles éclatées avec parfois un papa qui ne travaille pas ou une maman qui les élève seule. Les bénévoles se retrouvent devant des situations douloureuses et parfois dramatiques. Grâce à Ohr Hanna, les jeunes retrouvent un équilibre et une joie qui leur permet de poursuivre leurs études de façon sereine. T12 : D’où proviennent les finances de l’association ? C.J. : La grande majorité des dons émane des particuliers. Mais une partie provient des entreprises qui donnent des vêtements, des valises, des parfums et pleins d’autres choses neuves qui permettent d’organiser la vente annuelle qui jusqu’à présent se déroulait sur un jour dans une salle que la Mairie du XXème offrait à l’association. Cette année la Grande vente annuelle a duré une semaine dans les entrepôts de Ohr Hanna. Il est vrai que le comité d’honneur présidé par Élie Wiesel et composé entre autres personnalités du Pr François Jacob, prix Nobel de médecine et professeur au Collège de France, le Pr Marc Zerbib de l’hôpital Cochin, tranquillise les donateurs sur le sérieux et la confiance qu’on peut avoir en Ohr Hanna. T12 : Ohr Hanna a également une antenne en Israël C.J. : Ohr Hanna s’est alliée à la Fondation Ezrat Ménahem en Israël pour venir en aide aux nécessiteux, aux personnes âgées ou malades, mais également aux veuves et aux jeunes enfants qui sont les premiers touchés par la guerre permanente et son cortège d’épreuves. Des partenariats sont créés avec 200 Restaurants du Cœur répartis sur tout le territoire. T12 : Pour conclure C.J. : J’aimerai bien qu’Ohr Hanna puisse en faire plus. Et pour cela il faut encore plus de bénévoles et encore plus d’argent. J’espère que cet article encouragera quelques uns à franchir le pas. Ohr Hanna 14 Villa du Bel-Air 75012 Paris Tél. : 01 43 43 40 70
Histoire SAN NICANDRO : UN MIRACLE À L’ITALIENNE SAN NICANDRO EST UN PETIT VILLAGE PRINCIPALEMENT COMPOSÉ D’OUVRIERS AGRICOLES. C’EST UNE LOCALITÉ SITUÉE DANS LA PARTIE NORD-EST DU PROMONTOIRE DU GARGANO, À 224 MÈTRES D’ALTITUDE ET À 13 KILOMÈTRES DE LA MER ADRIATIQUE. À L’ORIGINE DE CETTE AVENTURE OÙ DES CATHOLIQUES ITALIENS DEVIENDRONT LES JUIFS DE SAN NICANDRO, IL Y A UN HOMME, DONATO MANDUZIO QU’ON APPELLERA LE PAYSAN-PROPHÈTE. IL EST LE BOUTE EN TRAIN DE SON VILLAGE, UN PEU MAGICIEN, UN PEU GUÉRISSEUR, UN PEU CONTEUR ET ANIMATEUR. Pendant la Première Guerre mondiale, Donato Manduzio se bat comme soldat. Blessé et mutilé en 1917, il retourne vivre dans son village. Manduzio est illettré. Il apprend à lire et à écrire pendant son séjour à l’hopital. Il tombe par hasard sur un exemplaire de l’Ancien Testament. Immédiatement c’est la révélation. Il découvre les enseignements de la Torah. Si Donato Manduzio était resté seul, son histoire serait probablement oubliée aujourd’hui. Mais des habitants de son village viennent l’écouter et il les communique à son voisinage. Ses prèches, souvent consécutifs à de fréquentes, visions attirent certains de ceux qui le fréquentent, même si tous ne s’y rallient pas inconditionnellement ; il est difficile pour certains de le suivre surtout quand il leur enjoint de brûler leurs images pieuses ou de briser leurs statues. Il fera des disciples dans vingt-trois familles. Il faut se souvenir que l’Italie est très catholique, surtout à cette période. Pourtant l’Ancien Testament fascine de plus en plus Donato. Son Dieu est le Dieu d’Israël. Ce qui est exceptionnel, c’est qu’ils sont convaincus d’être les seuls adeptes au monde de cette croyance et que le peuple israélite a disparu depuis des millénaires de la surface de la terre. Cette conversion se fait donc sans aucun contact avec des Juifs. Or, un voyageur de passage dans la région révèle à ces quelques nouveaux Israélites des Pouilles qu’il n’en est rien et qu’il y a bel et bien des Juifs, et même dans l’Italie de 1930. Après avoir fait des recherches, Donato Manduzio obtient l’adresse du Grand rabbin de Rome, qui s’appelait alors Angelo Sacerdoti (ironie de l’histoire : l’un des successeurs de Sacerdoti, le rabbin Israël Zolli (né Zoller), après avoir eu une vision mystique de J-C lors de l’office de Yom Kippour, se convertira au catholicisme en 1944, une démarche qui causera un véritable scandale dans le monde juif). En 1931, Donato Manduzio et ses fidèles adressent une lettre au grand rabbin de Rome qui croit à une plaisanterie ou à une farce, tant le message qu’il reçoit semble incroyable. Des semaines passent donc sans nouvelles. Manduzio et ses amis envoient un nouveau courrier au Grand rabbin, et toujours le même silence. Enfin, au troisième message, le Grand rabbin Sacerdoti réagit. Et la correspondance qui s’engage finit par convaincre le rabbin de la sincérité de la démarche de ses correspondants de San Nicandro, En 1936, le nouveau Grand Rabbin d’Italie, David Prato, envoie Rafaele Cantoni à San Nicandro pour monter un séminaire et ouvrir une synagogue. Mais le messager, conscient du danger du fascisme qui commence à se développer en Italie, essaie de dissuader les amis de Manduzio de se déclarer comme Juifs à la police. Le groupe de San Nicandro a donc toutes les raisons d’éprouver quelques découragements mais rien n’y fait. Lorsque le 10 septembre 1943, les Alliés prennent Tarente, des brigades des Juifs palestiniens intégrées à la 8ème Armée et se répandent dans la région. Les san-nicandrais voient défiler des jeeps arborant le « Maguen David ». On imagine sans peine la surprise des « Sabbatini », c’est ainsi qu’on appelait le groupe de néo-juifs de San Nicandro, lorsqu’ils voient l’étoile à six branches ! Ils confectionnent alors un drapeau bleu et blanc frappé du même bouclier qu’ils agitent au passage de chaque jeep. L’une d’elles que dirige le major Finn Lapide Spitzer finit par s’arrêter, et ses passagers ne sont pas peu étonnés de rencontrer des paysans italiens qui se proclament eux-mêmes juifs! Les Juifs de San Nicandro découvrent qu’un État juif est en gestation. L’idée d’émigrer en Palestine germe dans leur esprit. Les autorités religieuses juives d’Italie finissent enfin par accéder à la requête des convertis de San Nicandro. Le 29 juillet 1946,le rabbin Ravenna est envoyé de Rome pour préparer une circoncision collective qu’effectuera le Docteur Ascarelli permet à plusieurs d’entre eux d’être reçus officiellement dans le judaïsme. Le 15 mars 1948, Donato Manduzio décède à San Nicandro. Cette même année, trois jeunes de San Nicandro partent vers la Terre promise et s’enrôlent dans les forces israéliennes pour la Guerre d’Indépendance. Enfin, en 1949-1950, la plupart des convertis les suivent et vont s’installer en Israël. Leurs descendants y vivent toujours. Il reste actuellement une douzaine de membres de la communauté de San Nicandro, essentiellement des femmes, ce qui laisse à penser à une extinction prochaine. Mais qui sait ? Le miracle du Gargano se produira peut-être une seconde fois. Patrick Chemla Source : Jean-Pierre Allali : Les arabesques de la destinée. Histoires étonnantes du peuple d’Israël. Editions Gil Wern. 1996. Pinchas E. Lapide. Les compagnons de San Nicandro ou Retour aux sources. Editions Albin Michel. Elena Cassin. San Nicandro. Histoire d’une conversion. Éditions Quai Voltaire www.religioscope.com © 2002 15
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