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L'Essentiel Prépas N°58 - Mars 2022

L'Essentiel du Sup Prépas est le magazine numérique dédié aux professeurs des classes préparatoires, aux étudiants et à leurs parents. Chaque mois, retrouvez toute l'actualité des classes préparatoires économiques et commerciales et des Grandes Ecoles. Ce magazine vous est proposé par HEADway Advisory, cabinet de conseil en stratégie dédié à l'enseignement supérieur.

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MARS <strong>2022</strong> | N° 58<br />

CLASSES PRÉPAS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES GÉNÉRALES<br />

PORTRAIT<br />

Alice Guilhon (Skema)<br />

ENTRETIENS<br />

Herbert Castéran (EM Strasbourg)<br />

Julien Manteau (Neoma BS)<br />

DÉBAT<br />

Mathématiques : le grand dilemme<br />

Comment enseigner<br />

la transition écologique dans<br />

l’enseignement supérieur ?


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

ÉDITO + SOMMAIRE<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

PRÉPAS ECG : QUE FAIRE ?<br />

La première rentrée des classes préparatoires économiques et commerciales<br />

générales (ECG) s’est soldée sur une désillusion. Il manque au bas<br />

mot un millier d’étudiants en première année. Les causes sont multiples<br />

et Julien Manteau, directeur général adjoint de Neoma en charge notamment<br />

du développement, les analyse longuement dans ce numéro.<br />

Si la question du poids des mathématiques dans le choix des élèves de terminale<br />

semble déterminante dans cette baisse des effectifs, d’autres causes l’expliquent. La<br />

pandémie aura notamment empêché les classes préparatoires de proximité de communiquer<br />

auprès des étudiants. Un problème particulièrement aigu alors que la filière<br />

venait d’être réformée et que les différences entre ses quatre voies sont difficiles à<br />

percevoir.<br />

Le formidable effort entrepris par l’Aphec pour organiser des forums et participer<br />

à des salons d’orientation postbac – là où tout se joue ! - en compagnie d’écoles de<br />

management, les effets conjugués des actions de la Cdefm et du Bnem, doivent cette<br />

année permettre à la filière d’amorcer une reprise. Mais il n’en reste pas moins vrai<br />

que le faible faux d’orientation vers les prépas ECG des élèves ayant opté pour l’option<br />

Mathématiques complémentaire en terminale pose la question du niveau en mathématiques<br />

nécessaire pour intégrer la filière.<br />

Bien sûr on peut toujours espérer un retour des mathématiques dans le tronc commun<br />

du bac, ou même la création d’une spécialité plus proche par son niveau des<br />

mathématiques pratiquées dans l’ancien bac ES. Mais combien de temps faudra-t-il ?<br />

L’autre option serait de réduire la part des mathématiques dans une partie des classes<br />

préparatoires ECG. Mais cela heurterait fortement les convictions des grandes écoles<br />

du haut du tableau autant que les professeurs de mathématiques.<br />

Si cela se faisait, on passerait de plus forcément à un système proche de celui du<br />

recrutement des écoles d’ingénieurs post prépas. C’est-à-dire avec des places réservées<br />

dans chaque école à chaque filière. C’est d’ailleurs déjà le cas pour les élèves<br />

issus de classes préparatoires littéraires au sein des écoles du concours Ecricome<br />

et, cette année, de plusieurs écoles de la BCE : un quota de places leur est alloué. Ce<br />

serait aussi la fin d’un interclassement auquel sont très attachées les écoles.<br />

Les débats vont être vifs dans les mois à venir et la prochaine assemblée générale de<br />

l’Aphec, qui se tient cette année dans les locaux de Grenoble EM les 10 et 11 juin, sera<br />

l’occasion de faire le point sur l’avenir des concours et de la filière.<br />

Sommaire<br />

LES ESSENTIELS DU MOIS<br />

4 • ESCP présente sa nouvelle stratégie<br />

6 • Présidentielle : la CGE se positionne<br />

7 • Audencia fait le point sur son plan<br />

stratégique<br />

9 • Le PGE de l’EM Normandie s’implante à<br />

Evreux<br />

10 • « Grow by Doing® » :<br />

le PGE de KEDGE évolue<br />

11 • Un « Dictionnaire inattendu<br />

des Grande écoles »<br />

15 • L’institut Montaigne dresse le portrait d’une<br />

« jeunesse plurielle »<br />

PUBLI-INFORMATION<br />

12 • L’heure du Choice !<br />

ENTRETIENS<br />

16 • Herbert Castéran,<br />

Directeur général de l’EM Strasbourg<br />

30 • Julien Manteau,<br />

Directeur général adjoint de Neoma<br />

33 • Martial Martin, Président de l’Association<br />

des directeurs d’IUT (Adiut)<br />

36 • Frédéric Dallias, Directeur général de<br />

Exatech<br />

DOSSIER<br />

19 • Comment enseigner la transition<br />

écologique dans l’enseignement<br />

supérieur ?<br />

PORTRAIT<br />

26 • Alice Guilhon : sportive et universitaire<br />

DÉBAT<br />

39 • Mathématiques : le grand dilemme<br />

Olivier Rollot, rédacteur en chef<br />

ORollot<br />

« L’Essentiel du sup » est une publication du groupe HEADway<br />

Advisory, SAS au capital de 30 000 €, RCS 53298990200046 Paris,<br />

CPPAP 0920W93756, 33, rue d’Amsterdam, 75008 Paris.<br />

Directeur de la publication : Sébastien Vivier-Lirimont.<br />

Rédacteur en chef : Olivier Rollot (o.rollot@headway-advisory.com).<br />

Responsable commerciale : Fanny Bole du Chomont<br />

(f.boleduchomont@headway-advisory.com).<br />

Création graphique et mise en pages : Élise Godmuse / olo. éditions<br />

Photo de couverture : Audencia BS<br />

2


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

ESCP présente sa nouvelle<br />

stratégie<br />

« ESCP est la véritable école européenne avec<br />

ses six campus, bientôt peut-être sept avec<br />

un site à Dubaï, et des étudiants français qui<br />

sont devenus minoritaires. » À l’occasion de<br />

la présentation de son nouveau plan stratégique, le<br />

président de l’ESCP et des Galeries Lafayette, Philippe<br />

Houzé, est heureux de pouvoir annoncer que l’école a<br />

fini l’année 2021 sur un résultat de 5 millions d’euros<br />

pour un chiffre d’affaires de 140 millions quand, il y a<br />

cinq ans, elle « touchait encore des subventions de sa<br />

CCI sur un marché hyper compétitif où il faut notamment<br />

toujours se situer dans le top 10 des Masters in<br />

Management du Financial Times ». « Les piliers de la<br />

stratégie <strong>2022</strong>-2027 sont la soutenabilité, l’innovation,<br />

la communauté et l’expertise. Face à une obsolescence<br />

rapide du savoir en management qui impose une recherche<br />

connectée avec l’entreprise », explique quant à<br />

lui le directeur général de l’école, Frank Bournois quand<br />

Philippe Houzé insiste : « Dans l’avenir nous devons<br />

tous devenir des learners ». D’ici cinq ans le nombre<br />

d’étudiants passera de 8 300 à 10 000.<br />

passés d’un stade d’innovations locales avec des<br />

spécialisations à une volonté de dispenser des cours<br />

à tous avec un socle commun », confirme Aurélien<br />

Acquier, le doyen associé à la transition durable, le<br />

lendemain de la présentation du Rapport Jouzel sur<br />

l’enseignement des évolutions climatiques. Un « ESCP<br />

Transition Network » réunit par ailleurs professeurs,<br />

alumni, en appui des projets de l’école.<br />

Expertise. « Nous voulons être les leaders de la<br />

recherche impactante avec notamment le succès de<br />

la publication de nos livres blancs, en commençant<br />

par « Le management après le Covid » et depuis sur<br />

« Better business Creating Sustainable Value » », assure<br />

le professeur de finance Pramuan Bunkanwanicha.<br />

Trois nouveaux MSc viennent s’ajouter cette année aux<br />

25 existants faisant de ESCP « l’école qui en propose le<br />

plus », assure Leon Laulusa, le directeur général délégué<br />

de l’école, qui a également créé un « passeport numérique<br />

unique au monde pour valoriser les multi-compétences<br />

des étudiants auprès des employeurs ».<br />

Soutenabilité. « La soutenabilité est un sujet depuis<br />

1992 et la création d’un premier cours avant toutes les<br />

autres écoles. Aujourd’hui c’est tout un département<br />

en soutenabilité qui a été créé autour de ces questions<br />

avec quinze professeurs. Mais il s’agit aussi d’influencer<br />

tous les autres départements académiques », insiste<br />

Valérie Moatti, la doyenne de l’école. « Nous sommes<br />

Innovation. La dimension numérique et distancielle<br />

des enseignements est au cœur des nouvelles pédagogies<br />

que développe ESCP. « Tout étudiant de ESCP va<br />

pouvoir bénéficier de l’ensemble de nos cours sur une<br />

plateforme globale, développe la directrice du campus<br />

berlinois de ESCP, Véronique Tran. Maintenant il n’est<br />

plus nécessaire de se déplacer d’un campus à l’autre.<br />

Frank Bournois, directeur général de ESCP, et Philippe Houzé,<br />

président de l’école, présentent leur nouvelle stratégie.<br />

© O.R.<br />

4


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Cinq des six campus<br />

de ESCP en Europe.<br />

© ESCP BS<br />

Cela casse même les barrières générationnelles en<br />

permettant à tous d’accéder à tous les cours. »<br />

« Le concept 20/40 que nous développons c’est 20 %<br />

au moins d’enseignement numérique et au moins 40 %<br />

en présentiel. Tout dépend des programmes », complète<br />

Vanessa Strauss-Kahn, la directrice du bachelor<br />

de l’ESCP au sein duquel la partie présentielle est de<br />

75 %, qui se félicite de voir que « les étudiants peuvent<br />

ainsi travailler par eux-mêmes avant le cours avec un<br />

apprentissage inversé ».<br />

Communauté. Le soutien aux étudiants et à l’égalité<br />

des chances est au cœur de l’action de la Fondation<br />

ESCP que préside Christian Mouillon : « Nous refinançons<br />

par exemple le programme de bourses de l’école avec<br />

même la gratuité pour les étudiants des échelons 4 à 7 ».<br />

Une fondation qui a « vocation à devenir un actionnaire<br />

plus significatif de l’école », insiste le président d’une<br />

fondation reconnue d’utilité publique (FRUP) qui prépare<br />

sa première campagne pluriannuelle (2021-2026) avec<br />

un objectif de collecte de 75 M€ en six ans.<br />

explique Marie Boutet, la directrice du cabinet, qui<br />

veut également « créer des espaces modulables ».<br />

Les cours intérieures des différents bâtiments vont<br />

être remises au même niveau pour permettre une plus<br />

grande fluidité dans les déplacements.<br />

Financé par la CCI Paris-Ile de France avec l’aide de<br />

la fondation, un budget de 50 millions d’euros sera<br />

consacré à cette rénovation. Si les locaux de Londres<br />

ont été dévolus à l’école ceux de Paris restent en effet<br />

propriété de la CCI, par ailleurs actionnaire à quasiment<br />

100 % de l’EESC (établissement d’enseignement<br />

supérieur consulaire) qu’est l’ESCP. Au final l’école<br />

bénéficiera de plus de 20 000 m 2 de surfaces utiles<br />

pour 18 000 aujourd’hui. « Grâce à l’ingéniosité de nos<br />

architectes nous aurons des espaces de co-working<br />

nouveaux », souligne Frank Bournois.<br />

La transition passe par le déplacement de l’ensemble<br />

des équipes sur les campus de Montparnasse et<br />

Champerret de l’école à partir de septembre 2023.<br />

Quatre ans de déplacements donc pour « éviter que<br />

les personnels souffrent des travaux ».<br />

D’autres campus<br />

en travaux<br />

Dès 2023 un nouveau campus<br />

de 6 500 m 2 sera inauguré au<br />

centre-ville de Turin. Pendant<br />

quatre ans le campus sera<br />

loué puis acheté. « Par sa<br />

seule activité il se finance »,<br />

commente Frank Bournois.<br />

Quant à Dubaï ce n’est pas<br />

un véritable campus qui y<br />

serait développé mais un site<br />

dispensant un programme.<br />

Le nouveau campus parisien. L’actualité de l’école<br />

c’est aussi la rénovation de son campus historique de<br />

Paris d’ici 2027 pour lequel 140 cabinets d’architecte<br />

ont concouru. Retenu à l’issue du concours, l’Atelier 2,<br />

3, 4 a notamment prévu la construction de 3 000 m 2 de<br />

terrasse végétalisées et d’un « rooftop festif » ouvert<br />

sur tout Paris. « L’une des grandes questions est de<br />

passer d’un ilot de chaleur à un ilot de fraicheur »,<br />

5


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Présidentielle :<br />

la CGE se positionne<br />

Il ne manquait plus qu’elle. Après France Université, la Cdefm, la Cdefi, la Fesic<br />

ou encore la FCU, la Conférence des Grandes écoles (CGE) a fait ses propres<br />

propositions aux candidats pour l’élection présidentielle <strong>2022</strong>.<br />

« Cette campagne doit prendre en compte les<br />

transitions socio-écologiques, le numérique, les<br />

dynamiques territoriales et l’accompagnement<br />

de la jeunesse. Les Grandes écoles se tiendront<br />

à disposition pour fonder un enseignement supérieur<br />

à la hauteur des enjeux écologiques et sociétaux »,<br />

promet le président de la CGE et directeur des Arts et<br />

Métiers, Laurent Champaney.<br />

Lutter contre la marchandisation. Incisif comme<br />

toujours le secrétaire général de la CGE et directeur de<br />

Sciences Po Lille, Pierre Mathiot, insiste sur le rôle de<br />

la conférence dans la « lutte contre la marchandisation<br />

excessive de l’enseignement supérieur ». Et d’insister<br />

- « La CGE peut aider les étudiants à faire de bons<br />

choix face à des officines privées lucratives » - avant<br />

que Laurent Champaney abonde dans son sens : « Les<br />

fonds de la formation professionnelle ne sont pas assez<br />

régulés alors que les Grandes écoles répondent de leur<br />

côté à des contraintes drastiques d’accréditations ».<br />

Encore aujourd’hui France Compétences n’a laissé qu’un<br />

siège pour deux – l’un pour le ministère de l’Education,<br />

l’autre pour le MESRI – aux représentants du système<br />

éducatif dans son conseil d’administration…<br />

Laurent Champaney préside la Conférence<br />

des Grandes écoles depuis l’été 2021.<br />

© Arts et Métiers<br />

Dégager des moyens complémentaires. La sortie<br />

du président Emmanuel Macron sur la question du<br />

montant des droits de scolarité est encore dans tous<br />

les esprits. « La limitation du montant des droits de<br />

scolarité est un frein à la qualité de nos prestations. Il<br />

faut s’ouvrir l’esprit à une modulation de ces droits dès<br />

lors que nous pouvons accompagner tous les jeunes<br />

par un système de bourse et que l’État ne se désengage<br />

pas pour autant », demande Laurent Champaney.<br />

La CGE propose donc de « donner une plus grande<br />

marge de manœuvre dans la recherche de fonds des<br />

établissements » tout en « facilitant le développement<br />

du mécénat en levant le taux de défiscalisation des<br />

dons à 60 % » tout en « permettant aux établissements<br />

de moduler les droits de scolarité en fonction des<br />

revenus ». Autre proposition : « Créer une contribution<br />

partenariale scientifique, sur le même modèle de la taxe<br />

d’apprentissage, pour donner davantage de moyens<br />

à la recherche ».<br />

Mieux accompagner les transitions. Les organismes<br />

d’accréditation y sont certes de plus en plus<br />

attentifs mais on est encore loin de donner aux objectifs<br />

de développement durable de l’Onu une place déterminante<br />

dans les évaluations. La CGE demande donc à la<br />

fois d’« aligner les critères d’évaluation concernant le<br />

développement durable et la responsabilité sociétale<br />

dans les référentiels du HCERES, de la CTI et de la<br />

CEFDG », qu’un travail soit « conduit avec les branches<br />

professionnelles et les OPCO pour que les compétences<br />

liées au DD&RS soient reconnues par France Compétences<br />

» et que la transition écologique, à l’instar du<br />

handicap, soit « inscrite comme un critère d’évaluation<br />

de la qualité des référentiels inscrits au RNCP ». « Après<br />

deux années difficiles pour nos étudiants liées à la<br />

pandémie, nous proposons le lancement des premières<br />

assises de l’enseignement supérieur inclusif », lance<br />

Frédérique Pain, vice-présidente écoles de la CGE et<br />

directrice de l’Ensci.<br />

La CGE propose également de mettre en place un<br />

système universel de gestion de la data dans l’ESRI.<br />

Neoma : Delphine<br />

Manceau et Michel-<br />

Edouard Leclerc<br />

reconduits<br />

Le conseil d’administration<br />

de NEOMA a renouvelé<br />

les mandats de directrice<br />

générale de Delphine<br />

Manceau et de président de<br />

Michel-Edouard Leclerc<br />

pour une durée de quatre<br />

ans. « L’Ecole connaît<br />

une ascension formidable<br />

depuis plusieurs années<br />

avec plusieurs grandes<br />

réalisations, au premier<br />

rang desquelles l’ouverture<br />

d’un campus à la pointe<br />

de la modernité à Paris<br />

ou encore le déploiement<br />

de plusieurs innovations<br />

pédagogiques et digitales,<br />

de nombreuses fois primées.<br />

Tout est réuni pour que je<br />

continue à m’investir, aux<br />

côtés de Delphine Manceau,<br />

des élus du CA mais aussi<br />

de toute la communauté<br />

éducative, des étudiants<br />

et des alumni, pour servir<br />

l›ambition de NEOMA »,<br />

indique le président quand<br />

Delphine Manceau insiste<br />

sur les profondes mutations<br />

que connaît aujourd’hui<br />

l’enseignement supérieur :<br />

« C’est passionnant de<br />

pouvoir écrire une nouvelle<br />

page du développement<br />

de NEOMA à ce moment<br />

clé. Etre au service des<br />

jeunes, de leur projet et<br />

de leur avenir, mais aussi<br />

des entreprises et de la<br />

compétitivité de l’économie<br />

française, continuera à<br />

guider mon action ».<br />

Le plan stratégique <strong>2022</strong><br />

arrivant à son terme d’ici<br />

quelques mois, une nouvelle<br />

feuille de route stratégique<br />

pour les années à venir<br />

sera bientôt dévoilée.<br />

6


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Audencia fait le point<br />

sur son plan stratégique<br />

Depuis un an dans le cadre de son plan stratégique<br />

2021-2025 « Audencia se positionne comme<br />

un accélérateur des changements vertueux<br />

de la société » identifiée comme une « école<br />

meilleure pour le monde », explique son directeur général,<br />

Christophe Germain. Aujourd’hui sa toute nouvelle école<br />

centrée sur le développement responsable, Gaïa, se<br />

veut le nouveau « microprocesseur de l’école ». Une<br />

formule résumée par un « Audencia with Gaïa Inside ».<br />

Audencia « with Gaïa Inside ». Maintenant sur<br />

les rails, l’école Gaïa va délivrer ses premiers cours<br />

dans tous les programmes de l’école. « Nous voulons<br />

surtout que les enseignements que nous délivrons<br />

soient reliés aux métiers de demain et aux demandes<br />

des entreprises qui ne sont pas couvertes par les formations<br />

actuelles », explique le responsable de l‘école,<br />

José Maillet, qui insiste : « Ce sont bien des cours de<br />

management en rapport avec les transitions ». Un cours<br />

est par exemple donné sur l’agriculture, un autre sur la<br />

tech, un autre sur les business models soutenables,<br />

etc. Le tout avec beaucoup de projets en mien avec<br />

les entreprises sur des sujets « à impact ».<br />

L’objectif est de commencer plutôt modestement les cours<br />

en les délivrant à une centaine d’étudiants de 2 e année.<br />

« Les étudiants sont très conservateurs. Il faut qu’ils<br />

prennent conscience que tous les métiers seront demain<br />

impactés », analyse Christophe Germain quand José<br />

Maillet remarque : « Après un stage ils sont absolument<br />

convaincus de la nécessité de ces cours. Nous aurions<br />

pu nous concentrer sur les MSc mais nous voulons que<br />

le plus d’étudiants possible soient concernés ».<br />

Si en septembre <strong>2022</strong> c’est déjà un espace virtuel qui<br />

sera dédié à Gaïa (avec le concours de Laval Virtual),<br />

une extension physique sera ouverte à la rentrée 2024.<br />

Christophe Germain entouré du responsable<br />

de Gaïa, José Maillet, et de Token<br />

for Good, laure Bernuau-Diakov.<br />

C’est dans ce cadre qu’un partenariat a été noué avec<br />

The Shift Project pour réfléchir à comment peuvent<br />

évoluer les modèles économiques.<br />

Hybridation des compétences. C’est l’un des<br />

principaux axes de développement d’Audencia. De<br />

nombreux partenariats ont vu le jour avec différents<br />

partenaires. Dont le plus fidèle est Centrale Nantes. Dans<br />

ce cadre leur BBA Big Data & Management commun<br />

a reçu 26 étudiants pour sa première année en 2021.<br />

L’objectif pour <strong>2022</strong> est d’atteindre les 80 étudiants<br />

internationaux avec un diplôme mixte qui sera « mieux<br />

identifié sur Parcoursup ». Quant aux professeurs ils<br />

sont maintenant tous recrutés avec des expertises<br />

hybrides. 11 nouveaux cette année.<br />

À l’international des parcours double compétences<br />

ont été ouverts partout dans le monde, que ce soir avec<br />

la New York Film Academy, UCLA, etc. En Chine, où sont<br />

déjà formés 700 étudiants dans le cadre de la SABS,<br />

l’objectif est de passer à 2 000 étudiants en 2025 avec<br />

la création de trois nouveaux programmes de bachelor.<br />

De plus a été créé en 2021 un Centre académique et de<br />

recherche à Shanghai. Autre développement au Brésil<br />

où a été ouvert un campus à Sao Paulo avec la Fecap.<br />

À Paris une trentaine de propositions de nouveaux<br />

bâtiments ont été présentées pour ouvrir un nouveau<br />

campus parisien. Celui-ci recevra 2 000 étudiants, de<br />

tous les programmes, sur 7 000 m 2 . Un bâtiment situé<br />

dans le périmètre du Grand Paris qui sera la propriété<br />

d’Audencia. Il en reste deux en lice. La décision sera<br />

prise au premier semestre <strong>2022</strong>.<br />

Nouvelles pédagogies. Le distanciel est toujours<br />

à l’ordre du jour avec la possibilité pour les étudiants<br />

du programme Grande école de suivre leur troisième<br />

semestre à distance. Grâce à la création de son propre<br />

CFA Audencia proposera 470 places en apprentissage<br />

en <strong>2022</strong> – soit une hausse de 33 %. De plus une année<br />

de propédeutique sera ouverte en <strong>2022</strong> à 20 bacheliers<br />

professionnels.<br />

« Token for Good ». Une « communauté de confiance »<br />

va être créée pour « enregistrer et valoriser de façon<br />

transparente et irréfutable les interactions entre les<br />

parties prenantes de l’école », explique Laure Bernuau-Diakov,<br />

qui va diriger une start up dédiée appelée<br />

« Token for Good ». Celle-ci gérera les échanges sur une<br />

blockchain. « Plus les alumni participeront, par exemple<br />

en faisant partir d’un jury ou en faisant du mentoring,<br />

plus ils seront récompensés », commente la directrice.<br />

Une websérie<br />

Une websérie « Gaïa »<br />

est lancée pour le grand<br />

public. Chaque semaine<br />

José Maillet ou d’autres<br />

professeurs de Gaïa<br />

présentent les enjeux de la<br />

transition environnementale<br />

de manière décontractée.<br />

7


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Le PGE de l’EM Normandie<br />

s’implante à Evreux<br />

C’est dans les locaux d’une autre école consulaire,<br />

spécialisée dans l’alternance, l’Essci,<br />

que l’EM Normandie va déployer, à compter<br />

de septembre <strong>2022</strong>, son PGE en alternance<br />

à Evreux. « En implantant le PGE EM Normandie en<br />

alternance à Evreux avec la CCI Portes de Normandie et<br />

l’ESCCI, nous sommes heureux de soutenir le dévelop-<br />

© EM Normandie<br />

pement économique ébroïcien, de favoriser la montée<br />

des compétences et la révélation de jeunes talents<br />

localement et de renforcer davantage notre présence<br />

en Normandie, territoire d’origine de l’école », explique<br />

Elian Pilvin, le directeur général de l’EM Normandie.<br />

À la rentrée <strong>2022</strong>, le PGE comptera 25 étudiants en<br />

première année de Master, 50 l’année suivante en M1 et<br />

M2. Les cours seront dispensés par des professeurs<br />

permanents de l’EM Normandie (70 % en présentiel et<br />

en distanciel), ainsi que par les équipes pédagogiques<br />

de l’ESCCI (30 % en présentiel). L’accès se fait par le<br />

biais du concours Passerelle.<br />

Ce déploiement du PGE EM Normandie an alternance<br />

à Evreux est dans la lignée du modèle déjà proposé à<br />

La Réunion en 2021 et prévu en Martinique en septembre<br />

<strong>2022</strong> en partenariat avec les CCI locales.<br />

EN BREF<br />

ESCP Business School<br />

publie un nouveau livre<br />

blanc, « Comment la finance<br />

verte peut-elle répondre aux<br />

urgences climatiques ? »,<br />

rédigé par Christophe<br />

Thibierge, professeur<br />

de finance à ESCP.<br />

MBS a signé l’acte<br />

d’engagement « Stop au<br />

Sexisme Ordinaire en<br />

Entreprise », une initiative<br />

animée par l’AFMD<br />

réunissant 150 entreprises<br />

souhaitant « aller plus<br />

loin dans les dispositifs<br />

déployés pour agir<br />

contre les comportements<br />

sexistes au travail ».<br />

Les 14 et 15 janvier ont<br />

eu lieu les cérémonies de<br />

remise des diplômes de<br />

Rennes School of Business<br />

qui avaient été repoussées en<br />

2020, réunissant ainsi plus<br />

de 1 300 personnes, dont<br />

près de 600 diplômés. Ces 3<br />

cérémonies ont eu lieu pour<br />

la première année à la Glaz<br />

Arena à Cesson-Sévigné,<br />

près de Rennes. Elles ont été<br />

retransmises simultanément<br />

en streaming, pour permettre<br />

aux personnes n’ayant<br />

pu se rendre disponibles,<br />

de suivre à distance.<br />

ESCP sur TikTok !<br />

Né en 2016, TikTok a dépassé le milliard<br />

d’utilisateurs actifs mensuels. Environ<br />

50 % de l’audience mondiale de TikTok<br />

est âgée de moins de 34 ans, 32,5 %<br />

ayant entre 10 et 19 ans. Bien décidée à<br />

ne pas être absente d’un média aussi populaire<br />

auprès des jeunes ESCP Business<br />

School a lancé le compte TikTok officiel<br />

de l’école en janvier <strong>2022</strong>. Les étudiants<br />

et les sociétés étudiantes de tous<br />

ses campus européens se sont mobilisés<br />

pour produire des vidéos TikTok qui feront<br />

sa promotion. « Dans le paysage<br />

des médias sociaux, TikTok est une perturbation<br />

des médias sociaux que nous<br />

connaissons. Sa croissance rapide chez<br />

les jeunes et les moins jeunes nous a amenés<br />

à repenser notre façon de construire<br />

du contenu pour le rendre moins institutionnel,<br />

plus immersif et expérientiel »,<br />

explique Dimitri Champollion, directeur<br />

de la marque et de la communication de<br />

ESCP Business School.<br />

Le campus virtuel de NEOMA<br />

consacré<br />

Le metavers ? Déjà fait ! Le campus virtuel<br />

de NEOMA Business School remporte<br />

le prix « Best Innovation Strategy<br />

<strong>2022</strong> » de l’AMBA (Association of Masters<br />

of Business Administration). Lancé<br />

en 2020, le campus virtuel de NEOMA<br />

rassemble les espaces et les usages traditionnels<br />

d’un campus physique. « L’objectif<br />

? Permettre l’interaction, l’ambiance<br />

et la vie d’un vrai campus pour garantir<br />

une expérience académique et étudiante<br />

la plus riche et complète possible, même<br />

à distance », souligne Alain Goudey, directeur<br />

de la Transformation Digitale de<br />

NEOMA Business School.<br />

Une innovation qui a conquis le jury international<br />

de l’Amba, plus particulièrement<br />

concentré cette année sur les dispositifs<br />

ayant permis aux écoles et universités<br />

d’innover et de s’adapter à la pandémie<br />

dans les meilleures conditions. « NEO-<br />

MA a été la première Business School<br />

en Europe à répondre avec force à la<br />

© Neoma BS<br />

crise du Covid-19 en lançant un campus<br />

virtuel, explique Andrew Main Wilson,<br />

Directeur général de l’Association<br />

of MBAs and Business Graduates Association<br />

(AMBA & BGA). Les résultats<br />

sont impressionnants, en termes d’impact<br />

positif sur l’éducation et la société<br />

dans son ensemble ».<br />

9


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

« Grow by Doing® » :<br />

le PGE de KEDGE évolue<br />

Le Programme Grande Ecole de KEDGE est<br />

repensé cette année autour d’une nouvelle<br />

posture pédagogique : Grow by Doing®. L’objectif<br />

est « d’engager les étudiants dans des<br />

actions concrètes à impact, leur apprendre à penser<br />

différemment et enrichir leur parcours ».<br />

« Aujourd’hui, notre mission ne se limite plus à former<br />

nos étudiants au monde de l’entreprise. Nous devons<br />

offrir à notre écosystème des profils de professionnels<br />

singuliers, ancrés dans l’action et capables de rebattre<br />

les cartes d’une société qui tend à s’essouffler », explique<br />

la directrice du PGE, Aurélie Dehling.<br />

Parmi les nouveaux cours qui vont être inscrits au<br />

programme, certains s’inscrivent directement dans<br />

l’objectif d’exercer un impact sur l’environnement<br />

et le territoire. Le cours en RSE « Décarbonation et<br />

résilience » sera mis en place dès la rentrée <strong>2022</strong>.<br />

Au sein de ce module, les étudiants devront observer<br />

les avancées de l’école en matière de décarbonation<br />

et « émettre des recommandations dont l’établissement<br />

s’engage à tenir compte ». Un nouveau cours de<br />

comptabilité aura quant à lui pour objectif de construire<br />

un dispositif d’aide aux associations et TPE/PME des<br />

territoires autour des campus.<br />

Le deuxième axe de la posture Grow by Doing® consiste<br />

à inciter les étudiants à penser « différemment » en les<br />

confrontant à des modes de pensée plus disruptifs et<br />

novateurs. Un cycle de conférences appelé « Thinking<br />

Out Loud », démarré à l’automne 2021, permet ainsi<br />

aux étudiants d’écouter des personnalités invitées,<br />

« reconnues pour leur réflexion originale et prospective<br />

». La première conférence Thinking Out Loud avait<br />

ainsi pour intitulé ‘’Osez Josephine : Black cultures<br />

matters’’! et rendait hommage à l’entrée de Joséphine<br />

Baker au Panthéon.<br />

Par ailleurs un parcours « full english » est maintenant<br />

possible en L3. À la rentrée prochaine, les étudiants en<br />

M1 pourront quant à eux suivre un cours d’art oratoire<br />

- obligatoire - ainsi qu’un concours d’éloquence. Un<br />

cours « Penser 2050 » traitera chaque année d’une<br />

problématique d’avenir précise, pour « décoder le<br />

monde de demain ». En dernière année une nouvelle<br />

majeure en économie sociale et solidaire est créée<br />

La période obligatoire à l’international est passée<br />

de 6 à 12 mois. Effectuer 12 mois à l’international est<br />

maintenant un requis diplômant. Ces 12 mois pourront<br />

s’effectuer :<br />

• soit en échange dans une université partenaire du<br />

programme,<br />

• soit en stage dans une entreprise à l’international.<br />

Classement des MBA :<br />

Wharton reprend le lead<br />

Absente comme beaucoup<br />

en 2021 pour cause de<br />

Covid, Wharton reprend<br />

cette année le lead à Harvard<br />

dans le Classement des<br />

MBA du Financial Times.<br />

3 e l’Insead remonte sur le<br />

podium quand HEC sort du<br />

top 10 (-2 places). Première<br />

pour son « international<br />

course experience » ESCP<br />

fait son retour et gagne 20<br />

places par rapport à son<br />

rang moyen sur trois ans.<br />

Hybridation croisée pour KEDGE et l’ISEN<br />

Yncréa Méditerranée<br />

L’ISEN Yncréa Méditerranée et KEDGE<br />

lancent conjointement un Certificat numérique<br />

en Data Science et un double<br />

diplôme MSc Ingénierie d’Affaires à la<br />

rentrée académique <strong>2022</strong>-2023. Ce certificat<br />

sera ouvert à une vingtaine d’étudiants<br />

de KEDGE du campus de Toulon.<br />

Les étudiants seront sélectionnés après<br />

validation d’un test en informatique et<br />

mathématiques et d’un entretien de motivation.<br />

Ce certificat permettra aux étudiants<br />

de KEDGE d’acquérir des com-<br />

pétences dans les technologies utilisées<br />

en Data Science, en Intelligence Artificielle,<br />

en Big Data, en gestion des données<br />

et applications sur le cloud notamment.<br />

Ils pourront ainsi « affirmer leur<br />

rôle d’interface dans les entreprises entre<br />

ingénieurs et commerciaux ».<br />

De leur côté élèves-ingénieurs de<br />

l’ISEN pourront obtenir un double diplôme<br />

Ingénieur ISEN - MSc Ingénieur<br />

d’Affaires.<br />

10


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Un « Dictionnaire inattendu<br />

des Grande écoles »<br />

Pourquoi inattendu ? « Mais parce que nous n’avons<br />

pas voulu faire des entrées par écoles ou par<br />

les grands sujets classiques », répond Philippe<br />

Jamet, actuel directeur de Paris School of Business,<br />

ancien président de la Conférence des Grandes<br />

écoles (CGE) et directeur général de l’Institut Mines<br />

Télécom (IMT). C’est comme cela que ce dictionnaire<br />

propose des entrées comme « Egypte » - pour évoquer<br />

le rôle de l’État au travers de la campagne d’Égypte de<br />

Bonaparte et l’imprégnation internationale des Grande<br />

écoles – « Cosa Nostra » pour parler alumni ou encore<br />

« orpaillage » quand il s’agit d’évoquer le recrutement<br />

des meilleurs profils. Mais des entrées beaucoup<br />

plus classiques sont également développées comme<br />

« ingénieur » ou « uniforme ». « Alors qu’au début de<br />

notre projet nous pensions l’appeler « Dictionnaire<br />

amoureux », nous avons beaucoup tourné autour<br />

de notre concept pour finir sur cet inattendu et des<br />

entrées transversales », se souvient Philippe Jamet.<br />

Il aura en tout fallu six mois de travail aux deux auteurs<br />

pour rédiger un ouvrage de près de 750 000 signes<br />

dont ils se sont partagé les entrées tout en se relisant<br />

l’un l’autre. Un ouvrage pour lesquels ils n’avaient pas<br />

d’éditeur au départ. « Les grands éditeurs généralistes<br />

prétendent que les Grandes écoles n’intéressent pas le<br />

grand public. EMS souhaitait justement se diversifier<br />

sur les sujets de société. C’est comme cela que nous<br />

avons trouvé un accord », confie Philippe Jamet.<br />

Si le ton est volontiers bienveillant, quelques piques<br />

sur l’enseignement supérieur parcourent un ouvrage<br />

dont les auteurs sont des experts reconnus (Bernard<br />

Belletante a successivement été directeur d’Euromed<br />

puis de Kedge et de emlyon et a également présidé le<br />

Chapitre des écoles de management de la Conférence<br />

des Grandes écoles). Des experts qui veulent avant<br />

tout sauvegarder un système qu’ils jugent efficace et<br />

ne doit pas être absorbé par les universités. « Nous ne<br />

devons pas faire la même erreur que dans l’agriculture,<br />

en passant à de la monoculture qui nous a fait perdre<br />

de la diversité, ou dans l’industrie dans laquelle les<br />

grands groupes une fois constitués n’ont eu de cesse de<br />

produire à l’étranger. Il ne faut pas de modèle unique »,<br />

s’exclame Philippe Jamet qui rappelle que « les Grandes<br />

écoles sont un peu des PME ou des ETI, des organismes<br />

agiles » dont il doute qu’elles « puissent transformer<br />

les universités de l’intérieur » comme certains le soutiennent<br />

: « Le risque d’un rapprochement est que les<br />

Grande écoles ne transforment pas les universités<br />

tout en perdant leur agilité ».<br />

S’il n’y a pas d’entrée spécifiquement dédiée aux classes<br />

préparatoires, Philippe Jamet n’en reste pas moins<br />

un grand défenseur : « On ne les défend pas bien en<br />

laissant s’installer l’idée qu’elles préparent uniquement<br />

à un concours. On oublie le rôle qu’elles jouent dans<br />

la formation de compétences. C’est le seul système<br />

propédeutique qu’il nous reste ». Et d’insister : « Elles<br />

permettent à leurs élèves de s’approprier un socle de<br />

soft skills qui leur seront utiles tout au long de leur vie ».<br />

Quant à la question du débat sur la gratuité des études<br />

engagé par Emmanuel Macron, Philippe Jamet estime<br />

que la vraie question c’est « l’accessibilité des études,<br />

comment faire entrer l’étudiant dans le système pour<br />

l’y faire réussir ». Et d’asséner : « Chez PSB je reçois<br />

des étudiants qui n’ont pas les moyens d’échouer dans<br />

un système gratuit ! »<br />

« Dictionnaire inattendu des Grande écoles », Bernard<br />

Belletante et Philippe Jamet, éditions EMS, version<br />

papier : 25 €, e-book : 19,99 €<br />

PSL meilleure « jeune université » au monde<br />

PSL s’impose comme la meilleure « jeune<br />

université » au monde dans le Young University<br />

Rankings <strong>2022</strong> du Times Higher<br />

Education. Évidemment il est peut-être<br />

un peu abusif de placer dans la catégorie<br />

« jeune université » un établissement dont<br />

la création d’un des membres – Mines de<br />

Paris – remonte à avant la Révolution française<br />

mais ce serait dommage de bouder<br />

notre plaisir de voir, pour la première fois,<br />

une université française à la tête d’un classement<br />

international.<br />

Suivent deux universités créées en 1991 :<br />

la Nanyang Technological University de<br />

Singapour et la Hong Kong University of<br />

Science and Technology. Premier EPE à<br />

avoir été créé, l’Institut polytechnique de<br />

Paris se classe quant à lui 6 e , Sorbonne<br />

Université 12 e , l’université de Paris et Paris-Saclay<br />

18 e ex-aequo.<br />

11<br />

© EM Normandie


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS PUBLI INFORMATION<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

L’heure du Choice !<br />

Il y a un an ESCP a lancé le média The Choice, à destination des décideurs<br />

économiques et des influenceurs. L’ambition : valoriser l’expertise et l’engagement<br />

de la communauté ESCP sur les enjeux qui impactent la société.<br />

Plus de 200 articles, plus de 150 membres de la communauté ESCP mobilisés,<br />

plus de 25 nationalités représentées, et un an après .... Le média The Choice<br />

de ESCP fête son premier anniversaire !<br />

POURQUOI THE CHOICE, LE CHOIX ?<br />

Dimitri Champollion: “La capacité à faire un choix définit<br />

le purpose-driven leader, selon le terme difficilement<br />

traduisible qui désigne un dirigeant dont les actions<br />

sont dirigées vers un but souvent collectif.<br />

Analyser et comprendre son environnement, connaître<br />

ses propres atouts, déterminer son système de valeurs<br />

et être en mesure de mettre en œuvre les décisions<br />

prises. Cette grille est valable pour les choix stratégiques,<br />

technologiques, mais aussi moraux, environnementaux,<br />

éthiques…<br />

COMMENT ESCP TRANSMET-ELLE CETTE VISION ?<br />

Notre mission, affichée partout dans nos campus,<br />

est d’éduquer et inspirer les dirigeants et entrepreneurs<br />

de demain, guidés par nos valeurs européennes.<br />

Pour illustrer notre mission, The Choice est un média<br />

qui traite des grands enjeux contemporains, à destination<br />

des décideurs, en diffusant la recherche de nos<br />

professeurs, l’expertise de nos Alumni partout dans<br />

le monde ainsi que l’engagement et les réalisations de<br />

nos étudiants.<br />

Dimitri Champollion, Directeur<br />

de la communication et de la marque<br />

12


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS PUBLI INFORMATION<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

CONCRÈTEMENT, QUE TROUVE-T-ON DANS THE<br />

CHOICE ?<br />

Nous travaillons avec les équipes de communication,<br />

de valorisation des chaires et de la recherche, avec<br />

les campus. Chaque mois nous abordons un sujet avec<br />

un rédacteur en chef invité (professeur, Alumnus…).<br />

Avec les professeurs, les étudiants, les anciens<br />

élèves, et des experts extérieurs, nous avons abordé<br />

un large éventail de sujets essentiels pour la communauté<br />

des affaires : le développement durable,<br />

l’inclusion et la diversité, le bien-être, la technologie<br />

au service du bien, l’apprentissage continu, pour<br />

n’en citer que quelques-uns.<br />

Sur la forme, nous avons beaucoup de formats car<br />

nous visons un public de décideurs qui veulent découvrir<br />

de nouvelles idées en mettant à profit leurs<br />

rares temps morts : articles, interviews, infographies,<br />

revues de livres, chiffres-clés sélectionnés et expliqués<br />

par les professeurs. Nous avons aussi lancé les<br />

podcasts qui sont le format montant et autorisent,<br />

contrairement aux vidéos qui sont finalement peu<br />

regardées au-delà d’une minute, des formats un<br />

peu plus longs permettant d’approfondir les sujets.”<br />

THE CHOICE IS YOURS!<br />

Les articles ci-dessous mettent en lumière une poignée<br />

de thèmes qui ont intéressé nos lecteurs l’année<br />

dernière, soulignant les changements majeurs qui<br />

secouent le monde de l’entreprise et ce que signifie<br />

être un manager aujourd’hui.<br />

• Pour démontrer leur engagement, les travailleurs<br />

à distance se rendent plus disponibles que jamais<br />

Plus que jamais, les praticiens du monde des affaires<br />

recherchent des avis d’experts sur la manière de gérer<br />

la nouvelle normalité, en particulier l’impact du travail<br />

à distance sur leurs équipes. Et les recherches de<br />

notre faculté sont la source crédible qu’ils recherchent.<br />

Grâce à leurs recherches, publiées pour la première<br />

fois sur The Conversation, le professeur Emmanuelle<br />

Léon et ses associés de recherche ont montré que,<br />

dans un contexte où la présence physique est encore<br />

très appréciée, les employés étendent leurs heures de<br />

travail pour gagner la confiance de leurs supérieurs.<br />

Est-il vrai que les télétravailleurs travaillent tout autant<br />

(sinon plus) ?<br />

• Comment échouer rapidement et apprendre de<br />

ses erreurs<br />

Selon les mots de l’alter ego de Miley Cyrus, Hannah<br />

Montana, «Everybody makes mistakes, Everybody<br />

has those days». Et c’est tout aussi vrai dans le monde<br />

professionnel, même si nous avons moins tendance à<br />

en entendre parler. Comme il s’agit encore d’un tabou<br />

sur de nombreux lieux de travail, nos lecteurs étaient<br />

impatients de lire les réflexions honnêtes de Ben Voyer<br />

et Christoph Seckler, professeurs à ESCP, sur la façon<br />

dont l’échec pourrait, s’il n’est pas franchement positif,<br />

être au moins nécessaire pour que nous réussissions<br />

vraiment. Redonnons de la valeur aux erreurs.<br />

• 4 avantages de la diversité culturelle sur le lieu<br />

de travail<br />

Il n’y a pas de doute, la mondialisation est une tendance<br />

mondiale et irréversible. Ses effets profonds sur les<br />

entreprises et les activités transfrontalières dans le<br />

monde entier ont rendu le concept de diversité culturelle<br />

très pertinent pour les managers et les organisations.<br />

Comprendre et embrasser la diversité est la première<br />

étape pour devenir compétitif à l’échelle internationale.<br />

Mais les chefs d’entreprise veulent toujours savoir ce<br />

que cela apporte à l’entreprise dans son ensemble.<br />

Marion Festing, professeur de leadership interculturel,<br />

sait ce qui vous aidera à convaincre vos équipes et vos<br />

supérieurs de donner la priorité à la diversité.<br />

13


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS PUBLI INFORMATION MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

pour les entreprises - et leurs investisseurs - à faire<br />

d’énormes investissements concernant les gains et les<br />

avantages sociaux et environnementaux. Mais que se<br />

passerait-il si la technologie, l’IA en particulier, pouvait<br />

permettre aux investisseurs d’intégrer plus facilement<br />

l’ESG dans leurs stratégies d’investissement ?<br />

• L’IA pour de bon : Le cas de l’utilisation de la technologie<br />

pour l’ESG<br />

Les progrès de la recherche de la durabilité par la<br />

technologie restent lents. Selon le professeur affilié en<br />

entrepreneuriat Terence Tse, l’une des raisons de cette<br />

lenteur est qu’il reste un manque d’incitation économique<br />

• Du pitch au pitching : que peuvent apprendre les<br />

entrepreneurs des athlètes ?<br />

Si vous avez évité les médias sociaux et la télévision cet<br />

été, vous avez peut-être manqué les Jeux olympiques<br />

d’été 2020, à la fois étranges et captivants, qui se sont<br />

déroulés à Tokyo cette année et les impressionnantes<br />

prouesses athlétiques. Avec le sport à l’esprit, Sophia<br />

Braun, doctorante en entrepreneuriat, a posé la question<br />

suivante : que peuvent apprendre les entrepreneurs<br />

des athlètes ? Et il semble que nos lecteurs se soient<br />

posé la même question.<br />

Her Voice, 1 er podcast réalisé par ESCP<br />

Her Voice est le premier podcast produit<br />

par The Choice, le média de ESCP Business<br />

School à destination des décideurs<br />

économiques et des influenceurs.<br />

Her Voice donne la parole aux expertes<br />

qui sont encore peu visibles dans les<br />

médias, les journalistes restant davantage<br />

enclins à spontanément contacter des<br />

experts masculins. Mais à ESCP, nous<br />

savons que les femmes expertes sont<br />

nombreuses, notamment au sein de notre<br />

communauté, et nous voulons les entendre!<br />

Les femmes que nous avons interviewées<br />

exercent dans des domaines divers et variés,<br />

allant de bioluminescence, à l’intelligence<br />

artificielle, en passant par les cryptomonnaies<br />

et l’agriculture durable. Parmi<br />

elles, nous avons eu le plaisir d’échanger<br />

avec plusieurs diplômées de ESCP, une<br />

professeure en management ainsi qu’une<br />

scientifique numéricienne et entrepreneuse<br />

française de renommée internationale.<br />

Her Voice est disponible sur The Choice,<br />

ainsi que sur les principales plateformes de<br />

streaming Spotify, Amazon Music, Apple<br />

Podcast, Soundcloud, Deezer et YouTube.<br />

Une deuxième saison est en production.<br />

Afin que le podcast puisse toucher<br />

une audience aussi large que<br />

possible, nous avons choisi de le<br />

produire en langue anglaise.<br />

14


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

L’institut Montaigne dresse le<br />

portrait d’une « jeunesse plurielle »<br />

L’Institut Montaigne publie une grande étude<br />

inédite, Une jeunesse plurielle - Enquête auprès<br />

des 18-24 ans, qui dresse un « portrait de<br />

référence » de la jeunesse en <strong>2022</strong>. Pilotée par<br />

Olivier Galland, sociologue spécialiste de la jeunesse<br />

et directeur de recherche émérite au CNRS, et Marc<br />

Lazar, professeur d’histoire et de sociologie politique<br />

à Sciences Po, elle a été réalisée par Harris Interactive<br />

au mois de septembre 2021 auprès de plus de 8 000<br />

jeunes dont 4 profils se détachent :<br />

• les démocrates protestataires (39 %), des jeunes<br />

diplômés universitaires et étudiants, issus de familles<br />

favorisées à haut capital culturel qui entretiennent un<br />

rapport plus positif avec l’école et ressentent de très<br />

faibles difficultés matérielles. Ils sont davantage intéressés<br />

que les autres par les questions sociétales. Ils<br />

sont optimistes sur l’évolution de la société française.<br />

S’ils ne « se contentent plus de l’exercice du droit de<br />

vote pour peser sur la destinée de leur pays et peuvent<br />

manifester ou relayer leurs opinions sur les réseaux<br />

sociaux, ils rejettent pour autant la violence politique en<br />

restant attachés au modèle démocratique représentatif<br />

». 91 % de ces jeunes considèrent le vote « utile » ;<br />

• les désengagés (26 %), des jeunes qui sont en<br />

retrait sur toutes les questions sociétales et politiques.<br />

Ils représentent l’antithèse des « démocrates<br />

protestataires ». Leur principale caractéristique est de<br />

ne pas exprimer d’opinion politique : 63 % d’entre eux<br />

n’indiquent aucune proximité avec un parti et 47 % ne<br />

se positionnent pas sur l’axe gauche-droite ;<br />

• les révoltés (22 %), des jeunes qui sont davantage<br />

que les autres en détresse psychologique (38 % des<br />

jeunes « révoltés » sont dans ce cas contre 27 % pour<br />

l’ensemble des jeunes) et en situation matérielle difficile<br />

(39 % d’entre eux disent y arriver difficilement ou en<br />

contractant des dettes (26 % pour l’ensemble). Ils sont<br />

« favorables à un changement radical, de nature révolutionnaire,<br />

de la société, et prêts à justifier la violence<br />

politique pour y parvenir ». Ils sont 54 % à approuver<br />

les manifestations d’opposition aux mesures sanitaires<br />

prises par le gouvernement durant les premières<br />

vagues de la crise de la Covid-19 ou y avoir participé<br />

et sont plus souvent hostiles aux contrôles de police<br />

(38 % d’entre eux les trouvent excessifs contre 24 %<br />

pour l’ensemble des jeunes) ; l<br />

• les intégrés transgressifs (13 %), des jeunes qui<br />

« malgré de nombreux signes d’intégration économique<br />

et sociale, semblent gagnés par une culture transgressive<br />

en matière de respect des règles en montrant une<br />

plus grande tolérance à l’égard des comportements<br />

violents et déviants ». Ils se caractérisent également<br />

par un faible attachement à la démocratie, sont parmi<br />

les plus sensibles à la question du racisme structurel<br />

(72 % d’entre eux considèrent que la France est une<br />

société structurellement raciste, contre 46 % de l’ensemble<br />

des jeunes). Sur l’ensemble des comportements<br />

violents, incivils ou déviants ils sont nettement plus<br />

tolérants que les autres jeunes.<br />

© ESC Clermont BS<br />

Les 16-25 ans<br />

abandonnent Facebook<br />

pour TikTok<br />

Diplomeo et BDM (Groupe<br />

HelloWork) dévoilent pour<br />

la 5 e année consécutive leur<br />

enquête au sujet des pratiques<br />

des jeunes Français sur<br />

les réseaux sociaux. « En<br />

ce début d’année <strong>2022</strong>,<br />

Facebook, ancienne star<br />

des réseaux sociaux a été<br />

finalement détrônée par<br />

TikTok, le réseau tendance<br />

de l’année 2020. Instagram<br />

reste favori, Twitter s’impose<br />

d’année résume année et<br />

LinkedIn est de plus en plus<br />

sollicité par les plus jeunes »,<br />

résume Jérémy Plasseraud,<br />

directeur commercial de la<br />

Edtech chez HelloWork.<br />

Ouverture sociale : la CGE publie un livre blanc<br />

La Conférence des Grandes écoles (CGE)<br />

publie un nouveau Livre blanc consacré<br />

à l’Ouverture sociale et territoriale des<br />

Grandes écoles. « Il reste évidemment<br />

du chemin à parcourir pour atteindre<br />

une égalité des chances et une ouverture<br />

sociale idéales dans les Grandes<br />

écoles, notamment les plus sélectives »,<br />

admet Laurent Champaney. Riche de<br />

plus de 120 fiches sur les actions menées<br />

par ses écoles membres, de plus de<br />

70 pages d’analyses, de réflexion d’un<br />

benchmarking des pratiques opérées au<br />

niveau mondial, ce livre blanc couvre<br />

près de vingt ans d’actions et de réflexions<br />

continues.<br />

15


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Herbert Castéran<br />

DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’EM STRASBOURG<br />

« Nous souhaitons consolider notre statut d’école<br />

de management référente en Europe »<br />

Reconduit en 2021 à la tête de l’EM<br />

Strasbourg pour un second mandat,<br />

Herbert Castéran vient de présenter<br />

un nouveau plan stratégique pour son<br />

école. Les convictions d’un directeur qui<br />

met le cap sur l’Europe.<br />

Olivier Rollot : Vous venez de présenter<br />

le plan stratégique <strong>2022</strong>-2027 de l’EM<br />

Strasbourg. En une phrase c’est « cap sur<br />

l’Europe » ?<br />

Herbert Castéran : C’est effectivement au cœur de<br />

notre plan stratégique <strong>2022</strong>-2027 ; Nous souhaitons<br />

consolider notre statut d’école de management référente<br />

en Europe. À la rentrée <strong>2022</strong>, si le Covid permet<br />

la construction, nous ouvrirons ainsi notre premier<br />

campus européen en Allemagne. Ce sera à Kehl, une<br />

ville limitrophe de Strasbourg à laquelle on accède par<br />

un pont sur le Rhin. Sur 800 m 2 nous y hébergerons<br />

notre Cross- Border Management Institute (COMMIT),<br />

l’institut franco-allemand de management que nous<br />

avons créé, avec des masters, des programmes germanophones<br />

et d’Executive Education. Ce campus à<br />

Kehl va rendre visible notre politique de compétence<br />

linguistique.<br />

O. R : Cela s’inscrit dans le campus européen<br />

Eucor dont fait partie votre université de<br />

tutelle, l’université de Strasbourg ?<br />

H. C : C’est dans la logique d’Eucor mais pour l’heure,<br />

seule l’université de Karlsruhe est concrètement impliquée<br />

dans le COMMIT. En plus d’Eucor, l’université<br />

de Strasbourg est maintenant membre d’un réseau<br />

d’universités européennes plus large, EPICUR.<br />

O. R : Quels autres projets européens<br />

développez-vous ?<br />

H. C : En 2021, un triple diplôme bachelor européen a<br />

été créé. Ce parcours permet à des étudiants de notre<br />

bachelor de bénéficier d’un cursus de trois ans dans<br />

deux établissements européens de renom : HEC Liège<br />

en Belgique et l’Université de Hohenheim en Allemagne.<br />

Les étudiants de notre bachelor international peuvent<br />

passer une année au sein de chaque université partenaire<br />

et obtenir un triple diplôme. Ils peuvent également<br />

opter pour le parcours « affaires internationales » et<br />

obtenir en plus une licence d’économie de l’université de<br />

Strasbourg en suivant quelques cours supplémentaires.<br />

Depuis 2018, nous proposons également à tous nos<br />

étudiants de suivre un module qui chapeaute les initiatives<br />

de l’école sur le terrain de l’international en général et<br />

de l’Europe en particulier : CLUE de l’acronyme résume<br />

la mission avec Crosscultural skills (conférences et<br />

cours de « Management Interculturel »), Language<br />

excellence (accès au Language Learning Center et<br />

plateforme e-learning Go Fluent), Uncommon activities<br />

(visites d’institutions européennes) et European<br />

Leadership (conférence « Enjeux économiques et<br />

sociaux en Europe »).<br />

16<br />

© EM Strasbourg<br />

Synergies avec<br />

l’université<br />

Pour « affirmer sa<br />

singularité », l’EM Strasbourg<br />

entend d’abord d’exploiter<br />

davantage les synergies avec<br />

l’Université en proposant des<br />

parcours de formation à la<br />

carte et des partenariats avec<br />

d’autres composantes pour<br />

accroître l’offre de parcours<br />

double compétences. L’école<br />

entend également « mobiliser<br />

chaque acteur de l’EM<br />

Strasbourg pour devenir un<br />

établissement à impact social<br />

et environnemental positif ».


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

O. R : Le développement de l’EM Strasbourg à<br />

l’international peut-il également se faire hors<br />

d’Europe ?<br />

H. C : Notre objectif est de travailler avec un grand<br />

partenaire sur chaque continent. Nous créerons ainsi<br />

des hubs qui auront vocation à irriguer tout un continent<br />

en hébergeant des formations de l’EM Strasbourg. Nous<br />

nous adresserons ainsi à des étudiants internationaux<br />

qui n’ont pas forcément le souhait de passer deux ou<br />

trois années en France.<br />

En nous appuyant sur la réputation d’excellence de<br />

l’université de Strasbourg, de ses 60 000 étudiants,<br />

nous sommes très bien reconnus dans le monde. Nous<br />

pouvons ainsi par exemple proposer à nos étudiants<br />

de partir suivre un double diplôme dans une université<br />

américaine sans avoir à débourser un euro de plus.<br />

O. R : L’EM Strasbourg va-t-elle encore plus<br />

développer ses synergies avec l’université<br />

de Strasbourg ? Et plus largement sa région ?<br />

H. C : L’EM Strasbourg entend effectivement d’exploiter<br />

davantage les synergies avec l’université pour<br />

hybrider les compétences. Nous proposons ainsi des<br />

parcours de formation à la carte et des partenariats<br />

avec d’autres composantes pour accroître l’offre<br />

de parcours double compétences. Dans le cadre de<br />

notre programme Grande école, les étudiants auront<br />

accès en septembre <strong>2022</strong> à 22 masters en gestion et<br />

économie contre 17 aujourd’hui et 12 double diplômes<br />

(7 aujourd’hui).<br />

Nous travaillons également avec d’autres Grandes écoles<br />

d’ingénieurs, de designers, etc. Je viens d’ailleurs d’être<br />

élu président d’Alsace Tech, une alliance de Grandes<br />

écoles qui confie pour la première fois sa présidence<br />

à un non-ingénieur.<br />

O. R : La qualité de l’expérience étudiante<br />

est également une caractéristique que vous<br />

cultivez<br />

H. C : Nous proposons notamment un excellent ratio<br />

d’étudiants par professeur : 27 alors que la moyenne des<br />

écoles membres de l’AACSB (Association to Advance<br />

Collegiate Schools of Business) est de 33. À travers<br />

des entretiens individuels, des jeux en équipe pour<br />

développer les softs skills, des conseils de professionnels<br />

nous allons proposer un parcours sur-mesure<br />

aux élèves leur permettant de s’épanouir. Une politique<br />

de digitalisation sera également impulsée pour innover<br />

pédagogiquement et accroître l’expérience des étudiants.<br />

Par ailleurs l’EM Strasbourg ouvre son PGE à l’apprentissage.<br />

A partir de la 2 e année 50 étudiants par promotion<br />

pourront bénéficier de ce parcours et ainsi faire leur<br />

PGE avec un contrat d’apprentissage de 2 ans. Les<br />

étudiants auront donc le choix entre deux parcours à<br />

la carte : soit avec une année obligatoire à l’étranger,<br />

soit un autre davantage centré sur l’apprentissage.<br />

O. R : Dans quels axes la recherche se<br />

développe-t-elle au sein de l’EM Strasbourg ?<br />

H. C : Nous développons trois pôles d’excellence : la<br />

prise de décision dans un environnement complexe, la<br />

transformation digitale au sein des entreprises et des<br />

organisations, le management responsable et durable.<br />

Nous travaillons à la question de la dimension sociétale<br />

pour en faire un axe de recherche. C’est d’autant plus<br />

important pour nous que nous faisons partie d’un<br />

territoire qui entend produire un modèle management<br />

responsable.<br />

O. R : La responsabilité sociétale et<br />

environnementale (RSE) est un autre<br />

marqueur fort de l’EM Strasbourg ?<br />

H. C : Nous n’avons, comme d’autres, à faire d’effet<br />

d’affichage sur notre dimension RSE. Elle est depuis<br />

très longtemps essentielle dans notre modèle avec,<br />

à fois des modules spécifiques que suivent tous nos<br />

étudiants, et des certifications. Nous avons atteint<br />

aujourd’hui une dimension d’imprégnation de la RSE<br />

dans tous nos axes. Notre plan stratégique s’appuie<br />

d’ailleurs sur des intangibles culturels qui favorisent<br />

ce type d’émergence. L’école entend ainsi mobiliser<br />

chaque personnel pour devenir un établissement à<br />

impact social et environnemental positif.<br />

O. R : Tout cela ne se retrouve pas forcément<br />

dans les classements de l’école. Vous en<br />

contestez même certains critères.<br />

H. C : Nous sommes vigilants quant aux critères qui<br />

favorisent la taille brute au détriment du résultat. Notre<br />

croissance est volontairement limitée par le souhait de<br />

conserver un fort taux d’encadrement. Or, le volume<br />

de publications dépend forcément du nombre d’ensei-<br />

Individualiser<br />

les parcours<br />

À travers des entretiens<br />

individuels, des jeux en<br />

équipe pour développer<br />

les softs skills, des<br />

conseils professionnels<br />

l’école va proposer un<br />

parcours sur-mesure aux<br />

élèves leur permettant de<br />

s’épanouir. Une politique de<br />

digitalisation sera également<br />

impulsée pour innover<br />

pédagogiquement et accroître<br />

l’expérience des étudiants.<br />

© EM Strasbourg<br />

17


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Réformer le PGE<br />

© EM Strasbourg<br />

En septembre <strong>2022</strong>, la<br />

totalité des parcours mention<br />

« Management » seront<br />

ouverts en double-diplôme<br />

aux étudiants du PGE. Ainsi,<br />

le programme proposera 22<br />

spécialisations en 3 e année,<br />

contre 17 aujourd’hui, et<br />

12 doubles diplômes (7<br />

aujourd’hui). Par ailleurs<br />

l’EM Strasbourg ouvre<br />

son PGE à l’apprentissage.<br />

À partir de la 2 e année 50<br />

étudiants par promotion<br />

pourront bénéficier de<br />

ce parcours et ainsi faire<br />

leur PGE avec un contrat<br />

d’apprentissage de 2 ans.<br />

Les étudiants auront donc le<br />

choix entre deux parcours à<br />

la carte : soit avec une année<br />

obligatoire à l’étranger,<br />

soit un autre davantage<br />

centré sur l’apprentissage.<br />

gnants-chercheurs ! Cette donnée devrait être appréciée<br />

en termes de productivité par enseignant-chercheur.<br />

Le nombre d’alumni devrait quant à lui être ramené<br />

au nombre d’étudiants. Un étudiant pour sept alumni<br />

comme c’est le cas à l’EM Strasbourg c’est autant<br />

d’occasions de contacts que ne peut pas proposer<br />

une école qui a un moins bon ratio. Nous posons la<br />

question : qu’est-ce que les classements entendent<br />

mesurer ? La taille est-elle un élément consubstantiel<br />

de la qualité ? Nous ne le pensons pas. Nous voulons<br />

aujourd’hui instaurer un dialogue avec les classeurs.<br />

O. R : Quelle croissance de l’école prévoit<br />

votre plan stratégique ?<br />

H. C : Aujourd’hui nous recevons 3 400 étudiants dont<br />

2 000 dans le programme Grande école. Dans cinq ans<br />

nous souhaitons en recevoir en tout 4 000 avec une<br />

hausse qui concernera essentiellement notre bachelor et<br />

les masters universitaires. Nous souhaitons également<br />

multiplier par trois le nombre d’étudiants internationaux.<br />

Ils sont aujourd’hui 120 à suivre des diplômes sur notre<br />

campus et nous pensons passer à 360 ou 400.<br />

Cette croissance sera toujours accompagnée d’une<br />

grande ouverture sociale. Chaque année nous allons<br />

offrir en tout un siècle d’études gratuit à nos étudiants.<br />

Entrer dans une Grande école ne doit pas être conditionné<br />

par des critères financiers mais uniquement par les<br />

compétences. Aujourd’hui nous recevons par exemple<br />

30 % de boursiers en PGE. Nous allons également créer<br />

pour <strong>2022</strong>-2023 un statut d’« étudiant aidant » destiné<br />

à soutenir des étudiants qui ont quelqu’un à aider dans<br />

leur environnement.<br />

O. R : Alors que la fermeture de classes<br />

préparatoires économiques et commerciales<br />

générales (ECG) se précise comment l’EM<br />

Strasbourg défend-elle leur modèle ?<br />

H. C : C’est une vraie question. Un chiffre pour l’illustrer<br />

: en 2008 80 % des recrutements post classes<br />

préparatoires avaient lieu dans 19 écoles. En 2014 ce<br />

même pourcentage se réduit à 16 écoles et en <strong>2022</strong> à<br />

13. En 2026 l’essentiel du recrutement se fera-t-il dans<br />

seulement 10 écoles ? Quel devenir ont les classes<br />

préparatoires si leurs débouchés se réduisent ainsi ?<br />

Il faut s’interroger sur la possibilité de réguler les recrutements<br />

des écoles, soit en attirant plus d’élèves en<br />

classes préparatoires, soit en limitant leur croissance.<br />

Un autre chiffre : jusqu’en 2015 il y avait un élève de<br />

classe préparatoire pour sept élèves issus en Grande<br />

Ecole. En 5 ans, le ratio est passé à 1 pour 11 !<br />

C’est d’autant plus dommage aujourd’hui de limiter la<br />

croissance des classes préparatoires qu’elles mènent<br />

à des écoles qui assurent une excellente insertion<br />

professionnelle. Quand vous appartenez à une région<br />

qui ne propose pas de classe préparatoire, y compris<br />

si vous faites partie de la classe moyenne, vous êtes<br />

défavorisé.<br />

Il faudrait vraiment organiser aujourd’hui des assises<br />

entre les classes préparatoires et les Grandes écoles<br />

pour évoquer tous ces sujets.<br />

De nouveaux axes<br />

de recherche<br />

Comment décrypter les<br />

processus de prise de<br />

décision dans un contexte<br />

d’incertitude ? Comment faire<br />

évoluer les organisations vers<br />

un management responsable<br />

et durable ? Comment<br />

assurer la réussite de la<br />

transformation digitale des<br />

organisations ? D’ici à 2027,<br />

l’EM Strasbourg souhaite<br />

encore renforcer son expertise<br />

distinctive dans le domaine<br />

de la prise de décision<br />

dans un environnement<br />

complexe, et développer<br />

de nouveaux projets de<br />

recherche transdisciplinaire.<br />

18


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Un atelier de la Fresque du Climat à Audencia.<br />

Comment enseigner<br />

la transition écologique dans<br />

l’enseignement supérieur ?<br />

La publication du rapport du paléoclimatologue Jean<br />

Jouzel sur comme « Sensibiliser et former aux enjeux<br />

de la Transition écologique et du Développement durable<br />

dans l’Enseignement supérieur » marque une nouvelle<br />

étape dans la stratégie d’enseignement de la transition<br />

écologique dans l’enseignement supérieur.<br />

Les propositions du rapport et l’état des lieux.<br />

© P. Cauneau / Audencia<br />

19


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

L’étude Mobiliser l’enseignement<br />

supérieur pour le climat, menée<br />

par les équipes du think tank spécialisé<br />

dans la transition énergétique<br />

The Shift Project, avait montré en 2019<br />

combien peu établissements d’enseignement<br />

supérieur étaient engagés dans une<br />

démarche d’enseignement de la transition<br />

énergétique (seulement 11 % des 34<br />

établissements auscultés abordaient<br />

les enjeux climat-énergie de manière<br />

obligatoire). En deux ans une vraie prise<br />

de conscience s’est produite. En 2021,<br />

selon une étude menée pour le compte<br />

de la mission Jouzel, si seulement 38 %<br />

des établissements affichent clairement<br />

la problématique de transition écologique<br />

dans leur stratégie, 69 % d’entre<br />

eux proposent au moins une formation<br />

incluant la problématique. « La campagne<br />

présidentielle doit prendre en compte<br />

les transitions socio-écologiques, le<br />

numérique, les dynamiques territoriales<br />

et l’accompagnement de la jeunesse. Les<br />

Grandes écoles se tiendront à disposition<br />

pour fonder un enseignement supérieur<br />

à la hauteur des enjeux écologiques et<br />

sociétaux », promet ainsi le président<br />

de la Conférence des Grandes écoles<br />

(CGE) et directeur des Arts et Métiers,<br />

Laurent Champaney.<br />

UNE APPROCHE<br />

PAR COMPÉTENCES<br />

L’objectif du rapport Jouzel est de « faire<br />

en sorte que chacun dispose des connaissances<br />

et de compétences à même de<br />

lui permettre d’agir pour la transition<br />

écologique en tant que citoyen et en tant<br />

que professionnel ». Tout en « respectant<br />

l’autonomie des établissements et la<br />

liberté académique », le rapport Jouzel<br />

préconise que la transition écologique<br />

fasse « partie intégrante des parcours<br />

de formation ». Dans ce cadre le groupe<br />

de travail recommande de prioriser le<br />

niveau bac+2. L’objectif est de « former<br />

100 % des étudiants de niveau bac+2,<br />

quel que soit leur cursus, d’ici 5 ans ».<br />

Pour ce faire, la commission estime que<br />

Un classement fondé<br />

sur les ODD<br />

En 2020 le Times Higher<br />

Education a lancé son<br />

premier Impact Ranking<br />

fondé sur les ODD (objectifs<br />

de développement durables)<br />

de l’ONU. Transition<br />

environnementale,<br />

responsabilité sociétale des<br />

entreprises, contribution à<br />

la paix dans le monde, 17<br />

indicateurs y sont pris en<br />

compte et ont célébré l’action<br />

des universités australiennes<br />

et néo-zélandaises (quatre<br />

premières places en 2020,<br />

trois dans les quatre<br />

premières en 2021 avec la<br />

première place de l’université<br />

de Manchester) quand en<br />

France il faut remonter<br />

au-delà de la 100 e place<br />

pour trouver les premiers<br />

établissements classés (IMT<br />

Atlantiques, Université<br />

de Nantes et PSL).<br />

ESCP a été parmi les premières écoles<br />

à organiser des Fresques du Climat<br />

© ESCP BS<br />

20


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

la « voie la plus adaptée est de généraliser<br />

l’approche par les compétences ».<br />

Un cadre européen de reconnaissance<br />

des compétences liées à la transition<br />

écologique est d’ailleurs également en<br />

cours de réalisation. En s’appuyant sur<br />

son approche, chaque filière pourrait<br />

donc élaborer son propre socle sur la<br />

base de cinq grandes compétences :<br />

considérer une approche systémique<br />

: étudiants et enseignants doivent<br />

être en capacité de construire une vision<br />

holistique du monde de demain, pour<br />

mieux appréhender la complexité des<br />

transitions. L’analyse partielle de certaines<br />

dimensions ne doit pas omettre<br />

une appréhension plus intégrative des<br />

transitions, favorisant l’articulation entre<br />

le local et le global ;<br />

développer une analyse prospective :<br />

l’analyse des systèmes techniques et<br />

des co-systèmes implique des histoires<br />

et des échelles temporelles variées qu’il<br />

convient d’articuler pour inscrire des<br />

actions de court terme, dans un contexte<br />

d’incertitudes, en cohérence avec des<br />

enjeux de long terme ;<br />

co-construire des diagnostics et des solutions<br />

: pour que la transition écologique<br />

soit effective, il convient d’en établir les<br />

objectifs et les modalités dans un échange<br />

avec les parties prenantes, permettant<br />

à la fois d’en articuler harmonieusement<br />

les différentes dimensions (techniques,<br />

organisationnelles, territoriales, culturelles,<br />

juridiques, économiques…) et<br />

d’en permettre l’appropriation par tous ;<br />

mettre en œuvre des transitions : il s’agit<br />

d’écrire les récits rendant les transitions<br />

réalistes et d’en définir les étapes, les<br />

indicateurs, les modes de gouvernance<br />

démocratique ;<br />

agir en responsabilité : la capacité à agir<br />

en citoyen et professionnel responsable<br />

est la clé de voûte de ce référentiel. Cette<br />

dernière compétence implique d’analyser,<br />

d’expliciter et de confronter son propre<br />

système de valeur avec ce que le droit<br />

définit, avec celui que l’entité au nom<br />

de laquelle on agit propose, et avec le<br />

système de valeurs des autres.<br />

COMMENT ÉVALUER<br />

L’ENGAGEMENT DANS LA<br />

TRANSITION ?<br />

Si cet enseignement pourrait déjà devenir<br />

un critère d’évaluation dans les<br />

propositions de projet ou de stage, il<br />

semble « prématuré » à la mission de<br />

développer un processus de labellisation<br />

avant le déploiement des référentiels<br />

de connaissances et de compétences.<br />

Dès <strong>2022</strong>, une formation aux enjeux de<br />

la transition écologique à destination<br />

des évaluateurs, ainsi qu’aux outils et<br />

initiatives des établissements, favorisera<br />

la prise en compte de cette nouvelle<br />

mission dans les évaluations. D’ores<br />

et déjà le groupe de travail appelle les<br />

établissements à « utiliser le référentiel<br />

DD&RS comme un outil d’auto-évaluation,<br />

et à envisager la labellisation DD&RS ».<br />

C’est important : pour « encourager la<br />

dynamique d’ensemble », les experts<br />

insistent pour que le temps consacré à<br />

faire évoluer les enseignements, les maquettes<br />

et les offres de formation soient<br />

« décompté des activités dans la charge<br />

de service statutaire ».<br />

De son côté la CGE demande à la fois que<br />

soient « alignés les critères d’évaluation<br />

concernant le développement durable<br />

et la responsabilité sociétale dans les<br />

référentiels du Hcéres, de la Cti et de<br />

la Cefdg » et qu’un travail soit « conduit<br />

avec les branches professionnelles et<br />

les Opco pour que les compétences<br />

liées au DD&RS soient reconnues par<br />

France Compétences » et que la transition<br />

écologique, à l’instar du handicap, soit<br />

« inscrite comme un critère d’évaluation<br />

de la qualité des référentiels inscrits au<br />

RNCP (Répertoire national des certifications<br />

professionnelles) ».<br />

Un sujet qui tient également à cœur à<br />

la présidente de la Cefdg (Commission<br />

d›évaluation des formations et diplômes<br />

de gestion), Mathilde Gollety : « Le rôle<br />

des formations en management est de<br />

former les leaders de demain au monde<br />

qui nous attend. Il faut donc les former aux<br />

transitions environnementales et sociétales.<br />

Beaucoup de choses ont déjà été<br />

En France les écoles les<br />

plus engagées sont…<br />

On l’attendait avec<br />

impatience. Les Echos<br />

Start ont publié en 2021,<br />

en partenariat avec<br />

ChangeNOW, le premier<br />

classement Premier<br />

classement des grandes<br />

écoles les plus engagées<br />

dans la transition écologique<br />

et sociétale. Côté écoles<br />

de management ESCP<br />

l’emporte devant Montpellier<br />

BS, emlyon, Audencia et<br />

Grenoble EM. Côté écoles<br />

d’ingénieurs Centrale Nantes<br />

est classée première devant<br />

l’Engees Strasbourg et, c’est<br />

une vraie surprise, l’Isae<br />

SupAero. Suivent, et c’est<br />

tout sauf une surprise, Mines<br />

Paris et Toulouse INP-Ensat.<br />

21


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

États-Unis : mettre<br />

la pression sur<br />

les universités<br />

© P. Cauneau / Audencia<br />

Comme ici à Audencia les Fresques du Climat sont<br />

l’occasion de discussions entre les étudiants et un animateur<br />

La pression peut également<br />

être le fait des étudiants et<br />

concerner les investissements<br />

des universités ; Comme le<br />

raconte Courrier International<br />

Cinq grandes universités<br />

américaines assignées en<br />

justice par leurs étudiants au<br />

nom du climat. Un groupe<br />

d’étudiants porte plainte<br />

contre les présidents de Yale,<br />

du MIT, de Princeton, de<br />

Stanford et de Vanderbilt<br />

pour qu’ils cessent d’investir<br />

dans les industries fossiles.<br />

réalisées au sein des écoles, mais aussi<br />

au sein des universités d’ailleurs, pour<br />

répondre aux injonctions des étudiants ».<br />

Mais il faut aussi pouvoir dispenser des<br />

formations solides académiquement.<br />

Comment définir cette qualité dans un<br />

référentiel ? : « La liberté académique<br />

est importante et nous n’imposerons<br />

rien, pas plus de passer par un atelier<br />

Fresque du Climat que de suivre tel ou tel<br />

enseignement. La dynamique des écoles<br />

sur ce sujet est formidable. Maintenant<br />

il faut que toutes s’engagent dans cette<br />

voie ».<br />

ENSEIGNER AUTREMENT<br />

Au-delà de l’enseignement des fondamentaux<br />

c’est tout l’enseignement<br />

supérieur qui doit apprendre à travailler<br />

différemment. « Avec la nécessaire<br />

transition environnementale, l’enseignement<br />

supérieur fait face à un mur<br />

qu’il va falloir surmonter. Il nous faut<br />

changer de paradigme dans l’approche<br />

de nos étudiants qui vont devoir inventer<br />

les solutions que nous n’avons pas su<br />

inventer », assure François Germinet, le<br />

président de CY Cergy Paris Université.<br />

Cela implique selon lui un positionnement<br />

plus humble face à un étudiant qui « doit<br />

inventer un avenir collectif et durable » :<br />

« Dans l’enseignement supérieur le rapport<br />

à soi reste un tabou. Les professeurs<br />

considèrent pour la plupart que<br />

ce n’est ni à eux, ni à l’institution d’aider<br />

les étudiants à s’interroger sur ce qu’ils<br />

sont et là où ils vont. Mais il n’y aura pas<br />

d’accompagnement à la transition si on<br />

ne travaille pas le rapport de soi à soi,<br />

de soi à l’autre et de soi à la planète ».<br />

Président de la commission Développement<br />

durable et Responsabilité sociétale<br />

(DD&RS) de la Conférence des Grandes<br />

Écoles, le directeur de l’Institut Mines<br />

Télécom BS, Denis Guibard, rappelle<br />

quant à lui que « notre mission est de<br />

préparer les élèves ingénieurs ou managers<br />

à être des acteurs de la nécessaire<br />

transformation des entreprises, à avoir<br />

conscience des enjeux environnementaux<br />

et sociétaux de leurs décisions pour<br />

pouvoir interpeller les experts. Parfois<br />

ils ne voient pas toute la problématique<br />

et nous devons ouvrir le spectre de la<br />

complexité ».<br />

Créatrice du test dédié à la « construction<br />

d’un monde durable », le Sulitest, Kedge<br />

entend ainsi dispenser un socle commun<br />

de connaissances à l’ensemble de ses<br />

étudiants - ses 4 500 nouveaux étudiants<br />

suivent ainsi la Fresque du Climat et<br />

passent le Sulitest - d’autre part, former<br />

des spécialistes : dès 2016, elle a lancé<br />

le premier MSc en Sustainable Finance<br />

et, à la rentrée <strong>2022</strong>, proposera un nouveau<br />

MSc Business Transformation for<br />

Sustainibility. « Dans notre Programme<br />

Grande Ecole, cinq cours fondamentaux<br />

sont dédiés aux enjeux de la transition<br />

sociale et écologique et des électifs y<br />

22


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

sont également dédiés. Nos enseignants<br />

chercheurs sont au cœur de la démarche<br />

avec notre centre de recherche en sustainability<br />

parmi les plus importants en<br />

Europe », insiste le directeur de Kedge,<br />

Alexandre de Navailles, qui se félicite<br />

que ses étudiants soient « particulièrement<br />

mobilisés sur tous ces sujets.<br />

Aujourd’hui 78 % des projets associatifs<br />

qu’ils proposent intègrent des critères<br />

DD&RS. Et même 50 % pour les projets<br />

de start up ».<br />

LES ÉCOLES D’INGÉNIEURS<br />

EN POINTE<br />

Parce que leurs étudiants se sentent<br />

une responsabilité personnelle dans<br />

la définition d’un avenir soutenable, les<br />

écoles d’ingénieurs sont en points sur<br />

les sujets de transition environnementale.<br />

Alors qu’on attend pour le 10 mars<br />

prochain la publication intermédiaire du<br />

rapport du groupe Insa et du Shift Project<br />

sur Former l’ingénieur du XXI e siècle,<br />

l’École polytechnique vient de publier<br />

son Plan climat pour « affirmer son<br />

ambition d’intégrer pleinement la transition<br />

écologique dans l’ensemble de ses<br />

missions de formation, de recherche,<br />

d’innovation et dans le fonctionnement<br />

de son campus ». « Aujourd’hui le futur<br />

de l’école se situe clairement dans le<br />

développement durable. Pour cela, nous<br />

avons fixé 10 objectifs réalisables à 5<br />

ans pour transformer en profondeur les<br />

comportements et contribuer à l’avènement<br />

d’une prospérité responsable et<br />

soutenable », explique Eric Labaye, le<br />

président de l’Ecole polytechnique, qui<br />

entend notamment multiplier par trois les<br />

heures de formation aux enjeux de durabilité<br />

dans tous les cours et former tous<br />

nos personnels à appliquer la transition<br />

écologique au quotidien : « Nous allons<br />

créer un centre de recherche qui va<br />

impliquer tous les projets et créer ainsi<br />

un campus démonstrateur de la transition<br />

en nous assurant que 50 % de nos<br />

commandes sont effectuées sous des<br />

critères d’achats responsables. Notre<br />

responsabilité c’est aussi de réduire de<br />

Excelia (ici son hall central) fait<br />

partie des écoles les plus engagées<br />

dans les questions de RSE<br />

20 % nos émissions dans les cinq années<br />

à venir. Pour cela nous allons passer à<br />

une mobilité douce sur nos campus ».<br />

Les Arts et Métiers viennent quant à<br />

eux de signer l’Accord de Grenoble qui<br />

engage les établissements d’enseignement<br />

supérieur à prendre des mesures<br />

pour intégrer les enjeux de la transition<br />

socio-écologique dans leurs programmes<br />

et sur leurs campus. Dans ce cadre<br />

Arts et Métiers s’engage notamment à<br />

« former 100 % des étudiants aux enjeux<br />

de la transition socio-écologique » à<br />

« adapter les enseignements de chaque<br />

cursus et spécialité à ces enjeux, dans<br />

un délai de 5 ans » et à « augmenter la<br />

participation de la recherche dans l’effort<br />

de transition ».<br />

Ces défis sociétaux et environnementaux<br />

sont également au cœur de la<br />

nouvelle stratégie menée par Grenoble<br />

INP. Comme l’explique son administrateur<br />

général, Pierre Benech, il s’agit de<br />

« proposer des projets inspirants pour<br />

les jeunes ». Grenoble INP a créé à cet<br />

effet une vice-présidence développement<br />

durable et responsabilité sociétale et<br />

entend mettre sa recherche en ordre<br />

de marche en ce sens : « Nous menons<br />

notamment des recherches importantes<br />

sur le développement des réseaux électriques.<br />

Le défi des années à venir, c’est<br />

de faire en sorte que les sources d’énergie<br />

Positive Impact<br />

Ranking et DD&RS<br />

Les Nations Unies remettent<br />

un label aux seules business<br />

schools : le Positive Impact<br />

Ranking. Si aucune<br />

école française n’atteint<br />

le niveau d’excellence,<br />

« niveau 5 » dont ne font<br />

partie que quatre écoles,<br />

Audencia, GEM et l’Iéseg<br />

sont notées dans le niveau<br />

4, qui compte 24 business<br />

schools dans le monde.<br />

En France la labellisation<br />

DD&RS est accordée<br />

aujourd’hui 37 établissements<br />

d’enseignement supérieur<br />

en France pour « valoriser<br />

nationalement et<br />

internationalement au<br />

meilleur rapport bénéfices/<br />

coûts les démarches de<br />

développement durable<br />

et de responsabilité<br />

sociétale des établissements<br />

d’enseignement supérieur<br />

et de recherche ».<br />

© Excelia BS<br />

23


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

contrôlables (hydraulique, charbon…)<br />

puissent suppléer à l’intermittence de la<br />

production des énergies renouvelables,<br />

sans pour autant provoquer de blackout<br />

susceptibles de conduire à des drames ».<br />

Début septembre 2021 l’ensemble des<br />

écoles de l’Institut Mines Télécom (IMT)<br />

ont de leur côté signé une Charte pour<br />

une transition écologique et sociale<br />

pour notamment « contribuer au soutien<br />

économique à long terme des territoires<br />

en accompagnant la transformation des<br />

modèles de production de l’industrie vers<br />

des modèles d’écologie industrielle ».<br />

Deux écoles de l’Institut Mines-Télécom,<br />

IMT Atlantique et IMT Nord Europe, font<br />

déjà partie du réseau engagé Campus<br />

Responsables.<br />

LES ÉCOLES DE MANAGEMENT<br />

NE SONT PAS EN RESTE<br />

Forcément moins impliquées académiquement,<br />

les écoles de management<br />

n’en prennent pas moins leur part. Avec<br />

la création d’une école dédiée à la transition,<br />

Gaïa, Audencia entend ainsi « se<br />

positionner comme un accélérateur des<br />

changements vertueux de la société »<br />

identifiée comme une « école meilleure<br />

pour le monde », explique son directeur<br />

général, Christophe Germain. L’école Gaïa<br />

va délivrer ses premiers cours dans<br />

tous les programmes de l’école. « Nous<br />

voulons surtout que les enseignements<br />

que nous délivrons soient reliés aux<br />

métiers de demain et aux demandes des<br />

entreprises qui ne sont pas couvertes<br />

par les formations actuelles », explique<br />

le responsable de l‘école, José Maillet,<br />

qui insiste : « Ce sont bien des cours<br />

de management en rapport avec les<br />

transitions ».<br />

Classée en tête du « Premier classement<br />

des grandes écoles les plus engagées<br />

dans la transition écologique<br />

et sociétale » qu’ont publié Les Echos<br />

Start en octobre 2021, ESCP revendique<br />

également un rôle tout particulier. « La<br />

soutenabilité est un sujet depuis 1992<br />

et la création d’un premier cours avant<br />

toutes les autres écoles. Aujourd’hui c’est<br />

tout un département en soutenabilité qui<br />

a été créé autour de ces questions avec<br />

quinze professeurs. Mais il s’agit aussi<br />

d’influencer tous les autres départements<br />

académiques », insiste Valérie Moatti,<br />

la doyenne de ESCP. « Nous sommes<br />

passés d’un stade d’innovations locales<br />

avec des spécialisations à une volonté de<br />

dispenser des cours à tous avec un socle<br />

commun », confirme Aurélien Acquier, le<br />

doyen associé à la transition durable. Un<br />

« ESCP Transition Network » réunit par<br />

ailleurs professeurs, alumni, en appui<br />

des projets de l’école.<br />

Pour réfléchir à comment peuvent évoluer<br />

les modèles économiques, un partenariat<br />

ClimatSup Business a été noué entre Audencia<br />

avec The Shift Project. Il s’agit de<br />

« définir un socle de connaissances et de<br />

compétences souhaitables en tronc commun<br />

(à travers une veille à l’international<br />

et l’apport d’experts internes et externes)<br />

puis de le décliner et l’approfondir par<br />

département, tout en acculturant les<br />

parties prenantes à travers un cycle<br />

de conférences d’intérêt général et la<br />

diffusion de ressources pédagogiques ».<br />

Et justement, dix-huit mois après le lancement<br />

de Together, sa feuille de route de<br />

la transition sociale et environnementale,<br />

l’ESSEC a fait le bilan des actions mises<br />

en place et des engagements menés<br />

à bien. Comme prévu 100 % de ses<br />

étudiants (Grande école, Global BBA,<br />

Masters) suivent ainsi aujourd’hui une<br />

formation de 20 heures sur les enjeux<br />

environnementaux. Côté recherche, deux<br />

nouvelles chaires de spécialisation sur<br />

les enjeux environnementaux ont été<br />

créées : Talents de la transition écologique<br />

(avec Association Bilan Carbone,<br />

BNP Paribas, Campus de la Transition,<br />

CapGemini Invent, CITEPA, CYU) et Global<br />

circular economy (avec L’Oréal, Bouygues,<br />

Essilor, Zack et Circulab).<br />

FORMER LES PERSONNELS<br />

Au-delà des étudiants ce sont maintenant<br />

tous les personnels qui suivent<br />

ces formations. Après ESCP, pionnière<br />

en la matière, c’était pendant l’été 2021<br />

Un réseau étudiant :<br />

le Reses<br />

La préoccupation<br />

environnementale était au<br />

cœur de la création du Refedd<br />

(REseau Français Étudiant<br />

pour le Développement<br />

Durable) devenu début<br />

2021 le Reses (Réseau<br />

Étudiant pour une Société<br />

Écologique et Solidaire)<br />

parce que « l’utilisation<br />

du développement<br />

durable dans la politique<br />

gouvernementale et par<br />

des organismes influents,<br />

à des fins qui ne sont pas<br />

toujours si respectueuses<br />

de l’environnement ».<br />

Aujourd’hui plus de 140<br />

associations étudiantes,<br />

réparties dans plus de 45<br />

villes et sur plus de 90<br />

campus, en sont membres.<br />

24


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

au tour d’Audencia d’organiser cet été<br />

une Fresque du Climat pour l’ensemble<br />

de ses 416 collaborateurs au cours de<br />

son séminaire de rentrée. Les écoles<br />

s’engagent maintenant à permettre à<br />

l’ensemble de leurs collaborateurs et<br />

enseignants-chercheurs de devenir à leur<br />

tour « fresqueurs », afin de poursuivre<br />

la diffusion de la fresque auprès du plus<br />

grand nombre.<br />

L’Université Grenoble Alpes (UGA) a quant<br />

à elle convié pendant ce même été 2021<br />

l›ensemble de sa communauté - étudiants<br />

et personnels - à une semaine entièrement<br />

dédiée à la RSE. Intitulée « L’UGA, actrice<br />

des transitions socio-écologiques », cette<br />

semaine de rendez-vous, dݎchanges, de<br />

conférences scientifiques et de débats en<br />

ligne a eu pour objectif de « sensibiliser,<br />

faire connaître, fédérer les énergies<br />

autour de ce sujet central et de trouver<br />

des manières de travailler ensemble ».<br />

RÉDUIRE LES ÉMISSIONS À<br />

EFFET DE SERRE DES CAMPUS<br />

« Les campus doivent être des lieux<br />

démonstrateurs que ce soit par nos<br />

émissions de carbone ou la gestion des<br />

déchets. Déjà 20 universités sont mobilisées<br />

au sein de France Universités »,<br />

insiste le président de l’université Clermont-Auvergne,<br />

Mathias Bernard, qui<br />

veut que les établissements universitaires<br />

soient « exemplaires ». Arts et Métiers<br />

s’engage ainsi à réduire les émissions de<br />

gaz à effet de serre de l’établissement de<br />

30 % sur 2028-2032 par rapport à 2018-<br />

<strong>2022</strong> et à « assurer une bonne gestion<br />

du campus pour promouvoir la santé<br />

et le bien-être des parties prenantes à<br />

travers notamment la protection de la<br />

biodiversité, le lien social et l’ouverture<br />

sur le territoire ». Du côté de l’Ecole polytechnique<br />

on s’engage d’ici à 5 ans à<br />

« diminuer de 20 % les émissions de gaz<br />

à effet de serre par usager du campus<br />

sur le poste énergie ».<br />

Le Plan France Relance 2020-<strong>2022</strong> apporte<br />

ainsi des fonds pour rénover les<br />

campus et améliorer leurs performances<br />

Kedge (ici le campus de<br />

Bordeaux ) a été l’instigateur du<br />

test de référence : le Sulitest<br />

environnementales et énergétiques. L’Université<br />

Côté d’Azur va ainsi pouvoir mettre<br />

en place des équipements photovoltaïques,<br />

des bornes de recharges pour<br />

véhicules électriques, des panneaux<br />

solaires installés en toitures et surtout<br />

une solution hydrogène qui permettra<br />

d’améliorer l’autoconsommation du site<br />

en stockant les surplus d’électricité<br />

solaire sous forme d’hydrogène. Les<br />

travaux de rénovation de l’Isae SupAero<br />

devront quant à eux apporter un gain<br />

de consommation énergétique de 67 %<br />

pour « rendre le campus plus durable et<br />

responsable » va par exemple permettre<br />

le changement des appareils de régulation<br />

(chauffage, électricité…), l’utilisation<br />

d’éclairages LED et la pose de VMC double<br />

flux. Les chaudières à gaz du site seront<br />

remplacées par des pompes à chaleur.<br />

Enseigner la transition c’est bien, faire<br />

de ses campus des démonstrateurs<br />

c’est mieux !<br />

Olivier Rollot<br />

Alumni for the Planet<br />

Pour fédérer les initiatives<br />

des étudiants une fois<br />

diplômés a également été<br />

créé en 2020 Alumni for the<br />

Planet, un réseau soutenu<br />

par la CPU, la Cdefi et la<br />

CGE qui vise à « créer et<br />

à développer le réseau des<br />

diplômés de l’enseignement<br />

supérieur qui s’engagent et<br />

agissent en faveur du climat<br />

et de l’environnement ».<br />

L’écologisation dans<br />

l’enseignement supérieur<br />

L’Association européenne<br />

des universités a publié<br />

en 2021 la première<br />

enquête jamais menée<br />

auprès des établissements<br />

d’enseignement supérieur<br />

de l’Espace européen de<br />

l’enseignement supérieur<br />

(EEES) sur « l’écologisation<br />

dans les établissements<br />

d’enseignement<br />

supérieur » (« Greening<br />

in European higher<br />

education institutions »).<br />

© Kedge BS<br />

25


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

ALICE<br />

GUILHON<br />

Directrice générale<br />

de Skema BS<br />

Comment se forge un destin ?<br />

Alice Guilhon : sportive<br />

et universitaire<br />

Comment se forge<br />

un destin ? Parfois<br />

sur une terrible<br />

désillusion. Nous<br />

sommes en 1983.<br />

Alice Guilhon a 16<br />

ans et un destin<br />

de championne de<br />

tennis entre ses<br />

mains. « J’entamais<br />

une carrière de de<br />

professionnelle sur<br />

les circuits quand<br />

j’ai fait un choc<br />

anaphylactique.<br />

Deux jours dans le<br />

coma. Quand je me<br />

réveille à l’hôpital,<br />

mes dix raquettes<br />

posées près de<br />

mon lit, la première<br />

chose que me dit le<br />

médecin qui vient me<br />

voir c’est : « Le tennis<br />

de haut niveau c’est<br />

fini pour vous ». »<br />

Alice Guilhon a<br />

des rhumatismes<br />

articulaires,<br />

son corps l’a<br />

« littéralement lâché<br />

et on n’a jamais pu<br />

établir exactement<br />

pourquoi ».<br />

Sa passion pour le tennis a démarré<br />

quatre années plus tôt. Elle habite<br />

alors en Tunisie où son père,<br />

professeur d’Université, a été nommé<br />

après avoir obtenu son agrégation :<br />

« Tout de suite mon professeur de<br />

tennis nous a dit que j’étais douée. Je<br />

me mets d’abord à jouer deux heures<br />

tous les soirs après les cours. Je joue<br />

de mieux en mieux. Revenue vivre à<br />

Aix-en-Provence, un professeur de<br />

tennis très connu, qui avait formé la<br />

plus grande championne française<br />

François Dürr, me remarque ».<br />

Pendant quatre ans Alice Guilhon<br />

va donc s’entrainer à <strong>Mars</strong>eille, des<br />

heures chaque jour, accompagnée<br />

par sa mère qui tient absolument à ce<br />

qu’elle reste habiter dans sa famille<br />

à Aix. Seulement à l’époque on se<br />

soucie assez peu de la nutrition ou<br />

de l’équilibre physique des athlètes.<br />

Ils sont poussés à fond. Et craquent<br />

parfois : « J’étais en surdosage.<br />

L’esprit ne lâche pas, le corps si ».<br />

RETOUR À LA VIE « NORMALE »<br />

Après des années de compétition,<br />

de cours à distance avec le Cned,<br />

Alice Guilhon retourne donc à la<br />

vie « normale », celle de tous les<br />

jeunes de son âge, au lycée : « Je<br />

me sentais totalement déconnectée.<br />

Je n’étais pas allée dans une soirée<br />

depuis trois ans. Je n’avais pas<br />

d’amis en dehors du circuit et mes<br />

professeurs. Je rencontrais d’un seul<br />

coup des jeunes qui n’étaient pas<br />

du tout dans le combat permanent,<br />

comme je l’étais depuis des années en<br />

compétition. ». Mais parce qu’elle doit<br />

bien se faire une raison, parce que<br />

dans sa famille « on ne se plaint pas<br />

sur son sort », Alice Guilhon décide<br />

d’un tout autre avenir que celui qu’elle<br />

s’était promis : « Je décide de devenir<br />

professeur. Comme mon père qui était<br />

professeur de sciences économiques<br />

à l’université d’Aix-<strong>Mars</strong>eille ».<br />

Le tennis, elle ne l’abandonne pas pour<br />

autant pas tout à fait. Elle donne des<br />

cours pour « gagner un peu sa vie »<br />

et participe à de petits tournois où<br />

elle s’impose facilement. Aujourd’hui<br />

encore elle fait régulièrement du<br />

sport mais, le « dos vrillé » par la<br />

compétition préfère la natation au<br />

footing. De la compétition elle garde<br />

cette notion de performance qui<br />

l’accompagne toujours aujourd’hui.<br />

MAÎTRE DE CONFÉRENCES À<br />

AIX-MARSEILLE 2<br />

Toute sa formidable énergie, Alice<br />

26


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

© Skema BS<br />

Guilhon va maintenant la placer dans<br />

ses études. Après sa maîtrise, parce<br />

qu’elle en a un peu assez d’être la<br />

« fille du professeur Guilhon », elle<br />

décide de suivre son DEA (l’actuel<br />

master) à Montpellier. Un DEA qu’elle<br />

choisit de faire en gestion, et non<br />

plus en économie, ce qui « était assez<br />

mal vu ». Ayant obtenu une bourse<br />

d’allocataire de recherche, elle part<br />

au Québec. À 25 ans, elle finit une<br />

thèse, qui ne lui aura pris qu’un an<br />

et demi, sur l’Etude la relation entre<br />

le changement organisationnel et<br />

l’investissement intellectuel dans les<br />

PME.<br />

Maître de conférences, mère d’une<br />

petite fille qui fait elle aussi sa thèse<br />

désormais, la voilà propulsée dans<br />

Le 10 mars 2020, Alice reçoit, des mains du<br />

ministre de l’ESRI Frédérique Vidal, l’insigne<br />

d’Officier dans l’ordre national du mérite « qui<br />

couronne un parcours académique et un engagement<br />

entrepreneurial exemplaires » selon la ministre.<br />

la carrière dont son père rêvait tant<br />

pour elle. Mais la désillusion est<br />

là. « À Aix je m’ennuyais. Je voulais<br />

retourner à Nice, berceau familial.<br />

J’écrivais toute la journée des articles<br />

de recherche pour passer le temps. »<br />

Pour « s’occuper » elle s’inscrit en<br />

1994, elle a 27 ans, à l›Institut national<br />

des hautes études de la sécurité et de<br />

la justice (INHESJ), où elle « rencontre<br />

des personnalités incroyables », dont<br />

son second mari. Pendant ses années<br />

à l’université, elle obtient également<br />

son l’Habilitation à Diriger des<br />

Recherches (HDR) en 1998.<br />

Alice Guilhon se passionne alors pour<br />

l’intelligence économique et suivra,<br />

en 2004, les cours de l’Institut des<br />

hautes études de défense nationale<br />

(IHEDN) en tant qu’auditrice dans cette<br />

spécialité. La ministre de l’Intérieur<br />

de l’époque, Michèle Alliot-Marie, la<br />

nomme alors au Conseil économique<br />

de sécurité : « J’y ai beaucoup travaillé<br />

sur les questions de défense de la<br />

France et participé à l’écriture d’un<br />

référentiel d’intelligence économique<br />

avec Alain Juillet ». Elle est également<br />

co-autrice d’un livre sur le sujet chez<br />

Pearson.<br />

L’AVENTURE DU CERAM<br />

Nous sommes maintenant en 2000.<br />

Alice Guilhon s’ennuie toujours<br />

autant à l’université. Elle décide alors<br />

d’accepter un poste de doyen de la<br />

recherche au Ceram et enfin de retour<br />

à Nice, l’école qui deviendra plus tard<br />

Skema en fusionnant avec l’ESC Lille. À<br />

l’époque le Ceram est une toute jeune<br />

école, créée en 1980, dont elle n’avait<br />

d’ailleurs « jamais entendu parler » :<br />

« Je ne savais même pas ce qu’était<br />

une école de commerce. J’avais<br />

été élevé dans un environnement<br />

purement universitaire. Pour mon père<br />

il était invraisemblable de travailler<br />

dans une école de commerce car<br />

l’environnement scientifique n’était<br />

« pas à la hauteur » et il tente de me<br />

dissuader ».<br />

Sa décision est pourtant prise. Elle<br />

va intégrer cette toute jeune école<br />

placée au milieu d’une technopole,<br />

très internationale avec déjà des MSc<br />

dispensés en anglais, dont certains<br />

étudiants sont « brillantissimes ». Une<br />

« petite HEC du Sud » d’ailleurs créée<br />

sous la double égide des chambres<br />

de commerce et d’industrie de Paris<br />

et Nice. « J’y mets toute mon énergie.<br />

Je deviens successivement directrice<br />

27


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

de la faculté, des programmes puis<br />

directrice déléguée. Je me bats pour<br />

obtenir l’accréditation Equis. » En 2007<br />

c’est fait et la voici également nommée<br />

directrice générale du Ceram.<br />

EN ROUTE POUR SKEMA<br />

La toute nouvelle directrice générale<br />

du Ceram pointe vite la limite de<br />

son école : le manque de moyens<br />

et d’envergure. Entrée au board de<br />

l’EFMD (European Foundation For<br />

Management Development) elle<br />

découvre le fonctionnement d’une des<br />

business schools les plus renommées<br />

dans le monde, l’IMD et discutant<br />

avec Peter Lorange, et fait un arrêt<br />

sur image plus global sur le secteur.<br />

Sa conclusion : « Parce qu’il n’existe<br />

pas d’équivalent à des multinationales<br />

comme Microsoft dans l’enseignement<br />

supérieur, parce qu’il y a de plus en<br />

plus d’étudiants internationaux, il faut<br />

au Ceram un projet disruptif et global.<br />

Pour cela nous avons besoin de<br />

moyens, nous allons donc fusionner<br />

avec une autre école ».<br />

Seulement un autre acteur local a<br />

la même idée. Bernard Belletante,<br />

le directeur d’Euromed <strong>Mars</strong>eille,<br />

qui deviendra Kedge, révèle à Alice<br />

Guilhon que leurs chambres de<br />

commerce respectives veulent les<br />

voir fusionner. « Je vais tout de suite<br />

rencontrer notre CCI pour lui proposer<br />

un autre projet. Je venais de faire<br />

l’audit de l’ESC Lille, qui vivait une fin<br />

de règne, et je propose une autre<br />

fusion. Et surtout d’aller plus loin qu’un<br />

projet de fusion régional qui ne voyait<br />

que par le prisme de l’Hexagone »,<br />

se souvient la directrice. Trois mois<br />

plus tard la décision est actée : la<br />

fusion donnera en 2009 naissance<br />

à Skema. « Nous fusionnons tout,<br />

Décembre 2019, visite du vice-ministre chinois de l’éducation sur le<br />

campus de SKEMA à Sophia Antipolis, M. Xuejun Tian, en compagnie<br />

de Bernard Belloc, conseiller stratégique de SKEMA<br />

les programmes, les professeurs,<br />

les alumni. Et nous nous présentons<br />

bientôt devant la Cefdg (Commission<br />

d’évaluation des formations et<br />

diplômes de gestion) avec un seul<br />

programme pour deux campus. Ce qui<br />

surprend beaucoup à l’époque. »<br />

Il lui faut surtout gérer des<br />

personnels, un peu déboussolés.<br />

Alice Guilhon s’installe donc plus près<br />

de Lille, à Paris, et établit de « très<br />

bons rapports avec les partenaires<br />

sociaux ». Pour autant le premier<br />

baromètre social se révèle mauvais<br />

en 2009. « Je tenais absolument à<br />

le publier pour montrer comment<br />

nous allions progresser. Aujourd’hui<br />

nous sommes à 85 % de taux de<br />

satisfaction. »<br />

Fan de Marvel et DC Comics<br />

Depuis son adolescence une troisième<br />

passion irrigue la vie d’Alice Guilhon. Elle<br />

collectionne toutes les revues de super<br />

héros de Marvel et DC Comics dont<br />

elle possède aujourd’hui des milliers<br />

d’exemplaires. « J’ai tous les exemplaires<br />

Et pourquoi ce nom de Skema ?<br />

« L’agence Nomen nous a fait 150<br />

propositions de noms et nous avons<br />

choisi Skema pour la notion de<br />

knowledge. » Skema signifie d’ailleurs<br />

également School of Knowledge<br />

Economy and Management.<br />

UN PROJET INTERNATIONAL<br />

Quelques semaines avant la naissance<br />

de Skema naissait son premier<br />

campus international. Le Ceram<br />

s’installe en effet en Chine, à Suzhou,<br />

dès début 2009. En septembre 2010<br />

c’est à Raleigh, sur la côte Est des<br />

États-Unis, que Skema inaugure<br />

son campus américain - « Sans<br />

être présent aux États-Unis, on ne<br />

de Strange depuis plus de 30 ans. J’adore<br />

les X-Men, Superman, Spiderman, etc. »<br />

Mais elle n’en lit pas moins d’autres livres<br />

plus classiques : « Avec mes parents, mais<br />

aussi ma fille aussi nous lisons toujours<br />

en permanence quatre ou cinq livres ».<br />

© Skema BS<br />

28


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

programmes y sont américains et nos<br />

étudiants peuvent y obtenir un OPT<br />

pour rester y travailler une année. »<br />

© Skema BS<br />

Eté 2021, lors du SKEMA Graduation Show, Alice et Patrice Houdayer<br />

entourant la mascotte de l’école : « Leon The Skameleon »<br />

peut pas prétendre construire une<br />

marque mondiale » - où elle reçoit<br />

aujourd’hui 1 500 étudiants. Suivront<br />

Belo Horizonte, au Brésil, en 2015 – là<br />

aussi Skema reçoit 1 500 étudiants<br />

aujourd’hui comme à Suzhou et Nankin<br />

- et Le Cap, en Afrique du Sud en 2019.<br />

Autant de campus qui acquièrent peu<br />

à peu leur autonomie financière. Tout<br />

en s’appuyant sur le modèle de la<br />

business school à la française. « Avec<br />

ses stages, sa mobilité internationale,<br />

c’est un modèle hyper performant<br />

comme le montrent d’ailleurs tous les<br />

classements. »<br />

Et si Skema n’y a pas de campus, elle<br />

n’en pas moins également présente<br />

au Canada, à Montréal pour être<br />

précis, où elle a créé son laboratoire<br />

d’Intelligence artificielle (IA). « Avec<br />

une équipe de 20 professeurs, au sein<br />

d’un écosystème unique au monde,<br />

nous y créons des programmes et des<br />

outils pédagogiques qui seront utilisés<br />

sur tous nos campus. » Et à Raleigh<br />

tout un pan de la business school est<br />

maintenant consacré à l’Intelligence<br />

artificielle (IA). « Il faut toujours être<br />

à l’avant-garde, sur le cutting edge,<br />

et cela est passé pour nous par la<br />

fusion, la mondialisation et maintenant<br />

l’hybridation. »<br />

Et maintenant ? « Nous pensons à<br />

l’Inde, à l’Australie, à la Russie mais<br />

aussi à l’Europe. Pourquoi pas nous<br />

implanter en Italie ? » En Espagne<br />

Skema a déjà créé un double diplôme<br />

à Barcelone. « Nous voulons être<br />

une marque mondiale qui forme des<br />

citoyens du monde. En Chine nous<br />

sommes peu à peu devenus une école<br />

chinoise. Aux États-Unis aussi il nous<br />

faut un peu plus d’étudiants pour<br />

obtenir une reconnaissance nationale<br />

qui est en marche. Pour autant les<br />

Fédérer les énergies<br />

En 2020 Alice Guilhon se lance dans un<br />

nouveau projet : la création de la Conférence<br />

des directeurs des écoles françaises de<br />

management (Cdefm) comme il y avait déjà<br />

une Cdefi (Conférence des directeurs des<br />

écoles françaises d’ingénieurs). Le Chapitre<br />

des écoles de management de la Conférence<br />

SON AUTRE PASSION : LA<br />

MUSIQUE<br />

Avec le tennis, une autre passion<br />

accompagne Alice Guilhon dès sa<br />

jeunesse : la musique. Longtemps elle<br />

suivra des cours de flute traversière<br />

au Conservatoire d’Aix. « J’aurais rêvé<br />

de devenir chef d’orchestre. » Et dans<br />

la musique, sa passion c’est l’opéra. À<br />

12 ans son idole, celle dont elle tapisse<br />

les murs de sa chambre d’affiches,<br />

s’appelle Placido Domingo, le plus<br />

célèbre ténor des années 1980 à 2010.<br />

Elle suit même ses déplacements dans<br />

le monde jour après jour.<br />

Sa passion aurait même pu l’amener<br />

plus loin - « Je me suis remise à<br />

chanter à 20 ans. C’était trop tard<br />

pour me lancer dans une carrière »<br />

- au point qu’elle connaît par cœur<br />

tous les livrets des opéras de Verdi et<br />

Puccini : « Le « Turandot » de Puccini<br />

est sans doute l’opéra qui me donne<br />

le plus d’énergie le week-end quand je<br />

suis chez moi ».<br />

des Grandes écoles (CGE) disparait donc<br />

au profit d’une association dédiée. « Nous<br />

ne l’avons absolument pas fait dans le dos<br />

de la Conférence des Grandes écoles. Nous<br />

avions besoin d’une institution qui représente<br />

les Grandes écoles de management. »<br />

29


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Julien Manteau<br />

DIRECTEUR GÉNÉRAL ADJOINT DE NEOMA<br />

Attractivité des classes préparatoires ECG :<br />

« Ne nous trompons pas de diagnostic »<br />

C’est un expert du sujet. Directeur<br />

général adjoint de Neoma en charge<br />

notamment du développement, Julien<br />

Manteau observe depuis longtemps<br />

l’univers des classes préparatoires EC<br />

et aujourd’hui ECG. Forcément déçu par<br />

une première rentrée délicate il nous<br />

livre ses éléments de diagnostic.<br />

Olivier Rollot : A Neoma, et auparavant<br />

à HEC, vous avez développé toute une<br />

expertise autour des admissions d’étudiants.<br />

Notamment ceux issus des classes<br />

préparatoires aux grandes écoles. Comment<br />

expliquez-vous la désaffection qu’ont connue<br />

cette année les classes préparatoires<br />

économiques et commerciales générales<br />

(ECG) ? On parle d’une baisse de plus de<br />

9 % des inscrits par rapport aux anciennes<br />

classes EC.<br />

Julien Manteau : Il y a effectivement environ 1 000<br />

étudiants de moins qui se sont inscrits qu’à la rentrée<br />

2020. Il ne faut surtout pas se tromper de diagnostic.<br />

Ce n’est pas la classe préparatoire qui est en cause en<br />

général. En première année de classes préparatoires<br />

scientifiques, MP-SI et PC-SI, la croissance est de 1 %<br />

avec 17 500 élèves inscrits à la rentrée 2021. Elle est<br />

même de 5,4 % en Hypokhâgne A-L, où l’on passe cette<br />

année de 5 000 à 5 300 élèves, toujours en première<br />

année. Le problème est donc spécifique aux classes<br />

ECG. Ce n’est ni un problème des classes préparatoires<br />

en général, ni des écoles de management françaises<br />

toujours très bien classées à l’international, notamment<br />

par The Financial Times.<br />

O. R : Mais alors comment expliquez-vous<br />

cette désaffection pour la filière ECG ?<br />

Qu’est-ce qui a changé par rapport aux<br />

anciennes ECS et ECE ? La baisse du<br />

vivier d’élèves qui choisissent la spécialité<br />

mathématiques en terminale dans le cadre<br />

du nouveau bac est-elle en cause ?<br />

J. M : Cette explication n’est pas la plus convaincante.<br />

En MP-SI et PC-SI, le vivier de terminale est relativement<br />

restreint, puisque limité aux seules doublettes<br />

de spécialités Mathématiques et Physique-chimie,<br />

soit 72 000 élèves. Concrètement, par rapport aux<br />

17 500 places proposées en prépas, cela représente<br />

un multiple de 4.11 « seulement ». Et pourtant cette<br />

filière MP-SI / PC-SI croit de 1 % cette année, et n’a<br />

CV express<br />

Julien Manteau a été<br />

nommé directeur général<br />

adjoint Communication,<br />

marketing et développement<br />

de Neoma Business School<br />

à la rentrée 2021. Il était<br />

auparavant et depuis 9 ans<br />

directeur exécutif de la<br />

formation initiale d›HEC<br />

en charge de la stratégie et<br />

du développement. Diplômé<br />

d’HEC, Julien Manteau a<br />

développé une expertise en<br />

communication et marketing,<br />

d’abord en tant que chef de<br />

groupe au sein de l’agence<br />

BETC EURO RSCG puis<br />

en tant que directeur du<br />

développement de l’agence<br />

TBWA. Il rejoint ensuite<br />

HEC Paris en 2012.<br />

© Neoma BS<br />

30


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

pas enregistré de baisse du fait de la réforme du lycée.<br />

Pourquoi ? Parce qu’il y a une vraie affinité entre les<br />

élèves qui choisissent la doublette Mathématiques /<br />

Physique-chimie et les classes préparatoires scientifiques.<br />

Même plus forte qu’avec l’ancien bac S, avec un<br />

« taux de conversion » encore plus élevé. Il y a d’ailleurs<br />

de même une très belle affinité de ceux qui choisissent<br />

la doublette Mathématiques et Sciences économiques<br />

et sociales (SES) avec les ECG.<br />

Regardons les statistiques d’encore plus près : en<br />

MP-SI et PC-SI, le vivier comme on l’a vu est de 72 000<br />

élèves pour 17 500 places, soit un multiple de 4,11 élèves<br />

potentiels par place. Concernant le vivier ECG, on est<br />

bien au-dessus de 72 000 élèves, puisqu’il suffit d’avoir<br />

poursuivi les mathématiques jusqu’en terminale pour<br />

être éligible.<br />

En l’occurrence, selon une note de mai 2021 la DEPP<br />

(Direction de l’évaluation, de la prospective et de la<br />

performance) du ministère de l’Education nationale,<br />

de la Jeunesse et des Sports, l’option Mathématiques<br />

complémentaires a été choisie en 2020 par 61 % des<br />

élèves qui ont arrêté les mathématiques en enseignement<br />

de spécialité. Cela fait à peu près 65 000 élèves.<br />

En tout, spécialité plus option, ce sont environ 215 000<br />

élèves du bac général qui suivent un enseignement de<br />

mathématiques en terminale. Il y a donc un vrai vivier.<br />

Si on regarde de façon très brute les choses, le multiple<br />

du nombre de places (215 000 élèves pour 7 500<br />

places en 2020) est de 28.7 ! Le problème numéro 1,<br />

c’est donc la conversion de ce vivier.<br />

O. R : C’est un problème de taux de<br />

transformation. Pas de vivier ?<br />

J. M : Avant la réforme, le vivier était double : 50 % des<br />

élèves inscrits en classes préparatoires EC l’étaient en<br />

ECE, donc issus du bac ES, et 50 % l’étaient en ECS,<br />

issus du Bac S. Les élèves de terminale ES suivaient<br />

grosso modo 4h de maths, ce qui n’est pas très différent<br />

du volume horaire de Mathématiques complémentaires<br />

(3h). Mais ce que l’on observe cette année, c’est que<br />

seulement 20 % des inscrits en ECG ont fait Maths<br />

complémentaires en terminale ! Ce vivier spécifique,<br />

qui compte 65 000 élèves et devrait théoriquement<br />

représenter près de 50 % des effectifs en ECG, n’a<br />

pas été converti.<br />

© Neoma BS<br />

O. R : Mais alors pourquoi ces élèves, qui<br />

ont opté pour la spécialité Mathématiques<br />

en première pour conserver ensuite l’option<br />

en terminale, se détournent-ils de classes<br />

préparatoires pourtant conçues pour leur<br />

profil ?<br />

J. M : C’est tout le nœud du problème. En fait ils ont<br />

été contraints de suivre une spécialité Mathématiques<br />

en première qui s’est avérée en pratique au-dessus<br />

de leur niveau. Et ils ne veulent surtout pas revivre en<br />

classe préparatoire ce qu’ils ont vécu en première.<br />

Ils voient bien qu’en ECG, selon qu’ils optent pour la<br />

voie Mathématiques appliquées ou Mathématiques<br />

approfondies, ils suivront quoi qu’il arrive 8 ou 9 heures<br />

de cours de mathématiques. On comprend facilement<br />

que ceux qui n’avaient déjà pas voulu faire six heures<br />

de spécialité Mathématiques en terminale ne veulent<br />

surtout pas en suivre huit en prépa ! Autrement dit,<br />

les ECG ont essentiellement été choisies cette année<br />

par des profils matheux qui se perçoivent comme tel.<br />

Alors qu’auparavant, les élèves de ES étaient persuadés<br />

que la filière ECE leur correspondait tout à fait, nous<br />

avons aujourd’hui perdu une grosse partie de ce vivier<br />

un petit peu moins matheux. Quant aux quatre parcours<br />

possibles, ils semblent totalement interchangeables et<br />

ne constituent pas un levier d’attractivité qui viendrait<br />

compenser le problème. D’ailleurs la plupart des candidats<br />

cochent les quatre cases.<br />

Le campus rémois de Neoma<br />

31


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

O. R : Les autres motifs invoqués pour cette<br />

désaffection – manque de communication<br />

à cause du Covid, concurrence de filières<br />

comme le bachelor, départs pour l’étranger –<br />

ne vous paraissent pas significatifs ?<br />

J. M : La concurrence du bachelor n’explique pas la<br />

baisse. Les bachelors recrutent massivement sur un<br />

vivier qui n’a pas choisi l’option mathématiques complémentaires.<br />

Parmi les candidats qui avaient au moins un<br />

vœu en ECG il ne faut pas nier la concurrence d’autres<br />

filières comme les licences de sciences économiques<br />

et de droit, les PC-SI et MP-SI sans oublier les parcours<br />

santé. Mais avoir en ECG moins de 1 500 élèves issus<br />

de maths complémentaires sur un vivier de 65 000 doit<br />

d’abord nous interpeller sur la conversion de ce vivier !<br />

O. R : Cette baisse des recrutements<br />

en ECG inquiète forcément les Grandes<br />

écoles qui y recrutent une grande partie<br />

de leurs étudiants. Qu’est-ce que les<br />

classes préparatoires leur apportent de si<br />

important ?<br />

J. M : Dans son rapport « World Competiviness 2021 »<br />

l’IMD classe la France au premier rang pour la qualité<br />

de ses masters in management et rappelle que nous<br />

sommes le quatrième pays au monde qui possède<br />

le plus d’entreprises dans the Fortune Global 500.<br />

Regardez aussi combien de business schools sont<br />

triple accréditées dans le monde. À peine 1 %, soit<br />

une centaine environ, dont 17 rien que pour la France.<br />

Cela, nous le devons largement à des classes préparatoires<br />

qui sont le levier de notre compétitivité dans<br />

le monde.<br />

Des étudiants de Neoma à Rouen<br />

Par leur seule qualité, les classes préparatoires littéraires<br />

A/L attirent chaque année plus de 5 000 élèves,<br />

pourtant bien conscients que la quasi-totalité n’intégreront<br />

pas une école normale supérieure (ENS). Mais ils<br />

savent aussi que 95 % des étudiants entrant en classe<br />

préparatoire en sortent avec un master.<br />

La classe préparatoire du primaire c’est le CP, pour<br />

apprendre à lire, écrire, compter. Dans le supérieur,<br />

la classe préparatoire joue le même rôle de tremplin :<br />

elle permet tout simplement d’apprendre à apprendre,<br />

pour acquérir l’équipement complet de la réussite dans<br />

l’enseignement supérieur. La prépa est tout simplement<br />

le véhicule de la réussite de l’étudiant d’aujourd’hui !<br />

Les khôlles hebdomadaires, l’encadrement des professeurs<br />

et les évaluations régulières sont les leviers<br />

de cette réussite.<br />

© Neoma BS<br />

Les enseignements optionnels en fonction de la présence de mathématiques dans les triplettes et les doublettes<br />

32


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Martial Martin<br />

PRÉSIDENT DE L’ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’IUT (ADIUT)<br />

Le BUT succède au DUT : « Il y avait une vraie<br />

attente d’un diplôme en 3 ans »<br />

C’est une petite révolution dans<br />

l’enseignement supérieur : depuis la<br />

rentrée 2021 le diplôme phare des IUT,<br />

le DUT, a pris un an de plus pour devenir<br />

le bachelor universitaire de technologie<br />

(BUT). Avec le président de l’Adiut,<br />

Martial Martin, nous faisons le point sur<br />

son développement et ses enjeux.<br />

Olivier Rollot : Quel premier bilan pouvezvous<br />

établir du lancement du bachelor<br />

universitaire de technologie (BUT) ?<br />

Martial Martin : Le contexte n’était pas forcément le<br />

meilleur avec une réforme du bac général un peu avortée<br />

en raison de la pandémie. Sans oublier des jeunes qui<br />

ont passé deux années de cours un peu aléatoires<br />

et dont le niveau est d’une grande hétérogénéité. En<br />

l’absence de forums d’orientation il a aussi été difficile<br />

de communiquer auprès des élèves. Aujourd’hui il est<br />

difficile d’analyser ce qui est dû à la réforme du bac<br />

général et ce qui est dû à la pandémie. Au final nous<br />

avons reçu autant de candidatures pour le BUT qu’il<br />

y en avait auparavant pour le diplôme universitaire<br />

de technologie (DUT) soit 1,3 million sur Parcoursup.<br />

O. R : La création du BUT correspond donc<br />

bien à une demande des étudiants ?<br />

M. M : Il y avait une vraie attente d’un diplôme en 3<br />

ans alors que l’usage – à 90 % ! – de nos diplômés de<br />

DUT était de poursuivre leur cursus une année de plus,<br />

parfois en bachelor, parfois en licence ou encore en<br />

licence professionnelle. Cela signifiait qu’ils devaient<br />

candidater deux fois dans une filière sélective : après le<br />

bac pour entrer en DUT et après leur DUT. Maintenant<br />

ils n’ont plus à le faire qu’une seule fois. De plus ils ont<br />

toujours la possibilité d’interrompre leur cursus après<br />

deux ans leur DUT en poche. C’est une formule très<br />

souple que nous proposons.<br />

O. R : Quels sont les BUT les plus<br />

recherchés ?<br />

M. M : Il n’y a pas la même pression sur toutes les<br />

formations. Les formations tertiaires sont particulièrement<br />

demandées notamment par les bacheliers STMG<br />

qui sont très nombreux à candidater en Gestion des<br />

entreprises et des administrations (GEA), Techniques<br />

de commercialisation (TC), Gestion administrative et<br />

commerciale des organisations (GACO), Carrières<br />

juridiques (CJ) etc. Les formations en informatique et<br />

numérique sont également particulièrement demandées.<br />

Les formations industrielles un peu moins. Si on ne<br />

forme pas plus d’élèves en STI2D ou STL dans les lycées<br />

on va manquer de cerveaux pour réindustrialiser la<br />

France ! Comment créer une filière complète du médi-<br />

33<br />

© Adiut<br />

Les buts du BUT<br />

Le Bachelor Universitaire<br />

de Technologie (BUT) est<br />

devenu en 2021 le nouveau<br />

diplôme de référence des<br />

IUT. En intégrant un BUT les<br />

étudiants suivent un parcours<br />

intégré en 3 ans, sans<br />

sélection supplémentaire pour<br />

atteindre le grade licence.<br />

Le diplôme est aligné sur<br />

les standards internationaux<br />

et facilite les échanges avec<br />

les universités étrangères.<br />

Un DUT est délivré au<br />

bout des deux premières<br />

années. Le cursus s’articule<br />

toujours autour de mises en<br />

situation professionnelles,<br />

de périodes en entreprise<br />

sous forme de stages ou en<br />

alternance (parfois dès la 1 ère<br />

année ou plus généralement<br />

sur les deux dernières<br />

années, voire uniquement<br />

la 3 e année du cursus).


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

légende ?<br />

Des étudiants de l’IUT de l’université Lyon 3<br />

© David Venier / Université Jean-Moulin Lyon 3<br />

cament si on ne peut pas recruter assez de bacheliers<br />

STL dans les BUT chimie, biochimie ou encore génie<br />

biologique ? L’industrie garde malheureusement une<br />

image assez médiocre auprès du public. Il y a un vrai<br />

travail d’acculturation à faire auprès du public pour en<br />

montrer les atouts.<br />

O. R : Qu’est-ce qui change le plus entre<br />

l’ancien DUT et le nouveau BUT ?<br />

M. M : Nous avons réalisé une véritable révolution dans<br />

l’approche par compétences. En travaillent avec un<br />

laboratoire de l’université de Liège sur des méthodes<br />

éprouvées en Finlande ou au Canada nous proposons<br />

maintenant une approche par compétences. Cela signifie<br />

non seulement le recours à des TD/TP classiques mais<br />

aussi à une évaluation sur du travail en autonomie sous<br />

forme de projets articulés à des enseignements. Dès la<br />

première année nous faisons dialoguer l’étudiant avec<br />

ces « situations d’apprentissage et d’évaluation » (Saé).<br />

O. R : Les BUT sont censés recruter au moins<br />

50 % de bacheliers technologiques. Est-ce<br />

un chiffre que vous atteignez aujourd’hui ?<br />

M. M : Nous avons eu un moment de crispation avec le<br />

ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche<br />

et de l’Innovation (MESRI) car nous pensions qu’il<br />

était un peu trop tôt pour parvenir à ce pourcentage.<br />

Aujourd’hui c’est clairement l’objectif que nous nous<br />

sommes fixé. C’est relativement facile dans les BUT<br />

tertiaires – à 1 ou 2 % près dans un sens ou l’autre –<br />

mais beaucoup plus dans les BUT de production. Dans<br />

certains IUT de métropoles, nous parvenons à la parité<br />

mais ailleurs dans les IUT d’équilibre territorial, il n’y a<br />

tout simplement pas assez de bacheliers STI2D. On<br />

les appelle largement mais le vivier est vite épuisé et,<br />

au final, nous sommes plutôt aux alentours de 20 ou<br />

25 % de bacheliers technologiques dans beaucoup de<br />

BUT de production.<br />

O. R : Un vif débat vous a opposé, ainsi que<br />

la Conférence des présidents d’université<br />

(CPU), aux ingénieurs de la Cdefi (Conférence<br />

des directeurs des écoles françaises<br />

d’ingénieurs) autour de la question du<br />

niveau du BUT. En résumé la Cdefi considère<br />

que le BUT n’apporte pas un niveau<br />

significativement plus important que le DUT<br />

qui justifierait que ses titulaires entrent<br />

en cycle master. Une attitude que n’ont<br />

d’ailleurs pas les écoles de management qui<br />

recevront les titulaires d’un BUT à ce niveau<br />

pour la plupart. Où en est-on aujourd’hui de<br />

ce débat ?<br />

M. M : Tout part d’une incompréhension de la réforme<br />

des études en IUT. Délivrer 2 000 heures de cours sur<br />

trois ans et un stage long en troisième année c’est un<br />

nombre d’heures équivalent aux trois premières années<br />

de cours d’une école à prépa intégrée. En BUT on doit<br />

suivre au moins 24 semaines de stage et 600 heures<br />

de situation d’apprentissage et d’évaluation dans lesquelles<br />

s’imbriquent formation et projets en situation.<br />

C’est une formation toute nouvelle qui accorde un plus<br />

grand degré d’autonomie aux étudiants.<br />

Autre incompréhension : tout le monde n’avait pas<br />

compris que la sortie en DUT était orientée vers la<br />

poursuite d’études. Aujourd’hui on se comprend mieux<br />

avec un respect mutuel pour le cursus de BUT en 3 ans,<br />

comme pour le cycle ingénieurs, dont il est préférable<br />

de suivre les trois années.<br />

Au bout de deux années en IUT on a parfois un profil<br />

qui présente toutes les bonnes conditions de réussite<br />

en école d’ingénieurs. Mais nous avons également un<br />

public pour lequel trois années sont nécessaires et<br />

34


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

qui a tout avantage à poursuivre jusqu’en BUT avant<br />

de tenter d’intégrer une école d’ingénieurs.<br />

Nous travaillons avec les écoles d’ingénieurs du réseau<br />

Polytech pour sécuriser un parcours 3 ans + 3 ans pour<br />

un public d’élèves issus d’un bac technologique. Il ne<br />

faut d’ailleurs pas non plus oublier que tous les élèves<br />

de classe préparatoires n’entrent pas dans une école<br />

d’ingénieurs après seulement deux années.<br />

O. R : Avec les universités comment se passe<br />

la transition ?<br />

M. M : Tout dépend du master. Nous travaillons avec<br />

les unités de formation et de recherche (UFR) pour<br />

offrir une cartographie de ce qui est possible après<br />

l’obtention de son BUT. Parfois le BUT peut mener<br />

directement en première année de master, parce que<br />

le programme s’y prête, parfois il faut mieux passer<br />

par une licence 3, après la deuxième année de BUT,<br />

dans la mesure où le programme est plus théorique.<br />

O. R : Au moment où on a commencé à parler<br />

des spécialités du nouveau bac général, un<br />

tableau était sorti qui donnait des indications<br />

des meilleures spécialités à choisir, à<br />

l’époque DUT par DU. Est-ce un travail que<br />

vous referez pour les BUT ?<br />

M. M : Parmi les 24 BUT la grande majorité ne demande<br />

aucune spécialité spécifique. Dans les BUT Production<br />

la doublette Maths et physique-chimie a représenté<br />

22 % des reçus cette année. La plupart des jeunes qui<br />

postulent en BUT Production ont logiquement opté en<br />

amont pour des triplettes puis doublettes largement<br />

scientifiques. Mais les mathématiques complémentaires<br />

peuvent suffire.<br />

Nous sommes très intéressés par des profils transversaux.<br />

Un élève ayant choisi les spécialités Mathématiques<br />

et Sciences économiques et sociales (SES) pourrait<br />

être classé pour intégrer un BUT dans la production.<br />

Même chose pour Sciences de la vie accolée à Langues,<br />

littératures et cultures étrangères et régionales<br />

(LLCER). Les IUT sont sans doute la structure qui ouvre<br />

le plus les portes aux doublettes atypiques. Mais nous<br />

regardons aussi de très près les triplettes de première.<br />

O. R : Au-delà des spécialités qu’est-ce<br />

que les IUT regardent de très près dans les<br />

dossiers des candidats sur Parcoursup ?<br />

M. M : Nous prenons bien sûr en compte le projet de<br />

formation. Nous valorisons beaucoup les réalisations<br />

personnelles et l’engagement citoyen. En BUT on peut<br />

tout à fait conserver des activités associatives pour<br />

garder son équilibre tout en réussissant sa scolarité.<br />

Tout cela nous le voyons sur Parcoursup.<br />

Certaines de nos formations essayent également de<br />

maintenir des entretiens pour lever certaines ambiguïtés<br />

et bien faire comprendre ce qu’on append dans telle<br />

ou telle formation.<br />

Il ne faut surtout pas d’incompréhension. Si on a un<br />

esprit très théorique il faut sans doute mieux opter<br />

pour une CPGE ou une licence. Dans un BUT Production<br />

on fait beaucoup de manipulations sur les paillasses,<br />

on échafaude des théories et des hypothèses. Il faut<br />

aussi savoir travailler en binôme. Et enfin avoir plutôt<br />

un projet d’intégration sur le monde du travail après<br />

son diplôme.<br />

O. R : Le but du BUT c’est d’intégrer le monde<br />

du travail ?<br />

M. M : L’idée d’une continuation d’études ne doit pas être<br />

trop prégnante dans l’esprit des candidats. La mission<br />

des IUT est de former des cadres intermédiaires pour<br />

nos territoires. Nous proposons l’un des rares diplômes<br />

qui donne lieu à un référentiel de compétences édicté<br />

par un comité paritaire national avec les partenaires<br />

entreprises comme les partenaires sociaux.<br />

À dossier égal un jeune qui a le projet de faire de<br />

l’alternance et de travailler sur son territoire sera un<br />

profil que nous mettrons en avant. Ensuite il est tout<br />

à fait possible d’intégrer le marché du travail avec un<br />

bac+3 et de monter ensuite à bac+4 ou 5 par la validation<br />

d’acquis de l’expérience (VAE). Nous offrons à aux<br />

jeunes une grande souplesse de parcours.<br />

O. R : Qu’est-ce que représente aujourd’hui<br />

l’apprentissage dans les IUT ?<br />

M. M : 25% de nos étudiants suivent aujourd’hui leur<br />

cursus en alternance. Nous voudrions passer à 30 %<br />

et même à la moitié quand le BUT sera déployé sur<br />

l’ensemble du cursus.<br />

Avec le DUT c’était généralement la deuxième année qui<br />

était suivie en alternance puis l’ensemble de la licence<br />

professionnelle pour ceux qui poursuivaient. Nous<br />

proposons donc différentes formules : une année de<br />

formation classique suivie de deux années de formation<br />

en alternance, deux années de formation classique puis<br />

une en alternance et même trois années en alternance.<br />

35


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Frédéric Dallias<br />

DIRECTEUR GÉNÉRAL DE EXATECH<br />

« Il y a deux enjeux majeurs : la sécurisation des sujets<br />

et des copies, et l’équité entre les candidats »<br />

Créé il y a trente ans, Exatech est<br />

aujourd’hui le principal organisateur<br />

d’examens en France. Après deux<br />

années de pandémie qui ont fortement<br />

impacté son modèle, son directeur<br />

général, Frédéric Dallias, nous explique<br />

tout un processus indispensable pour<br />

garantir l’égalité de tous devant les<br />

concours.<br />

Olivier Rollot : Comment est née Exatech,<br />

leader aujourd’hui de l’organisation des<br />

examens en France ?<br />

Frédéric Dallias : Il y a trente ans chaque école,<br />

chaque université, chaque ministère organisait ses<br />

propres concours. Travailler avec Exatech leur a permis<br />

d’optimiser leur calendrier et de réduire leurs coûts<br />

avec des examens que nous organisons clés en main<br />

jusqu’à la correction des copies grâce à nos solutions<br />

numériques. Le tout en relations avec les préfectures<br />

dans le cadre de Vigipirate et dans le respect des protocoles<br />

Covid du MESRI comme de la Direction générale<br />

de l’Administration et de la Fonction publique (DGAFP).<br />

O. R : Exatech organise toutes sortes de<br />

concours ?<br />

F. D : Nous organisons près de 680 concours par an<br />

qui peuvent réunir de 100 à 50 000 candidats. Nous<br />

travaillons avec les grandes écoles, les universités,<br />

les banques d’épreuves, les Ministères et les administrations<br />

publiques. Le Service Interacadémique des<br />

Examens et Concours (Créteil, Paris et Versailles) nous<br />

sous traite par exemple l’organisation des concours de<br />

professeur des écoles (CRPE) ou des BTS, organisés<br />

dans des halls à Villepinte pendant toute une semaine.<br />

Nous organisons également des concours par exemple<br />

pour la Mairie de Paris (une trentaine par an), le Sénat,<br />

l’Assemblée nationale, ou la Gendarmerie nationale. Le<br />

concours de sous-officier de gendarmerie concerne<br />

environ 25 000 candidats chaque année.<br />

Afin d’optimiser le nombre de places par candidats<br />

et de diminuer les coûts, nous sommes capables de<br />

mettre en place les surbookings grâce à des algorithmes<br />

qui nous permettent de prévoir, à 5 % près, combien<br />

de candidats seront présents. Des concours et des<br />

examens ont lieu tout au long de l’année, avec deux<br />

périodes majeures : avril-mai-juin puis décembre.<br />

Pendant ces périodes nous pouvons organiser jusqu’à<br />

huit ou neuf concours par jour.<br />

O. R : Les Grandes écoles ont-elles des<br />

exigences particulières ? Notamment en<br />

termes de contrôle des candidats.<br />

F. D : Il y a deux enjeux majeurs : la sécurisation des<br />

sujets et des copies, et l’équité entre les candidats.<br />

Nos solutions numériques (notamment Viatique, la<br />

plateforme de dématérialisation des corrections) apportent<br />

des garanties et des avancées considérables<br />

sur ces points.<br />

La solution digitale<br />

Exatique<br />

Exatique est une solution<br />

de passation sur tablette en<br />

présentiel complètement<br />

déconnectée. En faisant<br />

passer des examens sur<br />

des tablettes il est même<br />

possible d’imaginer des sujets<br />

complètement différents<br />

d’un sujet papier en ajoutant<br />

des images ou des vidéos Ce<br />

sont d’ailleurs les universités<br />

de médecine qui ont été les<br />

premières à s’emparer de la<br />

solution. « C’est une solution<br />

totalement sûre qui permet<br />

de mettre à disposition les<br />

résultats pour analyse aux<br />

organisateurs le soir même »,<br />

insiste Frédéric Dallias.<br />

© Exatech<br />

36


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Le processus de<br />

correction<br />

© Exatech<br />

Les consignes de chaque concours permettent de<br />

faire appliquer l’égalité des chances. Cette exigence de<br />

contrôle est très importante pour les Grandes écoles,<br />

et les surveillants Exatech sont formés pour faire respecter<br />

ces consignes et aux techniques de surveillance.<br />

Chaque concours requiert au minimum un surveillant<br />

pour 50 candidats, parfois pour 20 candidats comme<br />

c’est le cas notamment du concours CentraleSupélec.<br />

Nous travaillons avec 120 Grandes écoles et nous<br />

organisons pour la plupart leurs concours d’entrée.<br />

Nous organisons par exemple le Concours Mines-Ponts<br />

en Île-de-France. C’est un concours qui a lieu dans<br />

100 centres d’examen, en France et en outre-Mer,<br />

qui doivent tous démarrer en simultané. Cette année,<br />

pour le concours Mines-Ponts, nous avons mis en<br />

place une solution numérique qui permet l’organisation<br />

totale du concours.<br />

O. R : Comment passez-vous ensuite à l’étape<br />

de correction des copies ?<br />

F. D : Toutes les copies sont dématérialisées sur notre<br />

plateforme Viatique. C’est un travail majeur si vous<br />

considérez par exemple qu’une copie du concours<br />

Centrale Supélec représente dix feuillets recto-verso.<br />

Et il y en a en tout 120 000. Ensuite les copies sont<br />

disponibles dans le cloud auprès des correcteurs.<br />

Les copies originales sont sécurisées et stockées<br />

dans un coffre-fort. Cela permet d’éviter la perte des<br />

copies comme les frais de déplacements. Et en temps<br />

de Covid c’est même mieux d’un point de vue sanitaire.<br />

O. R : La pandémie a mis en avant la<br />

possibilité de faire passer des examens à<br />

distance. Est-ce possible aujourd’hui dans<br />

de bonnes conditions de sécurité ?<br />

F. D : Quelle que soit la solution envisagée il y a aujourd’hui<br />

de gros problèmes de triche dès qu’on parle<br />

de solutions de passages d’examen à distance. Il y a<br />

bien sûr des logiciels de eye tracking pour surveiller<br />

ce que font les candidats. Eviter par exemple qu’ils<br />

utilisent un deuxième écran avec leur PC. Mais les<br />

candidats se sont montrés réticents à l’idée qu’on filme<br />

chez eux à travers leur webcam et ces solutions ont<br />

été abandonnées.<br />

Sans parler de l’impossibilité de rédiger des copies de<br />

mathématiques sur un ordinateur.<br />

O. R : La pandémie affecte tout<br />

particulièrement les concours. Quelles<br />

mesures particulières prenez-vous depuis<br />

maintenant presque deux ans ?<br />

F. D : Après avoir dû fermer nos portes pendant deux<br />

mois en 2020 nous sommes parvenus à organiser les<br />

concours en temps et en heure. Il a fallu notamment<br />

doubler la surface dont chaque candidat dispose, qui<br />

est passée à 4 m 2 au lieu de 2 m 2 avec au moins 1,5<br />

mètre de distanciation avec le candidat le plus proche.<br />

Chaque correcteur, tous<br />

choisi par les écoles, doit<br />

corriger de l’ordre de 400 à<br />

500 copies dans le cas des<br />

grandes écoles d’ingénieurs.<br />

Les « chefs correcteurs »<br />

disposent d’outils de<br />

docimologie - la discipline<br />

scientifique consacrée à<br />

l’étude de la façon dont<br />

sont attribuées les notes<br />

par les correcteurs des<br />

examens – pour permettre<br />

à l’ensemble des copies<br />

d’être corrigées de manière<br />

homogène. On peut ainsi vite<br />

percevoir si un correcteur<br />

est plus sévère qu’un autre.<br />

37


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Aujourd’hui, le nouveau protocole supprime la jauge<br />

dans les salles de concours et d’examens et privilégie<br />

l’espace maximal entre les candidats.<br />

De même nous avons dû multiplier le nombre d’entrées<br />

pour éviter que trop de candidats se retrouvent ensemble<br />

au même endroit au même moment. Évidemment il faut<br />

des désinfections permanentes.<br />

Des secouristes sont également présents sur chaque<br />

concours et peuvent faire passer des tests dès qu’il y<br />

a un doute. Si c’est le cas le candidat à risque est tout<br />

de suite isolé dans une « salle Covid » pour pouvoir<br />

composer.<br />

Chaque soir nous nébulisons les salles avec des antivirucides<br />

qui envoient des particules dans l’air pour<br />

désinfecter la salle. Une pratique qu’il faudrait d’ailleurs<br />

conserver dans l’avenir.<br />

O. R : Exatech est-elle également présente à<br />

l’étranger ?<br />

F. D : Nous organisons les corrections du bac et du<br />

brevet pour le compte de l’Agence pour l’enseignement<br />

français à l’étranger (AEFE) dans 300 collèges et lycées<br />

français répartis dans 132 pays. La dématérialisation<br />

des copies permet 80 % d’économies. Les copies des<br />

candidats d’un lycée au Japon pourront être accessibles<br />

pour correction à des correcteurs aux quatre coins de<br />

monde. Viatique dématérialise aussi le bac européen<br />

pour Schola Europaea. Exatech travaille également<br />

avec un réseau de partenaires à l’étranger.<br />

O. R : En France le ministère de l’Education<br />

n’a pas fait appel à vous pour dématérialiser<br />

les copies du bac en 2021 ?<br />

F. D : Non ils ont préféré développer leur propre système.<br />

O. R : Pour les candidats qui ont des<br />

aménagements spécifiques, organise-t-on<br />

des tiers temps ?<br />

F. D : C’est de plus en plus courant et très important<br />

pour l’égalité des chances. Cela peut aller jusqu’à<br />

mettre des secrétaires à disposition, ou des éclairages<br />

particuliers. Les équipes et les solutions numériques<br />

d’Exatech peuvent répondre à toutes ces demandes.<br />

Covid-19 : retour sur le défi de l’organisation<br />

des examens et concours<br />

En 2020, sii les concours postbac sont<br />

quasiment totalement réduits à l’examen<br />

des dossiers sur Parcoursup, s’il en est de<br />

même an admissions sur titre, les concours<br />

menant aux Grandes écoles post prépas<br />

comme les PACES et les ECN pour les études<br />

médicales ont bien conservé bien des écrits.<br />

Les oraux ont de leur côté été supprimés<br />

dans l’ensemble des Grande écoles à<br />

l’exception de l’Ecole polytechnique, où ils<br />

se sont déroulés durant les deux dernières<br />

semaines de juillet sous la forme d’épreuves<br />

de mathématiques et de physique.<br />

Mais comment sélectionner uniquement sur<br />

dossier ? Ce qui est une expertise reconnue<br />

pour les proviseurs et professeurs de<br />

classes préparatoires était une relative<br />

nouveauté pour les écoles Po. Synthèse<br />

du parcours du candidat, moyennes par<br />

matières, appréciations des professeurs<br />

mais aussi engagement associatif,<br />

expériences professionnelles et lettre de<br />

motivation sont à disposition des écoles<br />

pour sélectionner leurs candidats après le<br />

bac. De plus, à l’image de ce que pratiquent<br />

les sept Sciences Po du Réseau ScPo,<br />

les notes de contrôle continu ne sont<br />

généralement pas prises au pied de la lettre<br />

mais « redressées » de façon à prendre<br />

également le niveau de chaque classe. Le but<br />

est de réviser les notes brutes des élèves<br />

(notes de bulletin) en prenant en compte la<br />

«place» de la note obtenue dans la classe,<br />

avec pour objectif un traitement le plus<br />

équitable possible entre les candidats.<br />

© Fotolia<br />

38


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS REPÈRES<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Mathématiques :<br />

le grand dilemme<br />

C’est une équation à 14 inconnues : comment faire progresser le niveau en<br />

mathématiques des élèves qui se destinent à des carrières scientifiques alors qu’on<br />

manque cruellement de professeurs de mathématiques au lycée ? La réponse s’appelait<br />

spécialités du bac.<br />

« Nous constatons une forte adéquation<br />

des choix de spécialités des élèves et<br />

des filières choisies. Par exemple pour<br />

Sciences Po beaucoup ne faisaient auparavant<br />

des mathématiques en S que<br />

pour être reçus. Aujourd’hui les mathématiques<br />

ne sont plus un outil de sélection<br />

alors que moins de la moitié des<br />

élèves de la série S s’orientait dans une<br />

formation scientifique, hors médecine,<br />

avant la réforme du bac général. » En<br />

présentant ainsi son Analyse des vœux<br />

et affectations dans l’enseignement supérieur<br />

des bacheliers 2021 la cheffe de<br />

l’Inspection générale de l’éducation, du<br />

sport et de la recherche (Igésr), Caroline<br />

Pascal, dressait il y a moins d’un<br />

mois un bilan plutôt satisfaisant de la réforme<br />

du lycée : « Nous constatons une<br />

forte adéquation des choix de spécialités<br />

des élèves et des filières choisies. Par<br />

exemple pour Sciences Po beaucoup ne<br />

faisaient auparavant des mathématiques<br />

en S que pour être reçus. Aujourd’hui les<br />

mathématiques ne sont plus un outil de<br />

sélection alors que moins de la moitié des<br />

élèves de la série S s’orientait dans une<br />

formation scientifique, hors médecine,<br />

avant la réforme du bac général. » Mais<br />

depuis le ministre de l’Education,<br />

Jean-Michel Blanquer, a exprimé une<br />

opinion beaucoup plus prudente quant<br />

aux conséquences de sa réforme…<br />

même année la part d’élèves conservant<br />

la spécialité Mathématiques en terminale<br />

chute à 41,2 %, soit une baisse de 3,7 %<br />

par rapport à 2020. Bien sûr la plupart<br />

optent pour l’option Mathématiques complémentaires<br />

en terminale mais quel est<br />

son véritable niveau ? Comme le notent<br />

les experts de l’Igésr « la question du cadrage<br />

de ces options sans épreuves terminales<br />

se pose, les formations exprimant<br />

parfois des inquiétudes sur ce qui<br />

a été effectivement étudié, sur le niveau<br />

réel d’exigence et sur la question de leur<br />

évaluation ».<br />

Une inquiétude qui vaut aussi pour l’option<br />

mathématiques expertes : beaucoup<br />

d’élèves, dont le niveau en mathématiques<br />

n’est pas pour autant excellent, cochent en<br />

effet la case uniquement pour améliorer<br />

leur dossier. En 2021 le concours Avenir<br />

d’admission postbac en école d’ingénieurs<br />

constatait ainsi que 90 % de ses<br />

candidats « grands classés » - et 68,6 %<br />

des reçus - avaient suivi l’option mathématiques<br />

expertes, pourtant absolument<br />

pas nécessaire pour postuler.<br />

De plus la sous-représentation des filles<br />

en mathématiques est de plus en plus patente<br />

à mesure que celles qui visent les<br />

études médicales ou paramédicales optent<br />

essentiellement pour les spécialités Mathématiques<br />

et Physique-chimie au détriment<br />

des mathématiques. Si elles représentaient<br />

sensiblement la moitié des élèves<br />

qui optaient pour la spécialité Mathématiques<br />

en première en 2019 cette part a<br />

baissé à un peu plus de 48 % en 2021. Et<br />

en terminale elle tombe à 39,8 %.<br />

Enfin un biais social s’est fait jour : alors<br />

que 48 % des élèves d’origine sociale<br />

« très favorisée » conservent en terminale<br />

la spécialité Mathématiques, ce taux<br />

tombe à 30 % pour les élèves d’origine sociale<br />

« défavorisée ». C’est encore plus explicite<br />

pour les doublettes de terminale.<br />

En Mathématiques et Physique-chimie le<br />

taux d’élèves d’origine « très favorisée »<br />

est de 54 % pour seulement 14 % d’origine<br />

« défavorisée ».<br />

En 2020 et 2021 les élèves de terminale ont choisi…<br />

Le compte n’y est pas<br />

En 2021 ce sont 64,1 % des élèves de seconde<br />

qui ont choisi la spécialité Mathématiques<br />

en première. C’est-à-dire plus<br />

que ceux qui entraient en bac S, un peu<br />

plus de 52 %, mais moins que la somme<br />

de ceux qui optaient pour un bac ES<br />

(33 % environ) et suivaient donc également<br />

un enseignement de mathématiques :<br />

85 % en tout.<br />

Après une baisse de plus de 4,5 %<br />

entre 2019 et 2021 la spécialité s’est stabilisée<br />

en 2021 en première avec une petite<br />

hausse de 0,3 %. Oui mais voilà la<br />

39


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS REPÈRES<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Quand il fallait privilégier<br />

les filières scientifiques<br />

Il ne faut pas l’oublier : la réforme des<br />

mathématiques du bac général répondait<br />

fondamentalement aux attentes des<br />

filières scientifiques, tout en prenant acte<br />

de la pénurie de professeurs de mathématiques.<br />

Désespérés de voir le niveau<br />

de leurs élèves baisser d’années en années,<br />

les responsables des filières scientifiques<br />

ont milité pour que le niveau des<br />

mathématiques enseignées au lycée progresse.<br />

La spécialité Mathématiques de<br />

première correspond fondamentalement à<br />

leurs vœux. D’un niveau au moins égal à<br />

celui des mathématiques enseignées dans<br />

l’ancien bac S elle permet aux meilleurs<br />

élèves de terminale d’avoir en plus accès<br />

à une option « mathématiques expertes ».<br />

Neuf heures de mathématiques en terminale<br />

: de quoi entrer avec enthousiasme<br />

dans une classe préparatoire scientifique<br />

ou une filière scientifique universitaire.<br />

Et puis parce que beaucoup, excédés par<br />

sa difficulté, abandonnent la spécialité en<br />

terminale, voilà le problème du manque<br />

de professeurs de mathématiques résolu.<br />

Seul hic : les mathématiques ne sont<br />

pas utiles qu’à ceux qui se destinent à<br />

une MP-SI ou une licence scientifique.<br />

Elles sont aussi plus qu’utiles à des élèves<br />

qui veulent intégrer une école de management,<br />

une classe préparatoire économiques<br />

et commerciales générales (ECG)<br />

ou toute filière requérant un niveau minimum<br />

en mathématiques.<br />

Des filières menacées ?<br />

La plupart des formations exprimant<br />

des besoins dans les domaines des statistiques<br />

et des probabilités (classe préparatoire<br />

ECG, DCG, économie, psychologie)<br />

recommandent de suivre a<br />

minima l’enseignement de spécialité<br />

mathématiques en classe de première.<br />

Mais voilà, comme le soulignent encore<br />

les experts de l’Igésr, « certains élèves,<br />

inquiets du niveau attendu en spécialité<br />

mathématiques en classe de première,<br />

qui prépare sans doute davantage<br />

à la poursuite d’études en sciences,<br />

renoncent à cet enseignement de spécialité<br />

dont l’exigence du programme<br />

n’est, par ailleurs, pas forcément en<br />

adéquation avec leurs besoins futurs ».<br />

Ils peuvent ainsi se trouver écartés par<br />

les commissions d’examen des vœux<br />

de certaines formations, les privant de<br />

choix qui auraient pu correspondre à<br />

leurs souhaits de poursuite d’études.<br />

Dans ce contexte, les classes préparatoires<br />

Le ministère de l’Education nationale communique pour contrecarrer le message<br />

selon lequel les filles abandonnent massivement les mathématiques.<br />

ECG paraissent pour l’instant les grandes<br />

perdantes de la réforme du bac général.<br />

Alors qu’elles requièrent au moins l’enseignement<br />

de spécialité de Mathématiques<br />

en première et l’option Mathématiques<br />

complémentaires en terminale,<br />

elles sont loin d’avoir fait le plein de candidats<br />

cette année. Comme le montre le<br />

tableau ci-dessous leur taux de remplissage<br />

est seulement de 69 % alors que<br />

toutes les autres CPGE recrutant en voie<br />

générale ont un taux de remplissage supérieur<br />

à 80 %, qu’elles soient littéraires ou<br />

scientifiques. Sans que les chiffres soient<br />

encore publics on évoque une baisse de<br />

plus de 9 % des inscriptions.<br />

Le « Plan mathématiques »<br />

Suite au rapport « 21 mesures pour<br />

enseigner les mathématiques » de Cédric<br />

Villani et Charles Torossian, un « Plan<br />

mathématiques » a été mis en œuvre à<br />

l’école primaire dès 2018 et est désormais<br />

étendu au collège. Au début de l’année de 2 de ,<br />

un test de positionnement permet d’évaluer<br />

le niveau des élèves en mathématiques dans<br />

quatre domaines principaux : organisation<br />

et gestion des données ; nombres et<br />

calculs ; géométrie ; calcul littéral. Cette<br />

évaluation des compétences permet de<br />

mettre en place un soutien personnalisé<br />

pour ceux qui ont besoin de s’améliorer.<br />

Dans le 1er degré, le Plan mathématiques.<br />

se traduit par une transformation profonde<br />

Prudente dans son analyse la mission de<br />

l’Igésr, d’ailleurs dirigée elle-même par<br />

le responsable de la réforme des classes<br />

préparatoires EC, Olivier Sidokpohou,<br />

note que « l’analyse des causes est délicate<br />

et dépasse le cadre de la mission,<br />

mais nécessite sans doute d’aller au-delà<br />

des explications conjoncturelles (nouvelle<br />

organisation de la formation, absence<br />

de journées d’information dans les<br />

lycées pour cause de pandémie) et d’interroger<br />

l’adéquation entre un vivier renouvelé<br />

et l’offre de formation ». En résumé<br />

il va sans doute falloir se résoudre<br />

à réduire la part des mathématiques pour<br />

recruter en ECG.<br />

de la formation continue des professeurs<br />

des écoles. Désormais, un référent<br />

mathématiques est présent dans chaque<br />

circonscription pour les accompagner.<br />

Dans le 2 nd degré, ce Plan permet<br />

l’implantation à terme de 300 laboratoires de<br />

mathématiques dans les lycées et collèges,<br />

lieux de formation à long terme, entre pairs<br />

et au plus près du terrain. Les laboratoires<br />

s’articulent autour d’interventions<br />

d’enseignants-chercheurs organisées en<br />

fonction des besoins des enseignants.<br />

Depuis 2018, près de 150 laboratoires<br />

se sont développés dans les collèges.<br />

40


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS REPÈRES<br />

MARS <strong>2022</strong> N° 58<br />

Que faire ?<br />

De l’avis général le plus simple serait de<br />

repositionner les mathématiques dans<br />

le tronc commun. Mais cela signifierait<br />

d’une part de composer deux groupes de<br />

niveau – pour ceux qui veulent absolument<br />

entrer dans une filière scientifique et<br />

les autres – d’autre part recruter massivement<br />

des professeurs de mathématiques.<br />

Un tronc commun vraiment commun à<br />

tous ce serait en fait dispenser des cours<br />

de mathématiques non seulement aux<br />

ex ES et S mais aussi aux ex L, qui pouvaient<br />

en être totalement privés. À moins<br />

d’inventer une nouvelle façon d’enseigner<br />

les mathématiques, ou de faire travailler<br />

beaucoup plus les professeurs, le retour<br />

dans le tronc commun apparaît donc irréaliste<br />

à ce stade.<br />

Une solution plus réaliste pourrait être<br />

de créer deux spécialités de niveau différent<br />

sur le modèle des options (Mathématiques<br />

complémentaires et Mathématiques<br />

expertes) de terminale. D’ailleurs<br />

le Comité de suivi de la réforme du bac<br />

et du lycée préconisait déjà de créer des<br />

groupes de niveau au vu des difficultés<br />

d’une bonne part des élèves de première<br />

à suivre la spécialité.<br />

De quelles doublettes sont originaires les élèves<br />

qui ont postulé en ECG en 2021 ?<br />

Sébastien Gémon<br />

L’origine sociale des élèves et leurs choix de spécialités sont corrélés.<br />

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