28.12.2021 Views

Dumas de Demain: The French Literary Magazine Vol. 7

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Le soleil défie maintenant l’estompe de la brume. On voit

alors des bateaux qui tachettent l’horizon, leurs voiles visibles au

loin, légèrement ballotées par la brise matinale.

C’est un de ces matins mouillés de rosée et de lumière, où

chaque moment est une éclaboussure qui ondule dans ma mémoire.

On peut disparaître dans la douceur. Là-bas, à chaque instant-

Attends- je dois changer de film.

On peut voir un tablier de jeu de go oublié sur le sable.

C’est l’après-midi, on le voit se laisser baigner dans le soleil sans

retenue, détendu. Son corps allongé sculpte le sable chaud qui semble

presque le border.

Il y a des pots vides de kakigōri à côté. On mange comme

des gamins ; le sirop de fraise coule sur nos doigts, sur nos mains et

sur le sable blanc qu’il constelle de gouttelettes rouges. Il rit sans

cesse.

Il n’y a pas d’horloge cadré sur un mur derrière nous : le

temps, il s’écoule sur nous. Les vagues avancent furieusement sur la

plage puis se retirent, un mouvement sauvage qui nous échappe,

incontrôlable. On se laisse bercer par leur bruit, comme un vinyle

rayé qui joue sans cesse le même morceau, pas une octave plus fort,

mais qui tire sur le temps comme si c’était un fil. C’est ça, Kamakura

: les jours qui se défont comme des ricochets sur l’eau.

Le soleil se fond dans la mer, sur les flots reluisent ses

derniers éclats rouges. On arrive au bout du film.

Lui, il n’est plus là. Je ne vois plus les rivages, seulement

leurs silhouettes qui me tiennent. Le clapotis des vagues s’affaiblit, se

perd peu à peu dans les bruits de la ville qui finissent par l’anéantir.

L’odeur iodée de l’air se mêle de tabac et de café dilué de

distributeur.

Septième édition | 23

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!