Essentiel Prépas N°55 - Décembre 2021

L'Essentiel du Sup Prépas est le magazine numérique dédié aux professeurs des classes préparatoires, aux étudiants et à leurs parents. Chaque mois, retrouvez toute l'actualité des classes préparatoires économiques et commerciales et des Grandes Ecoles. Ce magazine vous est proposé par HEADway Advisory, cabinet de conseil en stratégie dédié à l'enseignement supérieur. L'Essentiel du Sup Prépas est le magazine numérique dédié aux professeurs des classes préparatoires, aux étudiants et à leurs parents. Chaque mois, retrouvez toute l'actualité des classes préparatoires économiques et commerciales et des Grandes Ecoles. Ce magazine vous est proposé par HEADway Advisory, cabinet de conseil en stratégie dédié à l'enseignement supérieur.

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DÉCEMBRE 2021 | N° 55 CLASSES PRÉPAS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES GÉNÉRALES PORTRAIT Isabelle Huault (emlyon BS) DÉBAT Étudier au temps du Covid DOSSIER Se forger un profil international, la marque des Grandes écoles Eloïc Peyrache : « Pourquoi nous faisons évoluer le concours d’HEC Paris »

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> | N° 55<br />

CLASSES PRÉPAS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES GÉNÉRALES<br />

PORTRAIT<br />

Isabelle Huault (emlyon BS)<br />

DÉBAT<br />

Étudier au temps du Covid<br />

DOSSIER<br />

Se forger un profil international,<br />

la marque des Grandes écoles<br />

Eloïc Peyrache :<br />

« Pourquoi nous faisons évoluer<br />

le concours d’HEC Paris »


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

ÉDITO + SOMMAIRE<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

CONCOURS :<br />

LES TENSIONS S’APAISENT<br />

Comme tout processus d’évolution en France celui de la réforme des<br />

concours post classes préparatoires EC se fait dans une tension plus ou<br />

moins forte. Il faut pour autant distinguer deux sujets : d’un côté la volonté<br />

des écoles du haut du panier de s’ouvrir plus largement aux candidats<br />

boursiers, de l’autre l’évolution des épreuves qui vont accueillir la première<br />

promotion des élèves des classes préparatoires économiques et<br />

commerciales générales (ECG) en 2023.<br />

La question de l’ouverture sociale des Grandes écoles de management<br />

concerne essentiellement celles du top 5 et même du top 3 puisque seule<br />

HEC Paris, ESCP et Essec ont été appelées par le ministère de l’Enseignement supérieur,<br />

de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) à s’impliquer dans une démarche qui<br />

les a réunies aux côtés de l’Ecole polytechnique et des Ecoles normales supérieures<br />

(ENS). À ce jour toutes trois ont pris des mesures. En favorisant les seuls étudiants<br />

boursiers cubant, HEC Paris entend faire passer un message fort que résume ainsi<br />

son directeur général, Eloïc Peyrache : « Les classes préparatoires ont une extraordinaire<br />

capacité à réduire les inégalités par rapport à la sortie du bac. Mais cela peut<br />

prendre du temps. Maintenir la bonification – ni plus ni moins – pour les étudiants<br />

boursiers s’ils cubent nous permet de les mettre sur la même ligne de départ au<br />

concours que les carrés non boursiers. Cette année de plus leur donne ainsi toute<br />

leur chance d’exprimer tout leur potentiel ». De son côté l’Essec a préféré opter pour<br />

un « double appel » à l’oral pour les étudiants boursiers quand ESCP a rendu son<br />

cursus absolument gratuit pour les boursiers à partir du rang 4.<br />

À ces controverses sur une certaine discrimination positive pour les<br />

boursiers se sont ajoutées d’autres sur les épreuves 2023. Deux sujets<br />

cristallisent les tensions : les nouvelles épreuves d’ESH et de langues. En ESH un<br />

certain nombre de professeurs de classes préparatoire s’inquiètent de savoir si<br />

leurs concepteurs ont bien saisi tout l’esprit des programmes. En langues, et plus<br />

précisément, pour la banque ELVI, les interrogations portent sur la complexité des<br />

épreuves. Est-il bien raisonnable de compliquer des épreuves que vont passer des<br />

étudiants qui ne postulent pas qu’à HEC et aux plus réputées des écoles ? De plus<br />

est-ce opportun l’année même où vont les passer des élèves qui ont vécu des confinements<br />

en première et terminale ? Des élèves dont le niveau est donc sans doute<br />

moins excellent que celui de leurs prédécesseurs, quels que soient les efforts de<br />

leurs professeurs pendant deux ans. Une fâcheuse corrélation entre l’entrée en vigueur<br />

des nouvelles classes préparatoires ECG et les nouvelles épreuves.<br />

Mais soyons optimistes : le dialogue n’est pas rompu entre les professeurs et les<br />

concepteurs des épreuves. Des réunions ont<br />

lieu régulièrement pour s’entendre autour de<br />

leur but commun : former et recruter les meilleurs<br />

élèves.<br />

Sommaire<br />

LES ESSENTIELS DU MOIS<br />

4 • Rennes SB fête ses 30 ans<br />

5 • HEC mobilise les écoles face à la crise<br />

climatique<br />

6 • Classements : Skema aux trousses<br />

de emlyon BS<br />

7 • Un nouveau campus à Paris<br />

pour Grenoble EM<br />

9 • IMT BS et Télécom SudParis unis dans la<br />

créativité<br />

10 • Combien d’étudiants en <strong>2021</strong>-2022 ?<br />

11 • BCE : un concours distinct<br />

pour la filière littéraire<br />

12 • Les prépas EC vues par leurs élèves<br />

13 • Concours 2022 : ce qu’il faut retenir<br />

ENTRETIENS<br />

14 • Eloïc Peyrache,<br />

Directeur général de HEC Paris<br />

DOSSIER<br />

19 • Se forger un profil international,<br />

la marque des Grandes écoles<br />

PORTRAIT<br />

26 • Comment se forge un destin ?<br />

Isabelle Huault : l’évidence emlyon<br />

31 • De l’hybridation comme dépaysement<br />

DÉBAT<br />

38 • Étudier au temps du Covid<br />

Olivier Rollot, rédacteur en chef<br />

ORollot<br />

« L’<strong>Essentiel</strong> du sup » est une publication du groupe HEADway<br />

Advisory, SAS au capital de 30 000 €, RCS 53298990200046 Paris,<br />

CPPAP 0920W93756, 33, rue d’Amsterdam, 75008 Paris.<br />

Directeur de la publication : Sébastien Vivier-Lirimont.<br />

Rédacteur en chef : Olivier Rollot (o.rollot@headway-advisory.com).<br />

Responsable commerciale : Fanny Bole du Chomont<br />

(f.boleduchomont@headway-advisory.com).<br />

Création graphique et mise en pages : Élise Godmuse / olo. éditions<br />

Photo de couverture : EM Strasbourg<br />

2


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Rennes SB fête ses 30 ans<br />

C’est en 1990 que Rennes SB fut créée. Pandémie oblige c’est en <strong>2021</strong><br />

qu’elle fête ses 30 ans. Business school française dont la faculté est la plus internationale<br />

– hors l’Insead – selon le dernier classement du Financial Times, Rennes SB<br />

a tout de suite été créée dans une dimension multiculturelle.<br />

«<br />

Ce qui est en train de se jouer aujourd’hui c’est<br />

une triple hybridation : multiculturelle, avec<br />

une diversité de personnes qui prennent une<br />

décision ensemble ; digitale, avec notamment<br />

une problématique de cybersécurité ; humaine, avec la<br />

géopolitique, la philosophie, les sciences humaines »,<br />

définit celui qui est le quatrième directeur général de<br />

l’école, Thomas Froehlicher, et insiste également sur<br />

la « nécessité de former des managers qui sauront<br />

gérer les évolutions environnementales ».<br />

Un développement maitrisé. « Nous allons continuer<br />

à grandir avec des atouts considérables. D’abord<br />

financier, car nous avons des résultats que nous consacrons<br />

entièrement aux étudiants en tant qu’association,<br />

avec également une réserve de plusieurs millions que<br />

nous n’utiliserons qu’en cas de difficultés », explique<br />

François Chatel, le président de l’école, qui insiste sur<br />

la « nécessité de pouvoir assurer la pérennité de l’école<br />

pour que les étudiants soient certains que leur diplôme<br />

aura toujours de la valeur dans cinquante ans ».<br />

Cette année Rennes SB s’est également installée à Paris,<br />

à deux pas de la gare Saint-Lazare pour y délivrer des<br />

formations en formation continue, des MSc mais aussi<br />

son programme Grande école aux alternants pour leur<br />

éviter de devoir revenir à Rennes suivre leurs cours.<br />

À Rennes ce sont 520 nouvelles chambres étudiantes<br />

qui vont être construites<br />

pour les étudiants.<br />

Alors que 95 % de ses<br />

professeurs sont internationaux,<br />

Rennes SB<br />

recrute aujourd’hui des<br />

professeurs de plus en<br />

plus expérimentés : 11 ans<br />

en <strong>2021</strong> contre 5 ans en<br />

2016. Des professeurs<br />

dont les derniers recrutés,<br />

dont plusieurs sont venus<br />

du Royaume-Uni après<br />

le Brexit, revendiquent<br />

près de 20 000 citations<br />

dans les publications de<br />

recherche quand elles<br />

n’étaient qu’un peu plus<br />

de 1 000 en 2020.<br />

Des effectifs en hausse. « Last but not least notre<br />

recrutement <strong>2021</strong> est marqué par le retour des étudiants<br />

internationaux et notre croissance est plus forte qu’avant<br />

le début de la pandémie », se réjouit Thomas Froehlicher,<br />

un temps inquiet pour une croissance « largement fondée<br />

sur le recrutement d’étudiants internationaux ». Alors<br />

que la Chine et l’Inde représentaient la plus grande part<br />

des recrutements avant la pandémie, les États-Unis et<br />

le Canada, mais aussi en Afrique des pays de langue<br />

anglaise, montent aujourd’hui en puissance.<br />

En France le passage au concours Ecricome en <strong>2021</strong> a<br />

eu des effets positifs avec notamment une augmentation<br />

de 11 % des élèves issus des classes préparatoires.<br />

« Nous sommes passés de 56 % à 66 % de duels<br />

avec les écoles du top 10 avec 24 % d’élèves que nous<br />

aurions ou recruter contre 19 % », se félicite encore<br />

le directeur, qui s’attend également à recevoir 1 000<br />

étudiants en contrats d’alternance en 2022.<br />

L’IMT BS sensibilise<br />

aux VSS<br />

L’Institut Mines Télécom,<br />

dont fait partie l’IMT BS, a<br />

créé une solution novatrice<br />

afin de sensibiliser aux<br />

violences sexistes et sexuelles<br />

en partenariat avec Reverto<br />

et Handsaway. Durant 20<br />

minutes, le spectateur se<br />

glisse dans la peau d’une<br />

étudiante victime de<br />

violences sexistes et sexuelles<br />

grâce à un casque de réalité<br />

virtuelle. Cette expérience<br />

est destinée aux élèves afin<br />

de les aider à identifier les<br />

différents types de violences,<br />

susciter de l’empathie et<br />

avoir les clés pour réagir<br />

face à ce type de situation.<br />

4


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

HEC mobilise les écoles face<br />

à la crise climatique<br />

Autour de HEC Paris, le collectif Business Schools<br />

for Climate Leadership (BS4CL.org) regroupe<br />

des business schools européennes leaders :<br />

Oxford Saïd Business School, Cambridge Judge<br />

Business School, IE Business School, IESE Business<br />

School, INSEAD, International Institute for Management<br />

Development et London Business School.<br />

Leur objectif est de « soutenir les décideurs et les organisations<br />

actives dans le domaine du climat en menant des<br />

recherches conjointes afin d’identifier et de concevoir<br />

les meilleures pratiques, toutes générations et tous secteurs<br />

confondus, afin d’accélérer la réponse du monde<br />

économique au changement climatique ». Collectivement,<br />

ils sensibiliseront le public à l’urgence de la lutte contre<br />

le changement climatique, à la nécessité de s’adapter<br />

à ce phénomène, et ils en maximiseront l’impact grâce<br />

à l’action conjointe de leurs huit communautés d’alumni.<br />

Dans un premier temps, les universitaires des huit<br />

écoles fondatrices ont collaboré à l’élaboration d’un kit<br />

ressource BS4CL sur le leadership climatique, qui a été<br />

présenté lors de la COP26 à Glasgow le 10 novembre.<br />

Le collectif tient également une série de webinaires<br />

accessibles sur son site et publie un « kit ressource ».<br />

BSB va-t-elle ouvrir un grand campus à Paris ?<br />

Après Lyon l’installation de BSB dans<br />

la capitale est-elle le prochain objectif<br />

de BSB ? Aujourd’hui l’école bourguigno-lyonnaise<br />

ne possède qu’une antenne<br />

de 300 m 2 à Paris. « Nous voulons<br />

conserver des campus à taille<br />

humaine. Pas plus de 1 000 étudiants à<br />

Lyon, 2 500 à Dijon, pourquoi pas demain<br />

nous étendre à Paris », s’interroge<br />

Race to Zero est une campagne mondiale<br />

menée par les Nations Unies visant<br />

à rallier entreprises et dirigeants<br />

afin de réduire de moitié les émissions<br />

mondiales de carbone d’ici 2030. ICN<br />

Business School fait aujourd’hui partie<br />

des 1 050 universités et établissements<br />

d’enseignement supérieur mondiaux<br />

signataires de l’initiative Race to<br />

Stephan Bourcieu, le directeur général<br />

de BSB. Mais Paris n’est pas la seule option<br />

à laquelle pense Stéphan Bourcieu :<br />

« Nous pouvons également aller vers<br />

d’autres villes en France mais aussi à<br />

l’international. Ce que nous voulons absolument<br />

c’est conserver notre spécificité<br />

avec des campus à taille humaine. »<br />

ICN Business School s’engage<br />

pour le climat avec « Race to Zero »<br />

Zero for Universities and Colleges for<br />

the Climate. Parmi les 14 universités<br />

et établissements d’enseignement supérieur<br />

français signataires, ICN Business<br />

School fait partie des 8 écoles<br />

de management qui se sont engagées<br />

à atteindre la neutralité carbone d’ici<br />

2050 au plus tard.<br />

EN BREF<br />

• KEDGE lance un<br />

cycle de conférences<br />

« Thinking Out Loud »<br />

pour « penser autrement ».<br />

Le 1er rendez-vous a eu<br />

lieu le 24 novembre avec<br />

un hommage à Joséphine<br />

Baker : « Osez Joséphine :<br />

Black Cultures Matter ».<br />

• La plateforme audio<br />

Majelan et ESCP ont signé<br />

un accord de partenariat<br />

qui permet aux auditeurs<br />

abonnés de bénéficier<br />

de parcours d’initiation<br />

sur des thématiques liés<br />

au management. Cinq<br />

programmes seront<br />

proposés en <strong>2021</strong>-2022.<br />

• La chaire « Impact Positif »<br />

d’Audencia a créé un<br />

nouveau programme gratuit<br />

en ligne. Slow Fashion<br />

Training vise à accompagner<br />

les consommateurs aux<br />

enjeux et à la consommation<br />

d’une mode plus responsable.<br />

• Entre janvier 2020<br />

et novembre <strong>2021</strong>, 32<br />

enseignants-chercheurs<br />

sont venus renforcer le<br />

corps professoral de l’EM<br />

Normandie. Alors qu’elle<br />

emploie aujourd’hui une<br />

centaine de professeurs<br />

permanents de 29<br />

nationalités, la Faculté devrait<br />

atteindre ses objectifs de<br />

200 professeurs permanents<br />

à horizon 2030, à raison de<br />

15 recrutements par an.<br />

Audencia soutient la mise<br />

en œuvre des « Contrats<br />

à Impact Écologique »<br />

Pilotés par l’ADEME<br />

(Agence de la transition<br />

écologique), les « Contrats<br />

à Impact Écologique » sont<br />

une innovation dérivée<br />

des « Contrats à Impact<br />

Social » (CIS). Basés sur un<br />

partenariat entre le secteur<br />

public, des financeurs privés<br />

et des innovateurs associatifs,<br />

ils sont destinés à favoriser<br />

l’émergence de projets<br />

sociaux et environnementaux<br />

innovants. Dans ce cadre<br />

l’investisseur privé préfinance<br />

le projet et prend le risque<br />

de l’échec en échange<br />

d’une rémunération prévue<br />

d’avance en cas de succès.<br />

Après avoir participé à<br />

l’appel à projets en 2020 en<br />

aidant l’ADEME à définir<br />

sa politique et à animer les<br />

relations avec les porteurs<br />

de CIE, Audencia démarre<br />

un projet de recherche<br />

de 4 ans sur le sujet.<br />

5


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Classements : Skema<br />

aux trousses de emlyon BS<br />

En gagnant deux places dans le Classement 2022<br />

des écoles de management du Figaro, Neoma<br />

établit la belle performance de l’année et obtient<br />

le meilleur rang qu’elle ait jamais obtenu dans un<br />

classement du Figaro (10 ème en <strong>2021</strong>, 8 ème en 2019, 11 ème<br />

en 2018, 14 ème en 2017, etc.). Mais l’école qui progresse<br />

le plus est l’ESC Clermont qui gagne cinq places en un<br />

an. Autre belle progression à Montpellier (deux places de<br />

gagnées en s’appuyant sur l’excellence de sa recherche)<br />

et l’Esdes (deux places également de gagnées notamment<br />

grâce à son accréditation par l’AACSB). A l’autre bout du<br />

spectre l’EBS s’enfonce de cinq places. L’EM Normandie,<br />

PSB et la SCBS perdent chacune deux places.<br />

Du côté du Classement 2022 des écoles de commerce<br />

de l’Etudiant le top 8 reste presque inchangé<br />

de l’Essec à l’Iéseg mais perd Grenoble EM qui passe<br />

à la 9 ème place. Les progressions sont plus loin dans le<br />

classement avec la belle remontée de l’ESC Clermont<br />

(quatre places de gagnées en un an pour atteindre la<br />

29 ème ), de l’EM Normandie et l’ISC Paris (trois places de<br />

gagnées pour être respectivement 18 ème et 22 ème ). A<br />

contrario PSB et Rennes SB vivent une année médiocre<br />

en perdant respectivement quatre et trois places (elles<br />

sont respectivement 25 ème et 14 ème ). L’EM Strasbourg et<br />

l’ISG perdent quant à elles deux places (21 ème et 32 ème ).<br />

Si on compare le classement de l’Etudiant et celui du<br />

Figaro la plus grande différence est toujours du côté de<br />

l’EM Strasbourg (16 ème pour Le Figaro mais 21 ème pour<br />

l’Etudiant) et l’EBS (33 ème et 28 ème ).<br />

Avec deux belles réussites cette année, l’ESC Clermont<br />

fait une spectaculaire remontée dans notre « Classement<br />

des classements » où elle gagne six places. Montpellier<br />

BS et l’ISC Paris en gagnent quant à elles eux. En revanche<br />

PSB perd quatre places et l’EBS trois.<br />

Action citoyenne : Inseec Grande école en première ligne<br />

Le Groupe SOS est aujourd’hui la première<br />

entreprise sociale d’Europe. Les<br />

écoles d’Omnes Education, dont Inseec<br />

Grande école, lancent avec lui le programme<br />

« PACT » (Programme d’Action<br />

Citoyenne de Terrain). Dans ce<br />

cadre 1 000 étudiants d’OMNES Éducation<br />

vont pouvoir bénéficier d’une immersion<br />

au cœur du travail social, sociétal<br />

et environnemental des structures<br />

du Groupe SOS en janvier 2022. À ho-<br />

rizon 2025, ce sont 100 % des 10 000<br />

primo-entrants des écoles d’OMNES<br />

Education qui seront impliqués chaque<br />

année dans le programme.<br />

En 2022 les primo-entrants INSEEC<br />

Grande École pourront ainsi vivre une<br />

immersion de plusieurs demi-journées<br />

réparties sur deux mois, au cœur d’associations<br />

et structures du Groupe SOS :<br />

centres d’hébergement personnes sans<br />

domicile, dispositifs d’accueil en faveur<br />

des personnes exilées, épiceries solidaires,<br />

associations de développement<br />

de l’agroécologie, ateliers et chantiers<br />

d’insertion…<br />

Ce partenariat a pour objectif d’être<br />

un « levier d’engagement par l’action<br />

de proximité, pour les nouvelles générations<br />

qui souhaitent s’impliquer sur<br />

des thématiques sociales, environnementales<br />

et citoyennes en faveur du<br />

bien commun ».<br />

6


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Un nouveau campus à Paris<br />

pour Grenoble EM<br />

Le 18 novembre, Grenoble Ecole de Management<br />

(GEM) a posé la première pierre - en fait une<br />

« poutre en bois » pour symboliser la structure<br />

en bois - de son futur campus parisien. GEM est<br />

implantée à Paris depuis 2014. Elle a d’abord occupé<br />

un campus avec l’EM Normandie dans le 16 e arrondissement<br />

(1 500 m 2 pour 500 étudiants et 6 programmes<br />

de formation) puis, au début 2020, ses locaux actuels<br />

dans le 14 ème arrondissement de Paris où elle reçoit<br />

1 000 étudiants dans 10 programmes sur 2 500 m 2 .<br />

En 2023, elle fera plus que doubler sa superficie en<br />

ouvrant un campus de 6 000 m 2 à Pantin.<br />

Ce nouveau campus parisien permettra de développer<br />

ses formations à destination des entreprises (formation<br />

continue et apprentissage), des bacheliers (avec deux<br />

bachelors) et des étudiantes et étudiants étrangers<br />

avec 3 MSc : Luxe ; Finance ; Affaires Internationales.<br />

Situé à Pantin, le futur campus de GEM se déploiera<br />

sur 6 étages en 2 bâtiments traversés par une « faille »<br />

architecturale. Il pourra recevoir 1 500 personnes en<br />

« Parlons Vrai » : l’EM Normandie<br />

rejette les lieux communs<br />

« PAS DE BULLSHITS. PARLONS<br />

VRAI » c’est ainsi que l’EM Normandie<br />

résume sa nouvelle campagne de communication.<br />

Les accroches opèrent selon<br />

un même schéma : elles associent<br />

un lieu commun traditionnellement vu<br />

dans les campagnes des écoles de commerce,<br />

avec, en contraste, ce que l’EM<br />

Normandie garantit à ses étudiants. Ce<br />

principe en deux temps entend « mettre<br />

en lumière la plus-value différenciante<br />

de l’école autour de thèmes clés, généralement<br />

traités à l’aide de formulations<br />

trop convenues ».<br />

Parce qu’un « discours vrai et percutant<br />

n’est pas forcément le même selon<br />

les cultures », l’EM Normandie a opté<br />

pour une approche différenciée à l’international<br />

avec « l’ambition de réaffirmer<br />

sobrement ses gages d’excellence ».<br />

simultané et 2 500 étudiantes et étudiants au total par<br />

an. Il disposera d’un auditorium de 300 places capable<br />

d’accueillir tout type d’événements, de 20 salles de<br />

classe entièrement modulables, d’une grande variété<br />

d’espaces de travail, de détente, d’échanges, d’un toit<br />

terrasse arboré…<br />

ESCP s’associe à, l’Institut<br />

Pasteur et CentraleSupélec,<br />

pour lancer à de<br />

nouveaux programmes<br />

de spécialisation<br />

• co-organisé avec l’Institut<br />

Pasteur, le programme<br />

APIL, Advanced Master<br />

Programme in Life Sciences<br />

and Health Management aura<br />

pour vocation d’accompagner<br />

de jeunes diplômés,<br />

doctorants ou jeunes salariés<br />

dans le lancement de leur<br />

projet d’entrepreneuriat,<br />

d’innovation ou de<br />

business développement<br />

sur le secteur des sciences<br />

de la vie et de la santé.<br />

• le MSc in Industry<br />

Transformation Management,<br />

lancé de concert avec<br />

CentraleSupélec,<br />

« combinera quant à lui des<br />

compétences en leadership<br />

et en ingénierie ». Cette<br />

spécialisation permettra<br />

aux diplômés/futurs leaders<br />

« d’accompagner les<br />

entreprises du secteur de<br />

l’industrie dans leurs projets<br />

de transformation tout en<br />

instillant de l’innovation ».<br />

Audencia soutient les<br />

bacheliers professionnels<br />

À la rentrée 2022, des<br />

bacheliers professionnels qui<br />

doutent de pouvoir poursuivre<br />

dans l’enseignement<br />

supérieur pourront intégrer<br />

gratuitement le nouveau<br />

programme d’Audencia :<br />

le Parcours Sirius. Ce<br />

programme d’un an, de<br />

septembre à mai, a été<br />

conçu spécifiquement<br />

pour les bacheliers ayant<br />

perdu confiance en leur<br />

capacité à faire des études<br />

supérieures. Il doit leur<br />

permettre de reprendre<br />

confiance en eux et optimiser<br />

leurs chances de réussite,<br />

mais aussi la possibilité<br />

d’intégrer Audencia<br />

Bachelor via une voie<br />

spécifique. Au programme :<br />

renforcement des acquis<br />

scolaires, programme de<br />

développement personnel<br />

(coaching d’orientation, etc.),<br />

ouverture internationale<br />

(internationalisation à<br />

domicile et voyage dans<br />

une capitale européenne)<br />

et ouverture sociale,<br />

culturelle et professionnelle<br />

(visites culturelles,<br />

d’entreprises, mentorat<br />

par des professionnels).<br />

À l’issue de leur année Sirius,<br />

les étudiants pourront faire<br />

le choix d’intégrer Audencia<br />

Bachelor in Management.<br />

Ils seront évalués selon<br />

les mêmes épreuves que<br />

l’ensemble des étudiants.<br />

7


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

IMT BS et Télécom SudParis<br />

unis dans la créativité<br />

Comme chaque année les étudiants de 2 ème<br />

année du Programme Grande Ecole de l’Institut<br />

des Mines-Télécom Business School et<br />

du cursus ingénieur de Télécom SudParis se<br />

sont retrouvés pour leur « Semaine de créativité et<br />

d’innovation ». Cette année ils se sont interrogés sur<br />

les grands défis sociétaux du XXI e siècle. Mobilité,<br />

l’habitat et la smart city, le commerce de demain, la<br />

transition écologique, l’inclusion, l’enseignement… les<br />

équipes mixtes, composées d’ingénieurs et de managers,<br />

devaient « imaginer un produit permettant de<br />

résoudre ces enjeux, sans contraintes de faisabilité ».<br />

Une sous le signe du « design fiction ». Cette méthodologie<br />

allie science-fiction, design, créativité, prototypage<br />

et narration, et « place ainsi l’imaginaire au service de<br />

solutions innovantes ». Les étudiants appréhendent<br />

les bases de la créativité afin de construire un univers<br />

au sein duquel leur solution prend place. « Couplées<br />

à la dimension multiculturelle des équipes mixtes<br />

ingénieurs-managers, les méthodes pédagogiques<br />

expérientielles employées pendant cette semaine<br />

visent à stimuler la créativité des participants,<br />

l’interaction entre les experts<br />

entreprise, les coachs, les encadrants<br />

pédagogiques et l’apprentissage pair à<br />

pair », explique Flavien Bazenet, titulaire<br />

de la chaire Inventivités Digitales et enseignant-chercheur<br />

en entrepreneuriat à<br />

Institut Mines-Télécom Business School<br />

et concepteur de la semaine.<br />

Durant 5 jours, les étudiantes et étudiants<br />

apprennent et expérimentent des<br />

techniques collectives de gestion de l’innovation<br />

et de la créativité au travers de<br />

conférences, workshops, master classes<br />

thématiques, témoignages, rencontres<br />

avec des enseignants, professionnels,<br />

artistes du numérique et ateliers immersifs<br />

créatifs leur permettant d’avoir un<br />

nouveau regard sur l’intelligence artificielle,<br />

l’innovation et la créativité.<br />

MBS embauche<br />

deux « Life coaches »<br />

La mission des deux « Life coaches »<br />

que Montpellier BS vient d’embaucher<br />

est d’« accompagner les étudiants à mobiliser<br />

leur plein potentiel pour évoluer<br />

dans tous les domaines ». « Le coaching<br />

est un processus responsabilisant<br />

qui consiste à analyser avec eux<br />

leur situation actuelle et identifier les<br />

croyances qui freinent leur développement<br />

ainsi que les défis potentiels qu’ils<br />

devront relever », précisent Marion Catarina<br />

et Carine Audran, les deux Life<br />

coaches de MBS.<br />

Au fur et à mesure des séances, l’étudiant<br />

décide des mesures spécifiques à mettre<br />

en place pour accompagner le changement<br />

et le coach s’assure que chaque<br />

étape aille dans le sens des objectifs finaux.<br />

« Ce service est un nouveau levier<br />

face à des problématiques récurrentes<br />

que pouvaient rencontrer les étudiants,<br />

comme trouver un équilibre entre ses<br />

cours et son alternance, se préparer à<br />

un départ à l’étranger ou encore retrouver<br />

de la motivation dans ses études »,<br />

expliquent encore les deux coachs.<br />

EN BREF<br />

• Depuis la rentrée <strong>2021</strong>, les<br />

étudiants du Programme<br />

Grande Ecole de SKEMA<br />

qui ont choisi le parcours<br />

Consilience ont la possibilité<br />

de suivre des cours du<br />

Collège de France. de<br />

France. Ils ont suivi la<br />

leçon inaugurale de l’un des<br />

plus grands représentants<br />

de la francophonie : le<br />

professeur de droit Yadh<br />

Ben Achour sur « La<br />

révolution, une espérance ».<br />

• Grenoble Ecole de<br />

Management (GEM)<br />

propose deux nouveaux<br />

parcours transcontinentaux :<br />

à partir de janvier 2023,<br />

30 étudiantes et étudiants<br />

pourront réaliser le 2 nd<br />

semestre de la 3 ème année<br />

du Programme Grande<br />

Ecole de GEM au sein<br />

de l’Université nationale<br />

Chengchi (NCCU) à Taïpeï<br />

ou au sein de l’Université<br />

de Stellenbosch Business<br />

School en Afrique du Sud.<br />

• Les étudiants de dernière<br />

année d’INSEEC Grande<br />

École s’affrontent chaque<br />

année le temps d’une<br />

nuit autour de scénarios<br />

catastrophes qu’ils<br />

pourraient rencontrer<br />

en entreprise. Chaque<br />

étudiant se glisse dans la<br />

peau d’un gestionnaire de<br />

crise ou doit imaginer au<br />

mieux une situation qu’il<br />

pourrait rencontrer dans sa<br />

carrière professionnelle.<br />

• IMT Atlantique et Rennes<br />

SB ont signé un accord de<br />

double-diplôme. Les élèvesingénieurs<br />

d’IMT Atlantique<br />

pourront suivre une année<br />

supplémentaire de scolarité<br />

à Rennes SB afin d’obtenir<br />

le diplôme de Master en<br />

Management de Rennes<br />

SB ainsi que le diplôme de<br />

Master of Science, en plus<br />

du diplôme d’ingénieur<br />

généraliste d’IMT Atlantique.<br />

9


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Combien d’étudiants en 2022-2023 ?<br />

Après deux années exceptionnelles de réussite au bac, un semblant<br />

de normalité devrait commencer à apparaître en 2022.<br />

Résultat : les effectifs de néo-bacheliers vont peu à peu baisser<br />

pour retrouver leur étiage de 2019.<br />

Si 59 400 étudiants supplémentaires sont entrés<br />

dans l’enseignement supérieur en <strong>2021</strong> (+2,1 %)<br />

à la rentrée 2022, la hausse ne devrait ainsi plus<br />

être que de 0,6 %, soit 17 100 étudiants de plus<br />

selon la note du SIES sur les Prévisions des effectifs<br />

dans l’enseignement supérieur – Rentrées <strong>2021</strong> et 2022.<br />

Un moindre taux de réussite du bac. L’hypothèse<br />

que retient le SIES est celle d’un nouveau recul du taux<br />

de réussite au bac après déjà une baisse en <strong>2021</strong> de<br />

1,9 point par rapport à la session 2020 à 93,8 % de<br />

réussite, soit 5,7 points de plus qu’en 2019. Le SIES<br />

estime également que la hausse des taux de passage<br />

des étudiants déjà en formation dans le supérieur<br />

serait pérenne.<br />

Fortes variations dans les filières courtes. Beaucoup<br />

plus dépendantes que les autres des évolutions<br />

démographiques et de la réussite au baccalauréat,<br />

les filières courtes verraient leurs effectifs fortement<br />

varier aux rentrées <strong>2021</strong> et 2022. Dans les CPGE la<br />

baisse de 0,6 % qui aurait été enregistrée à la rentrée<br />

<strong>2021</strong> serait suivie d’une nouvelle baisse de 1,1 % en<br />

2022 (soit 900 étudiants de moins).<br />

Dans les instituts universitaires de technologie (IUT),<br />

la baisse de 0,7 % enregistrée cette année serait au<br />

contraire suivie d’un rebond de 0,3 % à la rentrée<br />

2022. En sections de technicien supérieur (STS), si les<br />

effectifs ont augmenté significativement à la rentrée<br />

<strong>2021</strong> (+19,5 % pour étudiants apprentis - soit 21 300<br />

étudiants de plus - et +2,5 % pour ceux sous statut<br />

scolaire), les effectifs diminueraient de 1,4 % en 2022.<br />

Par discipline, la réforme de l’accès aux études de<br />

santé mise en place à la rentrée 2020 a des effets sur<br />

la répartition des effectifs en <strong>2021</strong> : l’impossibilité de<br />

redoubler en 1 ère année conduit à une baisse importante<br />

des étudiants en Parcours Accès Santé Spécifique<br />

- PASS (-30 %) et à une hausse dans les autres<br />

disciplines, où les étudiants non admis en 2 ème année<br />

poursuivraient leurs<br />

études. En 2022, les effectifs n’augmenteraient qu’en<br />

sciences (0,4 %). Ils baisseraient en PASS (-3,7 %)<br />

et STAPS -1,9 %) et évolueraient peu dans les autres<br />

grandes disciplines.<br />

Les Grande écoles continuent leur progression.<br />

Selon la note du SIES, les étudiants sont beaucoup plus<br />

nombreux à la rentrée <strong>2021</strong> par rapport à la rentrée<br />

2020 que ce soir en écoles de commerce, gestion et<br />

vente (+7,1 %), dans les établissements d’enseignement<br />

universitaire privés (+5,4 %) et dans les écoles d’ingénieurs<br />

(+3,2 %). Ces trois filières accueilleraient 21 800<br />

étudiants de plus à la rentrée <strong>2021</strong>.<br />

Cette évolution positive se poursuivrait en 2022 sur un<br />

rythme soutenu mais inférieur à celui de <strong>2021</strong> (13 300<br />

étudiants de plus) soit une hausse de 3,5 % pour les<br />

écoles de commerce et de 2,7 % dans les établissements<br />

d’enseignement universitaire privés comme dans les<br />

formations d’ingénieurs. Là comme ailleurs la baisse<br />

du nombre de bacheliers se fera en effet sentir.<br />

Stagnation des effectifs universitaires. À l’université<br />

hors IUT, le nombre d’inscriptions aurait été<br />

en légère hausse - 0,3 % - en <strong>2021</strong> (4 200 étudiants<br />

de plus), puis à nouveau de 0,3 % en 2022 (4 600 étudiants).<br />

Après un repli à la rentrée 2020, dû à l’afflux<br />

de bacheliers, le taux de poursuite des néo-bacheliers<br />

à l’université hors IUT retrouverait ainsi la progression<br />

observée depuis 2017.<br />

Le nombre d’étudiants en licence n’en devrait pas moins<br />

légèrement diminuer lors des deux prochaines rentrées,<br />

l’effet du pic de naissance de l’an 2000 s’estompant<br />

(respectivement -0,1 % et -0,4 % aux rentrées <strong>2021</strong><br />

et 2022).<br />

10


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

BCE : un concours distinct<br />

pour la filière littéraire<br />

Les préparationnaires issus des différentes filières<br />

de Khâgnes (Ulm, Lyon et B/L) représentent<br />

environ 10 % des candidats BCE ces trois dernières<br />

années. Sur le modèle d’Ecricome, neuf<br />

écoles membres de la BCE (AUDENCIA, BSB, EDHEC<br />

Business School, emlyon business school, Grenoble<br />

Ecole de Management, ICN Business School, Institut<br />

Mines-Télécom Business School, SKEMA Business School<br />

et TBS Education) ouvrent un concours pour la filière<br />

littéraire distinct de celui de la filière économique et<br />

commerciale. A partir du concours 2023 un nombre de<br />

places sera réservéepour les candidats issus de cette<br />

filière qui représente aujourd’hui un total de 260 places<br />

pour les 9 écoles concernées (ce chiffre est donné à<br />

titre indicatif, les écoles se réservant la possibilité de<br />

modifier le nombre de places ouvertes qui sera publié<br />

au BO pour le concours 2023).<br />

Le écoles ouvrent un concours spécifique, qui s’appuie<br />

sur les mêmes épreuves qu’actuellement (épreuves<br />

BCE et épreuves BEL). Tous les candidats issus des<br />

différentes filières de Khâgnes (Ulm, Lyon et B/L) seront<br />

classés ensemble et séparément des candidats de la<br />

filière économique et commerciale, en fonction des<br />

épreuves et des coefficients choisis par chaque école.<br />

L’épreuve de Contraction de texte HEC disparaissant,<br />

les écoles qui utilisaient cette épreuve ont la faculté<br />

de choisir l’épreuve d’Etude et de synthèse de textes<br />

ESCP BS - HEC Paris.<br />

Les écoles qui ne font pas le choix de ce concours<br />

distinct reconduisent pour 2023 leurs modalités de<br />

recrutement des candidats de la filière littéraire, en maintenant<br />

l’interclassement de l’ensemble des candidats.<br />

TBS Education<br />

EN BREF<br />

• Pour lutter contre les VSS,<br />

Excelia a présenté un projet<br />

de renforcement de ses<br />

dispositifs existants, dans<br />

le cadre de l’appel à projets<br />

du MESRI « Soutien<br />

aux établissements<br />

d’ESR dans la lutte<br />

contre les violences<br />

sexistes et sexuelles »<br />

lancé en juillet <strong>2021</strong>. Ce<br />

projet a été retenu par<br />

le MESRI.<br />

• A l’occasion de la journée<br />

internationale de lutte<br />

contre les violences faites<br />

aux femmes, l’ESSEC<br />

Business School a signé le<br />

Manifeste pour la protection<br />

des femmes victimes de<br />

violence, aux côtés de la<br />

Ministre chargé de l’Égalité<br />

entre les femmes et les<br />

hommes, de la Diversité et<br />

de l’Égalité des chances,<br />

et d’acteurs économiques<br />

français. L’ESSEC est<br />

le seul établissement<br />

d’enseignement supérieur<br />

signataire du Manifeste.<br />

• L’association étudiante<br />

SimONU et KEDGE<br />

Business School ont organisé<br />

les 26 et 27 novembre <strong>2021</strong><br />

sur le campus de KEDGE<br />

à Marseille la 14 ème édition<br />

de SimONU Prépa, une<br />

simulation des Nations Unies<br />

à destination des élèves<br />

de classe préparatoire.<br />

Audencia et The Shift Project<br />

lancent ClimatSup Business<br />

Un travail similaire a déjà été effectué<br />

pour les étudiants ingénieurs avec le<br />

groupe Insa. Afin d’« acélérer la transformation<br />

de la formation des acteurs de<br />

l’économie pour y intégrer les grands enjeux<br />

de transition écologique et sociale »<br />

Audencia et The Shift Project viennent de<br />

lancer le projet ClimatSup Business. Ensemble<br />

ils vont réfléchir à la « meilleure<br />

manière de préparer les futurs acteurs<br />

de l’économie à ces défis en regard des<br />

besoins des entreprises et des fortes attentes<br />

des étudiants ». Il s’agit de définir<br />

un socle de connaissances et de compétences<br />

souhaitables en tronc commun (à<br />

travers une veille à l’international et l’apport<br />

d’experts internes et externes) puis de<br />

le décliner et l’approfondir par départe-<br />

ment, tout en acculturant les parties prenantes<br />

à travers un cycle de conférences<br />

d’intérêt général et la diffusion de ressources<br />

pédagogiques.<br />

Audencia n’est pas seule dans ce projet.<br />

Montpellier Business School et l’EM<br />

Normandie soutiennent l’initiative. CNP<br />

Assurances, le Commissariat général au<br />

développement durable (CGDD) et le<br />

consortium Finance ClimAct ont également<br />

rejoint le projet, plus spécifiquement<br />

sur le volet finance, tandis que le Campus<br />

de la Transition, des entreprises, groupes<br />

d’experts ou chaires accompagneront l’ensemble<br />

du projet. Des sondages, groupes<br />

de travail et conseils consultatifs sont prévus,<br />

ainsi qu’un comité de suivi composé<br />

de membres d’Audencia.<br />

Après un état des lieux qui a débuté<br />

un premier rapport intermédiaire sera<br />

rendu public en avril 2022 puis des recommandations<br />

seront faites sur la meilleure<br />

manière d’intégrer ces enjeux dans<br />

les formations existantes à travers l’élaboration<br />

d’un plan d’action. Enfin le<br />

rapport final sera diffusé en septembre<br />

2022.<br />

Le directeur général<br />

d’Audencia, Christophe<br />

Germain, lance le projet<br />

Audencia BS<br />

11


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Les prépas EC vues par leurs élèves<br />

La classe préparatoire « véhiculant des stéréotypes tenaces »,<br />

le NewGen Talent centre de l’EDHEC a décidé d’éclairer les parents<br />

et les élèves de terminale. Son étude donne donc la parole à ceux<br />

qui connaissent le mieux la filière prépa économique et commerciale<br />

aujourd’hui car ils viennent d’y passer deux ans.<br />

Premier constat : indépendamment des résultats<br />

des concours qu’ils ne connaissaient pas au<br />

moment de l’enquête, 81 % des élèves referaient<br />

le même choix.<br />

Pourquoi la prépa ? Les principales raisons du<br />

choix de la prépa sont le contenu des enseignements<br />

et l’acquisition de méthodes de travail. Mais le défi que<br />

représente la filière et les atouts d’une voie générale<br />

avant de se spécialiser constituent également des<br />

critères de choix importants.<br />

Pour les élèves qui ont fait le choix d’un établissement<br />

public la localisation et le montant des frais<br />

de scolarité ont été plus déterminants que<br />

pour les élèves de prépas privées, qui<br />

ont davantage considéré le challenge et<br />

la réputation de l’établissement.<br />

Avant de choisir définitivement une classe<br />

prépa économique et commerciale les<br />

élèves avaient envisagé d’autres filières<br />

majoritairement sélectives pour 76 %<br />

d’entre eux en particulier des prépas<br />

scientifiques, Instituts d’études politiques<br />

et des licences universitaires (notamment<br />

l’université Paris Dauphine).<br />

Comment jugent-ils la prépa ? Ils<br />

qualifient la prépa « d’expérience enrichissante<br />

», stimulante et passionnante mais<br />

aussi ce qui est plus surprenant heureuse,<br />

variée et collective. Et si une pression<br />

est ressentie par certains élèves, ils la<br />

qualifient volontiers de motivante. « Les<br />

élèves nous disent que la classe prépa<br />

n’est pas un moyen mais une fin en soi,<br />

un accomplissement qui ne les a pas<br />

seulement préparés aux concours des<br />

grandes écoles mais à la vie », confie<br />

Manuelle Malot, la directrice du NewGen<br />

Talent Centre de l’Edhec.<br />

Quelles qualités pour réussir en prépa ? Les<br />

qualités considérées utiles pour réussir en prépa sont<br />

la capacité à surmonter les difficultés, la détermination,<br />

l’organisation, la capacité de travail et l’ambition.<br />

D’autres qualités moins spontanément associées à<br />

la prépa sont également indiquées par les élèves :<br />

l’autonomie, la curiosité intellectuelle, la confiance en<br />

soi, l’humilité et l’esprit collaboratif.<br />

S’épanouit-on en prépa ?<br />

Les sources d’épanouissement en prépa sont nombreuses,<br />

ainsi sont citées la stimulation intellectuelle,<br />

la qualité de l’enseignement, l’envie de se dépasser<br />

et l’acquisition de qualités personnelles. Les élèves<br />

considèrent qu’il s’agit d’une « expérience fondatrice »<br />

leur a appris à se connaître, à avoir confiance, à se<br />

dépasser et finalement à devenir des adultes autonomes.<br />

12


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS L’ESSENTIEL DU MOIS DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Concours 2022 : ce qu’il faut retenir<br />

On connaît maintenant les dates et les conditions de passage<br />

des concours BCE et Ecricome. L’essentiel à retenir.<br />

Les dates de la BCE<br />

• Inscriptions : du 10 décembre à 9 h au 19 janvier 2022<br />

à 17 h sur concours-bce.com et concours-bel.fr<br />

• Épreuves écrites du 4 au 13 mai 2022<br />

• Résultats d’admissibilité : du 14 au 16 juin 2022<br />

• Épreuves orales : du 20 juin au 12 juillet 2022<br />

• Procédure Sigem : du 5 au 22 juillet<br />

Les dates d’Ecricome<br />

• Inscriptions : 10 décembre <strong>2021</strong> à 10 h au 11 janvier<br />

2022 à 23 h 59 sur http://www.ecricome.org/<br />

• Épreuves écrites : 25 au 27 avril 2022<br />

• Juin 2022 : résultats d’admissibilité<br />

• Épreuves orales : mi-juin à début juillet 202<br />

• Procédure Sigem : du 5 au 22 juillet<br />

Combien de places ? Combien ça coûte ?<br />

Peu d’écoles augmentent cette année le nombre de<br />

places ouvertes quand encore plus d’autres font le<br />

mouvement contraire. En ajoutant 20 places à son<br />

concours ICN surfe sur ses excellents résultats <strong>2021</strong>.<br />

A contrario IMT BS choisit de supprimer le même<br />

nombre de places pour éviter de ne pas faire le plein<br />

comme en <strong>2021</strong>. Un mouvement encore plus prononcé<br />

pour TBS et l’ISC qui suppriment respectivement 25<br />

et 60 places cette année. Au total ce sont en tout 50<br />

places de moins qui seront donc proposées par les<br />

écoles en 2022.<br />

Réforme du bac et temps<br />

de service des enseignants<br />

Dans une note la DEPP<br />

explique les effets, suite<br />

à la réforme du lycée, de<br />

la délivrance de certains<br />

enseignements de spécialité<br />

quasi exclusivement par des<br />

enseignants de la discipline<br />

concernée (mathématiques,<br />

SVT, SES, physique-chimie,<br />

histoire-géographie, langues,<br />

littérature et cultures<br />

étrangères) alors que d’autres<br />

peuvent concerner plusieurs<br />

disciplines. Résultat : les<br />

enseignants d’histoiregéographie<br />

et de SVT<br />

délivrent plus d’heures de<br />

cours quand les enseignants<br />

de SES et de mathématiques<br />

en délivrent moins.<br />

160,6 milliards<br />

En 2020, la France a consacré<br />

160,6 milliards d’euros à son<br />

système éducatif, soit 7 % de<br />

son PIB selon une note de la<br />

DEPP. La dépense moyenne<br />

s’établit à 8 900 euros :<br />

6 980 €pour un écolier,<br />

9 850 € pour un élève du<br />

second degré et 11 580 €<br />

pour un étudiant. La dépense<br />

intérieure d’éducation (DIE)<br />

se répartit entre le premier<br />

degré pour 29,3 %, le<br />

second degré pour 37,8 %,<br />

l’enseignement supérieur pour<br />

21 %. Depuis une dizaine<br />

d’années la place du premier<br />

degré et de l’enseignement<br />

supérieur se sont renforcées<br />

(respectivement de + 2,1<br />

points et + 1,3 point), alors<br />

que la part du secondaire<br />

diminue (- 2,9 points).<br />

ÉCOLE<br />

CANDIDATS NON<br />

BOURSIERS<br />

PLACES<br />

Audencia 150 € 540 (+10)<br />

Brest Business School 50 € 30<br />

BSB Burgundy School<br />

of Business<br />

50 € 250<br />

EDHEC BS 170 € 520<br />

EM Normandie 45 € 95<br />

EMlyon business<br />

school<br />

EM Strasbourg<br />

170 € 540<br />

295 € (pour les 5<br />

écoles Ecricome)<br />

220<br />

ESCP Business School 180 € 420 (+10)<br />

ESSEC 180 € 430 (+10)<br />

Excelia Business<br />

School<br />

Grenoble Ecole de<br />

Management<br />

50 € 95 (-5)<br />

145 € 550<br />

HEC Paris 195 € 400 (+20)<br />

ICN Business School 55 € 285<br />

Inseec Grande École 50 € 130<br />

Institut Mines Télécom<br />

Business School<br />

ISC Paris Grande<br />

École<br />

KEDGE Business<br />

School<br />

Montpellier BS<br />

NEOMA Business<br />

School<br />

Rennes School of<br />

Business<br />

SKEMA Business<br />

School<br />

SCBS South Champagne<br />

Business<br />

School<br />

60 € 160 (-20)<br />

50 € 40 (-60)<br />

295 € (pour les 5<br />

écoles Ecricome)<br />

295 € (pour les 5<br />

écoles Ecricome)<br />

295 € (pour les 5<br />

écoles Ecricome)<br />

295 € (pour les 5<br />

écoles Ecricome)<br />

545<br />

270 (+10)<br />

690<br />

325<br />

140 € 580<br />

50 € 55<br />

TBS Education 80 € 350 (-25)<br />

ENSAE Paris 135 € 15<br />

ESM de Saint-Cyr 165,60 € 41<br />

ENS Paris Saclay 92 € 4<br />

Les candidats boursiers à la BCE n’ont pas de frais de dossier. Pour<br />

postuler à Ecricome il leur faudra débourser 30 € de frais de dossier<br />

pour l’ensemble des écoles.<br />

13


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Eloïc Peyrache<br />

DIRECTEUR GÉNÉRAL DE HEC PARIS<br />

« Les étudiants sur critères sociaux ont besoin<br />

d’un peu plus de temps en classes préparatoires<br />

pour exprimer tout leur potentiel »<br />

À la direction d’HEC Paris depuis début<br />

<strong>2021</strong>, Eloïc Peyrache a entrepris d’en<br />

faire évoluer le concours. Il revient avec<br />

nous sur les points névralgiques et sur<br />

toute l’actualité de HEC Paris.<br />

Olivier Rollot : Le soutien que HEC entend<br />

apporter aux boursiers dès son concours<br />

2022 a fait couler beaucoup d’encre. Quelles<br />

en seront les modalités exactes ?<br />

Eloïc Peyrache : Tout le monde en retient l’idée d’une<br />

discrimination positive, alors qu’il s’agit tout d’abord de<br />

donner des points en plus à l’ensemble des étudiants<br />

dits « carrés ». L’effet premier sera ainsi d’accélérer le<br />

temps en classe préparatoire ce qui, indépendamment<br />

de la grande qualité du parcours en prépas, est une<br />

bonne nouvelle pour l’ensemble des candidats.<br />

C’est déjà le cas depuis longtemps dans les écoles<br />

d’ingénieurs. In fine, nous aurons aux alentours de 80 %<br />

de nos étudiants qui seront bonifiés et donc aucune<br />

stigmatisation des étudiants boursiers.<br />

O. R : Mais alors pourquoi ne conserver ce<br />

« coup de pouce » en cubes qu’aux seuls<br />

boursiers ?<br />

E. P : C’est effectivement la deuxième dimension de la<br />

mesure. Nous avons longuement étudié les données<br />

des étudiants boursiers sur critères sociaux. Il est clair<br />

que ces étudiants ont besoin d’un peu plus de temps en<br />

classes préparatoires pour exprimer tout leur potentiel.<br />

Les classes préparatoires ont une extraordinaire<br />

capacité à réduire les inégalités par rapport à la sortie<br />

du bac. Mais cela peut prendre du temps. Maintenir<br />

la bonification – ni plus ni moins – pour les étudiants<br />

boursiers s’ils cubent nous permet de les mettre sur la<br />

même ligne de départ au concours que les carrés non<br />

boursiers. Cette année de plus leur donne ainsi toute<br />

leur chance d’exprimer tout leur potentiel.<br />

O. R : Au-delà de l’ouverture sociale, ce<br />

dispositif a-t-il d’autres vertus ?<br />

E. P : L’analyse de nos données de concours montre<br />

qu’un tel système devrait avoir un effet positif sur la<br />

part des femmes admises à HEC. Un effet de l’ordre<br />

de 10 % d’accroissement.<br />

L’autre impact est de favoriser l’entrée d’élèves issus<br />

d’un plus grand nombre de classes préparatoires,<br />

HEC Paris<br />

Sa nomination en <strong>2021</strong><br />

Ce fut une consécration<br />

attendue pour celui qui<br />

incarnait depuis déjà<br />

plusieurs années HEC. Eloïc<br />

Peyrache a été nommé à<br />

l’unanimité par le conseil<br />

d’administration de l’école<br />

directeur général et dean<br />

d’HEC Paris le 17 janvier<br />

<strong>2021</strong>. Il s’était auparavant vu<br />

confier la direction générale<br />

par intérim d’HEC suite à<br />

la démission pour raison de<br />

santé en date du 30 septembre<br />

2020 de Peter Todd.<br />

Directeur général adjoint<br />

en charge de l’ensemble<br />

des programmes du groupe<br />

HEC depuis février 2019,<br />

Éloïc Peyrache est entré dans<br />

le groupe en 2003 comme<br />

assistant professeur et a ainsi<br />

franchi tous les échelons en<br />

étant notamment en charge<br />

de tous les programmes<br />

pré-expérience de 2009 à<br />

2019. Très impliqué dans<br />

les questions d’inclusion<br />

sociale il est président de<br />

la Sextant Foundation for<br />

Education depuis 2016.<br />

Éloïc Peyrache est diplômé<br />

de l’École normale<br />

supérieure de Paris-<br />

Saclay, agrégé d’économie<br />

et titulaire d’un master<br />

d’économie mathématique et<br />

d’économétrie de la Toulouse<br />

School of Economics (TSE).<br />

Il a obtenu son doctorat<br />

d’économie en 2003 et a<br />

été doctorant visitant à<br />

l’Université Northwestern<br />

de Chicago (2000) ainsi<br />

qu’à l’Université Autonoma<br />

de Barcelone (2001).<br />

14


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

IA : HEC Paris et<br />

l’Institut Polytechnique<br />

de Paris créent<br />

Hi ! PARIS<br />

HEC Paris<br />

notamment en dehors de l’île de France. Cette plus<br />

grande diversité est à notre sens une dimension clé<br />

pour l’avenir de la filière. Favoriser les carrés permettra<br />

un peu plus à des étudiants de province par exemple<br />

d’intégrer en deux années plutôt que de cuber à Paris.<br />

Logiquement nous devrions ainsi avoir une progression<br />

du nombre de lycées.<br />

En résumé avec cette réforme nous allons accroître la<br />

diversité de genre, sociale et territoriale sans stigmatiser<br />

une population plutôt qu’une autre.<br />

O. R : Ce n’en est pas moins une réforme à<br />

laquelle certains sont opposés.<br />

E. P : Nous avons travaillé depuis plusieurs années<br />

sur cette idée de bonification des carrés avec de<br />

nombreux proviseurs de prépa. Je conçois bien que<br />

les changements ne peuvent avoir 100 % d’adhésion.<br />

Mais c’est une mesure qui nous semble simple et juste.<br />

O. R : Vous subissez aussi la pression du<br />

gouvernement pour accroître la diversité<br />

sociale dans les « très grandes écoles ».<br />

E. P : Notre décision n’est pas liée à une quelconque<br />

pression du gouvernement. Nous sommes une institution<br />

académique pour laquelle les enjeux d’ascension<br />

sociale sont très importants. C’est cela qui nous pousse<br />

à prendre des mesures qui font sens.<br />

Nous ne sommes pas en train de plier le bras face à<br />

des injonctions politiques. Il y a plus de dix ans que<br />

nous sommes fortement mobilisés sur les questions<br />

d’égalité des chances. C’est un engagement très fort<br />

que nous avons pris, notamment avec le soutien de la<br />

fondation HEC, pour amener plus d’étudiants vers la<br />

filière. En dix ans nous sommes ainsi passés de 5 % à<br />

15 % de boursiers parmi nos étudiants. Mais il fallait<br />

aussi constater que nous étions parvenus à un palier<br />

et qu’il était temps de nous engager dans d’autres<br />

dispositifs complémentaires et justes.<br />

O. R : Une évolution des épreuves est-elle<br />

nécessaire pour favoriser la diversité<br />

sociale ?<br />

E. P : Tout en gardant l’esprit et l’exigence de nos<br />

concours, il est possible de mieux structurer certaines<br />

épreuves. Parfois, cela peut passer par le libellé des<br />

sujets. Un exemple : il y a quelques années, dans le<br />

cadre de notre épreuve d’oral dite de « triptyque », où<br />

les candidats tirent un sujet au hasard, nous avions<br />

posé la question « Faut-il rendre à la Grèce la Victoire<br />

de Samothrace ? ». Or l’un des deux candidats ne<br />

connaissait pas l’œuvre et donc n’a pas pu débattre.<br />

Il est apparu que poser la question autrement en<br />

indiquant « Faut-il rendre à la Grèce la Victoire de<br />

Samothrace, œuvre de l’antiquité exposée au Musée<br />

du Louvre ? » n’aurait pas changé l’esprit de l’épreuve<br />

et aurait permis au débat d’avoir lieu.<br />

En parallèle, nous voulons bien entendu conserver<br />

l’épreuve de culture générale. Mais là, aussi, en ajustant<br />

sans doute un peu la structure de manière à ce que<br />

le sujet soit compris et la culture générale de chaque<br />

candidat mobilisée au service du sujet à traiter. C’est<br />

une posture assez différente.<br />

Le tout nouveau centre<br />

interdisciplinaire de<br />

recherche et d’enseignement<br />

consacré à l’intelligence<br />

artificielle (IA) et aux<br />

sciences des données qu’ont<br />

créé HEC et l’Institut<br />

Polytechnique de Paris en<br />

2020 entend devenir un<br />

« leader mondial du domaine<br />

d’ici 5 ans ». Il s’appuie<br />

sur les 300 chercheurs<br />

et sur les infrastructures<br />

d’IP Paris et HEC Paris<br />

dans ces domaines.<br />

Hi ! PARIS interviendra dans<br />

des domaines d’applications<br />

clés tels que l’énergie et<br />

l’environnement, la défense<br />

et la sécurité, la santé, le<br />

retail et l’industrie du luxe,<br />

les télécoms, l’alimentation,<br />

la finance et l’assurance…<br />

Le Centre est entièrement<br />

financé par des entreprises<br />

mécènes mobilisées autour<br />

des deux institutions<br />

académiques avec le soutien<br />

de cinq mécènes fondateurs :<br />

L’Oréal, Capgemini,<br />

TOTAL, Kering et Rexel.<br />

15


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

En tête de l’employabilité<br />

des écoles de<br />

management<br />

HEC Paris<br />

O. R : Avec l’arrivée en 2023 des premiers<br />

candidats issus des nouvelles classes<br />

préparatoires économiques et commerciales<br />

générales (ECG), l’évolution des épreuves<br />

des concours fait débat. Notamment en<br />

langues. Notamment pour la banque Elvi<br />

dont vos professeurs font partie de ceux qui<br />

rédigent les sujets. Comment voulez-vous<br />

faire évoluer ces épreuves ?<br />

E. P : La concertation est importante pour une filière<br />

qui doit s’adapter régulièrement. Ce que nous souhaitons<br />

en faisant évoluer les épreuves de langues c’est<br />

que les étudiants s’expriment et écrivent mieux dans<br />

une langue étrangère. Notre vocation est de recevoir<br />

des étudiants du monde entier, qui doivent pouvoir<br />

communiquer entre eux.<br />

O. R : Mais faut-il vraiment supprimer toute<br />

épreuve de version ?<br />

E. P : Dans un univers où tout le monde dispose de<br />

Google Traduction, il était nécessaire de faire évoluer<br />

nos épreuves. Traduire de l’anglais au français, ou<br />

toute autre langue, cela nous intéresse moins. Nous<br />

voulons recevoir des étudiants qui s’expriment – à<br />

l’écrit comme à l’oral - en anglais, arabe, italien, etc.<br />

le thème ou la version sont sans aucun doute des<br />

exercices intéressants mais ne peuvent pas être au<br />

cœur de notre sélection.<br />

O. R : Vous entendez quand même les<br />

critiques que vous font les professeurs de<br />

langues de classes préparatoires?<br />

E. P : Bien sûr et nous évoluons ensemble, tant sur la<br />

longueur des textes du dossier ou des attendus des<br />

élèves. Je suis très ouvert à une association avec les<br />

professeurs de classes préparatoires pour affiner<br />

ensemble nos projets. Une nouvelle fois, le monde<br />

change. En mathématiques il y a aujourd’hui de la<br />

programmation. En langues nous avons besoin de<br />

plus d’expression personnelle. Il est très sain que les<br />

concours évoluent régulièrement.<br />

O. R : Aujourd’hui HEC Paris est la seule<br />

école de management à ne pas dispenser de<br />

bachelor. Allez-vous bientôt le faire ?<br />

E. P : Ce n’est en tout cas pas dans les cartons. Nous<br />

regardons bien entendu en permanence comment<br />

évoluent les business schools. HEC est aujourd’hui<br />

une graduate school, leader à la fois en formation<br />

continue, sur le segment des MBAs et dans le domaine<br />

des Master pre-expérience professionnelle. C’est une<br />

force extraordinaire.<br />

Il faut avoir en tête qu’avec la classe préparatoire,<br />

nous offrons en fait un véritable parcours intégré en<br />

5 ans. C’est avec les classes préparatoires que nous<br />

délivrons la formation en arts libéraux comme le font<br />

les plus grandes institutions mondiales, Wharton, le<br />

MIT (Massachusetts Institute of Technology), Harvard.<br />

La différence c’est que, dans ces grandes institutions,<br />

l’enseignement des liberal arts dure tout au long des<br />

À la deuxième place avec 18<br />

établissements bien placées,<br />

l’enseignement supérieur<br />

français se distingue<br />

encore une fois cette année<br />

ans le Global University<br />

Employability Ranking 2020<br />

du Times Higher Education.<br />

22 ème CentraleSupélec est<br />

même la mieux classée de<br />

l’Union européenne (avec<br />

22 places de gagnées en un<br />

an !) et devance HEC (24 ème ),<br />

l’Ecole polytechnique (30 ème ),<br />

Paris Sciences et Lettres<br />

(34 ème ), emlyon (36 ème ), Mines<br />

ParisTech (40 ème ), l’EDHEC<br />

(59 ème ) et l’Essec (80 ème ).<br />

16


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Classement des Masters<br />

in management du<br />

Financial Times :<br />

HEC toujours 2 ème<br />

HEC Paris<br />

quatre ans de bachelor. Dans notre modèle, il est concentré<br />

sur les deux années de classes préparatoires. La<br />

sélection ne se fait également pas au même moment.<br />

Mais sur le fond, le projet intellectuel est assez proche.<br />

O. R : La pandémie a été rude pour les<br />

business schools, notamment en Executive<br />

Education. Comment se portent les finances<br />

d’HEC aujourd’hui ?<br />

E. P : Notre structure de revenus est en fait assez<br />

équilibrée avec un tiers pour les MBAs, un tiers pour la<br />

formation continue et un tiers sur le segment pré-expérience.<br />

L’Executive Education a connu pas mal de<br />

soubresauts mais nous avons pu largement les surmonter<br />

dans la mesure où beaucoup de coûts sont<br />

également variables. De plus, des élèves, bloqués dans<br />

leurs pays, ont dû reporter leur arrivée en MBA. Tout<br />

ceci a eu un effet négatif. En revanche, nous n’avons<br />

jamais eu autant de candidatures en pré-expérience.<br />

Alors qu’HEC est une institution à but non lucratif dont<br />

le budget est chaque année à l’équilibre, ces deux dernières<br />

années, nous avons donc connu un léger déficit.<br />

O. R : Allez-vous un jour recevoir plus<br />

d’élèves en classes préparatoires ?<br />

E. P : Nous sommes passés de 380 à 400 places il y a<br />

quatre ans. Notre volonté a été, en parallèle, de continuer<br />

à accroître la diversité disciplinaire et internationale<br />

au sein du programme Grande Ecole. Et donc, à court<br />

terme, nous pensons rester à 400 admis.<br />

O. R : Comment se développent les<br />

collaborations entre HEC et ses partenaires,<br />

dont l’Ecole polytechnique, au sein de<br />

l’Institut polytechnique de Paris ?<br />

E. P : Elles sont en plein essor avec notamment la<br />

création d’un institut dédié à l’Intelligence artificielle<br />

(IA), HI ! Paris, il y a un an. Nous y recrutons ensemble<br />

des chercheurs de premier plan venus du monde entier<br />

et favorisons les collaborations. Je vous donne un<br />

exemple : aujourd’hui des professeurs de droit d’HEC<br />

travaillent avec des professeurs d’informatique de<br />

l’Ecole polytechnique pour développer une Intelligence<br />

artificielle pour la Cour de Cassation.<br />

Nous formons également plusieurs centaines d’élèves<br />

dans des programmes communs, que ce soit dans le<br />

domaine de l’intelligence artificielle, de l’entrepreneuriat<br />

ou de l’innovation<br />

O. R : Pas question pour autant pour vous de<br />

faire partie un jour de l’Institut polytechnique<br />

de Paris ?<br />

E. P : L’Institut polytechnique de Paris est une school<br />

of engineering avec laquelle nous avons conclu une<br />

alliance très forte. Nous avons des liens très forts<br />

sur beaucoup de sujets, dont celui de l’égalité des<br />

chances, mais pas vocation à entrer dans l’Institut<br />

polytechnique de Paris.<br />

Les 56 étudiants de Saint-<br />

Gallen dominent encore cette<br />

année les 493 de HEC, les<br />

972 de l’Essec et les quasi<br />

1 200 de ESCP dans le<br />

Classement <strong>2021</strong> des Masters<br />

in Management du Financial<br />

Times qui est marqué par<br />

un large statu quo. La<br />

plus grande surprise cette<br />

année vient de la montée<br />

en puissance de University<br />

College Dublin et de sa<br />

business school Smurfit :<br />

passant de la 8 ème à la 3 ème<br />

place elle expulse du podium<br />

une London business school,<br />

dont la position paraissait<br />

inexpugnable, grâce<br />

notamment à son premier<br />

rang dans le classement de<br />

la mobilité internationale.<br />

17


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS ENTRETIEN DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

O. R : Selon un classement que vient de<br />

publier le Times Higher Education, les<br />

diplômes français sont les deuxièmes les<br />

plus prisés au monde. Derrière les États-<br />

Unis. C’est un classement qui vous étonne ou<br />

pas ?<br />

E. P : Notre capacité d’attraction des meilleurs étudiants<br />

est excellente. Nous regardons par exemple<br />

de près quelle est la proportion, parmi les étudiants<br />

qui sont admis chez nous et dans d’autres institutions<br />

de premier plan, de ceux qui nous choisissent ou qui<br />

démissionnent. Le taux de confirmation est excellent.<br />

La France s’appuie également sur de très bonnes<br />

écoles d’ingénieurs.<br />

Cette réputation est bien entendu connue des recruteurs.<br />

À HEC nous recevons ainsi des entreprises<br />

présentes sur de nombreux continents qui viennent<br />

recruter des étudiants qu’elles emploieront ensuite<br />

dans le monde entier. Là aussi, prenons un exemple :<br />

Bain & Company, l’un des cabinets de conseil les plus<br />

renommés au monde, vient ainsi recruter sur le campus<br />

avec une grande partie de ses bureaux dans le<br />

monde, qu’il s’agisse de New York, Dubai, Hong Kong<br />

ou Londres. C’est une chance inouïe pour nos élèves,<br />

quelle que soit leur nationalité.<br />

O. R : La concurrence entre les business<br />

schools du monde entier est rude. Comment<br />

HEC la vit-elle aujourd’hui ?<br />

E. P : Je ne sais pas si c’est un effet Trump qui se poursuivrait,<br />

ou Brexit, mais nous n’avons jamais eu autant<br />

de candidatures. La France reste en effet extrêmement<br />

ouverte aux étudiants grâce aux mesures prises par<br />

les autorités pour les recevoir. La France reste une<br />

terre d’accueil. Dans un monde qui a tendance à se<br />

replier sur lui-même nous devons saluer la richesse<br />

de cette diversité. Sur notre campus des étudiants de<br />

110 nationalités, dont les pays sont parfois en guerre,<br />

se croisent.<br />

Promouvoir l’ascenseur social en France, mais aussi<br />

à l’étranger, fait partie de nos missions.<br />

O. R : Vous avez pris la direction d’HEC il y a<br />

moins d’un an, en janvier <strong>2021</strong>. Qu’est-ce que<br />

vous avez déjà pu faire évoluer depuis cette<br />

date ?<br />

E. P : Avec toute la communauté d’HEC, l’école, les<br />

alumni, la fondation, nous avons entrepris de redéfinir<br />

la raison d’être, la mission et les valeurs de l’école.<br />

Ensemble nous avons pu délivrer une feuille de route<br />

qui met l’impact à cœur de notre ambition.<br />

Dans une entreprise c’est souvent le triptyque « people<br />

/ business / finance » qui permet de créer de la valeur.<br />

Dans une business school, le triptyque est à mon sens<br />

articulé autour de « people / impact / ressources ». Les<br />

personnes de l’écosystème HEC - salariés, professeurs,<br />

étudiant ou diplômés - sont bien au cœur de notre<br />

capacité d’action. À nous de créer les conditions de<br />

pleine expression de cette énergie.<br />

L’impact, quant à lui, c’est le cœur de notre métier.<br />

C’est en grande partie celui de nos chercheurs qui<br />

forment des étudiants qui seront des leaders inspirés<br />

et inspirants. C’est aussi celui de nos équipes qui<br />

rendent cela possible et aident nos élèves à grandir.<br />

Les ressources sont quant à elle une conséquence de<br />

notre impact et seront réinvesties au service de notre<br />

mission. C’est parce que nous sommes une formidable<br />

plateforme au service de l’impact que nous avons une<br />

capacité à générer des ressources externes avec notre<br />

fondation et nos alumni.<br />

Classements QS des<br />

masters : carton<br />

plein pour HEC<br />

Premiers en management<br />

et marketing, deuxième<br />

en finance, troisième<br />

en data sciences (avec<br />

un master conjoint avec<br />

l’Ecole polytechnique), les<br />

masters d’HEC s’imposent<br />

assez largement dans les<br />

différents classements des<br />

masters que publie QS :<br />

• en management, HEC<br />

précède la London business<br />

school et l’Essec, l’Insead<br />

est 4 ème , ESCP 8 ème ;<br />

• en marketing HEC<br />

précède Columbia et<br />

l’Imperial College, l’Essec<br />

est 4 ème , ESCP 5 ème , emlyon<br />

8 ème , l’Edhec 9 ème ;<br />

• en finance Oxford (Said)<br />

s’impose devant HEC<br />

et la London business<br />

school, l’Essec est 7 ème ;<br />

• en business analytics,<br />

le MIT s’impose devant<br />

UCLA (Anderson) et le<br />

MSc commun à HEC et<br />

l’Ecole polytechnique,<br />

l’Essec est 4 ème , ESCP 6 ème ;<br />

• en supply chain<br />

management aucune<br />

business school française<br />

n’atteint le top 10 dominé<br />

par l’incontournable<br />

MIT, Skema est 12 ème .<br />

18


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Se forger un profil<br />

international, la marque<br />

des Grandes écoles<br />

S’il est un domaine dans lequel l’expérience « Grande<br />

école de management » est reconnue c’est bien celui<br />

de l’international. Seulement avec la pandémie les<br />

destinations se sont raréfiées ou rapprochées. Alors que<br />

leur bilan carbone entre également en ligne de compte,<br />

comment vont évoluer les relations internationales ?<br />

Le campus chinois de Skema<br />

Skema BS<br />

19


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

C’est la marque des Grandes écoles<br />

de management françaises : elles<br />

sont les plus internationales qui<br />

soient. Et se déplacer est absolument<br />

nécessaire pour acquérir cette dimension<br />

internationale explique le directeur général<br />

de ESCP, Frank Bournois, : « Si on n’est<br />

jamais allé travailler dans une entreprise<br />

allemande, jamais sorti dans la rue en<br />

Allemagne on peut toujours essayer d’en<br />

parler grâce à des guides mais cela n’a rien<br />

à voir avec les parcours et les expériences<br />

que nous proposons. Nos campus – hérités<br />

du modèle historique de l’EAP – permettent<br />

cette acculturation. Le contact humain,<br />

l’empathie, l’adaptation à chaque profil,<br />

mais aussi le temps passé dans l’école et<br />

dans la capitale (car tous nos campus sont<br />

urbains !) sont autant de caractéristiques<br />

qui constituent le cœur de notre métier ».<br />

Le campus londonien de l’Edhec<br />

Edhec BS<br />

QUELLE PLUS-VALUE ?<br />

Dans un contexte post Covid l’époque du<br />

« tourisme académique » est bien finie.<br />

Chaque déplacement, séjour académique<br />

ou stage à l’international doit apporter une<br />

plus-value. « L’épisode Covid démontre, s’il<br />

en était encore besoin, que les mobilités<br />

internationales doivent entrer davantage<br />

dans une logique coût-bénéfice. Il ne s’agit<br />

plus de faire du tourisme académique<br />

comme cela a pu être le cas. Il faut en<br />

accroître la plus-value, non seulement<br />

en termes académiques, mais aussi en<br />

termes d’hybridation », assure Philippe<br />

Jamet, le directeur de la Paris School<br />

of Business.<br />

Et s’il fallait mieux profiter de son séjour<br />

académique pour découvrir d’autres<br />

disciplines que de rester dans une école<br />

de management ? Audencia propose ainsi<br />

des parcours doubles compétences<br />

à l’international. « Pour leur séjour à<br />

l’étranger, les étudiants pourront par<br />

exemple suivre un semestre dans une<br />

école de gastronomie à Florence, suivre<br />

des cours dans une Ecole de gaming<br />

aux Pays Bas ou bien dans une école<br />

de diplomatie à Washington, etc. Nous<br />

avons pour ce faire signé 10 accords de<br />

partenariats dans des domaines très<br />

variés », explique son directeur général,<br />

Christophe Germain.<br />

Autre option : se concentrer sur un domaine<br />

précis. Dans ce que Grenoble EM<br />

appelle le « Parcours Transcontinental »,<br />

il est possible pour les étudiants d’étudier,<br />

au cours de leur scolarité, dans quatre<br />

ou cinq campus emblématiques comme<br />

McGill, George Washington University<br />

(GWU), Cambridge, Pace University.<br />

Membre fondateur à Grenoble du Campus<br />

mondial d’innovation Giant, GEM entend<br />

ainsi renforcer encore cette dimension<br />

MTI (multimédia, technologie, informatique).<br />

« Des écosystèmes scientifiques<br />

et technologiques, comme celui de GIANT,<br />

il en existe une quinzaine dans le monde,<br />

avec qui nous sommes, par notre appartenance<br />

à GIANT, partenaires. Ils sont à<br />

Taïwan, en Corée du Sud, au Japon, sur<br />

« International at home »<br />

L’émergence de concepts<br />

comme l’« international at<br />

home » vise à produire à<br />

distance les compétences<br />

produites habituellement par<br />

une expérience internationale.<br />

« L’international commence<br />

dès l’accueil. Chaque<br />

étudiant doit avoir l<br />

sentiment d’être dans une<br />

école internationale, ce<br />

qui passe par le nombre de<br />

professeurs internationaux,<br />

l’accueil d’étudiants<br />

internationaux mais pas<br />

seulement. C’est d’abord une<br />

question organisationnelle<br />

pour donner une « global<br />

mindset ». Une approche<br />

longtemps négligée au profit<br />

de la seule mobilité et qui<br />

a évolué avec le Covid »,<br />

assure Hendrik Lohse<br />

20


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

la côte Est et Ouest des États-Unis…<br />

L’idée est de doubler le nombre de nos<br />

destinations de notre Transcontinental<br />

avec des Business schools ou Universités<br />

liées à ces mêmes écosystèmes sur les<br />

thématiques du MTI », confie le directeur<br />

général de GEM, Loïc Roche.<br />

Cette plus-value peut passer par des<br />

expériences extra académiques. « Excelia<br />

Business School a toujours fait reposer<br />

sa pédagogie sur des dispositifs expérientiels<br />

venant compléter les apports<br />

théoriques. Notre dispositif expérientiel<br />

est très riche : Humacité, Climacité,<br />

Cap’Anglophone, expatriation académique<br />

à l’étranger, double-diplôme à l’étranger »,<br />

assure le directeur général d’Excelia BS,<br />

Sébastien Chantelot. La mission Humacité<br />

consiste ainsi en un projet humanitaire,<br />

social ou citoyen au Depuis sa création<br />

en 2005, Humacité a fait participer les<br />

étudiants à des actions bénévoles dans<br />

des centaines d’associations à travers<br />

le monde.<br />

L’EUROPE A LE VENT EN POUPE<br />

Vous rêviez du Vietnam… et si vous<br />

essayiez la Belgique. Aujourd’hui, s’il<br />

n’est pas impossible de partir au bout du<br />

monde, les départs vers l’Europe sont<br />

privilégiés par les étudiants des écoles<br />

de management. Parce que les conditions<br />

d’études semblent plus rassurantes mais<br />

aussi parce que les retours au bercail sont<br />

relativement simples en cas de nouvelle<br />

pandémie. Dans les écoles c’est toute une<br />

stratégie qu’il a donc fallu repenser pour<br />

l’envoi de ses étudiants à l’international.<br />

D’autant qu’à cette question conjoncturelle<br />

s’ajoute une question structurelle :<br />

alors que le réchauffement climatique<br />

est une évidence de plus en plus patente<br />

l’enseignement supérieur doit revisiter ses<br />

pratiques en termes de déplacements.<br />

Un sacré dilemme alors que la dimension<br />

internationale est au cœur du projet<br />

des écoles de management. « Nous<br />

ne souhaitons pas faire une croix sur<br />

l’expérience internationale, qui reste<br />

La question des visas<br />

C’est unanimement reconnu :<br />

les autorités françaises ont<br />

été parmi les plus ouvertes<br />

du monde à l’accueil des<br />

étudiants internationaux en<br />

période de Covid. « Alors que<br />

la crise Covid et la fermeture<br />

des frontières menaçaient<br />

une attractivité qui s’effritait<br />

déjà, le MAEE et le MESRI<br />

ont très rapidement mobilisé<br />

les parties-prenantes,<br />

conférences, réseau des<br />

VPRI, Campus France,<br />

Crous etc. pour accompagner<br />

les établissements,<br />

permettre d’affiner au fil des<br />

informations disponibles,<br />

une gestion de l’accueil<br />

à flux tendus en suscitant<br />

des initiatives pour que<br />

collectivement, nous<br />

préservions la position<br />

de la France dans la<br />

course à l’attractivité »,<br />

se félicite Jean-Michel<br />

Nicolle, vice-président<br />

de la Cdefi (Conférence<br />

des directeurs des écoles<br />

françaises d’ingénieur) et<br />

directeur général de l’EPF.<br />

21


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

l’une des principales attentes de nos<br />

étudiants. La question se pose également<br />

pour savoir si des accords de cours à<br />

distance avec des universités partenaires<br />

peuvent suffire pour valider le semestre<br />

à l’étranger obligatoire dans nos écoles…<br />

Les cours ne constituent qu’une partie de<br />

cette expérience », analyse la directrice<br />

de TBS Education, Stéphanie Lerouge.<br />

ON N’EST JAMAIS MIEUX SERVI…<br />

Avoir ses propres campus permet de<br />

mieux gérer ses flux d’étudiants à l’international<br />

constate Stéphanie Lerouge :<br />

« Comme toutes les écoles, nous avons<br />

dû gérer les mécontentements de nos<br />

étudiants qui n’ont pu partir à l’international<br />

- sinon sur nos campus de Barcelone<br />

et Casablanca. Finalement, un nombre<br />

important de nos étudiants ont pu partir ».<br />

Même analyse du côté de l’EM Normandie<br />

dont le directeur, Elian Pilvin, met en<br />

valeur le développement des campus de<br />

l’école en Europe, à Oxford et Dublin, pour<br />

garantir toujours l’expérience internationale<br />

de ses étudiants : « Nous faisons<br />

évoluer nos maquettes pédagogiques<br />

pour que tous nos étudiants puissent<br />

partir à l’étranger pendant leur cursus.<br />

Avoir cinq campus dans trois pays c’est<br />

avoir la faculté d’y affecter nos propres<br />

étudiants quand beaucoup d’universités<br />

partenaires ferment leurs portes et<br />

quand les gouvernements ferment leurs<br />

frontières hors d’Europe ».<br />

Multi-campus, aucune école ne l’est autant<br />

que Skema rappelle sa directrice générale,<br />

Alice Guilhon : « Dès le début de l’école<br />

notre stratégie est toujours de créer une<br />

marque globale sur le modèle des grandes<br />

entreprises internationales. Une multinationale<br />

de l’éducation haut de gamme,<br />

possédant les meilleures accréditations,<br />

excellente en recherche, en ajoutant petit<br />

à petit des étages à la fusée ». Le modèle<br />

de Skema a évolué et évolue encore avec<br />

le Covid rappelle encore Alice Guilhon :<br />

« Quand nous sommes allés nous installer<br />

en Chine il s’agissait pour nous de donner<br />

à nos étudiants une véritable éducation<br />

globale de qualité, leur offrir le monde<br />

entier en apprentissage. Nous y avons<br />

fait d’importants investissements avec<br />

beaucoup de personnels et beaucoup<br />

d’étudiants. Mais au début il ne s’agissait<br />

pas d’aller former des Chinois en Chine<br />

alors qu’aujourd’hui nous proposons<br />

un master avec l’université Jiao Tong<br />

de Shanghai et une joint school avec<br />

Nankin ».<br />

À DISTANCE, POURQUOI PAS ?<br />

75 % des dirigeants de business schools<br />

dans le monde utilisent des classes virtuelles<br />

- soit une augmentation par rapport<br />

à 51 % fin 2020 -, selon le rapport<br />

AMBA & BGA Education Technology qu’a<br />

publié en <strong>2021</strong> l’organisme certificateur<br />

Amba en association avec Barco. « Il fallait<br />

s’adapter sans perdre le contact avec nos<br />

Mobilité étudiante :<br />

l’igesr tente de<br />

faire un bilan<br />

D’après la dernière enquête<br />

de l’Observatoire de la<br />

vie étudiante (OVE) sur la<br />

période du confinement, 72 %<br />

des étudiants qui avaient<br />

une mobilité internationale<br />

prévue cette année n’ont<br />

pas pu la réaliser. Dans les<br />

grandes écoles jusqu’à 50 %<br />

des mobilités de stages ont été<br />

interrompues en 2019-2020.<br />

Mais le décompte global<br />

est d’autant plus complexe<br />

à établir qu’en dehors des<br />

données fournies chaque<br />

année, avec deux ans d’écart,<br />

par l’Institut de statistique<br />

(ISU) de l’UNESCO, le<br />

MESRI ne dispose pas d’un<br />

outil de pilotage. L’Inspection<br />

générale de l’éducation,<br />

du sport et de la recherche<br />

(Igésr) publie un rapport sur<br />

L’impact de la crise sanitaire<br />

sur la mobilité européenne<br />

et internationale des publics<br />

scolaires, étudiants et<br />

apprentis, incluant un bilan<br />

du programme des assistants<br />

de langues étrangères.<br />

L’EM Normandie possède un campus à Oxford<br />

EM Normandie<br />

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L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

partenaires plus lointains. Nos étudiants<br />

d’Orléans ont ainsi pu suivre les mêmes<br />

cours en entreprenariat que des étudiants<br />

mexicains de Monterey. Ensemble ils ont<br />

travaillé sur des créations d’entreprises<br />

sans prendre un seul avion, sans un seul<br />

visiting professor ! », signifie le directeur<br />

général de l’ISC Pairs, Jean-Christophe<br />

Hauguel, qui estime qu’il faut « compléter<br />

l’expérience obligatoire à l’étranger par<br />

un « international at home » ».<br />

C’était une option indispensable en<br />

période Covid. Et maintenant ? « Si les<br />

étudiants étaient perplexes au départ,<br />

ils ont vite compris l’intérêt de suivre des<br />

cours d’une grande université américaine,<br />

même à distance. Certains étudiants<br />

considèrent même que c’est une solution<br />

qui permet d’économiser bien des<br />

coûts ou du temps de transport », assure<br />

Stéphanie Lerouge. Et cette possibilité<br />

de suivre des cours à distance rassure<br />

également les étudiants internationaux<br />

comme s’en fait l’écho le directeur général<br />

de Rennes SB, Thomas Froehlicher :<br />

« Nous constatons le retour des étudiants<br />

chinois et indiens qui savent que leurs<br />

cours leur seront délivrés qu’ils soient<br />

ou non présents en France. ».<br />

« Aujourd’hui tout le monde a accès à<br />

tous les cours sans être obligés de partir<br />

et en avoir les moyens. Pas de « fuite des<br />

cerveaux » dans la mesure où on peut<br />

être diplômés à l’international sans être<br />

forcément parti. Réduction de l’empreinte<br />

écologique bien sûr et… réduction des<br />

coûts. Le seul problème c’est finalement<br />

le décalage horaire mais on le résout. Nos<br />

étudiants ont pris l’habitude de travailler de<br />

façon efficace à distance sur Zoom. Ils ont<br />

pris le pli de travailler, échanger », définit<br />

le directeur des affaires internationales<br />

de l’EM Normandie, Hendrik Lohse.<br />

MIEUX GÉRER<br />

LES DÉPLACEMENTS<br />

INTERNATIONAUX<br />

Au-delà du Covid une prise de conscience<br />

planétaire des enjeux environnementaux<br />

nés des déplacements d’étudiants, professeurs<br />

et chercheurs voit le jour. Comme<br />

l’explique la directrice générale de emlyon,<br />

Isabelle Huault, « il ne s’agit pas de remettre<br />

L’ESCP est implantée sur six campus en Europe. Ici celui de Berlin<br />

en cause l’internationalisation mais plutôt<br />

de s’interroger sur les séjours courts. Les<br />

learning trips ont de lourds bilans carbone.<br />

Il convient ainsi d’éviter les déplacements à<br />

l’autre bout de la planète pour des séjours<br />

trop courts. Il en est de même pour les<br />

colloques scientifiques ». Un juste milieu<br />

à trouver car, insiste-t-elle, « il n’est pas<br />

question de renoncer à l’ouverture internationale,<br />

que nous considérons comme<br />

indispensable à l’expérience en milieu<br />

multiculturel et à l’apprentissage de nos<br />

étudiantes et étudiants, mais d’arbitrer<br />

sur la question des mobilités de manière<br />

raisonnable et équilibrée ».<br />

Comme emlyon, Grenoble EM et<br />

Jean-François Fiorina s’interrogent :<br />

« Nous entamons une réflexion sachant<br />

qu’il ne faut surtout pas tout jeter du<br />

jour au lendemain de ce qui a fait notre<br />

modèle. C’est un chantier titanesque<br />

alors que nous nous déplaçons beaucoup<br />

d’un campus à l’autre, pour des séjours<br />

académiques, des congrès ou encore<br />

de la prospection pour faire venir des<br />

étudiants internationaux sur nos campus<br />

». Alors quels déplacements faut-il<br />

maintenir selon lui : « Sans doute faut-il les<br />

concentrer sur des temps précis. Fondé<br />

sur les déplacements, notre modèle doit<br />

être transformé sans pour autant nous<br />

mettre en danger ».<br />

Sébastien Gémon<br />

ESCP BS<br />

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L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

10 ans de mobilité internationale<br />

À l’occasion de ses dix ans d’existence,<br />

Campus France retrace dans une étude<br />

les transformations spectaculaires de la<br />

mobilité étudiante et de recherche de la<br />

dernière décennie : alors que seulement<br />

3,5 millions d’étudiants partaient en mobilité<br />

en 2009 ils étaient 5,6 millions en 2018<br />

(2,5 % de la population étudiante). Soit<br />

une progression deux fois plus rapide<br />

que la population étudiante mondiale qui a<br />

augmenté de 30 % dans le même temps.<br />

Top 25 des pays d’origine des étudiants étrangers<br />

en France et évolution sur 10 ans<br />

Quels effets aura le Covid ? Attention :<br />

ces évolutions sont antérieures au Covid<br />

comme aux effets du Brexit ou d’autres<br />

faits géopolitiques. Comme le notent<br />

les experts de Campus France, ces<br />

événements ont des « conséquences<br />

majeures et aux effets durables sur la<br />

mobilité étudiante, qu’il n’est pas encore<br />

possible d’aborder ». De grands pays<br />

d’accueil comme l’Australie se sont en effet<br />

totalement fermés à la mobilité étudiante<br />

entre mars 2020 et novembre <strong>2021</strong>, tandis<br />

que les relations bilatérales de plusieurs<br />

grands pays d’accueil avec la Chine, premier<br />

pays d’origine, se sont détériorées.<br />

En France, en dépit de la pandémie de<br />

Covid-19, le nombre total d’étudiants<br />

étrangers n’a baissé que de 1 % entre 2020<br />

et <strong>2021</strong>. Cette baisse a été de 3 % dans<br />

les universités tandis que d’autres<br />

établissements ont même vu ce nombre<br />

progresser : c’est le cas dans les écoles de<br />

commerce (+8 %), les écoles d’ingénieurs<br />

(+3 %) ainsi que les formations du supérieur<br />

en lycées (+10 %). Début octobre <strong>2021</strong>,<br />

la France avait presque entièrement<br />

résorbé les effets de la crise avec 77 000<br />

visas délivrés, contre 67 000 en 2020 et<br />

89 000 en 2019, en fin de campagne.<br />

Où vont les étudiants ? Les pays<br />

anglo-saxons ont confirmé leur place<br />

en tête de l’accueil des étudiants dans<br />

le monde ces dix dernières années.<br />

Mais les États-Unis, toujours premiers,<br />

et le Royaume-Uni, deuxième, ne<br />

progressent plus aussi significativement<br />

sur les dernières années, à l’inverse de<br />

l’Australie, 3 ème , et du Canada, 7 ème .<br />

D’où viennent les étudiants ? L’Asie-<br />

Océanie a renforcé sa position de première<br />

zone d’origine des étudiants mobiles<br />

dans le monde, à travers notamment<br />

les progressions fortes des effectifs en<br />

provenance de Chine (+87 %) et d’Inde<br />

(+82%), mais aussi du Vietnam (+149 %) qui<br />

rejoint la 4 ème place derrière l’Allemagne.<br />

Parmi les pays européens, l’Allemagne<br />

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L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DOSSIER DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

10 ans de mobilité internationale (suite)<br />

est celui qui envoie le plus d’étudiants à<br />

l’étranger, devant la France. Néanmoins<br />

la croissance du contingent français à<br />

l’étranger (+87 %) est plus rapide que celle<br />

des étudiants allemands (+32 %).<br />

Les États-Unis n’occupent plus en 2018<br />

que la 7 ème place du classement des<br />

pays qui envoient le plus d’étudiants<br />

en mobilité alors qu’ils se situaient<br />

au 5 ème rang dix ans auparavant.<br />

L’Afrique est également un continent d’avenir<br />

pour la mobilité étudiante : les étudiants<br />

subsahariens ne représentent que 4 %<br />

de la population étudiante mondiale mais<br />

8 % des étudiants mobiles, et cette part<br />

devrait continuer à augmenter dans les<br />

années à venir. La France, qui accueille<br />

12 % de ces étudiants, est leur premier<br />

pays de destination, devant les États-Unis,<br />

l’Afrique du Sud et le Royaume-Uni.<br />

Et la France dans tout ça ? En baisse<br />

régulière dans le classement destinations<br />

préférées des étudiants, la France occupe<br />

aujourd’hui la 6 ème place des pays d’accueil<br />

avec 365 000 étudiants internationaux<br />

lors de l’année universitaire 2020-<strong>2021</strong>. La<br />

France a ainsi été dépassée par l’Allemagne<br />

en 2017 puis par la Russie en 2018 après<br />

avoir un temps occupé la 3 ème place.<br />

Les étudiants marocains, algériens et<br />

chinois sont les plus nombreux en France<br />

sur l’ensemble de la dernière décennie. Le<br />

nombre d’étudiants marocains et algériens<br />

progresse : respectivement +39 % et<br />

+28 % entre 2010-2011 et 2020-<strong>2021</strong>).<br />

Le nombre d’étudiants chinois diminue<br />

de 5 % sur la période en raison de la<br />

crise sanitaire : restait en effet positive<br />

jusqu’en 2019-2020 (+2 % entre 2010<br />

et 2019). De même le nombre d’étudiants<br />

tunisiens en France est en baisse sur dix<br />

ans (-5 %) ; et diminuait déjà avant la crise<br />

sanitaire (-4 % entre 2010 et 2019).<br />

Le nombre d’étudiants italiens en mobilité<br />

a en revanche plus que doublé sur dix<br />

ans (+121 %), ce qui en fait la quatrième<br />

nationalité la plus représentée parmi<br />

les étudiants étrangers (+2 places).<br />

En dix ans sa progression est moitié<br />

moins importante (28 %) que celle de<br />

l’ensemble des pays recevant des étudiants<br />

internationaux. La progression en licence<br />

universitaire n’est même que de 25 %<br />

entre 2010 et 2020 quand elle atteint 169 %<br />

dans les écoles de commerce, 120 % dans<br />

les écoles d’ingénieurs et 122 % dans les<br />

formations d’enseignement supérieur des<br />

lycées. Les écoles de commerce sont les<br />

formations les plus internationalisées,<br />

avec 20 % d’étudiants étrangers en<br />

leur sein, contre 13 % en moyenne.<br />

Les étudiants français sont de plus<br />

en plus internationaux et constituent<br />

aujourd’hui le sixième contingent d’étudiants<br />

internationaux, avec près de 100 000<br />

étudiants en mobilité sortante en 2018, soit<br />

près du double en dix ans (+87 %). Le Canada<br />

est devenu la première destination en 2018,<br />

avec 7 030 étudiants français en mobilité. La<br />

Belgique, première ces dernières années,<br />

arrive aujourd’hui en seconde position.<br />

L’Espagne, avec sa forte dynamique sur<br />

dix ans (+366 %), arrive en 6 ème position, se<br />

rapprochant de l’Allemagne (5 ème ) et de la<br />

Suisse (4 ème ) qui ont des dynamiques plus<br />

modérées (respectivement +21 % et +84 %).<br />

Les étudiants étrangers dans les établissements français : effectifs et évolutions sur dix ans en 2020-<strong>2021</strong><br />

Top 15 des pays d’accueil des étudiants français en mobilité diplômante<br />

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L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

ISABELLE<br />

HUAULT<br />

Présidente<br />

du directoire<br />

et directrice<br />

générale d’emlyon<br />

business school<br />

Comment se forge un destin ?<br />

Isabelle Huault : l’évidence emlyon<br />

Un destin, c’est<br />

une suite de choix.<br />

Dont certains sont<br />

décisifs. Nous<br />

sommes en 1990.<br />

Tout juste diplômée<br />

de la majeure<br />

finance de l’ESC<br />

Lyon, à la sortie<br />

d’un stage dans une<br />

entreprise de capital<br />

risk lyonnaise,<br />

Siparex, Isabelle<br />

Huault a le choix<br />

entre la voie royale<br />

du conseil - chez<br />

Arthur Andersen,<br />

à l’époque l’un des<br />

cinq géants de<br />

l’audit et du conseil<br />

-, et une poursuite<br />

d’études. La future<br />

directrice d’emlyon<br />

s’interroge : « J’ai<br />

décidé de poursuivre<br />

mes études en DEA à<br />

Lyon 3. J’y ai pris le<br />

goût de la recherche<br />

et j’ai enchainé par<br />

un doctorat ». Trente<br />

ans après, elle fera<br />

son retour à emlyon<br />

pour en prendre la<br />

direction : « C’était<br />

important pour moi<br />

de rejoindre mon<br />

alma mater ».<br />

En classe préparatoire au lycée<br />

Ampère de Lyon<br />

Isabelle Huault n’a pas fait que ses<br />

études à Lyon. Elle y est née, y a<br />

habité toute son enfance – tout près à<br />

Villeurbanne - et y a suivi ses études.<br />

« J’étais une bonne élève mais pas<br />

excellente en mathématiques. Alors<br />

que mes parents auraient préféré<br />

que j’entre en maths sup je choisis<br />

donc d’intégrer une prépa HEC. Je ne<br />

savais pas trop ce que je voulais faire,<br />

mais j’avais de l’appétence pour les<br />

disciplines enseignées. »<br />

Entrée en 1985 en classe préparatoire<br />

au lycée Ampère de Lyon, Isabelle<br />

Huault va y vivre une première<br />

année difficile : « J’étais au fond du<br />

classement, je travaillais tout le<br />

week-end pour préparer des khôlles<br />

où j’échouais. On m’avait prévenu que<br />

ce serait difficile mais je pensais être<br />

l’exception ».<br />

À la Toussaint, elle envisage de tout<br />

26


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

abandonner mais ses parents la<br />

poussent à s’accrocher. Fille unique<br />

d’un couple de la classe moyenne,<br />

dont aucun n’a obtenu le bac, elle est<br />

en effet très soutenue par une famille<br />

où « le savoir est très valorisé ».<br />

Résultat : à la fin de cette année<br />

de prépa – à l’époque les classes<br />

préparatoires HEC ne durent qu’un<br />

an – Isabelle Huault peut intégrer<br />

quelques bonnes écoles mais préfère<br />

redoubler. « J’ai bien fait car l’année<br />

suivante j’étais admissible à HEC. Tout<br />

en ayant eu une mauvaise note aux<br />

écrits de l’Essec. Le concours d’HEC<br />

était plus ouvert sur les humanités et<br />

la philosophie. »<br />

De ses deux années en classe<br />

préparatoire, Isabelle Huault conserve<br />

le souvenir d’excellents professeurs.<br />

En particulier d’un professeur de<br />

philosophie et culture générale,<br />

qui l’a beaucoup soutenue : « La<br />

première année, quand il distribuait<br />

Les étudiants de emlyon en mode projet<br />

les copies en commençant par les<br />

meilleures, j’étais toujours dans les<br />

cinq dernières. Mais l’année suivante<br />

j’ai plusieurs fois été major en philo.<br />

Rien n’est impossible si on s’en donne<br />

la peine ! »<br />

Étudiante à l’ESC Lyon<br />

Comme beaucoup d’étudiants de<br />

classes préparatoires, Isabelle<br />

Huault ne sait pas forcément à quoi<br />

s’attendre pour la suite : « Je ne savais<br />

pas trop ce qu’était une école de<br />

commerce. Sans parler de l’entreprise<br />

que je ne connaissais que par le<br />

prisme de mon père. Seule comptait<br />

à l’époque la réussite à un beau<br />

concours ! »<br />

Cet intérêt pour la compétition<br />

académique, Isabelle Huault avait déjà<br />

pu le mesurer en terminale : « J’ai été<br />

lauréate d’un concours d’éloquence<br />

national à Paris. Ma professeure de<br />

lettres m’avait inscrite ainsi que deux<br />

autres élèves dont elle pressentait le<br />

potentiel ». Pour l’emporter, elle cite<br />

les réussites de chefs d’entreprise<br />

emblématiques des années 80. Et<br />

ramène une coupe chez elle ! : « Pour<br />

quelqu’un comme moi qui n’était pas<br />

très sûre d’elle, cela permet d’acquérir<br />

un peu d’assurance. »<br />

Deux ans après cette coupe, Isabelle<br />

Huault intègre emlyon : « J’aurais<br />

aimé quitter la région, mes parents,<br />

vivre sur la résidence du campus<br />

mais les chambres étaient réservées<br />

aux étudiants des autres régions ».<br />

Si elle ne s’intègre pas tout de suite<br />

aussi bien qu’elle le souhaiterait, elle<br />

n’en profite pas moins de la proximité<br />

qui s’établit facilement entre tous<br />

les étudiants dans des promotions<br />

qui ne dépassent pas alors les 200<br />

étudiants, dont 180 issus de classes<br />

préparatoires.<br />

Pourtant Isabelle Huault est déçue<br />

par l’enseignement qu’elle reçoit :<br />

« On nous avait beaucoup irrigués<br />

sur le plan académique en classe<br />

préparatoire et là tout devenait assez<br />

plat. Beaucoup de pratique, des<br />

savoirs faire et parfois des recettes<br />

à appliquer. Heureusement cela a<br />

beaucoup changé depuis dans les<br />

écoles, avec l’ouverture au monde et<br />

l’arrivée de corps professoraux de<br />

haut niveau ».<br />

emlyon BS<br />

L’enseignement n’étant pas à la<br />

hauteur de ses attentes, Isabelle<br />

Huault se passionne pour la vie<br />

associative. Et se présente même<br />

sur une liste pour animer la junior<br />

entreprise : « C’était une belle<br />

campagne. Cela m’a permis de me<br />

faire beaucoup d’amis et m’a appris<br />

à travailler en groupe ». Militante<br />

27


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Le sport pour maintenir son équilibre<br />

Cyclisme, jogging, fitness, ski de piste<br />

ou de randonnée l’hiver, Isabelle Huault<br />

pratique de nombreux sports toute l’année.<br />

« Une nécessité pour entretenir son<br />

endurance. Les agendas sont chargés, il<br />

faut être en forme sur tous les plans. Le<br />

sport est pour moi un moyen d’entretenir<br />

un équilibre entre une vie professionnelle<br />

active et personnelle. La forme physique<br />

est en effet une composante significative<br />

des fonctions de direction et une pratique<br />

sportive régulière permet à l’évidence de<br />

depuis quelque temps à Amnesty<br />

International, elle intègre l’association<br />

humanitaire Odyssée (aujourd’hui<br />

Solidari-terre), qui vient d’être<br />

créée, et participe à une mission<br />

en Pologne, alors encore sous<br />

l’emprise soviétique. « L’engagement<br />

humanitaire, dans la RSE, n’était pas<br />

du tout valorisé à l’époque. Nous<br />

sommes dans les années 80, à<br />

l’époque de l’entreprise glorifiée, le<br />

management se doit d’être au service<br />

de l’entreprise et pas forcément de<br />

toute la société. » A contrario Isabelle<br />

Huault mettra ensuite cette volonté<br />

de s’engager dans le management au<br />

service de la société au cœur de sa<br />

vie professionnelle et de ses travaux<br />

de recherche.<br />

L’entrée dans la carrière<br />

Pendant son DEA (diplôme d’études<br />

approfondies, l’ancêtre des masters)<br />

en sciences de gestion, commun<br />

à l’ESC Lyon et à l’IAE (Institut<br />

d’Administration des Entreprises)<br />

de l’université Lyon 3, Isabelle<br />

Huault « découvre son goût pour la<br />

recherche ». Elle y fait également<br />

décompresser. Cette activité est d’une<br />

certaine façon inscrite dans mon agenda,<br />

c’est une question d’organisation qui n’est<br />

pas insurmontable et reflète une volonté et<br />

des priorités. » Quand elle était étudiante<br />

à l’ESC Lyon, Isabelle Huault appréciait<br />

particulièrement les sports collectifs<br />

- notamment le volley en compétition<br />

universitaire - qui « reposent sur des<br />

valeurs qui me semblent importantes :<br />

exigence, persévérance, émulation, respect<br />

d’autrui, goût du collectif, solidarité… »<br />

des rencontres avec d’autres futurs<br />

responsables de l’enseignement<br />

supérieur. Le futur directeur par<br />

intérim d’emlyon, Tugrul Atamer, y est<br />

son professeur et le futur directeur<br />

de ESCP, Frank Bournois, y enseigne<br />

également.<br />

Un univers dans lequel elle<br />

s’épanouit : « J’ai eu la révélation d’un<br />

environnement où on interroge les<br />

concepts et c’est tout naturellement<br />

que j’ai poursuivi par une thèse ». Mais<br />

comme elle tient absolument que son<br />

travail soit au plus près des faits en<br />

entreprise, c’est une thèse CIFRE,<br />

toujours à Lyon 3, qu’elle prépare<br />

chez PSA Peugeot-Citroën à Paris<br />

sur le thème « Multinationalisation<br />

des grandes entreprises implantées<br />

en France et gestion des cadres :<br />

spécificité du contexte européen ? ».<br />

Même si elle se rend compte à ce<br />

moment-là qu’une « thèse CIFRE n’est<br />

pas le meilleur moyen d’entrer dans<br />

une carrière académique », ses trois<br />

années de thèse la poussent, l’ont<br />

convaincue qu’elle avait toute sa place<br />

à l’université.<br />

En 1994 Isabelle Huault prend donc<br />

son premier poste en tant que maître<br />

de conférences en sciences de<br />

gestion (MSG) à l’Université Versailles-<br />

Saint Quentin (UVSQ). Reçue à<br />

l’agrégation du supérieur en 1999,<br />

elle est alors nommée professeure<br />

à l’université Paris 12 Val de Marne,<br />

à Créteil, face à des étudiants de<br />

première année pas toujours faciles :<br />

« Je me suis retrouvée devant des<br />

grands amphis un peu difficiles<br />

parfois. À la fois face à des étudiants<br />

à très haut potentiel, qu’on a envie de<br />

faire progresser, mais aussi face à<br />

d’autres qui ne sont absolument pas à<br />

leur place ».<br />

Trois ans plus tard, en 2002, elle<br />

entre dans une université de premier<br />

rang, Paris 2 Panthéon-Assas, et, en<br />

2005, saisit l’opportunité d’entrer à<br />

Paris-Dauphine, une université qui se<br />

distingue dans le paysage français.<br />

Jusqu’à la présidence<br />

« Paris-Dauphine est en effet une<br />

université hybride, si on y trouve des<br />

figures historiques de sciences de<br />

gestion, elle est aussi excellente en<br />

mathématiques ou en économie. Une<br />

large part de son financement repose<br />

sur ses ressources propres. Cela<br />

caractérise bien mon parcours : à la<br />

fois dans la recherche et proche du<br />

monde socio-économique. » Isabelle<br />

Huault va passer quinze ans au sein<br />

de Paris-Dauphine et y franchir tous<br />

les échelons au cours d’un parcours<br />

très marqué par la recherche. D’abord<br />

directrice de l’école doctorale de<br />

gestion, elle va diriger l’Unité Mixte<br />

de Recherche (UMR CNRS) Dauphine<br />

Recherches en Management tout en<br />

étant vice-présidente de la section<br />

28


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

emlyon BS<br />

Emlyon va inaugurer en 2023 un campus qui fera date en plein cœur de Lyon<br />

gestion du CNU (Conseil national des<br />

universités). En 2015, le président<br />

de l’époque, Laurent Batsch, la<br />

nomme vice-présidente chargée<br />

de la gestion des enseignantschercheurs.<br />

En décembre 2016, elle<br />

est élue présidente. « Compte tenu<br />

des résultats obtenus par mes listes<br />

dans les différents collèges, il n’y avait<br />

pas d’autre candidat à l’élection à la<br />

présidence. Ces bons scores tiennent<br />

sans doute à ma légitimité acquise<br />

en ayant su rassembler, participé au<br />

Comex de l’université et en m’étant<br />

intéressée à d’autres périmètres. »<br />

En 2020, nul ne doutait vraiment<br />

de sa réélection et Isabelle Huault<br />

se prépare à faire campagne pour<br />

un second mandat : « Au moment<br />

du début du premier confinement,<br />

j’avais commencé à écrire mon bilan<br />

et mon programme pour les élections<br />

de novembre 2020 » - quand la<br />

possibilité de prendre la direction<br />

d’emlyon se présente. Un cabinet de<br />

recrutement l’approche, des collègues<br />

la contactent. « Cela me surprend<br />

un petit peu car la porosité entre les<br />

universités et les grandes écoles n’est<br />

pas très forte. Il y a beaucoup de<br />

regards caricaturaux d’un côté comme<br />

de l’autre. Mais, notamment parce que<br />

je suis lyonnaise, je creuse le sujet. »<br />

Retour dans son « alma mater »<br />

Isabelle Huault n’a jamais coupé les<br />

ponts avec son « alma mater ». Elle<br />

avait présidé le jury d’intégration et de<br />

diplomation d’emlyon et fut membre<br />

de son conseil d’administration :<br />

« Je connais très bien la Faculté que<br />

je sais être de très haut niveau ».<br />

Elle ne méconnait pas non plus les<br />

turbulences dans lesquelles l’école est<br />

plongée. Son changement de statut,<br />

emlyon est désormais une entreprise<br />

privée, a fait couler beaucoup d’encre.<br />

Nommé en avril 2019 son directeur<br />

général, Tawhid Chtioui, a quitté l’école<br />

début 2020. Enfin la durée de son<br />

habilitation à délivrer le titre de master<br />

pour son diplôme grande école a été<br />

réduite de cinq à trois ans.<br />

Pas de quoi décourager Isabelle<br />

Huault : « Je pensais pouvoir<br />

apporter de la sérénité avec un<br />

profil académique. De plus j’avais la<br />

29


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PORTRAIT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

certitude que les fondamentaux de<br />

l’école étaient toujours là. Il fallait<br />

lutter contre les propos erronés<br />

tenus sur l’école et reconstituer une<br />

équipe managériale. » Son expérience<br />

à la tête de Paris-Dauphine lui<br />

permet de comprendre rapidement<br />

les attentes des équipes. « Je n’ai<br />

pas changé de métier, ni d’identité<br />

professionnelle, en passant de l’une<br />

à l’autre ! Les fondamentaux sont<br />

identiques. Les différences résident<br />

dans la gouvernance et dans le modèle<br />

économique. Sur ce dernier point,<br />

Dauphine est une université hybride :<br />

50 % des ressources de Dauphine-<br />

PSL lui sont propres et Paris-<br />

Dauphine est à la fois membre de la<br />

Conférence des Grandes Écoles (CGE)<br />

et de la Conférence des Présidents<br />

d›Université (CPU). »<br />

Depuis un an et deux mois qu’elle<br />

dirige emlyon, beaucoup de dossiers<br />

ont avancé. Pour réaffirmer sa<br />

mission d’intérêt général, emlyon est<br />

ainsi devenue une société à mission.<br />

« C’est un projet très structurant et<br />

fédérateur qui a été engagé dès mon<br />

arrivée à la direction de l’école. C’est<br />

le fruit d’une démarche participative<br />

qui nous a permis d’aboutir à la<br />

formulation de notre raison d’être<br />

associée à des objectifs sociaux<br />

et environnementaux clairement<br />

définis. »<br />

emlyon BS<br />

Le learning hub du campus stéphanois de emlyon<br />

Surtout la construction de son futur<br />

campus a été lancée en octobre <strong>2021</strong>.<br />

En 2023 les étudiants feront leur<br />

entrée dans ce qui sera le premier<br />

campus d’une école de management<br />

construit spécialement pour elle<br />

depuis celui de l’Edhec en 2010.<br />

« C’est un projet emblématique à tous<br />

les points de vue, à la fois un levier<br />

extraordinaire pour notre attractivité<br />

internationale et un très beau geste<br />

architectural au centre de Lyon. »<br />

Fini donc le lointain campus d’Ecully<br />

pour un projet qui a largement évolué<br />

depuis l’arrivée d’Isabelle Huault :<br />

« Nous avons revu la copie pour en<br />

faire un vrai espace d’apprentissage.<br />

Le Hub Gerland est devenu l’Agora des<br />

transformations. Ce sera un campus<br />

connecté et durable, dans le respect<br />

des normes environnementales<br />

les plus exigeantes. Nous voulons<br />

également en faire un lieu ouvert vers<br />

les entreprises, les associations,<br />

les partenaires académiques.<br />

Toutes celles et ceux intéressés<br />

par nos activités – incubateur,<br />

accélérateur, maker’slab, conférences<br />

scientifiques…– seront les<br />

bienvenus. » Isabelle Huault imprime<br />

peu à peu sa marque sur emlyon.<br />

30


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PAROLE DE PROFS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

CHRISTINE<br />

PIRÈS<br />

Vive-présidente<br />

de l’APHEC,<br />

représentante<br />

pour l’espagnol,<br />

et coordinatrice<br />

des langues<br />

De l’hybridation comme<br />

dépaysement<br />

L’exemple de la journée d’hybridation entre culture<br />

générale et langue et culture hispaniste, sur aimer,<br />

coorganisée par l’APHEC et la Villa Hispanica le vendredi<br />

25 septembre <strong>2021</strong> à Cogny<br />

VÉRONIQUE<br />

BONNET<br />

vice-présidente<br />

de l’APHEC et<br />

représentante<br />

pour la philosophie.<br />

De l’hybridation<br />

comme<br />

dépaysement :<br />

une perspective<br />

suggérée par les<br />

propositions de<br />

Michel Foucault<br />

sur la notion<br />

d’hétérotopie par<br />

Véronique Bonnet,<br />

vice-présidente<br />

de l’APHEC et<br />

représentante pour<br />

la philosophie.<br />

L’exemple de<br />

la journée<br />

d’hybridation entre<br />

culture générale et<br />

langue et culture<br />

hispaniste, sur<br />

aimer, coorganisée<br />

par l’APHEC et la<br />

Villa Hispanica<br />

le vendredi 25<br />

septembre à Cogny,<br />

par Christine Pirès,<br />

vice-présidente<br />

de l’APHEC,<br />

représentante<br />

pour l’espagnol, et<br />

coordinatrice des<br />

langues.<br />

Cet article en prolonge et complète<br />

deux autres, également co-écrits par<br />

Christine Pires et Véronique Bonnet :<br />

• le premier publié le 13 mars 2020,<br />

intitulé Oser l’hybridation : de la théorie<br />

à la pratique :<br />

https://blog.headway-advisory.com/<br />

oser-lhybridation-de-la-theorie-ala-pratique<br />

• le second publié le 25 février <strong>2021</strong>,<br />

intitulé Conjuguer l’hybridation<br />

au pluriel, en grande école de<br />

management et en classes<br />

préparatoires économiques :<br />

https://blog.headway-advisory.<br />

com/paroles-de-profs-conjuguerlhybridation-au-pluriel-engrande-ecole-de-managementet-en-classes-preparatoireseconomiques/<br />

DE L’HYBRIDATION COMME<br />

DÉPAYSEMENT : UNE<br />

PERSPECTIVE SUGGÉRÉE PAR<br />

LES PROPOSITIONS DE MICHEL<br />

FOUCAULT SUR LA NOTION<br />

D’HÉTÉROTOPIE.<br />

Comment rendre compte de ce<br />

ressenti de « tête ailleurs », ou de ce<br />

sentiment d’ « y être encore », que<br />

nous éprouvons assez régulièrement<br />

et dont nous mesurons la fécondité ?<br />

Ce qui advint à Cogny par exemple,<br />

longuement. Ou nous sortons parfois<br />

d’un roman qui nous a transportés<br />

dans un monde parallèle, en portant<br />

sur ce qui nous occupe ensuite un<br />

regard élargi et distancié.<br />

Celui que Montesquieu, dans De<br />

l’Esprit des Lois (1) de 1746, tentait<br />

de porter sur le royaume de France,<br />

rendu plus acéré encore après<br />

ses séjours dans les différentes<br />

capitales européennes ; celui que<br />

déjà, dans les Lettres Persanes (2),<br />

de 1721, il peignait comme aussi aigu<br />

qu’apparemment naïf, par le biais<br />

d’un Persan qui avait pu comparer les<br />

courtisans du roi aux courtisanes du<br />

sultan qu’il était.<br />

31


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PAROLE DE PROFS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Remontons de deux siècles, à la<br />

Renaissance, et à la contemplation<br />

émue, parce que distanciée, que<br />

porte, dans ses Regrets (3) , Du Bellay,<br />

de Rome, sur son Anjou natal : « Plus<br />

que le marbre dur me plaît l’ardoise<br />

fine / Plus mon Loire Gaulois, que le<br />

Tibre Latin /Plus mon petit Liré, que le<br />

mont Palatin /Et plus que l’air marin la<br />

douceur Angevine ». Il imaginait, dès<br />

la première strophe, heureux, parce<br />

que transformés dans leur vision par<br />

tous les espaces successivement<br />

traversés, Ulysse et Jason : « Heureux<br />

qui, comme Ulysse, a fait un beau<br />

voyage / Ou comme celui-là qui<br />

conquit la toison / Et puis est retourné,<br />

plein d’usage et raison / Vivre entre<br />

ses parents le reste de son âge ! »<br />

Si les classes préparatoires aux<br />

grandes écoles de management sont<br />

généralistes, si les grandes écoles de<br />

management elles-mêmes inscrivent<br />

de plus en plus dans leur cursus de<br />

Les photos de cet article proviennent de la journée d’hybridation<br />

coorganisée par l’APHEC et la Villa Hispanica<br />

première année avant le master, et<br />

même au-delà, des cours d’humanités,<br />

et toutes nos disciplines en sont<br />

porteuses, c’est que voyager dans<br />

l’espace et dans le temps permet<br />

à nos réflexions et à nos actions<br />

d’éviter l’ornière de la fréquentation<br />

du « même ». Pour éviter cette forme<br />

d’errance qui n’en est pas une et<br />

s’appelle le « sur place ».<br />

Michel Foucault, dans le chapitre III de<br />

son ouvrage de 1966, Les Mots et les<br />

Choses (4), intitulé Représenter, faisait<br />

bien l’hypothèse que la folie de Don<br />

Quichotte n’était pas de se prendre<br />

pour un chevalier errant mais de ne<br />

se prendre que pour un chevalier<br />

errant, l’imagination se contentant<br />

de réitérer dans le monde réel les<br />

figures rencontrées par les lectures.<br />

Il écrivait ainsi de Don Quichotte :<br />

« Don Quichotte n’est pas l’homme de<br />

l’extravagance, mais plutôt le pèlerin<br />

méticuleux qui fait étape devant toutes<br />

D.R<br />

les marques de la similitude. Il est<br />

le héros du Même. Pas plus que de<br />

son étroite province, il ne parvient<br />

à s’éloigner de la plaine familière<br />

qui s’étale autour de l’Analogue.<br />

Indéfiniment, il la parcourt sans<br />

franchir jamais les frontières nettes<br />

de la différence, ni rejoindre le cœur<br />

de l’identité. »<br />

L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte<br />

de la Manche (5), publié par Miguel<br />

de Cervantes en 1605 pour la<br />

première partie, et en 1615 pour la<br />

seconde partie, par cette parodie<br />

de celui qui ne cesse de « voir ce<br />

qu’il pense au lieu de penser ce qu’il<br />

voit », selon la formule de Bergson,<br />

a pour enjeu de montrer les dégâts<br />

que peut engendrer la rigidité de<br />

ceux des contemporains de l’auteur<br />

qui ne jurent que par un modèle, la<br />

chevalerie, sans accepter l’éclairage<br />

des figures de la modernité.<br />

Me référer non seulement à un<br />

texte du XVII e siècle, mais aussi à<br />

un texte de la culture hispanique, ce<br />

qui redouble la distanciation, pour<br />

aborder, avec Frédéric Bretécher, le<br />

25 novembre à Cogny, le verbe aimer<br />

au programme de culture générale<br />

de la session 2022 des concours,<br />

dans Aimer et ses représentations<br />

à l’épreuve de la réalité, écouter et<br />

voir la conférence de Christine Pirès<br />

intitulée Aimer et ses trois verbes<br />

en espagnol, celle de Philippe Merlo,<br />

Aimer au sens religieux dans la<br />

peinture et la musique, de Virginie<br />

Giuliana, Aimer dans le registre<br />

familial en peinture et en littérature<br />

contemporaine, de Magali Kabous,<br />

Aimer et ses transgressions au cinéma<br />

et de Laura Scibetta, Aimer comme<br />

passion dans le flamenco, permit de<br />

32


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PAROLE DE PROFS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

voyager et d’y voir mieux.<br />

Par exemple, à partir de l’œuvre<br />

de Cervantès, il est possible de se<br />

demander si aimer n’est que projeter,<br />

fantasmer ? Aimer Dulcinée, la<br />

chevalerie, les codes de l’honneur,<br />

serait-il ainsi le mécanisme même de<br />

tout amour ? Mais aimer ne seraitil<br />

pas alors sclérosé et empêché ?<br />

Pathologique même ? Pour aimer<br />

authentiquement, n’est-il pas essentiel<br />

de sortir aimer des ornières de la<br />

répétition ?<br />

Dans Des Espaces autres (6), Michel<br />

Foucault commence par rappeler la<br />

définition de l’utopie : « Il y a d’abord<br />

les utopies. Les utopies, ce sont les<br />

emplacements sans lieu réel. Ce sont<br />

les emplacements qui entretiennent<br />

avec 1’espace réel de la société un<br />

rapport général d’analogie directe ou<br />

inversée. C’est la société elle-même<br />

perfectionnée ou c’est l’envers de<br />

a société, mais, de toute façon, ces<br />

utopies sont des espaces qui sont<br />

fondamentalement essentiellement<br />

irréels. »<br />

Puis il se réfère à l’hétérotopie,<br />

notion qui signifie « espace autre »,<br />

ou contre-emplacement. « Il y a<br />

également, et ceci probablement<br />

dans toute culture, dans toute<br />

civilisation, des lieux réels, des<br />

lieux effectifs, des lieux qui ont<br />

dessinés dans l’institution même de<br />

la société, et qui sont des sortes<br />

de contre-emplacements, sortes<br />

d’utopies effectivement réalisées dans<br />

lesquelles les emplacements réels,<br />

tous les autres emplacements réels<br />

que l’on peut trouver à l’intérieur de<br />

la culture sont à la fois représentés,<br />

contestés et inversés, des sortes<br />

de lieux qui sont hors de tous les<br />

lieux, bien que pourtant ils soient<br />

effectivement localisables. Ces lieux,<br />

parce qu’ils sont absolument autres<br />

que tous les emplacements qu’ils<br />

reflètent et dont ils parlent, je les<br />

appellerai, par opposition aux utopies,<br />

les hétérotopies ; … »<br />

Le jardin public, le cimetière, le bateau.<br />

Le miroir aussi. Le miroir, utopie et<br />

hétérotopie, à la fois, est cet espace<br />

qui nous met en quelque sorte en<br />

posture hybride. En lui, simultanément,<br />

nous nous voyons simultanément et<br />

comme l’autre nous voit, n’accédant<br />

qu’à notre extériorité, et comme nous<br />

nous voyons au dedans, cette mise<br />

en tension des deux images nous<br />

déconcerte et nous éclaire : «... et<br />

je crois qu’entre les utopies et ces<br />

emplacements absolument autres, ces<br />

hétérotopies, il y aurait sans doute une<br />

sorte d’expérience mixte, mitoyenne,<br />

qui serait le miroir. Le miroir, après<br />

tout, c’est une utopie, puisque c’est<br />

un lieu sans lieu. Dans le miroir, je<br />

me vois là où je ne suis pas, dans un<br />

espace irréel qui s’ouvre virtuellement<br />

derrière la surface, je suis là-bas, là<br />

où je ne suis pas, une sorte d’ombre<br />

qui me donne à moi-même ma propre<br />

visibilité, qui me permet de me<br />

regarder là où je suis absent - utopie<br />

du miroir. »<br />

Michel Foucault a conscience<br />

d’être devant une forme mixte,<br />

hybride : « Mais c’est également une<br />

hétérotopie, dans la mesure où le<br />

miroir existe réellement, et où il a, sur<br />

la place que j’occupe, une sorte d’effet<br />

en retour ; c’est à partir du miroir que<br />

je me découvre absent à la place où<br />

je suis puisque je me vois là-bas. À<br />

partir de ce regard qui en quelque<br />

sorte se porte sur moi, du fond de cet<br />

espace virtuel qui est de l’autre côté<br />

de la glace, je reviens vers moi et je<br />

recommence à porter mes yeux vers<br />

moi-même et à me reconstituer là où<br />

je suis ; le miroir fonctionne comme<br />

une hétérotopie en ce sens qu’il rend<br />

cette place que j’occupe au moment<br />

où je me regarde dans la glace, à<br />

la fois absolument réelle, en liaison<br />

avec tout l’espace qui l’entoure, et<br />

absolument irréelle, puisqu’elle est<br />

obligée, pour être perçue, de passer<br />

par ce point virtuel qui est là-bas. »<br />

Le miroir des Menines de Vélasquez<br />

est travaillé en ce sens, par Foucault<br />

dans Les Mots et les choses, qui<br />

prennent eux-mêmes naissance dans<br />

un texte de Borgès La bibliothèque<br />

de Babel à partir d’« une certaine<br />

encyclopédie chinoise », dont<br />

l’étrangeté, soit l’extériorité par<br />

rapport à l’horizon culturel qui est le<br />

nôtre, donne à penser : « Ce livre a<br />

33


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PAROLE DE PROFS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

son lieu de naissance dans un texte<br />

de Borgès. Dans le rire qui secoue à<br />

sa lecture toutes les familiarités de la<br />

pensée – de la nôtre, celle qui a notre<br />

âge et notre géographie- ébranlant<br />

toutes les surfaces ordonnées et tous<br />

les plans qui assagissent pour nous<br />

le foisonnement des êtres, faisant<br />

vaciller et ébranlant pout toujours<br />

notre pratique millénaire du Même et<br />

de l’Autre. »<br />

Dans le texte de Borgès en effet,<br />

l’encyclopédie chinoise, par ses<br />

arborescences, déconcerte et<br />

oblige à revenir autrement, après<br />

dépaysement mental, aux catégories<br />

qui sont les nôtres, et qui se mettent à<br />

« sonner » autrement : « Ce texte cite<br />

« une certaine encyclopédie chinoise,<br />

où il est écrit que les animaux<br />

se divisent en : a) appartenant à<br />

l’Empereur b) embaumés c)apprivoisés<br />

d) cochons de lait e) sirènes f)fabuleux<br />

g) chiens en liberté h) inclus dans la<br />

présente classification i) qui s’agitent<br />

comme des fous j) innombrables k)<br />

dessinés avec un pinceau très fin en<br />

poil de chameau l) et caetera m) qui<br />

viennent de casser la cruche n) qui de<br />

loin ressemblent à des mouches. Dans<br />

l’émerveillement de cette taxinomie,<br />

Notes.<br />

(1) De l’Esprit des Lois.<br />

Montesquieu. L’édition Garnier, de<br />

1777, est accessible en ligne.<br />

https://fr.wikisource.org/wiki/<br />

De_l%E2%80%99esprit_des_<br />

lois,_Garnier,_1777/Tome_1<br />

(2) Les Lettres persanes. Montesquieu.<br />

https://fr.wikisource.org/wiki/Lettres_persanes<br />

(3) Les Regrets. Du Bellay.<br />

https://fr.wikisource.org/wiki/<br />

Les_Regrets_(du_Bellay)<br />

(4) Foucault, Les Mots et les Choses,<br />

Paris, Gallimard, 1966.<br />

ce qu’on rejoint d’un bond, ce qui […]<br />

nous est indiqué comme le charme<br />

exotique d’une autre pensée, c’est la<br />

limite de la nôtre, l’impossibilité nue de<br />

penser cela. »<br />

La fictive encyclopédie chinoise de la<br />

Bibliothèque de Babel suggère avec<br />

drôlerie que découpage conceptuel<br />

varie avec chaque langue, ce qui<br />

enrichit l’horizon de chaque locuteur<br />

des autres.<br />

Chaque bibliothèque, déjà par ellemême<br />

hétérotopie, est une hétérotopie<br />

d’hétérotopies, puisque chaque livre<br />

en elle se présente comme un nouveau<br />

pays, paysage de mots auquel<br />

confronter le nôtre.<br />

Hybrider, changer de pays, que l’on<br />

voyage dans une autre langue et<br />

culture vivante ou dans une autre<br />

dimension, mathématique, musique,<br />

géographie, peinture, histoire,<br />

poésie, informatique, danse, et<br />

autres champs, fait bouger les<br />

lignes du rapport à nous-même et<br />

infléchit les forces de l’esprit. Ce qui<br />

paradoxalement nous arrache à nos<br />

sarclages conceptuels originaires et<br />

nous y enracine autrement.<br />

L’hybridation est bien dépaysement.<br />

(5) Miguel de Cervantes. L’Ingénieux<br />

Hidalgo Don Quichotte de la Manche. En<br />

ligne dans la traduction de Louis Viardot.<br />

https://fr.wikisource.org/wiki/<br />

L%E2%80%99Ing%C3%A9nieux_<br />

Hidalgo_Don_Quichotte_de_la_Manche<br />

(6)Foucault. Dits et écrits (1984), T IV, « Des<br />

espaces autres », o 360, 752-762, Gallimard,<br />

NRF, Paris, 1994 ; (conférence au Cercle<br />

d’études architecturale, 14 mars 1967),<br />

in Architecture, Mouvement, Continuité,<br />

o 5, octobre 1984, 46-49. M. Foucault<br />

n’autorisa la publication de ce texte écrit<br />

en Tunisie en 1967 qu’au printemps 1984,<br />

l’année de sa mort. Disponible en ligne à<br />

l’adresse : https://foucault.info/documents/<br />

heterotopia/foucault.heteroTopia.fr<br />

LE CAS PRATIQUE<br />

DE L’HYBRIDATION 3.0<br />

A l’annonce du thème de Lettres<br />

et Philosophie pour la session<br />

2022 – Aimer- l’enthousiasme fut<br />

unanime dans le jury d’un concours<br />

de recrutement dans lequel je<br />

siégeais alors. Les universitaires qui<br />

le composaient ont immédiatement<br />

fourmillé d’idées pour étayer cette<br />

notion qui colle si bien à l’hispanisme.<br />

Sans trop croire à une Journée<br />

d’Étude dans son organisation<br />

universitaire classique, nous nous<br />

sommes toutefois laissés portés par<br />

la richesse de la culture hispanique<br />

34


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PAROLE DE PROFS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

pour divaguer, dans ce cocon<br />

intellectuel qu’offre un jury, sur les<br />

arts, les auteurs, les peintres qui<br />

pourraient être sollicités. Chemin<br />

faisant – ou idées fusant-, nous en<br />

sommes arrivés à une évidence : cette<br />

profusion de pistes d’exploitation ne<br />

pouvait rester à l’état de projet !<br />

Et si, au-delà d’hybrider sur un<br />

cours ou une séance, nous invitions<br />

le thème de Lettres et Philosophie<br />

dans le monde hispanique ? Et si<br />

nous poussions l’hybridation jusqu’à<br />

la transporter -voire la téléporterjusqu’à<br />

Cogny, à la Villa Hispánica,<br />

haut-lieu de la culture hispanique, où<br />

les journées d’études les plus riches,<br />

les plus variées et les plus érudites se<br />

succèdent ?<br />

Une communication fluide entre<br />

Véronique Bonnet, vice-présidente<br />

de l’APHEC et représentante de<br />

Philosophie, Frédéric Bretécher,<br />

représentant de Lettres, Philippe<br />

Merlo-Morat, président de la Villa<br />

Hispánica et moi-même, a permis de<br />

limiter contours et thématique afin de<br />

rendre exploitables par les collègues<br />

et les étudiants les conférences<br />

Notes.<br />

(1) Titre explicatif : Dans cette conférence,<br />

à partir de la figure du Don Quichotte de<br />

Cervantès, où aimer au sens chevaleresque<br />

et fantasmatique se heurte à un prosaïsme,<br />

collision que l’on peut retrouver chez Buñuel<br />

( par exemple dans Belle de jour, ou dans Cet<br />

obscur objet du désir inspiré par La femme<br />

et le pantin de Pierre Louÿs la collision entre<br />

le fatal et le banal), comme chez Dali dont<br />

les propositions surréalistes se confrontent<br />

à un tel clivage, comme dans la lithographie<br />

de 1957, Apparition de Dulcinée...<br />

(2) She,<br />

She speacks English,<br />

She raps English,<br />

retenues. La journée serait donc<br />

suivie en présentiel à Cogny et en<br />

distanciel par tout un chacun via la<br />

chaîne Youtube de l’APHEC, offrant le<br />

mérite du visionnage différé.<br />

C’est ainsi que le 25 septembre,<br />

nous nous sommes immergés dans<br />

une bulle hispanique au cœur du<br />

Beaujolais. La sensation fut immédiate<br />

à notre arrivée : les pierres dorées<br />

et l’esprit l’hôte de l’association ont<br />

ceci de magique qu’elles offrent un<br />

dépaysement quasi instantané dans<br />

une sphère hors-temps totalement<br />

propice au cocon d’une journée<br />

d’étude où Aimer l’espagnol et la<br />

culture hispanique n’est pas seulement<br />

une intention. Le lieu respirait la<br />

thématique…<br />

La journée d’étude a donc vu<br />

se décliner six conférences.<br />

L’introduction à la notion Aimer a<br />

logiquement été faite par Véronique<br />

Bonnet et Frédéric Brétecher. Ces<br />

deux non-hispanisants ont su décliner<br />

avec brio – et à deux voix- une belle<br />

partie du répertoire pictural, littéraire<br />

et cinématographique sous l’axe de<br />

« Aimer et ses représentations à<br />

She reads English,<br />

She sits English,<br />

Pero quiere en español,<br />

Sueña en español,<br />

Piensa en español,<br />

Va a la church en español,<br />

Juega en español,<br />

Works in English,<br />

Siente en español,<br />

Drives in English,<br />

Hace cariños en español,<br />

Runs in English…<br />

Se mece en las curvas de sus pasos en español.<br />

Mira, ¡Ay!, ¡Mira! en español.<br />

Duerme, duerme chula,<br />

Únicamente en español.<br />

Sergio Elizondo<br />

l’épreuve du principe de réalité » 1 .<br />

De Cervantes à Buñuel en passant<br />

par Dali et Foucault, c’est toute une<br />

invitation au voyage que nous ont<br />

offerte nos deux brillants collègues :<br />

une hybridation dépaysante,<br />

temporelle, spatiale et artistique en<br />

couvrant trois arts, en (con)fondant<br />

lettres, philosophie et hispanisme. Les<br />

bases de la définition d’Aimer ont ainsi<br />

pu être posées.<br />

Au terme de cette richissime<br />

conférence, disponible sur Youtube, et<br />

ouvrant le volet des hispanistes, une<br />

intervention destinée à l’attention des<br />

étudiants portait sur l’axe sémantique :<br />

Aimer et ses trois verbes en espagnol.<br />

Ce constat différentiel entre nos deux<br />

langues était précisément le point de<br />

départ de notre réflexion. Par quelle<br />

magie la langue de Molière n’a qu’un<br />

verbe Aimer alors qu’en espagnol,<br />

trois verbes se disputent la notion ?<br />

Le souvenir du poème She 2 , de<br />

Sergio Elizondo m’a d’abord amenée<br />

à visiter les autres langues que nos<br />

étudiants apprennent pour constater<br />

que toutes ont deux ou trois verbes<br />

aussi pour exprimer la notion Aimer.<br />

Mais si la nuance sémantique est de<br />

taille entre l’allemand et l’espagnol par<br />

exemple, elle l’est aussi avec l’italien<br />

non plus sous l’angle lexical mais<br />

étymologique, notamment pour gustar<br />

et querer. Après un dépaysement<br />

linguistique, une visite au berceau<br />

de notre civilisation et ses notions<br />

Eros, Philia, Agape et Storge ont tenté<br />

de circonscrire le sens des verbes<br />

querer et amar.<br />

La transition était toute naturelle<br />

avec la brillantissime conférence<br />

de Philippe Merlo-Morat, Aimer au<br />

sens religieux dans la peinture et la<br />

35


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PAROLE DE PROFS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

musique. Professeur des Universités<br />

à Lyon 2, Philippe Merlo-Morat est un<br />

spécialiste de la littérature et de la<br />

peinture contemporaine et le rapport<br />

texte-images, mais sa condition de<br />

chœur dans l’Oratorio de Lyon lui<br />

confère aussi une extraordinaire<br />

sensibilité et connaissance du<br />

répertoire classique et religieux.<br />

C’est donc tout naturellement que cet<br />

universitaire renommé nous a invités<br />

à un voyage hybridant deux arts :<br />

la musique et la peinture. Du chant<br />

grégorien aux pièces plus récentes, il<br />

a su décliner les représentations d’un<br />

Aimer religieux à travers la peinture<br />

espagnole. Un moment de béatitude<br />

pour toute l’assemblée…<br />

Dans un registre totalement littéraire,<br />

Virginie Giuliana, maître de conférences<br />

à l’Université de Clermont Auvergne,<br />

auteure d’une thèse intitulée « Regards<br />

sur l’enfant dans la peinture de Joaquín<br />

Sorolla et la poésie de Juan Ramón<br />

Jiménez », a logiquement accédé à<br />

notre demande de traitement de l’Aimer<br />

filial dans la littérature contemporaine<br />

espagnole. Sa conférence : Aimer<br />

dans le registre familial en peinture et<br />

en littérature contemporaine, était,<br />

elle aussi, un modèle du genre en<br />

termes d’hybridation où peinture et<br />

œuvres littéraires se fondaient et se<br />

confondaient dans une intertextualité<br />

troublante de sens. Point d’orgue d’une<br />

intervention où Virginie Giuliana a<br />

convoqué les Grands du XXè siècle, le<br />

tableau de Sorolla, Madre, clôturait une<br />

conférence qui a également offert une<br />

incursion sociétale sur la condition de<br />

la femme-mère, tout à fait en lien avec<br />

des problématiques actuelles.<br />

Plus exotique encore, la conférence de<br />

Magali Kabous, maître de conférences<br />

à Lyon 2, nous a complètement<br />

dépaysés à Cuba dans un Aimer et<br />

ses transgressions au cinéma, son<br />

aire d’expertise. Finies les purs Aimer<br />

visités jusqu’à lors ! Dans un Cuba<br />

conditionné par la censure, toute la<br />

maestria des artistes consiste à dire<br />

sans dire, à exposer en suggérant.<br />

Les cinéastes n’échappant pas à<br />

la règle, ils doivent inscrire leur<br />

diégèse dans un scénario dépourvu<br />

de toute référence trop précise à<br />

l’Histoire de l’île. Abordant parfois<br />

des thématiques dures telles que la<br />

prostitution ou l’inceste, le cinéma<br />

cubain ne saurait évidemment se limiter<br />

à ces transgressions extrêmes. Et<br />

de conclure son intervention par un<br />

retour sur le plaisir féminin pouvant<br />

être transgressif dans son traitement<br />

pictural – pourtant très chastes- où<br />

les codes générationnels sont souvent<br />

brisés, au point de subir la censure<br />

Youtube, la vidéo de Magali Kabous<br />

ayant été rendue silencieuse pendant<br />

1 minute !<br />

Enfin, le clou de la journée d’étude<br />

s’est matérialisé dans une conférence<br />

enflammée, - passionnée et<br />

passionnante- sur un Aimer comme<br />

passion dans le flamenco, faite par<br />

Laura Scibetta, professeur en CPGE<br />

et chanteuse dans le groupe Kaena<br />

Colora. Pendant trente minutes, nous<br />

avons été invités à décrypter les<br />

expressions d’Aimer dans les saetas,<br />

bulerías et autres sevillanas. Usant<br />

de métaphores filées convoquant<br />

le champ lexical de la nature,<br />

Laura Scibetta a agrémenté ses<br />

explications de sa magnifique voix nous<br />

transportant dans une Andalousie<br />

passée et contemporaine vive et<br />

ardente. La frontière avec le thème<br />

de Culture Générale d’il y a deux ans,<br />

le Désir, étant fine dans ce traitement<br />

d’Aimer, Carmen fut naturellement<br />

débattue et discutée dans les<br />

questions avec la salle.<br />

Cette concrétisation de l’hybridation<br />

fut donc, cette année, une expérience<br />

à multiples entrées. Indéniablement,<br />

l’hybridation disciplinaire est la base<br />

qui sous-tend le désir d’un travailler<br />

ensemble, d’un réfléchir ensemble.<br />

Aborder le thème en l’invitant dans le<br />

monde hispanique, y convoquer les<br />

différents arts permit un traitement le<br />

plus large possible.<br />

Nous n’évoquerons que<br />

superficiellement l’hybridation<br />

technologique, certes si importante<br />

ces derniers mois, qui n’est que<br />

factuelle. Nonobstant, « distanciel »<br />

36


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS<br />

PAROLE DE PROFS<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

et « présentiel » sont désormais<br />

incontournables dans la conception ou<br />

l’organisation d’une conférence ou d’un<br />

colloque.<br />

Un troisième axe vit le jour à Cogny<br />

dans cette expérience : l’hybridation de<br />

deux mondes, jugés à tort différents<br />

voire rivaux : les classes préparatoires<br />

et le monde universitaire. Or c’est<br />

précisément de cette diversité qu’est<br />

née la richesse de cette journée de<br />

conférences : l’expertise extrême des<br />

uns dans un domaine précis et l’agilité<br />

des autres à aborder des thèmes<br />

différents chaque année, amenés à<br />

visiter des ressources foisonnantes.<br />

Les intervenants universitaires ont<br />

relevé le défi d’aborder, eux aussi,<br />

leur domaine d’expertise avec un<br />

autre regard qui les a interrogés sur<br />

leur pratique. Les discussions en off<br />

en faisaient état ce jour-là : surprise<br />

des uns, fierté du défi relevé pour les<br />

autres, mais tous étions unanimes sur<br />

la densité intellectuelle, la complétude<br />

de cette hybridation qui, au-delà du<br />

professionnel, a transformé l’humain.<br />

Réactions de deux universitaires<br />

PHILIPPE MERLO-MORAT<br />

Universitaire plus rodée aux colloques qu’aux<br />

JE des CPGE, qu’est-ce qui vous a poussée à<br />

accepter ce défi d’hybridation, sur le thème<br />

de Culture Générale de l’année, qui plus est?<br />

Je n’oublie jamais que je suis à la fois<br />

chercheur mais aussi enseignant, que j’ai<br />

été professeur près de dix ans dans le<br />

secondaire et que je suis un ancien élève de<br />

CPGE (lycée Joffre à Montpellier). Pour toutes<br />

ces raisons et pour le plaisir de communiquer<br />

les fruits de mes recherches universitaires<br />

au plus grand nombre, j’ai accepté avec<br />

grand plaisir la proposition de l’APHEC.<br />

Y a-t-il un fossé réellement palpable<br />

entre nos pratiques respectives?<br />

Aucun. Nous enseignons et nous<br />

transmettons un savoir et nous essayons<br />

tous de faire de notre mieux pour faire<br />

naître des envies, des passions. Il est vrai<br />

que l’enseignement supérieur me permet de<br />

mener à bien mes recherches avec plus de<br />

facilités que si j’étais professeur en CPGE.<br />

Qu’avez-vous retiré de cette conférence<br />

et, plus globalement, de cette JE un peu<br />

particulière pour la Villa Hispánica?<br />

Un grand plaisir de faire partager et j’espère<br />

que le plaisir aura été partagé avec les<br />

étudiants et les professeurs de l’APHEC<br />

Si c’était à refaire… ?<br />

Ce n’est pas «si c’était à refaire»,<br />

c’est «cela va se refaire» !<br />

MAGALI KABOUS<br />

Universitaire plus rodée aux colloques qu’aux<br />

JE des CPGE, qu’est-ce qui vous a poussée à<br />

accepter ce défi d’hybridation, sur le thème<br />

de Culture Générale de l’année, qui plus est?<br />

En tant qu’ancienne élève de CPGE (lettreslangues<br />

et non HEC), je vois une grande<br />

continuité entre les deux univers. Parler d’un<br />

thème aussi vaste depuis nos spécialités<br />

était une commande très large. J’étais<br />

particulièrement attirée par le sujet de<br />

réflexion, nouvelle manière d’entrer dans<br />

mon corpus cubain. Et, à titre personnel,<br />

j’avais plaisir à répondre à ta demande.<br />

Y a-t-il un fossé réellement palpable<br />

entre nos pratiques respectives?<br />

Sur mon expérience de la JE et dans ce<br />

cadre précis, je ne l’ai pas ressenti. La<br />

différence de pratiques pour moi est<br />

surtout liée à la spécificité des disciplines<br />

enseignées. Ceci dit, le public concerné<br />

n’était pas présent, c’est lui qui pourrait<br />

nous confirmer si notre intervention a<br />

apporté de l’eau à son moulin ou pas.<br />

Qu’avez-vous retiré de cette conférence<br />

et, plus globalement, de cette JE un peu<br />

particulière pour la Villa Hispánica?<br />

J’ai trouvé qu’elle était agréable à suivre<br />

de bout en bout, accessible, stimulante.<br />

Si c’était à refaire… ?<br />

... tu pourrais compter sur moi, dans la limite<br />

de mes thématiques de travail. Je pense que<br />

nous gagnerions -lors de notre préparation<br />

en amont- à connaître mieux la nature de<br />

l’épreuve à laquelle sont confrontés les<br />

étudiants qui nous écoutent et les profs<br />

qui les y préparent afin de peut-être<br />

organiser notre intervention en fonction.<br />

37


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DÉBAT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Étudier au temps du Covid<br />

Alors que la pandémie reprend et qu’on n’ose imaginer<br />

un nouveau confinement, les effets multiples de la pandémie<br />

pour la vie étudiante sont de mieux en mieux analysés.<br />

Dans son étude Une année seuls<br />

ensemble. Enquête sur les effets<br />

de la crise sanitaire sur l’année<br />

universitaire 2020-<strong>2021</strong>, effectuée<br />

en juin et juillet <strong>2021</strong>, l’Observatoire<br />

de la vie étudiante (OVE) a ainsi<br />

procédé à un état des lieux de la vie étudiante.<br />

Un chiffre est particulièrement inquiétant<br />

: 43 % des étudiants présentent<br />

les signes d’une détresse psychologique<br />

alors qu’en 2019-2020, ils n’étaient que<br />

29 %. « Nos jeunes sont plus fragiles.<br />

Peut-être parce que plus cocoonés. Peutêtre<br />

parce qu’ils vivent très mal d’être<br />

coupés d’une communauté dans laquelle<br />

ils vivent. La crise sanitaire a fait émerger<br />

cette fragilité que nous n’avions pas vu<br />

venir et que l’on retrouve dans toutes les<br />

nationalités », commente la directrice de<br />

Skema et présidente de la Conférence des<br />

directeurs des écoles françaises de management<br />

(Cdefm), Alice Guilhon. C’est<br />

souvent lié : un quart des étudiants interrogés<br />

déclare également avoir rencontré<br />

des difficultés financières importantes ou<br />

très importantes durant l’année universitaire<br />

2020-<strong>2021</strong>, soit 4 points de plus que<br />

l’année 2019-2020 (21 %) mais 8 points<br />

de moins que durant le premier confinement<br />

(33 %). Enfin, de plus en plus d’étudiants<br />

se disent « pas ou peu satisfaits »<br />

de l’enseignement qu’ils ont reçu. Ce qui<br />

n’a pas entaché leur réussite : au contraire<br />

comme le montre une note du SIES (lire<br />

plus bas), la réussite en première année<br />

de licence a fortement augmenté en 2020.<br />

clarer avoir été confrontés à des difficultés<br />

financières importantes.<br />

Au total entre 2019-2020 et 2020-<strong>2021</strong>, la<br />

proportion d’étudiants déclarant rencontrer<br />

des difficultés financières importantes<br />

a augmenté de 15 points pour les étudiants<br />

âgés de 26 ans et plus et pour les étudiants<br />

étrangers (contre 4 points pour l’ensemble).<br />

Par ailleurs, si 15 % des étudiants dont les<br />

parents sont cadres et professions intellectuelles<br />

supérieures déclarent avoir rencontré<br />

des difficultés financières importantes<br />

ou très importantes en 2020-<strong>2021</strong>, c’est le<br />

cas de 28 % des étudiants dont les parents<br />

sont ouvriers et 32 % des étudiants dont<br />

les parents sont employés.<br />

Difficutés financières rencontrées depuis le début de l’année<br />

universitaire 2020-<strong>2021</strong><br />

De graves difficultés<br />

financières<br />

Si l’ensemble des étudiants a souffert de<br />

difficultés financières, les étudiants étrangers<br />

sont les plus touchés : 52 % ont rencontré<br />

des difficultés financières importantes<br />

ou très importantes contre 20 %<br />

des étudiants français. De même, les étudiants<br />

les plus âgés (26 ans et plus), plus<br />

indépendants financièrement, sont deux<br />

fois plus nombreux que les autres à dé-<br />

38


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DÉBAT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Dans ce contexte, la solidarité familiale<br />

est essentielle : pendant la pandémie, 37 %<br />

des étudiants ont reçu de leurs parents ou<br />

de leurs proches une aide financière en<br />

lien avec la crise sanitaire et 15 % une<br />

aide matérielle. Les CROUS ont également<br />

été une ressource importante : 27 %<br />

des étudiants déclarent avoir reçu une aide<br />

financière de leur part.<br />

De nombreuses autres initiatives ont été<br />

prises par les établissements eux-mêmes.<br />

Neoma a ainsi activé un fonds de solidarité<br />

Covid, en partenariat avec NEOMA<br />

Alumni et la Fondation NEOMA, pour venir<br />

en aide aux étudiants en précarité financière.<br />

Plusieurs aides d’urgence, pour<br />

un montant global de 200 000 €, ont pu<br />

être affectées. Même réflexion du côté de<br />

l’Edhec comme l’explique son directeur<br />

général, Emmanuel Métais, : « Nous avons<br />

accordé une aide financière et matérielle<br />

aux plus fragilisés de nos étudiants grâce<br />

à l’activation de notre fond d’urgence<br />

avec l’octroi de bourses, et avons prêté<br />

du matériel, distribué des repas, sans<br />

négliger leur bien-être psychologique<br />

pour lequel nous avons beaucoup<br />

œuvré en mobilisant des coaches et des<br />

psychologues pour les aider à surmonter<br />

cette période ».<br />

Moins de jobs étudiants<br />

Le confinement du printemps 2020 avait<br />

entraîné une baisse importante de l’activité<br />

rémunérée chez les étudiants : 46 %<br />

exerçaient une activité rémunérée en 2019-<br />

2020, contre 27 % pendant le premier<br />

confinement. À la rentrée 2020-<strong>2021</strong>, la<br />

part d’étudiants exerçant un job ou un emploi<br />

s’élève à nouveau, mais reste inférieure<br />

à son niveau d’avant crise puisque<br />

seulement 37 % exercent une activité<br />

rémunérée durant l’année universitaire<br />

2020-<strong>2021</strong>.<br />

Si le revenu tiré de l’activité rémunérée<br />

est passé de 780 € par mois en moyenne<br />

en 2019-2020 à 763 € en 2020-<strong>2021</strong>, ce<br />

sont les étudiants exerçant un simple job<br />

(moins d’un mi-temps) qui ont été les plus<br />

touchés : 358 € mensuels en moyenne en<br />

2020-<strong>2021</strong> contre 552 € en 2019-2020).<br />

Obligés de rentrer<br />

chez leurs parents<br />

À l’occasion du premier confinement<br />

(au printemps 2020), près de la moitié<br />

des étudiants interrogés (44 %) avaient<br />

quitté le logement qu’ils occupaient<br />

habituellement durant une semaine<br />

de cours (la plupart pour rejoindre le<br />

domicile parental). Le phénomène était<br />

moins prononcé durant la période du<br />

« stop and go sanitaire » : seuls 29 %<br />

des étudiants ont déclaré avoir changé de<br />

logement pendant l’année 2020-<strong>2021</strong> en<br />

raison des périodes de confinement et de<br />

couvre-feu.<br />

À la rentrée 2020, un peu plus de la moitié<br />

des étudiants (51 %) ont déclaré vivre<br />

en location, colocation ou sous-location<br />

pendant une semaine normale de cours,<br />

soit sensiblement le même taux qu’à la<br />

rentrée précédente (50 % en 2019-2020).<br />

La proportion d’étudiants étant restés<br />

vivre chez leurs parents est légèrement<br />

supérieure en 2020-<strong>2021</strong> (29 % contre<br />

26 % à la rentrée 2019). Comme l’expliquent<br />

les experts de l’OVE, « la montée<br />

en autonomie, traditionnellement liée<br />

à l’avancée en âge, semble avoir été<br />

légèrement ralentie par les mesures liées à<br />

la crise sanitaire au moment de la rentrée<br />

2020 ».<br />

Psychologiquement<br />

touchés<br />

Le chiffre est particulièrement inquiétant<br />

: 43 % des étudiants présentent les<br />

signes d’une détresse psychologique. En<br />

2019-2020, ils n’étaient que 29 % à présenter<br />

les signes d’une détresse psychologique<br />

et 30 % lors de la période du premier<br />

confinement. Comme l’analysent les<br />

experts de l’OVE « la plus grande attention<br />

accordée à la santé mentale dans le<br />

débat public peut favoriser les déclarations<br />

des étudiants sur le sujet et donc rendre<br />

visible une détresse jusqu’alors ignorée ».<br />

Mais ces résultats peuvent aussi tenir à<br />

un « mouvement de fond allant vers une<br />

dégradation effective de la santé mentale<br />

des étudiants ». Enfin, le stop and go sanitaire<br />

durant lequel les étudiants ont été<br />

soumis à davantage de restrictions que le<br />

reste de la population a pu aussi « accentuer<br />

la tendance, davantage encore que le<br />

confinement ». Le président de l’universi-<br />

Avec qui habitiez-vous pendant les périodes de confinement et de couvre-feu ? (en %)<br />

39


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DÉBAT<br />

DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

Forme des enseignements durant l’année universitaire 2020-<strong>2021</strong> (en %)<br />

té Paris 2 Panthéon-Assas, Stéphane Braconnier,<br />

se souvient : « Nous avons subi les<br />

changements de pied continus de l’État. À<br />

la rentrée 2020-<strong>2021</strong> nous avons d’abord<br />

pu donner des cours à 100 % en présentiel,<br />

avant que l’Agence régionale de santé<br />

d’Île-de-France n’estime, à tort, que les<br />

universités étaient des lieux de contamination.<br />

Cela a conduit le gouvernement<br />

à nous faire passer en demi-jauge puis<br />

en 100 % distanciel… Ces changements<br />

continuels n’ont cessé qu’à la fin du mois<br />

de janvier. Ce que nous demandons c’est<br />

de la stabilité ».<br />

Dans le détail, les étudiants indiquent particulièrement<br />

avoir éprouvé de la nervosité<br />

(49 % se déclarent souvent ou en permanence<br />

très nerveux), de la tristesse et<br />

de l’abattement (38 % souvent ou en permanence)<br />

ou du découragement (24 %<br />

souvent ou en permanence). 60 % se déclarent<br />

en outre souvent ou en permanence<br />

épuisés et 30 % avoir souffert de solitude<br />

ou d’isolement.<br />

Quatre catégories d’étudiants apparaissent<br />

particulièrement fragiles : les étudiants en<br />

difficulté financière (65 % présentent les<br />

signes d’une détresse psychologique), les<br />

étudiants étrangers (53 %), les étudiants<br />

âgés de 26 ans et plus (53 %) et les étudiantes<br />

(48 %).<br />

Là aussi les établissements ont pris les<br />

choses en main comme en témoigne le<br />

directeur de Sciences Po Rennes, Pablo<br />

Diaz : « Nous avons créé un dispositif<br />

d’ambassadeurs prévention Covid avec<br />

l›École des hautes études en santé<br />

publique (EHESP). 20 étudiants que<br />

nous réunissions chaque semaine pour<br />

interagir avec les étudiants ». C’est dans<br />

cette optique que les étudiants ambassadeurs<br />

de Sciences Po Rennes ont réalisé<br />

une enquête sur la situation psychologique,<br />

matérielle et financière<br />

des étudiants de l’établissement face à<br />

la pandémie. « Nous avons également<br />

développé service « Wellness » pour venir<br />

en soutien aux étudiants, avec plusieurs<br />

dispositifs visant à préserver leur santé<br />

et leur bien-être, notamment un système<br />

de parrainage entre étudiants français et<br />

internationaux », explique Delphine Manceau,<br />

la directrice de Neoma.<br />

Des modalités<br />

La méthodologie de<br />

l’enquête de l’OVE<br />

Au total, près de 45 000<br />

étudiants inscrits au<br />

printemps 2020 à l’université,<br />

en grand établissement, en<br />

CPGE, en école d’ingénieurs,<br />

de commerce, d’art et de la<br />

culture ont été sollicités et<br />

près de 5 000 ont participé à<br />

l’enquête de l’OVE entre le<br />

28 juin et le 15 juillet <strong>2021</strong>.<br />

40


L’ESSENTIEL DU SUP PRÉPAS DÉBAT DÉCEMBRE <strong>2021</strong> N° 55<br />

d’enseignement<br />

bouleversées<br />

35 % des étudiants interrogés se disent<br />

« pas ou peu satisfaits de la formation<br />

qu’ils ont reçue » en 2020-<strong>2021</strong> quand<br />

seulement 31 % se disent « satisfaits ou<br />

très satisfaits ». Une dégradation notable<br />

puisqu’en 2019-2020, seulement 10 %<br />

des étudiants ne se déclaraient « pas<br />

ou peu satisfaits » et 64 % « satisfaits<br />

ou très satisfaits ». Une dégradation<br />

qui était déjà notable lors du premier<br />

confinement au terme duquel 39 % des<br />

étudiants déclaraient être « satisfaits ou<br />

très satisfaits » et 25 % « pas ou peu<br />

satisfaits ».<br />

Durant l’année universitaire 2020-<strong>2021</strong>,<br />

seulement 3 % des étudiants déclarent en<br />

effet avoir eu uniquement des cours en<br />

présentiel. Un tiers des étudiants n’a eu<br />

que des cours en distanciel et 65 % ont<br />

connu une hybridation de cours en présentiel<br />

et de cours en distanciel. En ce<br />

qui concerne les cours en distanciel, la<br />

forme préférentielle reste le cours en visioconférence<br />

en temps réel (97 % des<br />

étudiants qui ont eu au moins un cours<br />

en distanciel). « Si les cours magistraux<br />

ont été donnés à distance nous avons<br />

pu maintenir les travaux dirigés et les<br />

travaux pratiques en présentiel », raconte<br />

le directeur de l’Eigsi, école d’ingénieurs<br />

de La Rochelle, Frédéric Thivet<br />

quand le président de l’Association<br />

des professeurs de classes préparatoires<br />

économiques et commerciales (APHEC),<br />

Alain Joyeux rappelle que « nos élèves ont<br />

seulement dû suivre une semaine ou deux<br />

en distanciel. On ne peut donc vraiment<br />

pas parler de « génération sacrifiée ».<br />

Cela a été notamment plus compliqué<br />

pour les élèves de terminale ou de classes<br />

préparatoires en 2019-2020 qui ont<br />

compensé quelques lacunes par une surmotivation.<br />

Je n’ai donc pas le sentiment<br />

que leur niveau ait été inférieur ».<br />

Les équipements ne semblent pas avoir<br />

été un problème. Tous milieux sociaux<br />

confondus, 96 % des étudiants déclarent<br />

ainsi avoir disposé d’un ordinateur ou<br />

d’une tablette à usage personnel et 4,2 %<br />

partagés avec d’autres personnes. Les difficultés<br />

ressenties par les étudiants résident<br />

davantage dans la qualité de la connexion<br />

internet : 43 % des étudiants ne l’estimaient<br />

pas satisfaisante, en particulier les<br />

boursiers (47 %) et les étudiants dont les<br />

parents sont ouvriers (50 %). De même,<br />

45 % n’ont pas disposé d’un espace de<br />

Effet de la crise sanitaire sur la poursuite des études (en %)<br />

travail personnel, isolé et au calme (et notamment<br />

48 % des boursiers et 54 % des<br />

étudiants dont les parents sont ouvriers).<br />

Par ailleurs 75 % des étudiants indiquent<br />

ne « pas avoir eu assez de relations avec<br />

les autres étudiants de leur formation »,<br />

59 % ont eu des difficultés d’organisation<br />

de leur travail personnel ou de leur temps<br />

et 57 % de connexion internet.<br />

Des projets d’études<br />

modifiés<br />

La crise sanitaire a fortement influencé<br />

les projets de formation. À la fin de l’année<br />

2019-2020 presque un quart des étudiants<br />

qui n’étaient pas en fin d’études<br />

considéraient que la période de confinement<br />

avait eu un impact sur leurs projets<br />

de formation, ils sont un tiers dans ce cas<br />

à la fin de l’année 2020-<strong>2021</strong>. 10 % ont<br />

même décidé ou envisagent d’arrêter leurs<br />

études et 13 % décident ou envisagent de<br />

se réorienter vers une autre formation<br />

ou un autre domaine professionnel (ils<br />

n’étaient respectivement que 4 % et 9 %<br />

un an avant). En revanche la même proportion<br />

qu’à la fin du premier confinement<br />

- 9 % - envisage de prolonger ses études.<br />

Les étudiants sont en outre plus pessimistes<br />

: ils sont à présent 66 % à penser<br />

que la crise sanitaire aura un « impact négatif<br />

sur le déroulement de la suite de leurs<br />

études », alors qu’ils n’étaient que 50 % à<br />

la fin de l’année universitaire précédente.<br />

On le sait : la mobilité internationale a<br />

été fortement limitée pendant l’année :<br />

sur l’ensemble des répondants, 17 % auraient<br />

dû avoir une période de mobilité<br />

internationale pendant cette année, mais<br />

celle-ci a été annulée en raison de la pandémie<br />

pour les deux tiers et, parmi ceux<br />

dont la mobilité avait été maintenue au<br />

programme, 42 % n’ont pas pu la réaliser.<br />

Depuis le début de la crise sanitaire, la<br />

proportion d’étudiants estimant que leur<br />

vie sera meilleure que celle qu’ont menée<br />

leurs parents est passée de 46 % à 27 %, et<br />

la proportion de ceux qui estiment qu’elle<br />

sera moins bonne de 12 % à 32 %<br />

Sébastien Gémon<br />

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