Vente Christie's - 27 juin 2018

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PHOTO : HUGHES DUBOIS46

Qu’est-il arrivé à la statue Bassa ? C’est un objet que certainspeuvent considérer comme mutilé ; hormis la main gauche, visiblementsectionnée de façon peut-être rituelle pour la désacraliser, lastatuette présente en efet de nombreux manques, dont la plupartsont certainement dus à sa conception : elle n’était pas sculptéeen entier dans la masse, comme en témoignent les orifces quel’on voit aux articulations de la main droite, où devaient s’insérerdes doigts, ou aux cuisses, suggérant que les jambes elles aussidevaient être rapportées. Nous n’avons jamais cherché vraimentà l’imaginer telle qu’elle devait être à l’origine car nous l’avonstoujours aimée telle qu’elle est, bien avant de l’acquérir.Liliane et Michel Durand-DessertCette élégante statuette présente toutes les caractéristiques dustyle Bassa qui se trouvent habituellement sur les masques : l’anglefacial, la scarifcation frontale se poursuivant sur l’arête nasale, ledédoublement des arcades sourcilières par motifs et pointillés et lesépaisses marques tribales losangées et chevronnées. Les inclusions dechevilles de même que les rajouts de dents d’ivoire sont aussi usuels.Outre sa riche ornementation, notamment symétrique aux épaules,les galbes qui rythment cette sculpture sont remarquables, toutparticulièrement au dos dans la représentation de la nuque d’une « bossede bison » pouvant évoquer l’opulence de la personne représentée, ce quin’est pas sans rappeler les plis de graisse fgurés sur les masques Mende.On ignore quelle était exactement la disposition des jambes. Leurmode de fxation, bien qu’inhabituel, n’est pas unique dans la sculptureafricaine ; la sculpture de l’ancienne collection Speyer fgurant un animalfétiche en est un autre exemple. D’autres sculptures non monoxylessont connues dans diférentes ethnies. La coife de fbre, dont on peutsupposer qu’elle ait été renouvelée pour le besoin du rite, est postérieure.Cette statue s’apparente plus à un portrait qu’à un objet de culte,représentant une personne précise sous des traits idéalisés sui-generis.Ce type de « représentation-portrait » se rencontre aussi dans desethnies assez proches, par exemple chez les Gouro (cf. Fischer, E. etHomberger, L., Die Kunst der Guro, Zürich, 1985, p. 230, n° 181). De plus, laposition corporelle est proche des attitudes traditionnelles des anciennessculptures en pierre Kissi et Sherbro de Guinée et Sierra Leone, ethniesvoisines. Cette parenté est notable dans les caractères suivants : le courentré dans les épaules, les bras repliés haut sur le buste massif et laschématisation des membres inférieurs ne laissant apparaître que lescuisses et la rotule (cf. Tagliaferri, A., Stili del Potere, Milan, 1989, pp.86-91, 101-103 et 106-107). De même, le reliquaire ombilical se rencontredans la statuaire Kissi-Sherbro (cf. op. cit. p. 110, n° 88, 89, 94 et 115).47

Qu’est-il arrivé à la statue Bassa ? C’est un objet que certains

peuvent considérer comme mutilé ; hormis la main gauche, visiblement

sectionnée de façon peut-être rituelle pour la désacraliser, la

statuette présente en efet de nombreux manques, dont la plupart

sont certainement dus à sa conception : elle n’était pas sculptée

en entier dans la masse, comme en témoignent les orifces que

l’on voit aux articulations de la main droite, où devaient s’insérer

des doigts, ou aux cuisses, suggérant que les jambes elles aussi

devaient être rapportées. Nous n’avons jamais cherché vraiment

à l’imaginer telle qu’elle devait être à l’origine car nous l’avons

toujours aimée telle qu’elle est, bien avant de l’acquérir.

Liliane et Michel Durand-Dessert

Cette élégante statuette présente toutes les caractéristiques du

style Bassa qui se trouvent habituellement sur les masques : l’angle

facial, la scarifcation frontale se poursuivant sur l’arête nasale, le

dédoublement des arcades sourcilières par motifs et pointillés et les

épaisses marques tribales losangées et chevronnées. Les inclusions de

chevilles de même que les rajouts de dents d’ivoire sont aussi usuels.

Outre sa riche ornementation, notamment symétrique aux épaules,

les galbes qui rythment cette sculpture sont remarquables, tout

particulièrement au dos dans la représentation de la nuque d’une « bosse

de bison » pouvant évoquer l’opulence de la personne représentée, ce qui

n’est pas sans rappeler les plis de graisse fgurés sur les masques Mende.

On ignore quelle était exactement la disposition des jambes. Leur

mode de fxation, bien qu’inhabituel, n’est pas unique dans la sculpture

africaine ; la sculpture de l’ancienne collection Speyer fgurant un animal

fétiche en est un autre exemple. D’autres sculptures non monoxyles

sont connues dans diférentes ethnies. La coife de fbre, dont on peut

supposer qu’elle ait été renouvelée pour le besoin du rite, est postérieure.

Cette statue s’apparente plus à un portrait qu’à un objet de culte,

représentant une personne précise sous des traits idéalisés sui-generis.

Ce type de « représentation-portrait » se rencontre aussi dans des

ethnies assez proches, par exemple chez les Gouro (cf. Fischer, E. et

Homberger, L., Die Kunst der Guro, Zürich, 1985, p. 230, n° 181). De plus, la

position corporelle est proche des attitudes traditionnelles des anciennes

sculptures en pierre Kissi et Sherbro de Guinée et Sierra Leone, ethnies

voisines. Cette parenté est notable dans les caractères suivants : le cou

rentré dans les épaules, les bras repliés haut sur le buste massif et la

schématisation des membres inférieurs ne laissant apparaître que les

cuisses et la rotule (cf. Tagliaferri, A., Stili del Potere, Milan, 1989, pp.

86-91, 101-103 et 106-107). De même, le reliquaire ombilical se rencontre

dans la statuaire Kissi-Sherbro (cf. op. cit. p. 110, n° 88, 89, 94 et 115).

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