Un art autre et au-delà
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D’<strong><strong>au</strong>tre</strong> p<strong>art</strong>, on sait qu’il a été très influencé par les <strong>art</strong>istes de<br />
l’informel. En eff<strong>et</strong>, en 1959, il assiste à l’exposition « Junge Maler der<br />
Gegenw<strong>art</strong> » à la Künstlerh<strong>au</strong>s de Vienne, dans laquelle sont présentés<br />
des œuvres de l’<strong>art</strong> informel <strong>et</strong> de l’expressionisme abstrait américain.<br />
On y r<strong>et</strong>rouve entre <strong><strong>au</strong>tre</strong>s pour ne citer qu’eux les œuvres de Georges<br />
Mathieu <strong>et</strong> de Jackson Pollock à propos desquelles Nitsch déclarera:<br />
Gina Pane lors de l’action Autportrait(s),<br />
le 11 janvier 1973<br />
© Archives galerie Rodolphe Stadler – les Abattoirs<br />
Musée-Frac Occitanie Toulouse France<br />
« J’ai vu Mathieu <strong>et</strong> les Américains <strong>et</strong> je me suis dit : ce que font ces peintres,<br />
c’est pareil pour moi avec le théâtre. J’ai rassemblé tout mon courage <strong>et</strong> j’ai<br />
recommencé à peindre dans le sens où j’ai concrétisé sur la surface du table<strong>au</strong><br />
les idées que j’avais eu pour mon théâtre, renversant de la peinture rouge sur<br />
la toile, organisant une peinture actionniste en renversant de la peinture fluide<br />
ou épaisse sur le sol dans des pièces entières. »<br />
Ainsi, la découverte des actions painting françaises <strong>et</strong> américaines<br />
eurent chez Nitsch un eff<strong>et</strong> déclencheur car elles concrétisent par le<br />
geste <strong>et</strong> l’action frénétique de peindre ce qu’il ambitionnait pour son<br />
théâtre : un <strong>art</strong> thérapeutique <strong>et</strong> exutoire.<br />
C’est d’ailleurs l’importance du geste que r<strong>et</strong>iendra Nitsch <strong>et</strong> qu’il m<strong>et</strong>tra<br />
en œuvre en novembre 1960 à l’occasion de sa première Malaktion ou<br />
peinture-action <strong>au</strong> Techniches Museum de Vienne. Nitsch place dès<br />
lors le corps en action <strong>au</strong> cœur de sa pratique picturale. Les table<strong>au</strong>x<br />
de l’<strong>art</strong>iste se présentent sur de grands formats qu’il nomme Rinnbild<br />
(table<strong>au</strong> où la peinture coule sur la toile) <strong>et</strong> Shuttbild (table<strong>au</strong> où la<br />
peinture est proj<strong>et</strong>ée sur la toile). Il travaille avec des pince<strong>au</strong>x, des<br />
éponges ou directement avec ses mains ainsi qu’avec toute la surface de<br />
son corps. Les éléments sont imbibés de peinture rouge, de sang, d’e<strong>au</strong><br />
tiède <strong>et</strong> de vinaigre qu’il frotte, presse <strong>et</strong> fait gicler violement laissant leur<br />
trace sur la toile <strong>et</strong> entr<strong>et</strong>enant un rapport physique, charnel <strong>et</strong> sensuel<br />
avec la matière. Ce corps-à-corps avec la toile, <strong>au</strong>-<strong>delà</strong> de son évidente<br />
intensité, est pour l’<strong>art</strong>iste chargé d’une symbolique propre :<br />
Rodolphe Stadler <strong>et</strong> Hermann Nitsch<br />
lors du vernissage de l’exposition d’Hermann<br />
Nitsch : Le théâtre du mystère <strong>et</strong><br />
des orgies en mars 1985<br />
© Archives galerie Rodolphe Stadler – les Abattoirs<br />
Musée-Frac Occitanie Toulouse France<br />
« Le déversement <strong>et</strong> l’aspersion, la pression d’éponges, battre, tacher, souiller<br />
<strong>et</strong> rouler ne sont pas à comprendre comme une bataille actionniste des<br />
matéri<strong>au</strong>x, mais en tant que rituel shamanique dans lequel les actions qui<br />
symbolisent la naissance <strong>et</strong> la mort, tuer <strong>et</strong> expier sont performées dans un<br />
processus d’<strong>au</strong>to-découverte. »<br />
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