Spectrum_04_2021
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FRIBOURG
Texte et photo Lara Diserens
Toxicomanie : au-delà des
préjugés
Depuis 1994, la fondation Le Tremplin, basée à Fribourg,
accueille les personnes en situation d’addiction dans un
but de réinsertion professionnelle, de réentraînement au
travail, et de resocialisation.
evant l’entrée du Seuil, on prend le soleil.
Il y règne une ambiance de cours
D
d’école. L’esprit est convivial, les discussions
animées, les débats vifs. Le tableau a tout
d’une réunion entre amis proches. Dans le
fond, ces gens semblent normaux. Car ils
le sont véritablement. Pour accompagner
les personnes en situation d’addiction, Le
Tremplin se base sur un principe simple :
les personnes toxicodépendantes sont des
citoyen·ne ·s avec des droits et des devoirs,
dignes d’être respectées et responsabilisées...comme
tout être humain.
Une prise en charge transversale
Cédric Fazan est directeur de l’institution
depuis 7 ans. Anciennement éducateur dans
le domaine des addictions, il décrit la fondation
comme un énorme laboratoire. L’institution
agit sur six secteurs d’activités ambulatoires,
dont un service social, des centres
résidentiels et de jours comme le Seuil, ou
encore des ateliers créatifs. M. Fazan insiste
sur le principe de transversalité. « Ces personnes
ont besoin d’accompagnement socio-éducatif.
» glisse le directeur. La prise en
charge des personnes en situation d’addiction
dépasse la consommation. « C’est un public
est en grande précarité social. Ces gens
ne sont pas seulement des toxicomanes,
mais des personnes qui ont des problèmes
d’insertion sociale et d’intégration professionnelle.
» De cette manière, l’accompagnement
l’emporte sur la sanction. M. Fazan
explique : « La réduction des risques a un
principe : on ne force pas la personne à l’abstinence.
D’abord ça ne marche pas, et puis
c’est contre les droits humains. La liberté de
choix des personnes, même si elle se fait du
mal, est fondamentale. »
Les bons termes à utiliser :
Toxicomanie : manie du toxique,
terme avec une connotation morale.
C’est une maladie de la volonté.
Toxicodépendance : maladie avec
une dépendance physique.
Personne en situation d’addiction :
dépendance de la consommation
entraînant une modification de la vision
du monde et de soi-même.
« La consommation n’est pas le problème
numéro un »
Au fil de son parcours, Cédric Fazan reconnait
certains schémas, notamment chez les
jeunes toxicodépendant·e·s. « Souvent, le
produit n’est pas le problème numéro un.
Mais systématiquement, on retrouve des
soucis psychiatriques et de la maltraitance
survenue dans l’enfance. La maltraitance
physique n’est pas le pire : c’est le mépris
psychologique qui empêche la construction
du jeune. » Qu’ils soient adolescent·e·s ou vieillar·e·ds,
les personnes toxicomanes souffrent
d’un manque de considération qui se
poursuit au sein de la société. « Ce qui tue les
personnes qui consomment, c’est le regard
des gens, la stigmatisation, le jugement», se
désole M.Fazan. Le directeur implore la sensibilisation
et la reconnaissance de la population
face à ce public. Malheureusement,
ces gens ont une capacité d’auto-exclusion
énorme. « Ils ont intégré les étiquettes de
la société », rappelle le directeur d’origine
vaudoise. « Il est de notre devoir d’accompagner
ces personnes dans le changement
et de leur faire confiance. ».
Miséricorde VS Le Tremplin
En plus de son engagement exigeant, l’institution
rencontre quelques différents avec
notre chère Université. Les désagréments
concernent la délocalisation de l’institution
pour cause de l’agrandissement de l’Université
de Miséricorde. Si les discussions sont
encore en cours, les propositions de relocalisation
proposées par l’état ne sont pas
suffisamment adaptées à une institution
comme le Tremplin. « Maints obstacles nous
barre encore la vue et nous sommes en train
de viser une solution pérenne, et une solution
temporaire et transitoire qui permettrait
au Tremplin de libérer la parcelle actuelle en
faveur de l'UniFR. » soumet M.Fazan. Pour
autant, Le Tremplin attend de l’état fribourgeois
un soutien et une prise en considération
de l’institution et de ses membres. P
Cédric Fazan, le directeur du Tremplin, devant le
centre d’accueil de jour Le Seuil.
20 spectrum 09.21