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Red Bulletin 09.21 FR

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<strong>FR</strong>ANCE<br />

SEPTEMBRE 2021<br />

HORS DU COMMUN<br />

Votre magazine<br />

offert chaque<br />

mois avec<br />

L’ÉPREUVE<br />

DE FORCE<br />

Dans la fascination<br />

du photographe BEN<br />

THOUARD pour les<br />

tubes de Teahupo’o,<br />

le « mur de crânes »<br />

Tout dans les bras :<br />

le Tahitien Matehau<br />

Tetopata échappe<br />

à la mâchoire du<br />

monstre aquatique.


T-TR1<br />

Robot de téléprésence mobile<br />

commandé à distance<br />

PRÈS DES YEUX,<br />

PRÈS DU CŒUR.<br />

*<br />

*DÉPASSER L’IMPOSSIBLE<br />

Prototype Toyota présenté. Indisponible à la vente. ©2020 Toyota Motor Corporation. Tous droits réservés.


Éditorial<br />

À CHACUN SA<br />

DYNAMIQUE<br />

Ces lignes introductives nous permettent de sentir<br />

et de vous transmettre l’esprit de chaque nouveau<br />

The <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong>. Ce qui nous saute aux yeux ce<br />

mois-ci, c’est la notion de dynamique qui réunit<br />

nos invités, malgré leurs réalités diverses.<br />

Celle des vagues que documente Ben Thouard<br />

dans un processus créatif mêlant défi physique<br />

et fascination. Avec le pilote F1 Max Verstappen,<br />

au-delà de l’idée attendue de vitesse, on aborde<br />

un nouvel état d’esprit et son potentiel premier<br />

titre de champion du monde. Chez la chanteuse<br />

Nai Palm, nous apprécions sa capacité à toujours<br />

avancer, malgré l’adversité.<br />

Enfin, sur une roue ou deux, les pneus massifs<br />

de jeunes riders new-yorkais à vélo propulsent<br />

une nouvelle donne culturelle et sociétale aux<br />

États-Unis : la Bike Life.<br />

À chacun sa dynamique, croyez en la vôtre.<br />

CONTRIBUTEURS<br />

NOS ÉQUIPIERS<br />

MARZ LOVEJOY<br />

L’ancienne New-Yorkaise,<br />

désormais installée à<br />

Copenhague, a eu des questions<br />

directes avant d’accepter<br />

de couvrir la culture Bike<br />

Life. « Il est impératif que<br />

les Noirs, les métisses et les<br />

autres personnes marginalisées<br />

racontent nos histoires<br />

à notre manière », déclare<br />

Lovejoy, qui a auto-publié<br />

un livre et écrit pour le<br />

site très tendance office.<br />

En selle avec la Bike Life.<br />

Page 62<br />

BEN THOUARD (COUVERTURE)<br />

Belle lecture !<br />

Votre Rédaction<br />

Le photographe Ben Thouard s’immerge dans son métier – et dans les eaux de Tahiti –<br />

avec son kit photo étanche. « Je veux faire des images intemporelles », dit-il. Page 24<br />

BEN THOUARD<br />

Nous avions sollicité Ben pour<br />

lui dédier un portfolio 100 %<br />

surf, mais le caractère hypnotisant<br />

des vagues dans l’ouvrage<br />

du Français nous a poussés à<br />

aussi publier des photos sans<br />

surfeurs. « L’aspect artistique,<br />

plus personnel de la photo de<br />

vagues m’a tellement attiré<br />

que j’ai plongé dedans, c’est<br />

le cas de le dire », explique-t-il<br />

depuis la Polynésie française<br />

où ce photographe réside et où<br />

il n’a qu’à se jeter à l’eau pour<br />

saisir ces formes aquatiques<br />

qui le passionnent. Page 24<br />

THE RED BULLETIN 3


CONTENUS<br />

septembre 2021<br />

52<br />

Devenu zen, Max<br />

remportera-t-il la<br />

saison de F1 ?<br />

8 Galerie : des performances à<br />

couper le souffle<br />

14 Roulettes ruse : quand le skate<br />

recycle le chewing-gum<br />

15 Pour un espace plus féminin<br />

16 Karishma Ali : la footballeuse<br />

qui change la donne au Pakistan<br />

18 Le télétravail devient mobile<br />

avec ce camping-car de Nissan<br />

20 Robby Naish : le dieu du windsurf<br />

glisse sur son destin<br />

24 Mer forte<br />

Pour le photographe de surf<br />

Ben Thouard, le surfeur n’est<br />

plus forcément au cœur du<br />

sujet.<br />

38 Passez au vert<br />

Pour préserver la nature à<br />

laquelle il doit tant, l’ultratraileur<br />

Xavier Thévenard ne<br />

prend plus l’avion. Et vous ?<br />

44 Sous les cicatrices<br />

Nai Palm, chanteuse du groupe<br />

australien Hiatus Kaiyote,<br />

a transformé en motivation<br />

ses plus rudes épreuves.<br />

52 À son tour de briller<br />

Nous avons rencontré le pilote<br />

de F1 Max Verstappen à Monaco.<br />

Un nouveau Max. Au max.<br />

62 En roue libre<br />

Au rythme de la Bike Life newyorkaise,<br />

où le vélo est bien plus<br />

qu’un moyen de déplacement.<br />

FORMULA 1/ADRIAN GREEN, BEN <strong>FR</strong>ANKE, TRÉ KOCH<br />

6 THE RED BULLETIN


62<br />

Quand la jeunesse<br />

US prend son envol<br />

sur une roue.<br />

75<br />

44<br />

Nai Palm ne laisse<br />

pas les coups durs<br />

gâcher son voyage.<br />

Voyage : faites un saut en<br />

Suisse méditerranéenne pour<br />

grimper les blocs du Tessin<br />

80 Fitness : les bienfaits d’une<br />

bonne baignade en eau froide<br />

81 Fitness 2 : un rameur d’intérieur<br />

qui vous transporte<br />

82 Gaming : les jeux de survie<br />

peuvent-ils nous préparer aux<br />

dangers de l’aventure outdoor ?<br />

84 Minimalisme : si vous suivez<br />

leurs conseils, vous ne garderez<br />

pas ce magazine longtemps…<br />

86 Agenda : sur <strong>Red</strong> Bull TV ou<br />

dans la vraie vie, ce qu’il ne faut<br />

pas manquer<br />

88 Matos : prêt(e) à bouger à moto ?<br />

96 Ils et elles font The <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

97 Photo finale : chute dans le Sud<br />

THE RED BULLETIN 7


LOS ANGELES, USA<br />

Part de rêve<br />

Bluffant, comment le pionnier du freeride<br />

russe Pavel Alekhin s’affranchit des lois de<br />

la physique pour atteindre des sommets, et<br />

les nuages. Évidemment, la photo est arrangée.<br />

Cette image est l’œuvre du photographe<br />

et prodige de Photoshop Denis Klero, aussi<br />

compatriote de Pavel. « Je voulais transposer<br />

le vrai saut de Pavel, exécuté à Los Angeles,<br />

dans un environnement artificiel mais féerique,<br />

explique Klero. Car le talent de Pavel<br />

flirte avec les sommets. »<br />

Plus de photos de rêve : klero.ru<br />

DENIS KLERO/RED BULL CONTENT POOL


9


LANDMANNALAUGAR,<br />

ISLANDE<br />

Beauté en<br />

extinction<br />

« L’histoire est toujours la même, affirme<br />

Chris Burkard. Un paysage magnifique<br />

menacé de disparaître. » À bord d’un<br />

Cessna, le photographe californien<br />

survole le cours des rivières glaciaires<br />

d’Islande serpentant les Highlands telles<br />

les racines d’une gigantesque plante.<br />

Le Piper-Cub jaune (volant 300 m plus<br />

bas) semble n’être qu’un simple puceron.<br />

Retrouvez l’ensemble du projet dans le<br />

livre de Burkard : At Glacier’s End.<br />

chrisburkard.com


GOLFE DE FINLANDE<br />

Tour de<br />

contrôle<br />

Les phares sont plus divertissants<br />

qu’ils n’y paraissent. Le photographe<br />

Victor Sukhorukov le<br />

prouve. Le Russe a dû surmonter<br />

deux obstacles : un épais brouillard<br />

et un drone capricieux pour filmer<br />

le BASE jumper Semjon Lazarev<br />

parti du haut des quarante mètres<br />

de ce phare situé en Russie, près<br />

de Saint-Pétersbourg.<br />

tankizt.com<br />

CHRIS BURKARD, VICTOR SUKHORUKOV/RED BULL ILLUME DAVYDD CHONG<br />

11


RAUNHEIM, ALLEMAGNE<br />

J’ai vu de<br />

la lumière...<br />

Au volant de sa voiture, le photographe Robert<br />

Garo est passé maintes fois devant ce spot situé<br />

sur l’autoroute A3 au sud-ouest de Francfort<br />

sans jamais y prêter attention. Il finit par le remarquer<br />

un jour d’embouteillage. Il y revient de<br />

nuit pour examiner la structure de près. Celle-ci<br />

est, à sa grande joie, illuminée. Un décor idéal<br />

pour mettre en valeur le skateur Milan Hruška.<br />

Et une chance unique de briller lors du <strong>Red</strong> Bull<br />

Illume, le plus grand concours de photographie<br />

pour les sports d’aventure et d’action au monde.<br />

Plus de photos sur : robertgaro.net<br />

ROBERT GARO/RED BULL ILLUME


13


SKATE DURABLE<br />

Mets la gomme<br />

Deux étudiants en design rendent les villes plus propres<br />

avec des roues de skateboard mentholées.<br />

Les adeptes des sports de<br />

glisse sont soucieux de préserver<br />

leurs terrains de jeu. Pour<br />

le surfeur ou le snowboardeur,<br />

un spot abîmé est une source<br />

de plaisir gâché. Aussi, lorsque<br />

Hugo Maupetit et Vivian<br />

Fischer, deux étudiants nantais<br />

en design de 23 ans, réfléchissaient<br />

à un nouveau moyen de<br />

rendre les rues de la ville plus<br />

propres, la communauté des<br />

skateurs est apparue comme<br />

une évidence. Leur projet ?<br />

Récupérer les chewing-gums<br />

usés pour les transformer en<br />

roues de skate.<br />

Contrairement à la rumeur,<br />

un chewing-gum avalé ne reste<br />

pas éternellement dans votre<br />

estomac, votre corps l’expulsera.<br />

Mais sur le trottoir, il y restera<br />

longtemps à cause des<br />

matières plastiques qu’il recèle :<br />

polyéthylène (utilisé dans la<br />

fabrication des sacs plastiques)<br />

et caoutchouc butyle (utilisé<br />

dans les pneus).<br />

Étonné ? Rassurez-vous,<br />

vous n’êtes pas seul. Une étude<br />

réalisée en 2018 par Iceland,<br />

une chaîne de supermarchés<br />

britannique, révèle que 85 %<br />

des personnes interrogées<br />

l’ignoraient. Pire encore, plus<br />

de 80 % des milliards de<br />

chewing-gums mâchés chaque<br />

année atterrissent sur un<br />

trottoir. « Les rues de Nantes<br />

sont parsemées de taches<br />

blanches, explique Maupetit.<br />

Les skateurs constituent une<br />

Adhésion durable : une plaque à chewing-gums.<br />

communauté très sensible à la<br />

protection de l’environnement,<br />

et recycler des chewing-gums<br />

nous a semblé être une excellente<br />

initiative. Le chewinggum<br />

évoque pour nous la souplesse<br />

que requièrent les<br />

roues de skate dont l’usure<br />

est rapide. »<br />

Maupetit et Fischer ont installé<br />

des plaques de collecte<br />

près des skate parks et des<br />

points de ralliement locaux,<br />

invitant les skateurs à y coller<br />

leurs chewing-gums. Les<br />

plaques sont ensuite envoyées<br />

dans une usine où elles sont<br />

broyées avec le chewing-gum.<br />

Le polyméthacrylate de<br />

méthyle, qui compose la<br />

plaque, stabilise la texture.<br />

Celle-ci est mélangée à un<br />

matériau non révélé par Maupetit,<br />

avant d’être moulée par<br />

injection puis usinée. Ainsi,<br />

une roue recycle entre dix et<br />

trente chewing-gums en fonction<br />

de la dureté souhaitée.<br />

Le projet est, pour l’heure<br />

en phase, d’expérimentation.<br />

Maupetit et Fischer espèrent<br />

y associer des marques susceptibles<br />

d’offrir plus de<br />

débouchés à leur initiative.<br />

Ils ont sollicité le fabricant de<br />

chewing-gum Mentos et la<br />

célèbre marque Vans, qui<br />

n’ont pas donné suite à ce jour.<br />

« Mentos est intéressé, mais<br />

Vans n’a pas encore réagi,<br />

confie Maupetit. Les marques<br />

gagneraient à développer des<br />

projets en faveur de l’environnement,<br />

mais ne le font souvent<br />

que sous la contrainte. »<br />

Maupetit fait également<br />

état de réticences de la part<br />

de l’autorité locale, pourtant<br />

principale bénéficiaire du projet.<br />

« Nous avons arrêté l’installation<br />

de nouvelles plaques,<br />

la ville ne nous a pas délivré<br />

d’autorisation pour les emplacements<br />

ciblés. Mais cela<br />

devrait changer prochainement.<br />

Il en va de l’intérêt de<br />

tous. Nantes pourrait ainsi<br />

réduire ses coûts d’entretien<br />

des espaces publics. »<br />

Instagram : @hugo_maupetit ;<br />

@vivian_fischer_<br />

HUGO MAUPETIT, VIVIAN FISCHER LOU BOYD<br />

14 THE RED BULLETIN


THIS IS ENGINEERING/ROYAL ACADEMY OF ENGINEERING LOU BOYD<br />

ROCKET WOMEN<br />

L’espace<br />

universel<br />

Enfant, Vinita Marwaha Madill rêvait de devenir<br />

astronaute. Aujourd’hui, elle encourage les<br />

ambitions des générations futures.<br />

En 1993, Vinita Marwaha<br />

Madill a six ans. Dans la<br />

bibliothèque du coin, elle<br />

découvre un livre sur l’espace<br />

avec, sur l’une des pages, la<br />

photo d’Helen Sharman, première<br />

femme astronaute britannique<br />

et première femme<br />

d’Europe occidentale à aller<br />

dans l’espace. « J’ignorais<br />

alors l’existence d’une astronaute<br />

britannique, explique la<br />

femme de 34 ans, native de<br />

Londres. Le fait de voir à un<br />

jeune âge cette photo a été<br />

un déclic, réaliser mes rêves<br />

devenait soudain possible. »<br />

Cette découverte incite<br />

Marwaha Madill à s’engager<br />

Marwaha Madill a conçu des combinaisons<br />

pour l’espace et rédigé des<br />

procédures pour les astronautes.<br />

dans un parcours qui la mène à<br />

l’Université internationale de<br />

l’espace en France, à un emploi<br />

d’ingénieure des opérations<br />

spatiales au sein de l’Agence<br />

spatiale européenne (ESA) ;<br />

aujourd’hui, elle est chef de<br />

projet pour la société d’exploration<br />

spatiale et de robotique<br />

Mission Control Space Services<br />

à Ottawa (Canada).<br />

Désireuse d’encourager<br />

d’autres jeunes femmes à<br />

entrer dans l’industrie spatiale<br />

et à rejoindre le programme<br />

STIM (sciences, technologies,<br />

ingénierie et mathématiques)<br />

de la NASA, elle fonde en 2012<br />

Rocket Women, une plateforme<br />

mondiale qui relate des<br />

parcours de femmes remarquables<br />

dans les domaines de<br />

l’espace, les sciences et l’ingénierie.<br />

Récemment, le site a<br />

mis à l’honneur Dr Chiara Manfletti,<br />

responsable des stratégies<br />

de l’ESA, et feue Katherine<br />

Johnson, mathématicienne de<br />

la NASA et pionnière afro-américaine<br />

dont les calculs ont été<br />

essentiels à de nombreuses<br />

missions spatiales, notamment<br />

l’alunissage historique<br />

d’Apollo 11 en juillet 1969.<br />

« J’ai également été inspirée<br />

par Sally Ride, la première Américaine<br />

à aller dans l’espace,<br />

confie Marwaha Madill. “On ne<br />

peut pas être ce qu’on ignore’’,<br />

disait-elle. Rien n’est plus vrai. »<br />

En plus d’être un réseau permettant<br />

aux étudiantes en<br />

STIM de rencontrer des professionnelles,<br />

Rocket Women propose<br />

une ligne de vêtements<br />

dont les revenus assurent une<br />

bourse d’études à de jeunes<br />

étudiantes à l’Université internationale<br />

de l’espace — une<br />

étape cruciale dans le parcours<br />

professionnel de Marwaha<br />

Madill. « Je n’aurais pas pu étudier<br />

à l’ISU sans cette bourse »,<br />

insiste-t-elle. Anglaise originaire<br />

d’Inde, Marwaha Madill estime<br />

nécessaire de promouvoir la<br />

diversité dans le domaine des<br />

sciences et de l’ingénierie, une<br />

diversité de genre, mais aussi<br />

d’origine sociale et ethnique.<br />

« Au Royaume-Uni, environ 12 %<br />

des professionnels de l’ingénierie<br />

sont des femmes, et moins<br />

de 9 % sont issues de minorités<br />

ethniques. Statistiquement,<br />

une étudiante en ingénierie ou<br />

en STIM a de fortes chances<br />

d’être l’unique femme dans une<br />

salle de cours, d’où la nécessité<br />

d’une communauté qui vous<br />

soutient… L’ingénierie et les<br />

STIM doivent refléter la société,<br />

on ne le dira jamais assez, car<br />

les systèmes que nous concevons<br />

se destinent à tous. »<br />

rocket-women.com<br />

THE RED BULLETIN 15


Karishma Ali<br />

Droit au but<br />

La star du foot pakistanais parle de ses victoires, de sa lutte<br />

pour l’égalité des sexes et de son combat contre les haters.<br />

Texte ALEXANDRA ZAGALSKY<br />

Photo ABUZAR MIR<br />

beaucoup plus important que prévu.<br />

Elles m’ont montré qu’elles étaient<br />

prêtes à se battre pour leurs droits,<br />

et que je pouvais les aider. Au lieu<br />

d’inviter leurs pères et leurs frères à<br />

assister aux tournois, j’ai convié leurs<br />

mères, qui ont rarement l’occasion<br />

d’assister à de tels événements.<br />

En 2016, Karishma Ali établit un<br />

record à double lecture. Choisie pour<br />

représenter le Pakistan aux Jubilee<br />

Games à Dubaï, la pépite du football,<br />

alors âgée de 19 ans, devient la première<br />

fille de sa ville natale, Chitral,<br />

à participer à un grand tournoi sportif.<br />

Dès l’âge de neuf ans, Ali se passionne<br />

pour le football. Ses années<br />

de lycée à Islamabad, ville plus<br />

ouverte à l’éducation physique des<br />

filles, donnent un coup de pouce à<br />

sa carrière sportive. Elle décroche<br />

une médaille d’argent à Dubaï, et<br />

rentre chez elle avec l’envie d’inciter<br />

les femmes au sport. Pour ce faire,<br />

Ali organise un stage de football<br />

pour lequel elle s’attend à un intérêt<br />

très limité : à sa grande surprise, plus<br />

de cinquante filles s’y inscrivent.<br />

Mais ce succès s’accompagne d’un<br />

revers. Le district de Chitral – région<br />

montagneuse isolée du nord du<br />

Pakistan – est particulièrement<br />

conservateur et patriarcal. Ali est<br />

l’objet d’abus et menaces en ligne.<br />

« Difficile d’être imperméable à la<br />

haine et aux critiques quand on a<br />

18 ans, se souvient-elle aujourd’hui<br />

à 24 ans. Je m’endormais en pleurs. »<br />

Loin de se décourager, la jeune<br />

femme fonde en 2018 le Chitral<br />

Women’s Sports Club, qui propose<br />

aux filles de pratiquer le foot, le volley-ball,<br />

le cricket et même le ski. Le<br />

club compte actuellement plus de<br />

200 licenciées âgées de 8 à 16 ans.<br />

En janvier 2020, elle organise un<br />

stage de football à Islamabad : 37<br />

membres du club y participent, encadrées<br />

par des pros. « Les grands<br />

immeubles, les femmes au volant,<br />

tout cela les a impressionnées,<br />

confie-t-elle. Leur assurance sur le<br />

terrain était belle à voir. »<br />

Quant au club de Karishma, le<br />

Highlanders FC, il a participé cette<br />

année au championnat national<br />

féminin en atteignant les quarts de<br />

finale, avant que la compétition ne<br />

soit annulée après qu’un conflit politique<br />

pousse la FIFA à suspendre,<br />

au printemps dernier, la délégation<br />

pakistanaise de football. Mais la<br />

jeune femme, qui a intégré le 30<br />

Under 30 Asia, classement Forbes<br />

des jeunes entrepreneurs en 2019,<br />

ne recule jamais. Outre son académie<br />

de sport, elle dirige à Chitral<br />

un centre d’artisanat pour femmes,<br />

associé à des créateurs de mode et<br />

qui génère ses propres revenus.<br />

Désormais diplômée en gestion<br />

des affaires à l’université de Londres<br />

d’Islamabad, Ali ambitionne d’améliorer<br />

les infrastructures sportives<br />

de Chitral et de sa région. « Je veux<br />

construire un stade pour les filles et<br />

implanter des clubs dans toutes les<br />

vallées. Le foot est bien plus qu’un<br />

sport, c’est un levier de changement<br />

positif pour les communautés. »<br />

the red bulletin : Jouer au football<br />

n’est pas une mince affaire<br />

pour les filles de Chitral…<br />

karishma ali : Je le dois beaucoup<br />

à mon père. J’ai regardé la Coupe<br />

du monde 2006 à ses côtés. J’allais<br />

dehors et tapais dans tout ce que je<br />

pouvais. Mon père est très libéral<br />

et m’a encouragée à me lancer. Il a<br />

contribué à fonder la première école<br />

anglophone de Chitral en 2002. Les<br />

parents désireux d’y envoyer leurs<br />

fils devaient aussi y inscrire leurs<br />

filles. Mon jeu s’est beaucoup amélioré<br />

au lycée. Je tapais dans le ballon<br />

en Salwar kameez (l’uniforme<br />

traditionnel pakistanais, ndlr) avant<br />

les cours. Je me moquais d’être en<br />

sueur ou pas « jolie ».<br />

Vous attendiez-vous au succès dès<br />

votre premier stage ?<br />

Je n’avais que vingt formulaires<br />

d’inscription, mais les filles les ont<br />

photocopiés, le groupe a fini par être<br />

Comment le stage d’été s’est-il<br />

transformé en club permanent ?<br />

Les joueuses dont je m’occupe<br />

viennent de quarante villages différents.<br />

Même avec un terrain attitré,<br />

de nombreuses filles marchaient<br />

jusqu’à deux heures pour s’y rendre.<br />

Depuis 2019, la subvention Made to<br />

Play (octroyée par Nike et Gurls Talk,<br />

une association pour la promotion du<br />

bien-être psychique des jeunes femmes,<br />

ndlr), nous permet de louer des<br />

Jeeps pour le transport. C’est ainsi<br />

que le nombre d’adhérentes a doublé.<br />

Chitral possède le taux de suicide le<br />

plus élevé du Pakistan, et un grand<br />

nombre de ces suicides concerne les<br />

jeunes femmes. Beaucoup sont issues<br />

de milieux défavorisés. Le football<br />

leur offre une nouvelle perspective.<br />

Il les éduque et les unifie. Le club est<br />

né du bonheur de jouer.<br />

Vos actions vous ont valu de figurer<br />

sur la liste Forbes 30 Under 30<br />

Asia…<br />

Figurer parmi des leaders exemplaires<br />

est une grande fierté. J’ai tout<br />

de suite appelé mon père, qui n’a pu<br />

retenir ses larmes. On me prenait<br />

pour folle parce que je croyais en mes<br />

rêves, mais en devenant la première<br />

Chitrali à figurer dans Forbes, j’ai fait<br />

la une des journaux pakistanais. Cela<br />

a changé la perception que suscitent<br />

les sportives.<br />

Toute cette activité a néanmoins<br />

fini par vous attirer des trolls…<br />

À l’époque, cette haine m’a poussée<br />

à m’éloigner des réseaux sociaux<br />

pendant deux mois, j’étais secouée.<br />

Les insultes n’ont pas cessé, surtout<br />

après les qualifications d’Islamabad<br />

pour le championnat national féminin,<br />

mais vous savez, je n’ai pas<br />

reculé à 19 ans, alors aujourd’hui<br />

encore moins. Nul ne se mettra en<br />

travers de ma route. Je suis en feu.<br />

Twitter : @karishmaAli22<br />

16 THE RED BULLETIN


« Je tapais<br />

dans le ballon<br />

avant les<br />

cours. Je me<br />

moquais de<br />

ne pas être<br />

“jolie”. »<br />

THE RED BULLETIN 17


Mon Vanhattan :<br />

un cocktail sur le<br />

toit quand vous ne<br />

conduisez pas —<br />

pensez au frein<br />

à main.<br />

NISSAN OFFICE POD<br />

Un business<br />

qui roule<br />

Voyage d’affaires ou voyage à faire,<br />

en camping-car, ça roule.<br />

Jusqu’à présent, si vous vouliez<br />

partir à la découverte du<br />

monde sans contrainte, vous<br />

deviez épargner et souvent<br />

démissionner. Mais la pandémie<br />

de l’an dernier a changé<br />

la donne. Le télétravail et les<br />

réunions en ligne ont banalisé<br />

le travail à distance. Une évolution<br />

qui a incité le constructeur<br />

automobile japonais<br />

Nissan à concevoir un camping-car<br />

d’un genre nouveau<br />

intégrant un espace bureau.<br />

Une manière d’allier vie nomade<br />

et vie professionnelle<br />

classique.<br />

Le bureau rétractable via<br />

une application mobile, peut<br />

accueillir une personne, un bureau,<br />

un écran grand format<br />

et une chaise ergonomique du<br />

célèbre fabricant de meubles<br />

américain Herman Miller. Le<br />

sol transparent vous rappelle<br />

entre deux courriels que vous<br />

êtes sur un sentier de montagne<br />

ou au bord d’une plage.<br />

Après l’effort, place au<br />

réconfort : l’appli range le bureau,<br />

le moment est propice<br />

à une randonnée ou à une<br />

séance de surf. À votre retour,<br />

la lampe UV antibactérienne<br />

placée dans la boîte à gants<br />

désinfecte vos effets personnels.<br />

Le toit du véhicule tient<br />

lieu de terrasse avec chaise<br />

longue et parasol, idéal pour<br />

l’apéro. Selon une étude<br />

menée en 2018 par MBO<br />

Partners, une société de solutions<br />

high-tech, 4,8 millions<br />

d’Américains se considéraient<br />

comme des « nomades numériques<br />

», un nombre en forte<br />

augmentation. « Le travail à la<br />

maison pose divers problèmes<br />

à beaucoup d’employés, explique<br />

Nissan à propos de son<br />

concept. En élargissant leur<br />

choix quant au lieu et à la<br />

manière de travailler, nous<br />

les aidons à surmonter ce<br />

problème. »<br />

Présenté cette année lors<br />

de l’édition virtuelle du salon<br />

de l’automobile de Tokyo,<br />

l’Office Pod est encore au<br />

stade de concept qui, toutefois,<br />

s’appuie sur une version<br />

modifiée du fourgon ultracompact<br />

NV350, le projet est<br />

donc pris au sérieux en interne.<br />

« C’est le début d’une<br />

nouvelle ère où concevoir nos<br />

propres modes de vie devient<br />

possible, estime le constructeur<br />

automobile, et où notre<br />

lieu de travail correspond à<br />

notre idéal. »<br />

nissan.fr<br />

NISSAN LOU BOYD<br />

18 THE RED BULLETIN


RED BULL AU<br />

GOÛT DE PASTÈQUE.<br />

<strong>Red</strong> Bull France SASU, RCS Paris 502 914 658<br />

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Robby Naish<br />

Toujours à l’eau<br />

À 58 ans, le plus grand windsurfeur de tous les temps<br />

surfe comme à son habitude et n’est pas prêt à raccrocher.<br />

Texte JÜRGEN SCHMIEDER<br />

Robby Naish naît en 1963 à La Jolla,<br />

en Californie, cinq ans avant que le<br />

premier brevet de la planche à voile<br />

ne soit déposé. En 1976, il devient<br />

champion du monde de la discipline<br />

à seulement 13 ans. Il raflera ce titre<br />

24 fois durant les deux décennies suivantes.<br />

« À aucun moment, je me dis<br />

que je peux en faire mon métier,<br />

confie Naish. L’idée d’une carrière ou<br />

me projeter dans l’avenir ne m’effleure<br />

même pas. Je vis l’aventure<br />

sans me poser de questions. »<br />

Plus de quatre décennies plus tard,<br />

l’aventure dure encore. À 58 ans, Naish<br />

remue toujours sa planche et son<br />

sport, une légende et l’incarnation<br />

vivante de l’évolution des sports nautiques<br />

à travers le monde. En 1968, le<br />

père de Naish, un surfeur passionné,<br />

installe la famille à Hawaï. Robby a<br />

cinq ans. Aujourd’hui, il y vit encore,<br />

mais le paysage autour de lui a bien<br />

évolué, au surf et à la planche à voile<br />

s’ajoute entre autres le kitesurf, le<br />

paddle (SUP), le surf foil. Au milieu<br />

des années 90, il lance sa propre<br />

entreprise, Naish Sails, et crée des<br />

équipements innovants pour ces<br />

sports émergents. « C’est venu naturellement<br />

sans calcul préalable.<br />

Planche à voile, waveboard, planche<br />

de slalom, kite, foil à aile gonflable,<br />

longboard ou SUP, sont des variantes<br />

auxquelles je me suis adapté parce<br />

que j’en avais les compétences et les<br />

moyens. »<br />

En 2016, Joe Berlinger, réalisateur<br />

en 2004 du rockumentaire Metallica:<br />

Some Kind of Monster, contacte Naish<br />

pour un film sur les plus grandes<br />

vagues au monde. Un peu avant le<br />

début du projet, Naish se fracture le<br />

bassin lors d’une figure aérienne mal<br />

négociée et met sa vie en danger.<br />

Le film, sorti cette année, est le poignant<br />

témoignage d’un athlète face<br />

à une onde d’un autre genre, celle<br />

de sa propre mort.<br />

Rétabli, Naish a depuis vieilli et<br />

s’est assagi, mais son optimisme n’a<br />

pas pris une ride. « Mon dernier titre<br />

mondial date de plusieurs décennies,<br />

mais ne comptez pas sur moi pour<br />

ruminer le passé. Je suis aussi actif<br />

qu’il y a trente ans, et heureux d’être<br />

ce vieil athlète qui prend de l’ibuprofène<br />

au réveil, améliore sa technique<br />

ou développe de nouveaux sports<br />

pour inciter les plus jeunes à sortir<br />

et à s’amuser. »<br />

the red bulletin : L’ibuprofène<br />

n’explique pas tout. Comment<br />

entretenez-vous votre forme en<br />

dehors de l’eau ?<br />

robby naish : Mes pairs s’étirent,<br />

font une demi-heure de yoga par<br />

jour. Je déteste le yoga et m’étire peu.<br />

Pour moi, plus c’est raide, plus c’est<br />

fort. Il en va ainsi depuis mes 20 ans.<br />

N’importe quel entraîneur trouverait<br />

cela insensé. Les chutes dans l’eau<br />

ont peu d’impact ce qui n’empêche<br />

pas l’usure des articulations à un<br />

rythme certes bien plus lent qu’avec<br />

des blessures à répétition aux<br />

genoux, aux coudes et aux épaules.<br />

J’essaie d’aller sur l’eau tous les jours,<br />

car avec l’âge, l’inactivité se paie cher.<br />

La blessure reste le principal ennemi.<br />

J’ai travaillé dur pour me remettre de<br />

mes récentes fractures (en 2016, et<br />

une autre au pied droit en 2017, ndlr).<br />

À Hawaï, le fait de pouvoir surfer<br />

toute l’année aide aussi.<br />

Racontez-nous cette blessure…<br />

J’ai cru sur le coup que mon dos était<br />

brisé. La chute n’est pas violente,<br />

mais j’atterris mal, je serais incapable<br />

de la refaire même en essayant des<br />

centaines de fois. Le pied à l’arrière<br />

sort du strap et s’enfonce dans l’eau<br />

derrière moi tandis que la planche<br />

emporte le pied resté calé dans<br />

l’autre strap. L’aile se déplace à vive<br />

allure et je n’arrive pas à basculer<br />

le poids du corps vers l’avant. Je<br />

sens un craquement dans le dos en<br />

tombant à l’eau. Je remue les jambes<br />

pour vérifier si elles répondent et<br />

c’est le cas. Je conclus à un déchirement<br />

de ligament. Je me traîne<br />

sous le vent jusqu’à la plage où ma<br />

mine inquiète visiblement. L’instant<br />

d’après, je suis sur une civière à l’hôpital,<br />

puis dans un avion médicalisé<br />

pour Honolulu. Je venais de vivre<br />

ma première blessure grave, une<br />

expérience instructive, mais très<br />

désagréable.<br />

Certains disent qu’un athlète<br />

meurt deux fois : à la fin de sa carrière,<br />

puis à la fin de sa vie. Vous<br />

n’avez toujours pas rencontré<br />

votre première mort…<br />

Cette affirmation est très vraie. La<br />

plupart des athlètes tournent non<br />

sans peine la page après quelques<br />

années de carrière. Un passage difficile<br />

à vivre lorsque ce qui a le plus<br />

compté pour vous s’arrête soudainement.<br />

J’ai progressivement quitté la<br />

compétition, mais sans prendre ma<br />

retraite sportive. La compétition a<br />

toujours été secondaire, du coup ma<br />

vie a peu changé ; je participais à six<br />

ou sept compétitions par an sans courir<br />

après les points, tandis que le reste<br />

prenait plus de place. Conception,<br />

voyages promotionnels, vidéos, des<br />

journées bien remplies. De plus, mon<br />

éventail de sports s’est étoffé : kite,<br />

paddle, et plus récemment le foil et<br />

le wingsurf. J’ai plus de choses à faire<br />

que de temps pour les accomplir.<br />

CRAIG KOLESKY / RED BULL CONTENT POOL<br />

20 THE RED BULLETIN


« Le plus<br />

bruyant est<br />

rarement le<br />

plus brillant. »<br />

THE RED BULLETIN 21


Robby Naish<br />

Le rêve d’un ado : en 1976, Naish, 16 ans, sur la plage du Diamond Head on Oahu, Hawaï.<br />

Cela peut être préjudiciable à un<br />

sport comme le windsurf ?<br />

Je ne me fais pas de souci pour le<br />

sport, mais cela change la donne. Le<br />

lien spontané avec la nature disparaît.<br />

Avant, on sautait dans un avion<br />

sans savoir quelle météo on aurait à<br />

destination. Maintenant, vous savez<br />

à l’avance quelle houle il y aura aux<br />

Fidji dans deux jours. Je vois beaucoup<br />

de jeunes doués en surf, et ils<br />

semblent s’amuser tout autant que<br />

nous à leur âge. Mais une fois rentrés<br />

chez eux, ils s’empressent de poster<br />

leurs figures au lieu d’apprécier l’instant<br />

et de se réjouir à l’idée de renouveler<br />

l’expérience.<br />

À quel moment vous êtes-vous dit :<br />

« Je peux vivre de cette passion » ?<br />

Ma première compétition de planche<br />

à voile remonte à 1981, j’étais en<br />

classe de terminale. Mon dilemme<br />

était le suivant : soit je passais pro,<br />

soit je restais amateur pour espérer<br />

partir aux Jeux olympiques (en 1984,<br />

la planche à voile intègre les disciplines<br />

pour la première fois, ndlr).<br />

À l’époque, si un athlète perçoit le<br />

moindre dollar, il passe pro de facto<br />

et donc exclu des Jeux réservés<br />

aux seuls amateurs. J’ai fait don<br />

de mes deux premiers gains à mon<br />

lycée. C’est à ce moment que cette<br />

possibilité s’est concrétisée. J’ai été<br />

admis à l’université de Santa Cruz,<br />

en Californie et des sponsors proposaient<br />

de me payer pour faire de la<br />

planche à voile. J’ai repoussé d’un an<br />

mes études pour tenter l’aventure. Je<br />

n’ai pas fait marche arrière depuis.<br />

Nombre d’athlètes au succès<br />

précoce se sont brûlé les ailes.<br />

Pas vous. Pourquoi ?<br />

Cela tient à la chance, au fait de faire<br />

partie des pionniers. Ma personnalité<br />

a joué aussi : j’étais solitaire,<br />

peu sociable et égocentrique. Je<br />

fréquente peu de monde et ne sors<br />

« Les regrets<br />

empoisonnent<br />

la vie. Ma vie,<br />

je l’aime. »<br />

quasi jamais avec des amis ; je suis<br />

un peu bizarre. J’ai ainsi évité les<br />

distractions susceptibles de déconcentrer<br />

un athlète. La lassitude peut<br />

parfois entamer la motivation chez<br />

certains. Je ne suis pas mû par des<br />

objectifs, je ne m’en suis d’ailleurs<br />

jamais fixé. Si l’objectif prend le pas<br />

sur le plaisir, l’envie de réussir finit<br />

par vous quitter. J’aime tout bonnement<br />

ce que je fais.<br />

Vous dites être peu sociable dans<br />

un monde pourtant dominé par les<br />

réseaux sociaux aujourd’hui…<br />

Ils permettent à chacun de se mettre<br />

en valeur et de se faire connaître<br />

sans l’aide d’un agent ou d’un photographe.<br />

Ça, c’est le côté positif.<br />

En revanche, il s’agit moins de devenir<br />

meilleur que d’obtenir des likes et<br />

un million de vues. L’auto- promotion<br />

des athlètes n’a rien de nouveau,<br />

mais ce n’est pas très valorisant —<br />

c’est à celui qui sera le plus bruyant<br />

et en général c’est rarement le plus<br />

brillant. Je déteste les réseaux, mais<br />

impossible d’y échapper.<br />

Avez-vous des regrets au regard de<br />

votre parcours ?<br />

Non, les regrets empoisonnent la vie<br />

et moi j’aime ma vie. Elle n’est pas<br />

parfaite, mais j’ai une sacrée chance<br />

d’être aujourd’hui qui je suis, comme<br />

je suis. D’avoir la liberté de faire ce<br />

que je veux, sans prendre pour acquis<br />

les gens qui financent ma passion.<br />

Cela peut s’arrêter à tout moment –<br />

l’avenir d’un sportif professionnel est<br />

des plus précaires. Alors je savoure<br />

ma vie comme il se doit.<br />

En quête de la vague<br />

la plus longue<br />

Un documentaire accompagne<br />

Naish dans sa dernière aventure.<br />

De la Namibie au Pérou en passant par le<br />

Costa Rica, Robby Naish a passé trois ans<br />

à sillonner le monde, chevauchant les<br />

plus grosses vagues sur son stand-up<br />

paddle. Accompagné du cinéaste Joe<br />

Berlinger, nommé aux Oscars, le surfeur<br />

découvre un nouveau sport, mais aussi<br />

une partie de lui-même. Cette aventure,<br />

probablement la plus émouvante de la<br />

carrière de Naish, est le sujet du documentaire<br />

The Longest Wave.<br />

Disponible sur <strong>Red</strong> Bull TV dès le 10 août ;<br />

infos : redbull.com<br />

THE LONGEST WAVE<br />

22 THE RED BULLETIN


MODÈLE SPEED LIGHT GREY<br />

L UNETTES DE SOLEIL<br />

SPORTS DE VITESSE


La vague de verre, décembre 2015<br />

« Nous sommes sur la côte nord de Tahiti, avec<br />

des houles venant d’Hawaï, voire de plus loin.<br />

Une vague, un shorebreak, se forme juste au<br />

bord de la plage de sable noir, et en le remuant,<br />

cela crée toute cette variété de couleurs. Ici,<br />

c’est le lever du soleil, avec une falaise derrière,<br />

ce qui donne un côté très sombre. Les premiers<br />

rayons du soleil passent par-dessus la falaise<br />

et éclairent cette lèvre d’eau, donnant un fort<br />

contraste, comme s’il s’agissait de verre ou de<br />

dentelle. Je suis au bord de la plage et il ne faut<br />

pas se faire attraper par la vague, car ça peut<br />

faire mal. J’ai déjà perdu mon appareil photo<br />

et mes palmes dans de telles circonstances.<br />

On est comme démembré par l’impact de la<br />

lèvre sur le sable. »<br />

24


MER<br />

FORTE<br />

Le photographe BEN THOUARD<br />

capture des images des tubes<br />

implacables de Tahiti, et de ceux<br />

qui sont assez téméraires pour les<br />

chevaucher. Une passion pour les<br />

vagues devenue fascination.<br />

Texte PH CAMY


Ben Thouard<br />

Sortie de secours, août 2017<br />

« Avec le surfeur australien Adrian Buchan sous la fameuse vague de Teahupo’o<br />

(considérée comme l’une des plus dangereuses au monde en raison de sa taille<br />

et de sa puissance, et parce qu’elle déferle sur un récif corallien acéré. Le nom<br />

du site de Teahupo’o vient du polynésien, et signifie « le mur de crânes », ndlr).<br />

Ici, à plusieurs centaines de mètres au large, les vagues roulent sur un récif<br />

corallien dépourvu de sable et de particules, et nous avons des conditions<br />

exceptionnelles, une clarté extraordinaire. On voit que la vague ne s’ouvre pas,<br />

qu’elle va s’écraser, alors Adrian décide de s’en sortir en la traversant. J’étais<br />

sur le point de filmer Adrian dans le tube, mais il a surgi à travers la vague<br />

au moment où elle se brisait. C’est ce qui donne cette image inhabituelle :<br />

Adrian debout sur sa planche, mais sous l’eau. »<br />

26 THE RED BULLETIN


THE RED BULLETIN 27


Ben Thouard<br />

En aveugle, avril 2016<br />

« J’aime les clichés engagés, au plus près de<br />

l’action. Ici, avec le surfeur français William Aliotti<br />

à Teahupo’o, je suis juste sous le rebord d’une<br />

vague sur le point de s’écraser sur le boîtier étanche<br />

de mon appareil photo. Je suis déjà complètement<br />

sous l’eau, commençant mon plongeon pour échapper<br />

à l’impact, mais mon bras est encore hors de<br />

l’eau pour shooter. Et puis – hop ! – je tire mon bras<br />

sous l’eau. Je dois passer sous la surface pour éviter<br />

d’être projeté. Je shoote en aveugle et je joue<br />

avec le risque, avant que tout n’explose. »<br />

28 THE RED BULLETIN


Chasseur de slabs, avril 2020<br />

« En plus de mon travail de photographe de surf,<br />

je me suis intéressé à des endroits qui ne sont<br />

pas forcément des spots de surf, où les vagues<br />

prennent des formes incroyables. Ici, non loin<br />

de Teahupo’o, se trouve un surplomb de récifs<br />

où les vagues se brisent en tubes. Je suis dans<br />

l’eau avec un objectif de 300 mm (un téléobjectif,<br />

ndlr), ce qui n’est pas courant pour<br />

photographier à la nage, mais qui me permet<br />

de me concentrer sur cette courbe, ce détail.<br />

J’adore la texture de la surface, et cette courbe<br />

gigantesque et majestueuse, de 4 à 5 m de haut.<br />

Ce genre de forme atypique a un nom : un slab. »<br />

« Je shoote en aveugle<br />

et je joue avec le risque,<br />

avant que tout n’explose. »<br />

THE RED BULLETIN 29


L’attente, mai 2019<br />

« Deux photos prises au même endroit, le même jour : Teahupo’o à 6 heures du matin. La brise matinale arrache<br />

l’écume de la lèvre de la vague, la lumière rasante du lever du soleil illuminant ces projections d’eau volante,<br />

avec ces grandes montagnes en arrière-plan. Sur la photo du haut, les surfeurs attendent, les yeux rivés sur<br />

le large. Sur celle du bas, un surfeur s’est élancé avec une vague, et les autres se positionnent pour la suivante.<br />

Je travaille beaucoup en jet ski, car il me permet d’être très mobile, réactif et, surtout, seul et autonome.<br />

Ici, je suis derrière les vagues, le regard tourné vers le rivage. Cela m’offre un angle complètement opposé. »<br />

30 THE RED BULLETIN


Ben Thouard<br />

« Si tu fais une erreur, l’océan ne pardonne pas »<br />

the red bulletin : Qu’est-ce qui vous a motivé à<br />

plonger votre appareil photo dans l’eau ?<br />

ben thouard : Je suis surfeur depuis tout jeune, mais<br />

je vivais à Toulon, pas la meilleure région pour le surf.<br />

Alors à l’adolescence j’ai commencé à faire de la planche<br />

à voile, puis de la photographie, en faisant un stage avec<br />

Bernard Biancotto, l’un des pionniers de la photo de<br />

windsurf. À 19 ans, j’ai pu aller à Hawaï pour faire des<br />

images de planche à voile. J’avais mon appareil photo et<br />

un boîtier étanche fait maison. Cela m’a conduit à Tahiti<br />

en 2008, et ce fut le coup de foudre. La culture, les gens,<br />

la qualité des vagues, la clarté de l’eau, la lumière changeante<br />

et les différentes atmosphères dans la même<br />

journée… tout était attirant. Je me suis installé ici pour<br />

développer ma photographie de surf. J’avais 22, 23 ans.<br />

À quel moment avez-vous décidé de prendre des<br />

photos de vagues sans surfeurs ?<br />

Environ six ans après mon installation à Tahiti. Il y a eu<br />

une évolution progressive dans mon travail. Cela peut<br />

paraître triste, mais désormais, pour moi, la photo de<br />

surf est davantage un travail ; la photographie de vagues<br />

est devenue une approche personnelle, une rêverie. Je<br />

voulais me libérer des contraintes de la presse ou des<br />

marques qui me passaient des commandes, et montrer<br />

ce qui m’attire dans l’océan, de manière intemporelle.<br />

La tenue, la planche du surfeur datent un<br />

cliché de surf, mais une bonne photo de vague<br />

sera toujours bonne dans vingt ans. J’ai travaillé<br />

dur sur le sujet, photographiant des<br />

vagues dans toutes sortes de conditions, puis<br />

j’ai commencé à vendre des photos en ligne.<br />

J’ai auto-publié mon livre dédié aux vagues,<br />

Surface, en 2018. Cette fin d’année, j’en sortirai<br />

un nouveau, sûrement intitulé Turbulences.<br />

Pourquoi photographier quelque chose<br />

d’aussi insaisissable ?<br />

Ce qui me fascine dans les vagues, c’est de<br />

saisir une image unique, qui peut être<br />

esthétique, graphique ou simplement<br />

belle ; une image qui traduit<br />

la puissance de l’océan : une<br />

forme majestueuse, une explosion,<br />

un vortex qui apparaît<br />

sous l’eau lorsque la vague se<br />

brise. Je trouve fabuleux de<br />

transmettre la beauté de la<br />

nature et de sa force.<br />

Que ressentez-vous dans<br />

les vagues ?<br />

De l’excitation. Et, quand<br />

c’est une grosse vague,<br />

un peu de peur, bien<br />

sûr. Je suis fasciné face<br />

à tant de beauté.<br />

Ce que vous faites exige un haut niveau de forme<br />

physique. Quelle est votre routine côté fitness ?<br />

Je surfe autant que je peux, et j’ai une certaine hygiène<br />

de vie. En outre, je fais des prises de vue plusieurs fois<br />

par semaine et, lorsque les conditions sont bonnes,<br />

je suis dans l’eau trois heures le matin et trois heures le<br />

soir – c’est beaucoup de nage sur place, à attendre avec<br />

mon appareil, pas mal d’apnée aussi. Puis, soudain, une<br />

série de vagues arrive et il faut sprinter, pour échapper à<br />

la vague, ou se placer au bon endroit pour shooter,<br />

avant de plonger – une sorte d’apnée dynamique.<br />

De quel type de matériel avez-vous besoin ?<br />

J’utilise un Canon dans un caisson étanche Aquatech.<br />

C’est un classique des séries professionnelles 1D et 5D,<br />

qui peut prendre des rafales de 15 à 20 images par<br />

seconde avec un autofocus très rapide. J’utilise des<br />

objectifs classiques : fisheye, grand angle, ou autre<br />

lorsque les vagues sont plus grosses. On peut aussi utiliser<br />

un gros téléobjectif qui rentre dans le caisson<br />

étanche. J’ai à peu près 5 kilos de matériel en main.<br />

Comment manipulez-vous tout cela ?<br />

Avec une poignée façon fusil à harpon, ça me sert par<br />

exemple pour saisir les derniers instants d’une action<br />

avec le bras hors de l’eau. J’ai aussi des hublots interchangeables<br />

sur le boîtier étanche pour changer<br />

d’objectif, et des boutons pour régler la caméra<br />

et actionner l’obturateur – je photographie<br />

manuellement. Le tout attaché à mon<br />

bras avec un leash comme celui à la cheville<br />

du surfeur. Tu dois nager, te positionner,<br />

cadrer et faire la mise au point,<br />

et lorsque le surfeur se jette dans la vague<br />

à Mach 12, ne pas le rater. Et si tu fais une<br />

erreur, l’océan ne pardonne pas.<br />

C’est-à-dire ?<br />

Je me suis retrouvé projeté sur le récif<br />

comme si j’étais plaqué à un sol<br />

recouvert de lames de rasoir.<br />

Ça peut arracher tes palmes,<br />

ou bien ton leash te projette<br />

l’appareil au visage. Le but est<br />

d’être au cœur de l’action<br />

sans être enfermé dans la<br />

vague, et d’avoir toujours<br />

une solution de sortie.<br />

Ça n’est jamais lassant ?<br />

Je suis à l’eau depuis plus<br />

de quinze ans, mais je suis<br />

toujours étonné par ce que<br />

j’y vois. C’est toujours en<br />

mouvement et changeant,<br />

ça reste excitant. C’est la<br />

force de la passion.<br />

benthouard.com<br />

THE RED BULLETIN 31


Ben Thouard<br />

Master, mai 2019<br />

« On me demande si j’ai trafiqué<br />

cette photo. Pas du tout, c’est une<br />

lumière complètement naturelle.<br />

Nous sommes une heure avant le<br />

coucher du soleil, avec une montagne<br />

derrière nous, à contre-jour,<br />

avec ce vent offshore qui vient arracher<br />

les embruns de la houle.<br />

Cela crée un jeu de lumière unique :<br />

des gouttelettes d’eau réfléchissant<br />

la lumière et contrastant avec le<br />

fond dans l’ombre. Deux éléments<br />

qui s’affrontent : l’eau et le vent. »<br />

33


Le surfeur inconnu,<br />

mai 2019<br />

« Sous la vague Teahupo’o. Ce jour-là,<br />

l’attente entre les vagues était très longue,<br />

parfois 25 minutes, ce qui m’a offert une<br />

telle clarté d’eau – on peut voir les poissons<br />

et le corail au premier plan. J’ai<br />

tourné toute la matinée pour obtenir deux<br />

ou trois photos, en me plaçant au fond<br />

de l’eau. Il faut anticiper la vague, plonger<br />

au bon moment, se retourner, préparer ses<br />

réglages et son cadrage – tout cela sous<br />

l’eau. On dirait que le surfeur vole, avec<br />

le soleil qui vient frapper le poisson. Cette<br />

image peut être apaisante à regarder,<br />

mais pas à prendre. Et je ne sais toujours<br />

pas qui est ce surfeur. »<br />

34 THE RED BULLETIN


Ben Thouard Surf<br />

Le local,<br />

avril 2015<br />

« Une journée avec des conditions<br />

exceptionnelles : un océan<br />

calme et lisse comme un miroir,<br />

qui nous offre un beau swell de<br />

2, 3 mètres. Et les prouesses<br />

techniques du local, Michel<br />

Bourez, qui se glisse avec aise<br />

sous la lèvre de Teahupo’o ! »<br />

THE RED BULLETIN 35


« Avant cette image,<br />

il y a des années de<br />

photos ratées. »


Ben Thouard<br />

Full speed,<br />

juin 2016<br />

« Matahi Drollet, surnommé le<br />

“Prince de Teahupo’o”, est l’un<br />

des surfeurs les plus doués au<br />

monde. Je l’ai photographié en<br />

utilisant une vitesse d’obturation<br />

plus lente, en attrapant tout ce<br />

qui passe pendant les dixièmes<br />

de seconde où l’obturateur reste<br />

ouvert, ce qui donne ce flou filé.<br />

C’est esthétique mais compliqué,<br />

car il faut avoir quelque chose de<br />

net dans l’image. Il a son regard<br />

fixé sur moi, et sa planche et ses<br />

jambes comme aspirées par<br />

cette machine à laver, ce qui permet<br />

de ressentir la vitesse et la<br />

puissance de la vague. Pour obtenir<br />

une telle photo, il faut de la<br />

chance, mais surtout de la détermination.<br />

J’ai pris des milliers de<br />

photos avant d’obtenir celle-ci –<br />

des années de photos ratées. Je<br />

suis sur un bateau avec d’autres<br />

photographes, tous en train de<br />

photographier la même chose, et<br />

je pense à cette technique en me<br />

disant : “Si tu n’obtiens aucune<br />

photo à la fin, ce n’est pas grave,<br />

mais si tu obtiens quelque chose,<br />

alors ce sera vraiment différent<br />

des autres.” »<br />

Du pur bonheur, avril 2017<br />

« Une photo toute simple, mais un moment magique.<br />

Il doit être 6 heures du matin, je suis parti sous la pluie, et au<br />

moment où j’arrive sur place, il y a cette grande percée de<br />

lumière dans le ciel, avec un grain qui vient de s’évaporer.<br />

Les petits plaisirs de la vie : on se lève tôt, on arrive à l’eau et<br />

on voit ça. La journée commence bien. Du pur bonheur. »<br />

THE RED BULLETIN 37


PASSEZ<br />

AU VERT<br />

Il est l’un des meilleurs ultra-traileurs de<br />

la planète (trois victoires à l’Ultra-Trail du<br />

Mont-Blanc en 2013, 2015, 2018, entre<br />

autres) mais il a cessé de prendre l’avion<br />

pour préserver son terrain de jeu : la nature.<br />

Aucun trophée ne le fera changer d’avis.<br />

Comment suivre ses traces, même si on n’a<br />

pas le même rythme ? Le Jurassien XAVIER<br />

THÉVENARD, 33 ans, parle du déclic nécessaire<br />

pour adopter des comportements<br />

verts simples, et ce qu’il lui a fallu pour<br />

passer des paroles aux actes.<br />

Texte PATRICIA OUDIT<br />

Photos JORDAN MANOUKIAN<br />

Xavier Thévenard, dans la nature où<br />

il s’éclate depuis l’enfance, et où il<br />

est devenu une figure de l’ultra-trail.<br />

38 THE RED BULLETIN


39


Xavier Thévenard<br />

the red bulletin : Xavier, vous venez<br />

de courir la Lavaredo, dans les Dolomites<br />

en Italie, comment vous sentez-vous<br />

pour ce retour aux sentiers ?<br />

xavier thévenard : J’ai abandonné au<br />

33 e kilomètre. Je n’ai pas encore récupéré<br />

de mon Covid, en novembre, j’ai<br />

attrapé une forme très virulente, avec<br />

des gros problèmes de respiration à ne<br />

pas en dormir la nuit. J’ai passé dix jours<br />

au lit, mal, très mal. Au bout d’un mois<br />

et demi, ça allait mieux, mais ce virus,<br />

c’est un peu la roulette russe. Il y a des<br />

moments où ça va à peu près, d’autres<br />

où je souffre d’oppressions au niveau<br />

du thorax. C’est ce qui s’est passé sur<br />

cette course, j’ai eu des sensations<br />

d’étouffements, et toute mon énergie<br />

s’est dégradée. De toutes façons, au<br />

niveau plaisir, c’était zéro, donc ça ne<br />

servait à rien de continuer…<br />

On sait aujourd’hui qu’il existe un lien<br />

entre cette pandémie et la dégradation<br />

des écosystèmes par l’homme. Vous<br />

avez décidé bien avant le Covid de<br />

vous investir pleinement dans la<br />

protection de l’environnement.<br />

Jusqu’à ne plus prendre l’avion…<br />

C’est une décision que j’ai mûrie depuis<br />

des années. L’an passé, je suis allé en<br />

Corse en bateau pour ma tentative de<br />

record du GR 20*. Je n’ai pas fait ça pour<br />

créer le buzz ou la polémique, cela fait<br />

partie de mes engagements depuis tout<br />

jeune. J’ai toujours eu des convictions<br />

écologiques, toujours été un peu militant.<br />

Je me souviens qu’au collège et au<br />

lycée, j’avais déjà des sujets de discussion<br />

sur l’écologie, sur des choses et des actes<br />

qui me révoltaient. Par la suite, j’ai été<br />

influencé par des gens proches des<br />

théories de la décroissance ou de<br />

« On donne<br />

des cours sur<br />

l’écologie à<br />

l’école, c’est<br />

bien, mais il faut<br />

une connexion<br />

physique avec<br />

la nature. »<br />

l’effondrement comme Aurélien Barrau<br />

ou Pablo Servigne, ce sont des personnalités<br />

que je suis sur les réseaux. Ils me<br />

semblent aller dans le bon sens.<br />

*ratée d’une heure et 26 minutes en juillet<br />

2020, battue en juin de cette année par<br />

le Corse Lambert Santelli en 30 heures et<br />

25 minutes, soit 41 minutes de moins que<br />

le record détenu par François D’Haene<br />

depuis 2016.<br />

Aller dans le bon sens, ça commence<br />

par quoi ?<br />

Je ne veux pas donner de leçons, je ne<br />

suis pas un porte-parole, mais je considère<br />

que ça commence par avoir<br />

conscience de ses faits et gestes pour le<br />

bien commun. Aujourd’hui, avec cette<br />

crise sanitaire, on voit qu’on arrive à le<br />

faire : pour le bien commun, on met des<br />

masques, du gel hydroalcoolique, pour<br />

éviter de se mettre en danger les uns les<br />

autres. Pourquoi ne le ferait-on pas pour<br />

l’environnement ? Pourquoi ne pas se<br />

déplacer à pied, à vélo pour aller faire<br />

deux ou trois courses et acheter en vrac<br />

pour éviter les emballages, tout ce plastique<br />

? Il y a 630 000 personnes en<br />

Europe qui décèdent tous les ans des<br />

effets de la pollution, soit 13 % de la<br />

population : sur la durée, ça tue beaucoup<br />

plus que le Covid*. Pourtant, on ne<br />

prend pas la mesure de la catastrophe.<br />

C’est moins immédiat qu’une pandémie,<br />

mais beaucoup plus mortel à terme.<br />

*à titre de comparaison, sur 15 mois,<br />

à compter du 1 er avril 2020 au 30 juin<br />

2021, le Covid a fait 860 000 morts.<br />

Que constatez-vous de ces effets, vous<br />

qui êtes en permanence sur le terrain ?<br />

Il y a le problème des déchets bien sûr,<br />

mais on constate aussi les changements<br />

de comportements parmi la faune, c’est<br />

le cas pour les oiseaux. On voit régulièrement<br />

des moineaux en altitude parce<br />

que les températures augmentent, des<br />

milans noirs qui sont là toute l’année<br />

alors qu’ils partaient migrer en Afrique<br />

pour se mettre au chaud. En montagne,<br />

les orages violents sont de plus en plus<br />

fréquents, en discutant avec les anciens,<br />

c’est flagrant, ils disent ne pas avoir<br />

connu ça. D’un autre côté, quand on<br />

entend les climatosceptiques, on s’aperçoit<br />

qu’ils font plein de raccourcis : par<br />

exemple, cette année, quand on voit les<br />

paquets de neige qui sont tombés, ils en<br />

concluent : le dérèglement climatique<br />

c’est du pipeau ! Sauf que c’est ni plus ni<br />

moins qu’un hiver normal, mais comme<br />

on n’en a pas eu depuis cinq ans, on finit<br />

par penser que c’est exceptionnel. Mais<br />

des – 20 °C dans nos régions, c’est normal<br />

! C’est sur le long terme qu’il faut<br />

analyser le réchauffement, les causes,<br />

les conséquences. Là où je me rassure<br />

un petit peu, c’est que je vois encore<br />

certaines fleurs que je voyais gamin.<br />

Pouvez-vous nous éclairer sur le rapport<br />

bénéfice-contrainte de vos choix ?<br />

Ne plus prendre l’avion, c’est se priver<br />

de compétitions majeures…<br />

Bénéfices ? Que des plus. Et contraintes ?<br />

Franchement, il n’y en a pas tant que ça !<br />

Quand je fais huit heures de route pour<br />

aller courir la Lavaredo dans les Dolomites,<br />

je découvre un univers de fou.<br />

Et quand je vois cette nature-là, magnifique,<br />

je me dis : a-t-on vraiment besoin<br />

d’aller aux États-Unis ? Derrière ta maison,<br />

il y a tellement à faire ! J’ai choisi un<br />

sponsor et des partenaires qui me suivent<br />

dans mes convictions, qui ne m’imposent<br />

pas d’aller à l’autre bout du monde pour<br />

faire des courses. Je ne perds pas mon<br />

énergie dans les aéroports, en plus je<br />

déteste ça, alors pour moi, c’est nickel.<br />

Pour l’anecdote, mon beau-père était<br />

40 THE RED BULLETIN


« Même pour<br />

l’ultra-trail<br />

du siècle, je<br />

resterai fidèle<br />

à mes engagements.<br />

Ou j’irai<br />

à la voile ! »


Sera-t-il à l’heure pour le dîner ? Afin de réduire son empreinte carbone, Xavier peut<br />

enchaîner des dizaines de kilomètres de course rien que pour rendre visite à sa famille.<br />

avec nous en Italie, il n’a jamais pris<br />

l’avion de sa vie, ce n’est pas pour autant<br />

qu’il n’est pas ouvert, pas cultivé, pas<br />

heureux ! On se crée des besoins, comme<br />

absolument aller à l’étranger. Pourquoi<br />

ne pas casser cette symbolique du tout<br />

consommation ?<br />

Comment la casser ?<br />

Pourquoi ne pas faire des lois : au même<br />

titre qu’on n’a pas le droit d’assassiner<br />

son voisin, pourquoi ne pas interdire<br />

les véhicules hyper-polluants qui sont<br />

néfastes pour le bien commun et tuent à<br />

petit feu. Si on va un peu loin, on participe<br />

tous à la destruction des espèces<br />

humaines et animales. Essayons de<br />

ringardiser cette image d’accumulation<br />

de biens de consommation. Dire que<br />

faire son jardin, cultiver ses légumes,<br />

c’est la classe !<br />

Question avocate du diable : on vous<br />

propose l’ultra-trail du siècle à l’autre<br />

bout du globe, vous faites quoi ?<br />

Par rapport à l’avion, je me laisse juste<br />

la possibilité d’une urgence familiale ( les<br />

parents de Xavier vivent en Corse, ndlr),<br />

un problème de santé… Sinon, même<br />

« Je ne suis pas<br />

exemplaire, c’est<br />

impossible de<br />

l’être à partir du<br />

moment où l’on<br />

consomme. »<br />

s’il y a un plateau d’anthologie, je resterai<br />

fidèle à mes engagements. Ou alors,<br />

j’irai à la voile ! Un de mes sponsors,<br />

Julbo, a de bons skippeurs, il y a peutêtre<br />

moyen de goupiller un truc !<br />

Comment réagit la communauté trail<br />

à vos engagements ? Y a-t-il une prise<br />

de conscience ?<br />

Globalement oui de la part des coureurs,<br />

et y compris dans l’organisation des<br />

grandes courses, de plus en plus<br />

propres. Mais il y a encore des comportements<br />

choquants. Sans nommer personne,<br />

quand je vois sur Insta des traileurs<br />

faire les kékés avec leur grosse<br />

BMW, Mercedes ou faire de la moto<br />

trial sur les chemins, je me dis que<br />

l’image véhiculée n’est pas la bonne.<br />

Lorsqu’on pratique un sport comme<br />

le trail, où on est en permanence dans<br />

la nature, on ne peut pas utiliser sa<br />

notoriété à ça.<br />

En termes d’écologie, nul n’est irréprochable.<br />

Quels choix faites-vous<br />

dans votre vie quotidienne pour<br />

consommer moins, mieux ?<br />

Je ne suis pas exemplaire, bien sûr,<br />

c’est impossible de l’être à partir du<br />

moment où l’on consomme. Mais on<br />

peut faire en sorte de se fixer quelques<br />

objectifs faciles à atteindre dans sa vie<br />

de tous les jours. Le problème, c’est<br />

qu’on va forcément se heurter à des<br />

paradoxes, à des méthodes contre-productives.<br />

Par exemple, avec ma copine<br />

qui est architecte, on est en train de<br />

rénover une vieille ferme, avec l’envie<br />

d’en faire une maison autonome, passive,<br />

sans déperdition d’énergie. Il y a<br />

beaucoup de travail en amont sur le<br />

choix et l’utilisation des matériaux, sur<br />

les techniques. Mais pour le terrassement,<br />

on est obligés de faire venir des<br />

pelleteuses, néfastes pour l’environnement…<br />

Ce qui est contradictoire avec<br />

notre projet d’éco-durabilité. Pour faire<br />

du propre aujourd’hui, il faut encore<br />

passer par du sale.<br />

Comment discutez-vous de cette<br />

problématique avec vos sponsors ?<br />

Mon nouvel équipementier, On, veut<br />

bien faire les choses, c’est pour ça que<br />

je me suis engagé avec eux. L’idée est<br />

d’aller vers le 100 % recyclable, ce qui<br />

est déjà le cas avec un modèle de chaussures.<br />

Il y a d’autres démarches en cours<br />

pour limiter le packaging, ce beau<br />

carton… qui va finir à la poubelle.<br />

ON-RUNNING.COM<br />

42 THE RED BULLETIN


Xavier Thévenard<br />

De la même manière, comment un<br />

circuit mondial de trail peut réduire<br />

son empreinte carbone ?<br />

J’avais évoqué l’idée d’un circuit trail<br />

par continent, avec l’idée de rassembler<br />

les meilleurs sur un seul championnat<br />

du monde dans un seul pays. Ce serait<br />

une solution pour limiter les déplacements.<br />

Je pense que ça peut le faire pour<br />

des trails pas trop longs, des 30 ou des<br />

50 km, mais que cela ne fonctionne pas<br />

pour les ultras : dans ce genre de format,<br />

il faut venir avec 100 % de motivation,<br />

avec ses tripes, et on ne peut pas imposer<br />

à un coureur de venir, surtout si c’est à<br />

l’autre bout du monde, dans un désert<br />

ou un spot qui lui déplaira, dans lequel<br />

il aura zéro sensations. L’ultra nécessite<br />

déjà de s’entraîner dans des univers<br />

hostiles, dans la plus extrême difficulté,<br />

si en plus on doit courir 170 bornes<br />

sans prendre aucun plaisir… C’est de<br />

la torture. Il faut que les parcours nous<br />

fassent vibrer, en termes de décor,<br />

d ’atmosphère. Moi, j’ai la chance d’avoir<br />

l’UTMB (Ultra-Trail du Mont-Blanc)<br />

à côté… Mais un Américain va larguer<br />

pas mal de gaz à effet de serre en volant<br />

jusqu’à chez nous.<br />

« J’ai beau être<br />

ultra-traileur,<br />

80 kilomètres<br />

en courant, ça<br />

pique un peu ! »<br />

À propos, connaissez-vous votre<br />

empreinte carbone ? A-t-elle baissé<br />

ces dernières années ?<br />

Très bonne question ! Il faut que je fasse<br />

le point à la fin de l’année. Pour le<br />

moment, on est à sept mois de l’année<br />

2021, et mon plus gros voyage, c’est les<br />

huit heures de voiture que je viens de<br />

faire pour aller en Italie. On peut rajouter<br />

les quelques allers-retours Alpes et<br />

Jura en voiture, mais dès que j’ai pu,<br />

j’y suis allé à vélo, voire à pied. J’ai beau<br />

être ultra-traileur, ça fait quand même<br />

80 kilomètres ! Ça pique un peu. Après,<br />

avec ma copine, on fait un maximum<br />

de co-voiturage.<br />

Parlez-nous de votre engagement<br />

auprès des associations Mountain<br />

Riders et Une Bouteille à la mer, de<br />

vos prises de parole dans les écoles.<br />

Que dites-vous à ces jeunes ?<br />

Ce sont essentiellement des élèves de<br />

primaire et de collège, des publics auxquels<br />

je suis un peu habitué en tant qu’éducateur<br />

sportif. Je préfère montrer que dire, alors<br />

souvent, je les emmène dans la nature.<br />

On fait un peu de plogging (ramassage des<br />

déchets en marchant ou en courant, ndlr)<br />

que je pratique personnellement à chaque<br />

sortie. Je crée des équipes pour rendre le<br />

tout plus ludique, à celles qui ramassent<br />

le plus vite, je leur explique en passant<br />

combien de temps un déchet met à se<br />

dégrader…<br />

Je les amène dans une forêt bien rangée<br />

et bien droite d’épicéas, aménagée par<br />

l’homme et dans une autre zone sauvage<br />

et par la simple observation des sols, ils se<br />

rendent compte que l’empreinte humaine<br />

n’est pas forcément une bonne chose, que<br />

ça appauvrit. Juste à travers une balade,<br />

les sensibiliser à l’environnement, c’est<br />

déjà ça. J’ai des gamins parisiens qui n’ont<br />

jamais vu une vache en vrai et qui s’émerveillent<br />

de tout sur leur chemin… On<br />

devrait fondamentalement revoir notre<br />

rapport à la nature, faire en sorte que dès<br />

le plus jeune âge, on touche la terre de ses<br />

mains : on donne des cours sur l’écologie<br />

à l’école, c’est bien, mais il faut une<br />

connexion physique avec la nature.<br />

Cette nature est votre terrain de jeu<br />

depuis toujours…<br />

J’ai toujours baigné dedans, à faire des<br />

cabanes dans les bois, à soigner le petit<br />

corbeau tombé de son nid et à en faire<br />

un compagnon de jeu, à apprivoiser le<br />

marcassin abandonné et recueilli par ma<br />

mère et qui a fini par s’amuser avec notre<br />

chien. Tout ça m’a ancré dans la terre,<br />

m’a éveillé, émerveillé. Et quand tu es<br />

émerveillé, tu fais tout pour que ça dure,<br />

perdure, que le joyau ne soit pas abîmé.<br />

On ne peut pas se lasser de tout ça.<br />

Tous les mois de juin, l’odeur des foins<br />

me fait retomber en enfance.<br />

Partir du bon pied : pour Xavier, une sortie en forêt ou sur un<br />

sentier peut déclencher une prise de conscience écologique.<br />

À tous les gens qui courent et<br />

marchent dans la nature, où qui souhaitent<br />

s’y aventurer désormais,<br />

qu’avez-vous envie de dire ?<br />

Observez, regardez ! Prendre conscience<br />

de la beauté de la nature, s’imprégner<br />

de tout ça, et se dire qu’on est privilégiés.<br />

Et qu’on va tout faire pour le rester.<br />

Instagram : @xavierthevenard<br />

THE RED BULLETIN 43


Sous les<br />

cicatrices<br />

NAI PALM, chanteuse du groupe australien Hiatus<br />

Kaiyote, a fait face à l’adversité toute sa vie.<br />

Elle révèle ici comment son art et la force de<br />

la nature l’ont aidée à revenir plus forte.<br />

Texte LOU BOYD<br />

Photos TRÉ KOCH


Ils en font des caisses :<br />

(de gauche à droite)<br />

Perrin Moss, Paul Bender,<br />

Simon Mavin et Nai Palm<br />

du groupe Hiatus Kaiyote.<br />

45


Nai Palm<br />

Le<br />

deuxième titre du nouvel album de Hiatus Kaiyote, Mood<br />

Valiant, s’ouvre sur des chants d’oiseaux. Pour la chanteuse<br />

et compositrice du groupe, Nai Palm – de son vrai nom Naomi<br />

Saalfield – il ne pouvait y avoir une toile de fond plus parfaite :<br />

le chant et la compagnie des oiseaux font partie de la vie de<br />

cette Australienne de 32 ans depuis toujours. « Mais ce n’était<br />

pas intentionnel, s’amuse Saalfield lors d’une conversation<br />

Zoom avec The <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong>. Ce n’est pas un choix – on finit toujours<br />

avec les oiseaux. J’étais en train de faire l’enregistrement<br />

d’une piste vocale et ils étaient dehors. Ils avaient l’air vraiment<br />

cool, alors on s’est dit : “Pourquoi ne pas les garder en tant que<br />

touche environnementale ?” »<br />

La relation de Saalfield avec les oiseaux et les animaux<br />

sauvages est bien documentée dans la discographie de Hiatus<br />

Kaiyote : elle a jammé avec un hibou sur le deuxième album<br />

du groupe, Choose Your Weapon (2015), et son perroquet,<br />

aujourd’hui disparu, Charlie Parker – nommé d’après la légende<br />

de jazz – était souvent présent dans le studio lors des séances<br />

d’enregistrement du groupe.<br />

Bien que leur musique soit souvent décrite comme étant de<br />

la « future soul », les musiciens de Hiatus Kaiyote préfèrent parler<br />

d’un « truc gangster multidimensionnel et polyrythmique ».<br />

Un genre qui pourrait passer pour inaccessible mais qui s’avère<br />

être tout le contraire : non seulement des chansons des deux<br />

premiers albums de Hiatus Kaiyote ont été en nomination<br />

aux Grammy Awards (Nakamarra, avec Q-Tip et Breathing<br />

Underwater) mais le groupe a également été validé par des<br />

icônes musicales comme Prince et Erykah Badu en plus<br />

d’être samplé par Beyoncé, Anderson .Paak ou encore Drake.<br />

Naomi Saalfield, en compagnie de Paul Bender (basse),<br />

Simon Mavin (claviers) Perrin Moss (batterie), a passé les dix<br />

dernières années à créer une musique qui examine la relation<br />

entre toutes les composantes de la vie, de la science et l’art à la<br />

nation et à la culture, ainsi qu’entre les humains et le reste du<br />

monde naturel. « Nous essayons de faire une musique qui donne<br />

aux gens une multitude de choses différentes à découvrir, ditelle.<br />

Il y a tellement de détails qu’au fil des années, vous pouvez<br />

toujours trouver quelque chose de nouveau et continuer à avoir<br />

une relation avec les titres. »<br />

« Nous essayons<br />

de faire une musique<br />

qui donne aux gens<br />

une multitude<br />

de choses différentes<br />

à découvrir. »<br />

46 THE RED BULLETIN


« Une femme sur cinq vit avec un cancer du<br />

sein, mais je n’ai jamais vu de femmes avec un<br />

seul sein. Si je ne pouvais pas voir d’exemples,<br />

alors j’allais en devenir un pour les autres. »<br />

48 THE RED BULLETIN


Nai Palm<br />

Bien avant la formation du groupe en 2011, les rencontres<br />

spontanées et oniriques avec des animaux sauvages faisaient<br />

partie intégrante de la vie de Saalfield. Née et élevée à Melbourne,<br />

elle a été contrainte de déménager à la campagne à<br />

l’âge de onze ans après la mort de sa mère des suites d’un cancer<br />

du sein. Puis son père est également décédé peu après dans<br />

l’incendie de sa maison. Ce déménagement dans la petite ville<br />

de Mount Beauty, dans l’État de Victoria, au sud-est de l’Australie,<br />

l’a éloignée de tout ce qu’elle avait connu jusque-là, mais<br />

il a également marqué le début d’une relation importante et<br />

durable avec la faune indigène. « J’ai vécu avec des gardiens<br />

animaliers et nous avions un dingo, un aigle royal et des<br />

wombats », se souvient Saalfield.<br />

Pour s’extraire de cette jeunesse dramatique, elle a commencé<br />

à jouer de la guitare et à passer la plupart de son temps<br />

à l’extérieur, se liant d’amitié avec un chiot dingo qui dormait<br />

près de la maison. « Mon installation dans une vallée alpine très<br />

isolée et le temps passé avec la faune indigène ont été de beaux<br />

moments enrichis de vertus thérapeutiques, dit Saalfield. Les<br />

animaux manifestent vraiment de l’empathie, et j’ai souvent<br />

chanté pour eux. Je pense que le rôle de la musique et celui du<br />

musicien consistent avant tout à rappeler aux gens la magie et<br />

l’émerveillement. Pour moi, la nature est le meilleur exemple<br />

de la véritable magie qui existe dans le monde. »<br />

Sur le visage de la chanteuse, de la lèvre au menton, un<br />

tatouage trace la ligne d’une éraflure causée par un ami animal<br />

– un corbeau orphelin qu’elle a sauvé, élevé et libéré lorsqu’elle<br />

avait quinze ans. Pour Saalfield – elle-même orpheline – la relation<br />

avec le jeune oiseau et l’éraflure qu’il lui a laissée étaient<br />

imprégnées d’une signification plus profonde. « J’ai eu l’impression<br />

que c’était une leçon de ma mère. De la laisser aller tout<br />

en continuant de la porter en moi. »<br />

Ces traumatismes précoces constitueraient un défi plus<br />

que suffisant pour quiconque, mais l’adversité a continué<br />

d’attendre Saalfield au tournant. Il y a trois ans, alors que<br />

Hiatus Kaiyote était en tournée aux États-Unis, on lui a diagnostiqué<br />

un cancer du sein – la même maladie qui a emporté sa<br />

mère. La chanteuse dit que le diagnostic l’a secouée d’une<br />

manière qu’elle n’avait pas connue jusque-là. Publiant la nouvelle<br />

sur Instagram à l’époque, elle a dit à ses fans : « Je suis<br />

rongée d’anxiété tout en essayant de pratiquer le courage et la<br />

patience au quotidien face à la merde la plus effrayante et la<br />

plus angoissante que j’ai jamais eu à endurer. » Saalfield s’est<br />

envolée pour l’Australie où elle a subi une opération chirurgicale<br />

vitale. En 2019, elle a heureusement reçu un verdict de<br />

guérison. Avec le recul, elle considère que la musique a été<br />

l’exutoire par lequel elle a pu traiter et comprendre son<br />

expérience.<br />

Tout en se remettant de la mastectomie qui lui a sauvé la vie,<br />

Saalfield a pris contact avec d’autres personnes atteintes de ce<br />

cancer, et elle a pris publiquement position contre les normes<br />

de beauté qui, selon elle, peuvent pousser les femmes ayant<br />

subi une mastectomie à opter sans réfléchir pour une chirurgie<br />

superficielle. Afficher la beauté de son expérience est quelque<br />

chose qui a toujours semblé naturel chez elle. Ainsi, lorsqu’on<br />

lui a proposé une chirurgie reconstructive du sein après l’opération,<br />

elle a refusé.<br />

« J’ai été très ferme dès le départ sur le fait que je ne voulais<br />

pas de chirurgie reconstructive, explique-t-elle. C’est vraiment<br />

invasif et dangereux– vous introduisez un truc géant en silicone<br />

THE RED BULLETIN 49


Nai Palm<br />

« Soyez fier de vos<br />

cicatrices. Elles sont<br />

fortes et belles. »<br />

dans votre corps. » Bien qu’elle soit convaincue de sa décision,<br />

Saalfield a été choquée par la réaction du corps médical qui<br />

n’a guère fait preuve d’empathie et qui lui a recommandé<br />

un suivi psychiatrique. « Le chirurgien plastique m’a dit :<br />

“Vous risquez de le regretter plus tard et cela vous ferait sentir<br />

à nouveau normale”, dit-elle en secouant la tête. J’étais soufflée.<br />

Je me suis dit : “Qui es-tu pour décider pour moi ce que<br />

je vais regretter ? Je ne serai jamais normale. Cela a changé<br />

ma vie pour toujours.“ »<br />

Au lieu de cela, son torse arbore désormais un tout nouveau<br />

tatouage là où se trouvait autrefois son sein en plus d’une décoration<br />

dorée semblable – modelée sur son sein avant son ablation<br />

– qu’elle prévoit de porter sur ses tenues de scène. « Je ne<br />

serai plus jamais ce que j’étais, mais putain que c’est génial,<br />

dit-elle, soudainement animée. On m’a offert la possibilité de<br />

retourner la situation, tu vois ? Non seulement je ne vais pas<br />

avoir de reconstruction, mais je vais m’afficher avec ça. » Sa<br />

prise de position a suscité des centaines de messages de soutien<br />

et de gratitude de la part de femmes qui vivent une situation<br />

semblable. « Une femme sur cinq vit un cancer du sein et pourtant<br />

je n’ai jamais vu de femmes avec un seul sein dans la vraie<br />

vie. Jamais, pas une seule, dit Saalfield en haussant les épaules.<br />

J’ai décidé que si je ne pouvais pas voir d’exemples, j’allais en<br />

devenir un pour les autres. Montrer aux femmes une autre voie<br />

et montrer qu’elles peuvent encore être dans le coup. Portez<br />

vos cicatrices avec honneur – elles sont fortes et belles. »<br />

Après les épreuves et les tribulations de ces trois dernières<br />

années, le Hiatus Kaiyote de 2021 est-il le même groupe<br />

qu’avant, ou Saalfield pense-t-elle que sa propre expérience<br />

et l’épreuve collective causée par la pandémie ont provoqué<br />

un changement de tonalité ? « Chaque chanson que nous faisons<br />

a son propre petit monde en soi, dit-elle, pensive, mais<br />

l’intention reste la même. » Après tout, il s’agit d’un groupe<br />

dont la musique a tendance à ne pas être tournée vers l’intérieur<br />

mais plutôt vers l’extérieur, vers le monde. Le titre phare<br />

de Hiatus Kaiyote, Nakamarra, sorti en 2012, invitait ses fans<br />

à se documenter au sujet de l’artiste aborigène Doreen Reid<br />

Nakamarra. Get Sun, le premier single de Mood Valiant,<br />

comporte un court extrait du documentaire Corumbiara: They<br />

Shoot Indians, Don’t They ? réalisé par le cinéaste brésilien<br />

Vincent Carelli en 2009.<br />

« Vous pouvez écouter Get Sun et vous dire que c’est amusant,<br />

dit Saalfield, ou vous pouvez aller plus loin et découvrir<br />

que c’est plus que cela. C’est un sujet de discussion et cela<br />

peut pousser les gens à s’informer sur ce qui se passe réellement,<br />

en particulier dans les communautés indigènes. En tant<br />

qu’artiste blanche dans l’œil du public, il est important pour<br />

moi de me concentrer sur des choses qui sont dignes d’amour<br />

et d’attention. »<br />

Cela signifie-t-il que Saalfield considère que sa musique<br />

a une ambition politique plus élevée dans le monde ? Elle<br />

secoue la tête. « Tout ce que je veux, c’est apporter de la<br />

beauté et un sanctuaire, parce que c’est ce que la musique<br />

représente pour moi. Quand j’ai l’impression que le monde<br />

va s’écrouler, la chose qui m’apporte la paix, c’est la musique.<br />

Elle m’a sauvé la vie. Si je peux jouer ce rôle pour quelqu’un<br />

d’autre, alors j’ai l’impression de faire davantage partie de<br />

l’univers et que ma vie a de la valeur. »<br />

Aujourd’hui, Saalfield est en forme, Hiatus Kaiyote a un<br />

nouvel album, le monde s’ouvre à nouveau, et le groupe prévoit<br />

d’entamer sa première tournée depuis 2018 – un nombre<br />

restreint de concerts un peu partout en Australie. La chanteuse<br />

dit que, même si elle est heureuse de pouvoir sortir et<br />

de recommencer à jouer avec le groupe, elle allait s’ennuyer<br />

de la vie plus calme qu’elle a mené ces deux dernières années<br />

qui a inclus l’adoption d’un chaton – « Pas un oiseau cette<br />

fois-ci, dit-elle en riant. Retournement de situation ! » – et la<br />

satisfaction procurée par un espace chez elle dédié à la création<br />

de musique et d’art. Saalfield révèle qu’au cours des<br />

douze derniers mois, elle s’est initiée au kintsugi – l’art japonais<br />

de réparation des objets fissurés ou cassés à l’aide d’une<br />

laque spéciale mélangée à de la poussière d’or ou d’argent,<br />

créant une soudure à la fois visible et esthétique – et a pratiqué<br />

cet art sur ses propres tuyaux cassés et ses vases dans sa<br />

maison.<br />

« Dans la vie, quand on casse quelque chose, souvent on le<br />

jette parce qu’il semble trop difficile d’en faire quelque chose<br />

d’autre, explique-t-elle lorsqu’on lui demande ce qui l’a attirée<br />

vers cet artisanat. Mais avec le kintsugi, vous décidez d’en<br />

faire quelque chose de beau d’une manière nouvelle et différente.<br />

La partie cassée est désormais illuminée. »<br />

hiatuskaiyote.com ;<br />

Instagram : @artykarateparty<br />

50 THE RED BULLETIN


À son tour<br />

de briller<br />

En devenant le plus jeune vainqueur<br />

d’une compétition de F1 à l’âge de<br />

18 ans, MAX VERSTAPPEN est vu<br />

comme l’Élu, voué à régner en maître<br />

sur les championnats du monde.<br />

Et l’année 2021 pourrait être celle<br />

du couronnement du Néerlandais.<br />

L’impétueux pilote qui avait tant de<br />

mal à contenir son impatience affiche<br />

à présent un calme olympien.<br />

Un Max de zen…<br />

Texte JUSTIN HYNES<br />

MARKUS BERGER/RED BULL CONTENT POOL<br />

52


Max Verstappen<br />

D<br />

ans un peu plus de 96 heures, ici à Monaco,<br />

les concurrents s’élanceront pour le plus<br />

glamour des Grands Prix de F1. En raison<br />

des restrictions liées à la crise sanitaire, le terrain<br />

de jeu des stars et de la jet-set sur la Côte d’Azur<br />

n’accueillera pas les fastes habituels qui accompagnent<br />

la plus insolente des démonstrations de<br />

consommation ostentatoire dans le monde des<br />

sports mécaniques. Mais le niveau de la compétition<br />

reste spectaculaire. Pour Max Verstappen,<br />

ce week-end est un tournant décisif : à 23 ans, le<br />

pilote <strong>Red</strong> Bull Racing est impliqué dans son premier<br />

véritable duel pour la tête du championnat depuis<br />

ses débuts en 2015. Difficile de le croire quand<br />

on l’aperçoit à la marina du port de Fontvieille,<br />

car le Néerlandais dégage une incroyable sérénité.<br />

Retour sur la course qui a libéré le nouveau Max.<br />

En route vers une victoire<br />

éventuelle, six ans après<br />

l’accident spectaculaire qui<br />

a marqué ses premiers pas<br />

dans la compétition à l’âge<br />

de 17 ans, Max Verstappen<br />

est le favori du Grand Prix<br />

de Monaco 2021.<br />

GETTY IMAGES


55


56 THE RED BULLETIN


Max Verstappen<br />

GETTY IMAGES<br />

On ne s’attendrait pas à une telle<br />

sérénité de la part d’un pilote<br />

automobile qui considère habituellement<br />

que tous les coups<br />

sont permis et accorde peu d’importance<br />

à la réputation prestigieuse de ses rivaux.<br />

Dès son arrivée dans le monde de la F1,<br />

Max Verstappen a remporté des courses.<br />

Il a d’ailleurs battu le record du monde<br />

du plus jeune vainqueur à l’âge de<br />

18 ans, ce qui lui a valu le qualificatif<br />

de « futur champion ». Mais il aura fallu<br />

attendre cette année pour que les étoiles<br />

s’alignent et transforment le poids de<br />

cette destinée en possible réalité.<br />

L’an dernier, de nouvelles réglementations<br />

ont bouleversé le monde de la F1.<br />

Après que le fournisseur de pneumatiques<br />

Pirelli a dévoilé ses inquiétudes concernant<br />

les charges aérodynamiques infligées<br />

aux pneus des voitures de F1 les plus<br />

rapides jamais construites, des modifications<br />

ont dû être apportées aux monocoques<br />

afin de réduire drastiquement la<br />

déportance. Mercedes, septuple champion<br />

des constructeurs, et Lewis Hamilton,<br />

son septuple champion du monde,<br />

ont été les plus affectés, car les obscurs<br />

changements affectant les dimensions<br />

du fond plat et les écopes de frein arrière<br />

ont fait perdre aux Flèches d’Argent leur<br />

avantage historique, plaçant Hamilton<br />

à portée de volant.<br />

Pour l’équipe de Max Verstappen,<br />

ce vent de nouveauté a été plus clément.<br />

Totalement repensé, le groupe propulseur<br />

Honda a métamorphosé la <strong>Red</strong> Bull<br />

Racing RB16 2020 : autrefois capable<br />

de faire monter Max Verstappen sur le<br />

podium, mais rarement à la première<br />

place, cette voiture est devenue une<br />

« La saison va<br />

être longue et<br />

on ne peut pas<br />

se permettre de<br />

faire de grosses<br />

erreurs. »<br />

À gauche : Max Verstappen, contemplatif au port<br />

de Fontvieille (Monaco), quelques jours avant le<br />

début du Grand Prix iconique de la principauté.<br />

concurrente féroce de Mercedes, que ce<br />

soit en termes d’élégance, de puissance ou<br />

de rapidité. Or, si Max Verstappen dispose<br />

désormais d’une arme redoutable pour<br />

renverser le maître incontesté Hamilton,<br />

en ce jour de Grand Prix à Monaco (le<br />

23 mai), le pilote <strong>Red</strong> Bull se trouve toujours<br />

à 14 points du champion en titre<br />

après les premières courses de la saison.<br />

Dès l’ouverture du championnat à<br />

Bahreïn, Max Verstappen a affiché ses<br />

intentions en s’emparant avec panache<br />

de la pole position. Le rusé Lewis Hamilton<br />

a alors manœuvré pour piéger le<br />

jeune pilote dans un dépassement tardif<br />

un peu approximatif qui a assuré la victoire<br />

au Britannique. Max Verstappen<br />

a riposté pendant la course suivante à<br />

Imola, jouant des coudes dès le départ<br />

avec Lewis Hamilton qui avait cette fois<br />

pris la pole position, ce qui a propulsé le<br />

Néerlandais vers une victoire incontestée<br />

tandis que son rival devait se contenter<br />

de la deuxième place.<br />

Cependant, si cette rencontre éprouvante<br />

a montré que le pilote <strong>Red</strong> Bull ne<br />

se laisserait pas facilement intimider, les<br />

deux manches suivantes, qui ont eu lieu<br />

au Portugal et en Espagne, ont été de<br />

véritables master class dispensées par<br />

Lewis Hamilton.<br />

De son côté, Max Verstappen n’a eu de<br />

cesse d’accumuler les erreurs mineures :<br />

un léger dérapage au tour 14 sur le circuit<br />

portugais, puis un moment de confusion<br />

lors d’un appel au stand et une roue<br />

avant droite bloquée pendant son out lap<br />

à Barcelone. Ces petits soucis ont suffi<br />

pour apporter la victoire à l’invulnérable<br />

représentant de Mercedes dans la lutte<br />

la plus acharnée qu’ait connue le championnat<br />

de F1 depuis dix ans.<br />

Aujourd’hui, alors qu’il s’apprête<br />

à prendre le départ sur le circuit de<br />

Monaco, le jeune Néerlandais n’attend<br />

qu’une chose : la rédemption. Toutefois,<br />

un problème persiste : Max Verstappen<br />

n’a jamais brillé ici et il n’a jamais pu<br />

accéder au podium. Pour garder Lewis<br />

Hamilton à l’œil et éviter qu’un désagréable<br />

écart de 14 points ne devienne<br />

irrattrapable, Max Verstappen doit puiser<br />

au plus profond de lui-même.<br />

« Monaco, c’est un événement unique,<br />

répond Max Verstappen quand on lui<br />

demande ce qu’il attend du week-end.<br />

La piste est vraiment serrée. Il y a<br />

d’autres circuits urbains, mais rien<br />

d’aussi marqué. On ne peut pas se sentir<br />

plus à l’étroit qu’à Monaco. Surtout<br />

pendant les qualifications, lorsqu’on<br />

THE RED BULLETIN 57


Max Verstappen<br />

Devant le virage : Max Verstappen précède Valtteri Bottas, pilote Mercedes AMG Petronas,<br />

au niveau de la fameuse chicane pendant le premier tour de la course.<br />

repousse toutes les limites. » Mais alors<br />

que la vision des murs qui se rapprochent<br />

dangereusement pouvait autrefois l’inciter<br />

à relâcher l’accélérateur et jouer<br />

son va-tout, Max Verstappen arbore un<br />

comportement différent cette année.<br />

Finies les démonstrations régulières de<br />

son tempérament volcanique. Fini l’entêtement<br />

qui l’a conduit à ignorer sciemment<br />

les drapeaux jaunes dans sa course<br />

vers la pole position au Mexique il y a<br />

deux ans, ou encore son obstination qui<br />

l’a relégué à la quatrième position sur la<br />

grille de départ. Tout cela a laissé place<br />

à un nouvel équilibre et une zénitude<br />

axée sur ce qu’il appelle « choisir le<br />

moment où l’on va briller ».<br />

« Vous devez comprendre que si ce<br />

n’est pas votre jour, il n’y a rien à faire.<br />

Il faut se contenter de ce que l’on a,<br />

explique-t-il. Jusqu’à l’an dernier, nous<br />

savions que nous ne pouvions pas remporter<br />

le championnat. Dans ce type<br />

de situation, vous sautez sur toutes les<br />

occasions pour gagner… au risque de<br />

tout perdre. Enfin pas vraiment, mais<br />

vous franchissez les limites pour tenter<br />

d’obtenir un meilleur résultat.<br />

Aujourd’hui, notre voiture peut clairement<br />

concurrencer Mercedes. C’est plus<br />

qu’un miracle occasionnel. Nous devons<br />

veiller à engranger au moins quelques<br />

points chaque week-end, même si nous<br />

ne réalisons pas la course parfaite. C’est<br />

une approche différente. » Cette vision<br />

des choses paraît à des années-lumière<br />

du Max Verstappen connu pour avoir<br />

menacé de frapper son rival Esteban<br />

Ocon après que le Français l’a percuté<br />

pendant le Grand Prix du Brésil en 2018,<br />

ou pour avoir tout risqué lors d’un dépassement<br />

tardif, brutal et ultraserré de la<br />

Ferrari de Charles Leclerc pour s’assurer<br />

la victoire lors du Grand Prix d’Autriche<br />

de 2019. Pour Max Verstappen version<br />

2021, une seule chose compte : l’âpre<br />

lutte qui l’oppose à Lewis Hamilton.<br />

« Je me retrouve face à un septuple<br />

champion qui ne manque pas d’expérience,<br />

mais je dois tout mettre en œuvre<br />

pour le battre. Quand la victoire n’est<br />

pas envisageable, il faut se contenter du<br />

meilleur résultat possible, car la saison<br />

va être longue et on ne peut pas se<br />

permettre de faire de grosses erreurs,<br />

analyse-t-il. Lewis sait lui aussi parfaitement<br />

choisir ses moments et garder la<br />

tête froide quand ce n’est pas le jour et<br />

qu’il faut tout de même aller chercher<br />

des points. »<br />

Jeudi après-midi. Alors qu’il reste<br />

72 heures avant le début de la<br />

course, la probabilité d’une issue<br />

positive est mise à rude épreuve.<br />

Le nouveau coéquipier de Verstappen,<br />

Sergio Pérez, est le plus rapide lors de la<br />

première session d’essais libres du weekend,<br />

mais dans l’après- midi, les deux<br />

<strong>Red</strong> Bull perdent le rythme. Sergio Pérez<br />

termine neuvième. Max Verstappen fait<br />

un peu mieux avec sa quatrième place,<br />

mais il reste toujours à quatre longs<br />

dixièmes de Charles Leclerc qui mène<br />

la danse avec sa Ferrari.<br />

Et surtout, il est juste derrière Lewis<br />

Hamilton. « Nous sommes trop lents,<br />

déplore-t-il. D’habitude, je me sens<br />

assez à l’aise dans la voiture, je trouve<br />

mon rythme rapidement, mais pas cette<br />

fois-ci. Ça ne me plaît pas. C’est le weekend<br />

le plus difficile de la saison. »<br />

Et en alimentant la guerre psychologique,<br />

Lewis Hamilton ne fait rien pour<br />

simplifier les choses. Lorsqu’on l’interroge<br />

sur les duels musclés qui se déroulent<br />

sur le circuit, le pilote Mercedes tente<br />

de prendre l’ascendant. « Je pense avoir<br />

réussi à éviter tout accident éventuel,<br />

affirme-t-il. Mais il nous reste 19 courses,<br />

et un accrochage est toujours possible.<br />

[Max] a peut-être le sentiment d’avoir<br />

beaucoup à prouver. Je ne suis pas dans<br />

GETTY IMAGES<br />

58 THE RED BULLETIN


« À présent,<br />

notre voiture<br />

peut enfin<br />

concurrencer<br />

Mercedes. »<br />

La <strong>Red</strong> Bull Racing RB16<br />

a été modifiée pour la saison<br />

2021 du championnat. Elle<br />

dispose notamment de nouveaux<br />

sidepods et d’un groupe<br />

propulseur Honda amélioré.


« Il existe<br />

d’autres circuits<br />

urbains, mais<br />

on ne peut pas<br />

se sentir plus<br />

à l’étroit qu’à<br />

Monaco. »<br />

Sur le circuit étriqué et tortueux<br />

de Monaco, qui s’étend de Monte-<br />

Carlo jusqu’au quartier voisin de<br />

La Condamine, il est pratiquement<br />

impossible de doubler.


Max Verstappen<br />

GETTY IMAGES<br />

On prend Verstappen de haut : le pilote néerlandais s’en va célébrer<br />

son butin à Monaco. Et envisage déjà la suite, dans un mode apaisé.<br />

la même position que lui. » Max Verstappen<br />

sourit et refuse de mordre à l’hameçon.<br />

« Nous avons combattu avec ardeur<br />

et évité les contacts chacun de notre<br />

côté. Espérons continuer comme ça afin<br />

de rester tous deux sur le circuit et poursuivre<br />

notre affrontement. »<br />

Pendant les qualifications du samedi,<br />

Max Verstappen confirme sa réputation<br />

de futur champion qui le suit depuis qu’il<br />

a été le plus jeune vainqueur dans cette<br />

catégorie lors du Grand Prix d’Espagne<br />

2016. Les qualifications, c’est le moment<br />

où les vrais champions de F1 excellent.<br />

Les courses de F1 modernes sont<br />

des exercices de maîtrise technique qui<br />

englobent des notions extrêmement<br />

complexes de gestion des pneumatiques,<br />

d’économie de carburant, ou encore<br />

de déploiement de l’énergie tactique<br />

des groupes propulseurs hybrides. De<br />

leur côté, les qualifications sont la substantifique<br />

moelle de la course : elles<br />

représentent l’alliance entre l’homme<br />

et la machine, avec la plus petite quantité<br />

de carburant possible, et un engagement<br />

absolu aux limites de l’adhérence.<br />

Or, sur le circuit de Monaco où il est<br />

quasiment impossible de doubler et où<br />

les résultats reflètent régulièrement la<br />

grille de départ, les qualifications sont<br />

primordiales.<br />

Cette étape se solde par l’élimination<br />

des cinq pilotes les plus lents après chacune<br />

des deux premières séances, laissant<br />

au final les dix meilleurs se battre<br />

pour la pole position pendant douze<br />

minutes d’une intensité incroyable. Ratez<br />

vos qualifications, comme Max Verstappen<br />

en 2016, et vous feriez tout aussi<br />

bien de rester au lit le dimanche.<br />

Réussissez-les, et l’un des prix les<br />

plus prestigieux dans le milieu des sports<br />

mécaniques est soudain à votre portée.<br />

À Monaco, où les risques sont sensiblement<br />

accrus du fait de la proximité des<br />

rails et où les erreurs ne pardonnent pas,<br />

Max Verstappen choisit son moment<br />

pour briller… ou presque.<br />

Après avoir réussi haut la main les<br />

deux premières séances, il se maintient<br />

lors de la phase finale des qualifications<br />

et réussit à surpasser le héros local,<br />

Charles Leclerc, qui détenait le meilleur<br />

temps provisoire. Max Verstappen est<br />

1 500 millièmes de seconde plus rapide<br />

que le Monégasque pendant le premier<br />

des trois secteurs du circuit – le retard<br />

de jeudi est de l’histoire ancienne – mais<br />

devant lui, Charles Leclerc heurte violemment<br />

le rail de la piscine. Dès que sa<br />

Ferrari accroche le rail à l’extérieur, le<br />

drapeau rouge est levé. Cela signe la fin<br />

du tour de Max Verstappen et le cantonne<br />

à la deuxième place sur la grille de<br />

départ. Mais s’il éprouve de la frustration,<br />

le jeune Néerlandais n’en laisse rien<br />

paraître. Devant la presse, Verstappen<br />

ne blâme absolument pas le pilote de la<br />

Ferrari, affirmant qu’il n’y avait aucune<br />

raison de révoquer sa pole position.<br />

« Une action intentionnelle mérite<br />

certainement la révocation. Or, ce n’était<br />

pas le cas ici. Charles n’avait rien prémédité,<br />

explique-t-il aux journalistes à l’affût<br />

de la controverse. Nous repoussons tous<br />

les limites, et une erreur est vite arrivée.<br />

Dans l’ensemble, je suis très content. »<br />

On peut dire que Verstappen a un bon<br />

karma. Notons par ailleurs que Lewis<br />

Hamilton, mécontent de sa voiture, se<br />

trouve cinq places plus loin sur la grille.<br />

Dimanche. Il reste trente minutes<br />

avant le début de la course. La<br />

pit lane ouvre et les voitures s’engouffrent<br />

sur la piste pour accéder<br />

à la grille de départ. Alors que Charles<br />

Leclerc monte la côte en direction de la<br />

place du Casino, on entend son cri de<br />

désespoir jaillir de la radio. « Non, non,<br />

non, pas la boîte de vitesses ! » Le pilote<br />

Ferrari se réengage dans la pit lane et<br />

le diagnostic tombe : l’arbre de transmission<br />

a été endommagé par l’accident<br />

de la veille. Max partira donc en tête<br />

de la course.<br />

Lorsque les lumières s’éteignent, le<br />

Néerlandais brille une fois de plus. Après<br />

avoir rapidement fermé la porte à tout<br />

débordement éventuel, il mène la course<br />

avec brio. Et pendant que Lewis Hamilton<br />

se retrouve coincé derrière des voitures<br />

plus lentes et lambine à la septième<br />

place, Max Verstappen prend confiance<br />

et remporte avec élégance et sans coup<br />

férir sa première victoire à Monaco.<br />

En cette fin de week-end, Verstappen<br />

domine la saison 2021, quatre points<br />

devant Hamilton : le champion immortel<br />

vacille. Max Verstappen version 2021<br />

sera peut-être le pilote qui rapportera<br />

enfin un titre à <strong>Red</strong> Bull après huit ans de<br />

disette. Mais en ce dimanche à Monaco,<br />

le Néerlandais ne veut pas trop s’avancer…<br />

Depuis, et au moment où nous bouclons<br />

ce numéro, il a aussi remporté les<br />

GP de France, de Styrie et d’Autriche.<br />

« Je veux juste me concentrer sur la<br />

course à venir, déclare-t-il. Je refuse de<br />

mettre une pression inutile sur quiconque<br />

ou de parler à tort et à travers.<br />

Je n’ai pas besoin de battage médiatique.<br />

Rêver ? Ça ne mène nulle part. »<br />

verstappen.com ; redbull.com<br />

THE RED BULLETIN 61


En roue<br />

libre<br />

Comment la Bike Life s’est<br />

emparée de New York.<br />

Texte MARZ LOVEJOY<br />

Photos BEN <strong>FR</strong>ANKE<br />

62


Jae Milez, un natif du Bronx<br />

vivant à Manhattan, en pleine<br />

démo de l’esprit Bike Life dans<br />

le Washington Square Park.


Bike Life<br />

Si<br />

vous habitez New York, vous avez sans<br />

doute déjà vécu cette scène surnaturelle :<br />

simple marcheur, vous voilà soudain en<br />

train de nager au beau milieu d’un océan<br />

de cyclistes latinos et afro-américains.<br />

Comme une lame de fond, ils déferlent<br />

sur tout un quartier, debout sur leurs<br />

selles ou enchaînant les figures et autres<br />

wheelings défiant les lois de la gravité.<br />

Jae Milez, 23 ans, né dans le Bronx et<br />

élevé de l’autre côté du fleuve à Dyckman,<br />

ne se déplace plus que sur la roue arrière<br />

de son vélo (il a même carrément ôté la<br />

roue avant). À le voir s’élancer avec ses<br />

compagnons de route, on est gagnés par<br />

cette euphorie et cette liberté.<br />

Soudain, ils disparaissent, roulant déjà<br />

vers un autre quartier de New York, l’une<br />

des nombreuses villes américaines à<br />

revendiquer et à mettre en valeur cette<br />

culture marginale. Un phénomène qui<br />

s’étend à Newark, Boston, Philadelphie,<br />

Baltimore, Oakland et Los Angeles. La<br />

Bike Life, c’est un terme qui réunit le vélo<br />

et la vie. Une sous-culture qui, comme<br />

tant d’autres mouvements socioculturels,<br />

est née de la souffrance pour être sublimée<br />

par la créativité. Prolifiques, ces<br />

cyclistes passent leur temps à inventer de<br />

nouvelles figures et à perfectionner leur<br />

talent. C’est leur mode de vie, un mélange<br />

de passion pour le vélo, de positivisme…<br />

et d’une sérieuse envie de s’amuser.<br />

La Bike Life a beau être une culture<br />

majoritairement masculine, les filles ne<br />

sont pas en reste quand il s’agit de raser<br />

le bitume. De plus en plus nombreuses<br />

ces dernières années à grossir les rangs<br />

du peloton, elles alignent les wheelings<br />

et autres figures avec style et dextérité.<br />

C’est le cas de la rideuse Curly. En 2017,<br />

cette jeune fille originaire de la Lower<br />

East Side traîne dans son quartier quand<br />

elle voit un groupe de garçons défiler<br />

Plus new-yorkais,<br />

tu meurs : un petit<br />

groupe de bikers sur<br />

le pont de Brooklyn<br />

avec Manhattan en<br />

arrière-plan.<br />

64 THE RED BULLETIN


« La vie est devenue plus belle sur<br />

une roue. Chaque jour, je fais naître des<br />

sourires sur mon passage. » JAE MILEZ<br />

THE RED BULLETIN 65


Bike Life<br />

devant elle, roue avant en l’air. « C’est ce<br />

qu’on appelle le destin, explique Curly.<br />

Cette sensation qu’une chose est faite<br />

pour toi. Mon seul but désormais est de<br />

garder ma roue en l’air. »<br />

Curly reconnaît qu’il lui a fallu énormément<br />

de temps pour maîtriser ces<br />

figures. « Au début je n’étais pas trop sûre<br />

de moi, du coup je m’entraînais toute<br />

seule sur un parking, raconte-t-elle.<br />

Mais j’ai décidé de sortir de ma zone de<br />

confort. Ce n’est pas seulement un sport<br />

de mecs. » La discipline demande du<br />

temps et du talent. Originaire du Bronx,<br />

Obloxkz, alias O, est adepte de la Bike<br />

Life depuis quatre ans. Au bout de deux<br />

ans de pratique, il s’est fait sponsoriser<br />

par Throne Cycles, une entreprise de<br />

vélos urbains de Los Angeles. Il suffit de<br />

l’observer pour comprendre pourquoi.<br />

Zigzaguant entre les voitures, les pieds<br />

sautant sur les pédales, la main frottant<br />

le sol alors que son vélo est à la verticale,<br />

Obloxkz a clairement les compétences<br />

d’un athlète professionnel. « On nous<br />

juge sur ce qui est visible, dit-il. J’aimerais<br />

juste qu’on nous respecte autant que<br />

les riders BMX. »<br />

La Bike Life devient plus connue, plus<br />

commerciale, plus politisée et malheureusement,<br />

plus contrôlée. Faire du vélo<br />

dans la rue semble une pratique anodine,<br />

mais des problèmes plus larges de justice<br />

sociale et de pratiques discriminatoires<br />

des forces de police ont un impact considérable.<br />

Disons-le tout net : les chiffres<br />

concernant le nombre de jeunes cyclistes<br />

noirs et latinos verbalisés dans la ville de<br />

New York sont très préoccupants. Selon<br />

la direction des transports de New York,<br />

plus de 86 % des cyclistes verbalisés en<br />

ville en 2018 et 2019 étaient noirs et hispaniques.<br />

Près de la moitié de ces contraventions<br />

concernaient des cyclistes âgés<br />

de 24 ans ou moins, et 51 % des cas<br />

impliquaient des jeunes Afro-Américains.<br />

Une attitude hostile qui reflète l’injustice<br />

« Le vélo est fédérateur », assure Milez, 23 ans ; farouche défenseur<br />

de la communauté Bike Life, il prend les wheelings très au sérieux.<br />

ambiante et les carences en matière de<br />

pratiques équitables, notamment envers<br />

les cyclistes noirs et latino-américains<br />

féminins, les jeunes filles, les personnes<br />

non-binaires, les membres de la communauté<br />

LGBTQI ou les personnes issues<br />

des quartiers défavorisés.<br />

Je suis une femme noire, je vais avoir<br />

30 ans et je fais du vélo depuis dix ans.<br />

Être une cycliste noire, c’est se livrer au<br />

danger, à la peur, à l’angoisse. J’en suis<br />

bien consciente, mais c’est la seule<br />

« Le vélo, c’est un exutoire plus positif<br />

que n’importe quel jeu vidéo ou réalité<br />

virtuelle. » JAE MILEZ<br />

manière de faire bouger les choses. À<br />

l’heure actuelle, la discrimination est<br />

encore trop réelle, elle gangrène tous les<br />

éléments d’une culture, et celle du vélo<br />

n’est pas en reste : dans un article examinant<br />

les origines racistes, sexistes et classistes<br />

du cyclisme, l’auteur Taz Khatri énumère<br />

les préjugés encore trop présents en<br />

matière de race, de sexe et de socio-économie,<br />

soulignant que « les clubs cyclistes<br />

excluaient explicitement les Afro-Américains,<br />

les Américains d’origine asiatique,<br />

les pauvres et les Amérindiens ».<br />

Des données consternantes qui en<br />

disent long sur ce que cela représente<br />

d’être un cycliste noir ou latino-américain.<br />

Une seule solution : l’accessibilité. Ce sera<br />

la clé de l’acceptation sociale. Dans des<br />

interviews séparées, Jae, Curly et O<br />

évoquent la liberté, l’amitié, et décrivent<br />

le sens que le vélo donne à leur vie.<br />

66 THE RED BULLETIN


Obloxkz, originaire du Bronx,<br />

a un sponsor, 18 000 followers sur<br />

Instagram… et un désir légitime<br />

d’être respecté pour son talent.


Bike Life<br />

YourBoyFromBK<br />

offre un divertissement<br />

gratuit aux<br />

clients déjeunant<br />

dans le quartier de<br />

Soho à Manhattan.


La Bike Life, c’est être dans le flow<br />

du mouvement, c’est un mode de vie<br />

qui apporte positivité et bien-être.<br />

69


Bike Life<br />

Oui, la Bike Life réunit des petits prodiges qui s’entraînent jour et nuit. Mais le noyau dur<br />

de cette culture est avant tout une communauté soudée de passionnés.<br />

« J’ai vu des membres de gangs<br />

adverses se réunir pacifiquement pour<br />

partager leur amour du vélo. » JAE MILEZ<br />

Amoureux de la Bike Life, Jae cherche<br />

de nouvelles solutions. Il est favorable à<br />

la création d’espaces intérieurs afin de<br />

s’entraîner librement sans se soucier de<br />

la météo, des conducteurs agressifs ou de<br />

la police. Conscient des enjeux politiques<br />

de la situation, il rencontre régulièrement<br />

le chef de police de son quartier. « Le vélo<br />

est fédérateur, dit-il. J’ai vu des membres<br />

de gangs adverses se réunir pacifiquement<br />

juste pour partager leur amour du<br />

vélo. Un exutoire plus positif que n’importe<br />

quel jeu vidéo ou réalité virtuelle. »<br />

Il pense qu’une fois que les autorités<br />

auront compris tous les bénéfices que<br />

représente la Bike Life pour les jeunes,<br />

elles prendront davantage en compte les<br />

initiatives liées au vélo dans leurs politiques<br />

publiques. La législation et les comportements<br />

suivront.<br />

Pour moi, le vélo a longtemps été un<br />

sport solitaire, je n’avais que deux amis<br />

qui en faisaient. Tout a changé en 2016<br />

lorsque j’ai (littéralement) croisé le chemin<br />

de Q dans les rues de New York. Mon<br />

mari et moi, on rentrait du travail à vélo<br />

quand soudain, on s’est retrouvés plongés<br />

dans un océan de bikers. Leur joie était si<br />

communicative qu’on a décidé de faire un<br />

peu de route avec eux. J’en ai profité pour<br />

me présenter à Q, vice-président d’Only<br />

The Rocketz, un club de cyclistes de New<br />

York. Et voilà. Tout d’un coup, j’avais un<br />

lien personnel avec la Bike Life.<br />

Mais la pandémie est venue bouleverser<br />

la vie des cyclistes. Le quotidien a<br />

changé : avec moins de circulation, les<br />

salles de sport fermées, et l’ennui général<br />

provoqué par la pandémie, les Américains<br />

ont commencé à enfourcher leur vélo<br />

comme jamais auparavant. Les ventes<br />

de vélos au printemps et à l’été 2020 ont<br />

augmenté de plus de 80 % par rapport à<br />

l’année précédente. Si la Bike Life a été<br />

touchée par le virus, elle l’a également été<br />

par l’actualité, tout comme beaucoup<br />

d’autres aspects de notre société. Nous<br />

avons subi une prise de conscience lente<br />

et douloureuse en termes de justice<br />

sociale, et ma passion occasionnelle a pris<br />

une nouvelle ampleur : en réponse au<br />

poids d’être une femme noire, confrontée<br />

à la brutalité policière et au sentiment<br />

d’injustice provoqué par les violents assassinats<br />

de George Floyd, Breonna Taylor et<br />

de nombreux autres Afro-Américains, j’ai<br />

participé au lancement de la première<br />

édition annuelle de … And Still We Ride,<br />

une sortie à vélo rendant hommage aux<br />

femmes noires. Épaulée par Q et de nombreux<br />

bénévoles, j’ai organisé une grande<br />

manifestation réunissant des amoureux<br />

de la Bike Life et des gens qui n’étaient pas<br />

monté sur un vélo depuis des années. Jae<br />

Milez s’est joint à nous et a parcouru cinquante<br />

kilomètres en roue arrière.<br />

Notre manifestation a été reprise dans<br />

tout le pays, puis le mouvement s’est propagé<br />

dans le monde entier en signe de<br />

solidarité. Les gens étaient ultra motivés,<br />

solidaires et complètement dingues. Ils<br />

sont sortis dans la rue pour s’exprimer,<br />

leurs corps en mouvement comme<br />

autant d’actes de protestation. La maladie,<br />

le meurtre et le chaos les ont poussés<br />

à l’action, une expérience douce-amère<br />

qui nous a définitivement changés.<br />

Des lueurs d’espoirs sont nées de cette<br />

tragédie: des activistes en herbe prennent<br />

la parole, des gens font appel à la communauté,<br />

des groupes marginalisés se<br />

70 THE RED BULLETIN


« Ce n’est pas seulement<br />

un sport de mecs », déclare<br />

Curly, qui passe des<br />

heures à perfectionner sa<br />

technique du wheeling.<br />

La Bike Life est bien<br />

plus qu’un sport : c’est<br />

une forme d’expression,<br />

un moyen d’affirmation<br />

et une passion.<br />

THE RED BULLETIN 71


Le duo fait monter la<br />

sauce dans le quartier<br />

de Chinatown à New<br />

York. Ici, El Arte saute<br />

au-dessus de son pote<br />

Luis Banks.


Bike Life<br />

Sur sa roue arrière, Luis Banks apporte une énergie dynamisante dans cette zone<br />

piétonne de Manhattan écrasée par la monotonie.<br />

mobilisent, nous allons toujours de<br />

l’avant. Mais comme le souligne O, beaucoup<br />

de jeunes ont peu ou aucun revenus.<br />

Difficile pour eux d’acheter un vélo.<br />

« Si j’avais 100 vélos sous la main, je les<br />

donnerais tout de suite », ajoute-t-il, précisant<br />

qu’un bon vélo peut coûter entre<br />

700 et 1 000 dollars. Euphorique, il nous<br />

explique son projet de collaboration avec<br />

des entreprises privées pour organiser<br />

des remises de vélos et des cours de création<br />

de contenu. C’est tout simple : offrez<br />

des perspectives intéressantes aux jeunes<br />

et ils y consacreront le temps et la concentration<br />

nécessaires. Mais outre l’aspect<br />

financier, c’est aussi l’infrastructure des<br />

quartiers défavorisés qui freine les jeunes.<br />

Pas facile de construire une culture du<br />

vélo au milieu des nids-de-poule, dans<br />

des rues sans pistes cyclables ni panneaux<br />

de signalisation indiquant le droit des<br />

cyclistes à circuler. Pas étonnant que les<br />

cyclistes ressentent le besoin d’envahir les<br />

rues en masse pour se sentir en sécurité.<br />

Je suis née à Minneapolis, l’une des<br />

villes les plus cyclables d’Amérique, et je<br />

vis actuellement à Copenhague, l’une des<br />

villes les plus cyclables au monde. J’ai<br />

remarqué que les villes qui ont investi<br />

dans des infrastructures cyclables ont<br />

beaucoup à nous apprendre. À Copenhague,<br />

les habitants à vélo prennent<br />

« On nous juge sur ce qui est visible.<br />

J’aimerais juste qu’on nous respecte<br />

autant que des riders de BMX. » OBLOXKZ<br />

moins de congés maladie et font économiser<br />

1 euro par kilomètre parcouru à<br />

la sécurité sociale. La Bike Life est une<br />

activité sportive et artistique, mais les<br />

avantages vont bien plus loin : une<br />

société en meilleure santé physique et<br />

mentale, une réduction de l’empreinte<br />

carbone, des économies sur les coûts de<br />

stationnement et les véhicules, une<br />

réduction de la criminalité, des opportunités<br />

de développement économique,<br />

des avantages en termes d’équité sociale.<br />

C’est surtout sur le plan personnel que<br />

ses avantages se ressentent. « Le vélo est<br />

synonyme de communauté et de famille,<br />

déclare Obloxkz. Quoi que tu fasses,<br />

même si c’est autre chose que du vélo,<br />

donne-toi à fond. »<br />

La Bike Life, c’est être dans le flow<br />

du mouvement, une culture et un mode<br />

de vie qui apporte positivité et bien-être.<br />

Alors, la prochaine fois que vous vous<br />

retrouverez plongé dans un océan de<br />

cyclistes, posez-vous cette question :<br />

« Où est ma place ? »<br />

THE RED BULLETIN 73


PRÊT À ATTEINDRE<br />

VOTRE PIC DE FORME ?<br />

Pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière. www.mangerbouger.fr


PERSPECTIVES<br />

Expériences et équipements pour une vie améliorée<br />

GONFLÉ À BLOC<br />

Une visite des blocs<br />

du Tessin en compagnie<br />

du maestro Giuliano<br />

Cameroni en Suisse<br />

méditerranéenne.<br />

STEFAN KUERZI/RED BULL CONTENT POOL SIMON SCHREYER<br />

75


PERSPECTIVES<br />

voyage<br />

« La plus grande<br />

concentration de<br />

passages ardus en<br />

Europe se trouve<br />

dans le Tessin. »<br />

Le pro de l’escalade Giuliano<br />

Cameroni, 24 ans, nous parle<br />

de sa terre natale<br />

Je n’étais pas né que, déjà, j’escaladais<br />

les blocs du Tessin. Ma mère<br />

ne ratait jamais une occasion<br />

de faire du bloc, même lorsqu’elle était<br />

enceinte. Mon jeune frère Diego et surtout<br />

mon père Claudio sont également<br />

connus chez moi en tant que grimpeurs.<br />

Mon père a même écrit quatre guides<br />

reconnus consacrés au Tessin. L’escalade<br />

est donc une véritable affaire de famille<br />

chez nous. Et les zones de blocs de la<br />

région constituaient mon terrain de jeu<br />

alors que je n’avais pas encore soufflé<br />

mes cinq bougies.<br />

Il y a quatre zones importantes de<br />

blocs dans le Tessin : Cresciano, Chironico,<br />

Brione et le col du Saint-Gothard. Elles<br />

sont toutes de première catégorie : les<br />

blocs de granit et de gneiss offrent des<br />

structures compactes qui offrent des<br />

prises. Il arrive rarement que l’une d’elles<br />

se casse. De plus, les blocs se présentent<br />

de telle manière que les mouvements<br />

semblent se décider d’eux-mêmes.<br />

On dirait que la Création a réfléchi<br />

pour nous. Dans le Tessin, il y a une plus<br />

grande concentration de passages ardus<br />

que n’importe où ailleurs en Europe. Et<br />

c’est exactement ce qui stimule les<br />

Chez-soi de pierre : le pro de l’escalade Giuliano Cameroni sur un bloc dans le Tessin.<br />

Tourbillons naturels du<br />

ruisseau de montagne<br />

limpide du Val Verzasca,<br />

dans le Tessin. Un coup<br />

de frais après avoir<br />

escaladé les blocs.<br />

76 THE RED BULLETIN


Comment<br />

s’y rendre<br />

En voiture : depuis Zurich,<br />

vous pouvez rejoindre le<br />

tunnel du Saint-Gothard en<br />

environ 1 h 30 (sans péage).<br />

Une vignette autoroutière<br />

pour dix jours coûte 9,40 € /<br />

10,29 CHF. Nous vous recommandons<br />

d’y faire un<br />

arrêt car le col du Saint-<br />

Gothard est un bloc de rêve.<br />

Si vous empruntez le tunnel,<br />

vous atteindrez Bellinzone<br />

une heure après la sortie.<br />

De là, il ne vous faudra que<br />

quelques minutes pour<br />

gagner Cresciano.<br />

Berne<br />

En train : la durée du voyage<br />

de Zurich à Bellinzone est<br />

d’environ 2 heures. Prix des<br />

billets : 71 € / 77, 8 CHF.<br />

Suisse<br />

CANTON DU TESSIN<br />

Cresciano<br />

Lugano<br />

Zurich<br />

Le village de Lavertezzo du Val Verzasca : pour faire du bloc et se baigner dans la nature.<br />

STEFAN KUERZI/RED BULL CONTENT POOL, EVOLUTIONCENTER.CH,<br />

GETTY IMAGES (2) SIMON SCHREYER<br />

grimpeurs ambitieux. Mon expérience<br />

m’a fait réaliser que chaque pierre possède<br />

sa propre énergie.<br />

Que vous soyez débutant<br />

ou expert, ici tout le monde<br />

peut grimper<br />

Voici trois blocs en détail. Ils sont situés<br />

dans ma région préférée, Cresciano.<br />

Commençons par le plus difficile, le<br />

niveau de difficulté (qui peut s’élever<br />

jusqu’à 9a) est indiqué entre parenthèses<br />

: Dreamtime (8b+/8c), 7 mètres<br />

de long, 3 mètres de haut, est un classique<br />

avec vingt et un mouvements suivis<br />

d’un jeté ou dyno à la sortie. La voie<br />

passe dans un dévers à 50 degrés, se<br />

S’il pleut : centre d’escalade Evolution à Taverne.<br />

Bon à savoir<br />

Hébergement : Barbara et Cornelia<br />

gèrent l’Ostello Cresciano qui devient<br />

de plus en plus populaire auprès<br />

des grimpeurs. Le petit-déjeuner est<br />

inclus, le wifi est gratuit et le salon<br />

confortable. Les alternatives incluent<br />

Airbnb ou trois campings (Al Censo,<br />

Bellinzone ou Agriturismo La Finca)<br />

si vous arrivez en monospace.<br />

Pour les journées pluvieuses,<br />

il y a deux salles de blocs : Alpha<br />

Boulder à Giubiasco et le centre<br />

d’escalade Evolution (photo de<br />

gauche) à Taverne.<br />

Infos : ostello-cresciano.online<br />

THE RED BULLETIN 77


PERSPECTIVES<br />

voyage<br />

Le Ponte dei Salti, dans le Val Verzasca, invite les casse-cou à se jeter à l’eau.<br />

monte de droite à gauche avant de<br />

revenir par le milieu. Ce que j’aime ici,<br />

c’est la fluidité des mouvements.<br />

La grotte des soupirs (7c), 4 m de<br />

long, 2 m de haut, est un toit caverneux<br />

avec de larges prises. Elle propose<br />

une séquence qui n’est pas trop<br />

difficile, mais qui demande de l’énergie.<br />

Les efforts demandés et l’acoustique<br />

ont inspiré le premier grimpeur,<br />

Fred Nicole, à lui donner ce nom.<br />

Il Cerchio Celtico (6a+), 4 m de<br />

long, 2 m de haut et probablement<br />

un ancien site de culte celtique, est<br />

situé sur une colline qui offre un panorama<br />

incroyable. Cinq voies qui<br />

servent d’échauffement pour les experts,<br />

ou de point de départ pour les<br />

débutants, mènent au bloc.<br />

La plupart des blocs sont cachés<br />

au plus profond du paysage sauvage,<br />

loin de la civilisation. Autre atout de la<br />

région : dans le Tessin, on peut grimper<br />

toute l’année et le soleil est très souvent<br />

au rendez-vous !<br />

« Dans le Tessin,<br />

la roche parle aux<br />

grimpeurs. »<br />

Giuliano Cameroni, 24 ans, pro du bloc<br />

Pour se rafraîchir,<br />

une baignade dans<br />

le Val Verzasca<br />

En outre, il se dégage de la région<br />

une atmosphère paisible. S’il y a trop<br />

d’animation à Cresciano (ce qui arrive<br />

rarement), vous pouvez toujours<br />

aller à Chironico dans le district de<br />

Léventine.<br />

Pour nous rafraîchir, mes amis<br />

et moi aimons nous baigner dans le<br />

Val Verzasca. Le ruisseau de montagne<br />

limpide de cette vallée idyllique<br />

crée des tourbillons naturels avec<br />

des courants agréables. Alternative<br />

attrayante : Ponte Brolla dans la vallée<br />

voisine de la Maggia. Vous pourrez<br />

y sauter dans l’eau depuis des hauteurs<br />

de plusieurs mètres et parfois<br />

observer des plongeurs de falaise<br />

professionnels.<br />

Plus sur Giuliano Cameroni :<br />

Instagram : @giuliano_cameroni ;<br />

redbull.com<br />

GETTY IMAGES, STEFAN KUERZI/RED BULL CONTENT POOL SIMON SCHREYER<br />

78 THE RED BULLETIN


HORS DU COMMUN<br />

Retrouvez votre prochain numéro en août en abonnement avec et avec ,<br />

dans une sélection de points de distribution et sur abonnement.<br />

LORENZ HOLDER/RED BULL CONTENT POOL


ALLER MIEUX<br />

Bienfaits froids<br />

Piquer une tête dans une eau glacée peut sembler fou, pourtant cela peut<br />

changer votre vie comme le révèle la fondatrice des Mental Health Swims.<br />

En ce 1 er janvier 2019, Rachel<br />

Ashe, 34 ans, participe à son<br />

premier Loony Dook, un événement<br />

consistant à prendre<br />

le jour de l’an un bain de mer<br />

dans l’eau glacée de l’estuaire<br />

du Forth, près d’Édimbourg<br />

(Écosse). « J’étais dans un sale<br />

état, mais j’ai couru avec des<br />

centaines de personnes et j’ai<br />

sauté dans l’eau. » Une eau à<br />

un ou deux degrés. « Après le<br />

choc, j’ai ressenti un calme<br />

profond, cela ne m’était pas<br />

arrivé depuis des années.<br />

Ce fut une révélation. »<br />

Depuis l’enfance, Ashe<br />

souffre de troubles psychiques<br />

; en 2018, elle est<br />

diagnostiquée borderline.<br />

Ce premier bain glacé l’incite<br />

à poursuivre la pratique chez<br />

elle, à Swansea (Pays de<br />

Galles). Et ça marche, son<br />

état mental s’améliore sensiblement.<br />

« En hiver, j’étais<br />

souvent dépressive. Les bains<br />

de mer ont éclairci mon horizon.<br />

Le froid mordant produit<br />

un incroyable effet sur la<br />

peau. J’ai le sentiment que<br />

tout redevient possible. »<br />

Après neuf mois de pratique<br />

sous les orages et la<br />

grêle, Ashe organise la première<br />

édition de la Mental<br />

Health Swim (trad. nage pour<br />

la santé mentale) à Caswell<br />

Bay, à 10 km de Swansea. « Je<br />

tenais à me retrouver dans la<br />

mer avec des personnes qui<br />

m’acceptent comme je suis,<br />

quels que soient mes états<br />

d’âme. » Près de trente personnes<br />

répondent à l’appel,<br />

« Plonger dans<br />

l’eau froide me<br />

force à sortir de<br />

ma tête. »<br />

PERSPECTIVES<br />

fitness<br />

Frisson de joie :<br />

Rachel Ashe<br />

(à droite) et<br />

sa compagne<br />

Cory Hughes.<br />

de quoi encourager Rachel à<br />

rendre cette rencontre mensuelle.<br />

Aujourd’hui, la Mental<br />

Health Swim compte près de<br />

90 groupes à travers le<br />

Royaume-Uni.<br />

En quoi l’eau froide améliore-t-elle<br />

le bien-être mental<br />

? Le Dr Mark Harper, directeur<br />

de Mental Health Swims<br />

et anesthésiste au CHU de<br />

Brighton et de Sussex, étudie<br />

les bienfaits de ce type de baignade<br />

et ses effets sur l’inflammation.<br />

De plus, des tests<br />

montrent que l’exposition au<br />

froid aide à traiter la dépression<br />

et l’anxiété. « L’immersion<br />

en eau froide n’est pas un<br />

remède, précise le Dr Harper,<br />

mais elle procure un ensemble<br />

d’avantages — exercice,<br />

sociabilité, autonomie, réussite,<br />

plaisir — qui, associé à<br />

l’eau froide, est étonnamment<br />

bon pour la santé mentale. »<br />

L’immersion peut<br />

accroître la résilience<br />

« L’eau froide est un facteur de<br />

stress pour le corps, explique<br />

Rachel Ashe. Parvenir à surmonter<br />

le choc de l’immersion<br />

facilite la gestion du stress<br />

quotidien. La méditation<br />

consciente ne m’a pas été<br />

bénéfique, j’avais tendance<br />

à fabriquer ma pleine<br />

conscience. Plonger dans<br />

l’eau froide me force à sortir<br />

de ma tête. Beaucoup d’entre<br />

nous portent leur anxiété dans<br />

la poitrine. Le fait de pénétrer<br />

lentement dans l’eau libère<br />

cette anxiété sous l’effet du<br />

froid qui pénètre par les pieds<br />

et remonte le long du corps. »<br />

En bonne compagnie<br />

« Le confinement a boosté les<br />

Mental Health Swims, confie<br />

Ashe. Le sentiment d’isolement<br />

a touché beaucoup de<br />

personnes au cours de l’année<br />

écoulée, les baignades ont été<br />

un réel soutien, une occasion<br />

de renouer des liens sociaux.<br />

Je veux montrer à ceux qui<br />

luttent pour leur santé mentale<br />

qu’ils sont plus forts qu’ils<br />

ne le pensent. »<br />

Pas d’équipement<br />

spécifique requis<br />

« Portez ce qui vous plaît,<br />

maillot de bain, combinaison<br />

de plongée, tee-shirt et leggings,<br />

qu’importe. L’essentiel<br />

est ailleurs, dans le fait de<br />

plonger dans l’eau froide et<br />

d’en ressentir les bienfaits,<br />

de passer du temps avec ceux<br />

qui vous comprennent. »<br />

Faites trempette,<br />

pas des longueurs<br />

« Soyez toujours à l’écoute de<br />

votre corps. Ne nagez jamais<br />

seul. On ne prépare pas un<br />

triathlon. Parfois, le simple<br />

fait de s’enfoncer dans l’eau<br />

jusqu’à la taille suffit. Les<br />

séances sont encadrées par<br />

des secouristes formés aux<br />

troubles psychiques et aux<br />

règles de sécurité en eau<br />

froide, identifiables grâce à<br />

leur drapeau de pirates rose. »<br />

Instagram :<br />

@mentalhealthswims<br />

LAURA MINNS NINA ZIETMAN<br />

80 THE RED BULLETIN


PERSPECTIVES<br />

fitness<br />

HYDROW TOM GUISE<br />

RAMER<br />

Aviron à réaction<br />

En plus de vous mettre en forme, ce rameur d’intérieur<br />

vous transporte sur les cours d’eau du monde entier.<br />

« Je peux vous apprendre à ramer en trois secondes », affirme Bruce Smith. Ce Bostonien<br />

de 51 ans est l’ex-entraîneur de l’équipe nationale d’aviron des États-Unis. Aujourd’hui,<br />

avec Hydrow, sa version révolutionnaire du rameur d’intérieur, Smith se lance dans le<br />

domaine du fitness high-tech. « L’aviron fait travailler 86 % du corps, renforce la densité<br />

osseuse et ménage les articulations, contrairement à la course à pied », explique-t-il. Estimant<br />

les anciens rameurs d’intérieur bruyants et encombrants, Smith voulait procurer la<br />

sensation de fendre l’onde. Hydrow y parvient grâce à un mécanisme électromagnétique<br />

contrôlé par ordinateur qui modifie la résistance jusqu’à 240 fois par seconde pour correspondre<br />

aux entraînements à l’écran, filmés en direct sur de véritables cours d’eau. Les<br />

utilisateurs peuvent se connecter en ligne et ramer en groupe. « Avoir l’impression d’être<br />

sur l’eau et travailler en parfaite synchronisation avec ses coéquipiers procurent une sensation<br />

particulière, dit Smith. C’est méditatif et énergisant. » hydrow.co.uk<br />

Les utilisateurs<br />

de Hydrow se<br />

connectent pour<br />

ramer ensemble,<br />

et aussi partager<br />

leurs questions,<br />

leur motivation et<br />

leurs conseils.<br />

THE RED BULLETIN 81


PERSPECTIVES<br />

gaming<br />

Prenez vos repères<br />

« Dans la zone, interdiction<br />

de se perdre, explique<br />

Nimara, qui vit en Roumanie.<br />

Souvenez-vous des points de<br />

repère et de leur emplacement.<br />

Utilisez une boussole<br />

et ne perdez pas de vue l’endroit<br />

où vous vous trouvez<br />

sur la carte. » Et s’il est trop<br />

difficile de voir devant vous<br />

(comme en cas de blizzard<br />

intense), réfléchissez avant<br />

de continuer.<br />

Dormez malin<br />

Le bon sens devrait toujours<br />

dicter l’endroit où vous dormez.<br />

« Nous n’obligeons pas<br />

les joueurs à camper dans<br />

des endroits spécifiques mais<br />

il est sage d’observer les ressources<br />

à portée de main. Ne<br />

campez pas là où vous n’êtes<br />

pas protégé des éléments, ou<br />

dans un endroit dangereux. »<br />

SURVIVRE<br />

Virtuel ou naturel ?<br />

Quittez la ville pour les grands espaces depuis le confort<br />

de votre fauteuil de gamer. Mais allez-y préparé...<br />

« Quand on veut saisir une<br />

simple chose dans la nature,<br />

on s’aperçoit qu’elle est liée au<br />

reste du monde », écrivit John<br />

Muir, explorateur de légende,<br />

défenseur de l’environnement<br />

et père de l’important système<br />

des parcs nationaux<br />

américains, après avoir vu<br />

pour la première fois les montagnes<br />

de la Sierra Nevada en<br />

1869. Une sensation que les<br />

joueurs d’Open Country, un<br />

nouveau défi de plein air de<br />

l’éditeur de jeux italien 505<br />

Games, partageront sous peu.<br />

En contrôlant un personnage<br />

qui troque sa vie urbaine<br />

pour la nature, vous êtes lâché<br />

dans une gigantesque simulation<br />

immersive de grands<br />

espaces inspirée par les parcs<br />

nationaux de Yellowstone et<br />

de Yosemite. La compréhension<br />

de l’interconnexion de la<br />

nature est ici vitale pour la<br />

survie : le bois permet de<br />

construire des abris et sert de<br />

combustible, les traces<br />

mènent à des animaux et les<br />

rivières vous guident vers une<br />

végétation luxuriante.<br />

« Le jeu vous permet de<br />

vous frotter à la vie en plein<br />

air en utilisant des techniques<br />

de brousse, de chasse et de<br />

pêche pour survivre, explique<br />

Tudor Nimara (photo),<br />

concepteur principal des<br />

développeurs du jeu, FUN<br />

Labs. Mais nous voulions<br />

aussi des moments où vous<br />

pouvez simplement contempler<br />

les vues magnifiques et<br />

reconnecter avec la nature. »<br />

Voici quelques-unes des<br />

compétences en matière de<br />

nature sauvage que vous<br />

découvrirez dans le jeu et qui<br />

pourraient s’avérer utiles pour<br />

votre prochaine aventure dans<br />

la vie réelle...<br />

« Ce jeu peut<br />

combler votre<br />

côté plein air. »<br />

Le bon vêtement<br />

Dans le jeu comme dans la<br />

vie, la météo est imprévisible<br />

et vous devrez vous adapter.<br />

« Les joueurs doivent bien<br />

s’équiper. Vous devez donc<br />

utiliser les bons vêtements,<br />

réagir si vous avez chaud et<br />

soif, ou si vous avez froid.<br />

Nous nous sommes également<br />

penchés sur les techniques<br />

de bushcraft (art des<br />

bois), par exemple, la fabrication<br />

d’un bouclier de feu. Rassemblez<br />

du bois et mettez-le<br />

d’un côté du feu de camp<br />

pour qu’il serve de réflecteur ;<br />

plus efficace. »<br />

Votre meilleur pote<br />

En rase campagne, vous êtes<br />

accompagné d’un ami fidèle.<br />

« Votre chien peut renifler les<br />

traces d’animaux et vous<br />

alerter en cas de danger.<br />

Dans ce jeu, vous ne pouvez<br />

vous déchaîner contre les<br />

grizzlis ou autres prédateurs,<br />

vous devez envisager de vous<br />

éloigner. Ici, la chasse est utilitaire,<br />

il ne s’agit pas de collectionner<br />

les trophées mais<br />

de mettre de la nourriture sur<br />

le feu de camp. »<br />

Open Country sur PS4, Xbox One<br />

et Steam ; opencountrygame.com<br />

STU KENNY<br />

82 THE RED BULLETIN


© Jean Nouvel, Gilbert Lézénès, Pierre Soria et Architecture-Studio / Adagp, Paris, 2021<br />

ALPHATAURI.COM


PERSPECTIVES<br />

Et si… on rangeait ?<br />

Toujours moins :<br />

pour Millburn<br />

(à gauche) et son<br />

pote Nicodemus,<br />

le bas de la photo<br />

est superflu.<br />

Dites adieu<br />

au bazar<br />

Millburn et<br />

Nicodemus<br />

recommandent<br />

cinq techniques<br />

pour s’alléger.<br />

SIMPLICITÉ<br />

Allégez-vous<br />

Vous vous sentez piégé par tous vos biens accumulés ? Les<br />

Minimalistes se libèrent de l’absurdité qu’est le matérialisme…<br />

Pour beaucoup, le minimalisme<br />

évoque l’esthétique :<br />

une pièce blanche dépouillée,<br />

la musique d’un unique instrument,<br />

un gadget dépourvu<br />

de boutons. Mais pour les<br />

amis Joshua Fields Millburn<br />

et Ryan Nicodemus, alias les<br />

Minimalistes, c’est le secret<br />

d’une vie heureuse.<br />

Natifs de Dayton, dans<br />

l’Ohio (USA), ces amis d’enfance<br />

découvrent le minimalisme<br />

en 2009, au moment<br />

où Millburn subit deux grands<br />

bouleversements en l’espace<br />

d’un mois : le décès sa mère<br />

et un divorce. « Ces événements<br />

m’ont forcé à faire le<br />

point et à revoir mes priorités<br />

qui incluaient alors réussite,<br />

statut social et accumulation,<br />

explique le quadragénaire.<br />

Un ménage américain moyen<br />

possède jusqu’à 300 000<br />

objets, et le mien probablement<br />

davantage. »<br />

En se séparant des biens<br />

de sa mère, Millburn décide<br />

d’en faire autant avec les<br />

siens, et plus il se débarrasse<br />

de ses objets, plus il se sent<br />

libre. Déprimé, Nicodemus,<br />

39 ans, rend visite à Millburn,<br />

ce dernier lui suggère de l’imiter.<br />

« Je travaillais 80 heures<br />

par semaine et négligeais des<br />

aspects importants de ma<br />

vie, tels que les relations<br />

humaines. J’ai alors cessé<br />

de faire passer les biens<br />

avant les personnes. »<br />

Podcasts, blog, conférences,<br />

livres et documentaires<br />

Netflix, les Minimalistes<br />

partagent leur philosophie<br />

avec des millions de personnes<br />

à travers le monde. Le<br />

message est simple : le vrai<br />

bonheur ne se trouve pas en<br />

adhérant au capitalisme et<br />

au consumérisme, mais en<br />

y renonçant. « La majorité<br />

d’entre nous passe sa vie à<br />

accumuler des objets au lieu<br />

de la vivre, déclare Millburn.<br />

En possédant uniquement le<br />

strict nécessaire, notre perception<br />

ira au-delà du simple<br />

monde physique et permettra<br />

à chacun de se reconnecter<br />

à l’essentiel. » Ou, pour citer<br />

le titre de leur dernier livre :<br />

« Chérissez les gens, pas les<br />

choses ».<br />

« Les objets ne sont pas<br />

nos ennemis », assure Millburn,<br />

et souligne qu’adopter<br />

ce mode de vie n’implique<br />

pas nécessairement de jeter<br />

tout ce que l’on possède. « Il<br />

ne s’agit pas de renoncer ou<br />

de bannir les objets, mais<br />

de posséder uniquement<br />

ceux qui apportent une réelle<br />

valeur ajoutée à nos vies.<br />

90 % de nos effets personnels<br />

sont des rebuts prétendument<br />

essentiels qui nous<br />

encombrent. Désencombrer<br />

notre monde extérieur ouvre<br />

la voie à l’épanouissement<br />

de notre monde intérieur. »<br />

theminimalists.com<br />

Le pourquoi<br />

« Posez-vous au préalable<br />

la question suivante :<br />

“Comment vivre mieux<br />

avec moins ?” Si vous mettez<br />

quelque chose au rebut<br />

sans savoir pourquoi, celleci<br />

sera vite de retour. »<br />

Objets saisonniers<br />

« Un objet non utilisé depuis<br />

trois mois et qui ne sera pas<br />

utilisé dans les trois mois à<br />

venir, peut être éliminé. »<br />

La règle<br />

des 20/20<br />

« Pour chaque objet que<br />

vous conservez au cas<br />

où, demandez-vous si<br />

vous pourriez l’obtenir<br />

pour moins de 20 euros<br />

en moins de 20 minutes.<br />

Si c’est le cas, dégagez-le.<br />

Cela concerne généralement<br />

deux ou trois objets<br />

tout au plus. »<br />

1 de plus,<br />

10 de moins<br />

« Séparez-vous de dix objets<br />

pour chaque nouvel objet<br />

acquis. Cela rendra vos<br />

achats plus judicieux, tout<br />

en vous obligeant à réévaluer<br />

constamment les possessions<br />

dont vous êtes<br />

prêt(e) à vous défaire. »<br />

Combustion<br />

spontanée<br />

« Imaginez pour un objet<br />

donné qu’il parte soudain<br />

en fumée. Vous seriez surpris<br />

du nombre de fois où<br />

vous vous sentirez soulagé.<br />

Si tel est le cas, défaitesvous<br />

en. »<br />

JOSHUA WEAVER LOU BOYD<br />

84 THE RED BULLETIN


PERSPECTIVES<br />

agenda<br />

DÉJÀ DISPO<br />

RISK VS REWARD: A NAZARÉ ANTHOLOGY SERIES<br />

Pourquoi seriez-vous prêt à tout risquer ? Pour la plupart d’entre nous, cette question n’est<br />

heureusement guère plus qu’hypothétique. Mais pour les surfeurs de cette série, elle est<br />

bien réelle. Nazaré, au Portugal, abrite les plus grandes vagues surfables de la planète, où<br />

des records et des corps peuvent être et ont été battus. C’est une légende qui a déjà été<br />

racontée, mais ce qui est rarement couvert, ce sont les enjeux humains : les familles, les partenaires<br />

et les animaux domestiques laissés de côté dans la poursuite de ce prix. Les deux<br />

premiers épisodes de cette série se concentrent sur les vies et les amours de la Française<br />

Justine Dupont et du Brésilien Pedro « Scooby » Vianna, qui risquent tout. redbull.com<br />

17 AU 19 SEPTEMBRE<br />

VÉLO EN GRAND<br />

Si vous aimez le vélo, ce nouveau<br />

rendez-vous est pour vous. Organisé<br />

sur le site (protégé) de l’île de loisirs<br />

de Jablines-Annet, en Seine-et-<br />

Marne (77), Vélo en Grand s’annonce<br />

comme un rendez-vous grand public,<br />

ouvert aux familles comme aux<br />

sportifs, et aux convaincus comme<br />

aux curieux du vélo. Que vous l’aimiez<br />

urbain, électrique, pliant,<br />

cargo, gravel, de route, de voyage ou<br />

nature, votre vélo sera à l’honneur,<br />

lors d’initiations, courses, randos,<br />

animations (multiples) et même de<br />

compétitions, comme les championnats<br />

du monde de Wheeling (Bike<br />

Life), la Coupe du Monde MTB Eliminator<br />

et le Cyclo-Cross International<br />

de la Solidarité C2. Organisé par<br />

les équipes de Vélo Vert, dont on ne<br />

présente plus le magazine de VTT<br />

historique, ce premier festival du<br />

vélo en Île-de-France devrait être<br />

surprenant. veloengrand.com<br />

DÉJÀ DISPO<br />

ACCOMPLICE<br />

L’acquisition de son premier vélo est un moment<br />

important dans la vie de chacun. Ce film est un<br />

hommage à ce billet pour la liberté, au lien qui<br />

s’est tissé entre l’homme et son compagnon à<br />

deux roues. Mais les personnes qui racontent leur<br />

histoire ici ne sont pas n’importe qui – ce sont des<br />

légendes du cyclisme, qui se sont engagées sur<br />

une voie dès le moment où elles ont découvert ce<br />

que permettait un vélo. Pour Brandon Semenuk,<br />

ce parcours a conduit le Canadien à remporter le<br />

<strong>Red</strong> Bull Joyride pour la première fois en 2011.<br />

Pour l’Américain Paul Basagoitia, il s’est traduit par<br />

une chute au <strong>Red</strong> Bull Rampage en 2015 qui l’a laissé<br />

paralysé et a dû réapprendre à rouler. Bien plus<br />

qu’un simple film de vélo. redbull.com<br />

KONSTANTIN REYER/RED BULL CONTENT POOL, VÉLO EN GRAND, LUKE WALKER/SAATCHI GALLERY,<br />

BEN MARR/RED BULL CONTENT POOL<br />

86 THE RED BULLETIN


PERSPECTIVES<br />

agenda<br />

JUSQU’AU 3 OCTOBRE ‒ LONDRES<br />

JR: CHRONICLES<br />

L’artiste de rue français JR est célèbre pour ses collages de photos à la fois<br />

épiques et intimes, et le monde entier est sa galerie. De 2008 à 2014, son<br />

projet Women Are Heroes a recouvert les toits, les trains et les murs d’Europe,<br />

d’Amérique du Sud, d’Asie et d’Afrique de photos de femmes vivant<br />

dans des bidonvilles. Pour Giants (photo ci-dessus) en 2017, il a érigé une<br />

imposante photocopie d’un enfant regardant par-dessus le mur de la frontière<br />

entre les USA et le Mexique. Ces œuvres et d’autres sont présentées<br />

dans une exposition événement à Londres qui pourrait bien justifier un<br />

saut en Angleterre si l’actualité le permet.<br />

Saatchi Gallery, Londres ; saatchigallery.com<br />

17 ET 18 AOÛT<br />

PARIS CONQUEST<br />

Enfin, un gros événement de skate<br />

à Paris ! Le <strong>Red</strong> Bull Paris Conquest<br />

est une compétition internationale<br />

de street qui rassemblera 36 riders<br />

pros (24 hommes et 12 femmes)<br />

qui s’affronteront dans un format<br />

head-to-head, au sein d’un skatepark<br />

unique composé de sept spots<br />

parisiens iconiques reconstitués<br />

pour l’occasion au Trocadéro (non<br />

loin du Palais de Tokyo, place forte<br />

du skate dans la capitale). Les noms<br />

du Français Aurélien Giraud, de<br />

Leticia Bufoni (Brésil) et de Nyjah<br />

Huston (USA) sont évoqués à<br />

l’heure où nous bouclons ce numéro.<br />

Une retransmission en direct<br />

vous sera proposée sur <strong>Red</strong> Bull TV<br />

et Twitch, ainsi qu’un replay.<br />

redbull.com<br />

DÉJÀ DISPO<br />

FILER CREEK<br />

Il ne reste finalement que très peu<br />

de rivières à explorer sur la planète.<br />

Lorsque le Canadien Ed Muggridge<br />

a été contacté par son collègue kayakiste<br />

Sandy MacEwan pour effectuer<br />

une première descente de Filer<br />

Creek, un tronçon de 60 kilomètres<br />

d’eau vive qui s’étend de la côte de<br />

la Colombie-Britannique à l’océan<br />

Pacifique, il n’a pas pu laisser passer<br />

l’occasion. Le genre d’expédition<br />

dont il apprécie la « rudesse ». Partagez<br />

leur aventure en compagnie d’un<br />

autre kayakiste, Benny Marr, avec<br />

ce documentaire de 20 minutes disponible<br />

sur <strong>Red</strong> Bull TV. Une source<br />

d’inspiration pour l’esprit alors que<br />

nous recommençons à planifier<br />

nos propres aventures.<br />

redbull.com<br />

THE RED BULLETIN 87


PERSPECTIVES<br />

moto<br />

En route<br />

Parce qu’il y a des virées à rattraper,<br />

chopez le bon matos pour partir à moto.<br />

Photos OPHELIA WYNNE<br />

88 THE RED BULLETIN


Moto DUCATI Monster<br />

1200, ducati.com ;<br />

casque HEDON Bike<br />

Shed Club Racer Carbon<br />

Edition, hedon.com ;<br />

veste de denim SAINT<br />

Unbreakable Shearling<br />

Collar, eu.saint.cc ;<br />

t-shirt manches longues<br />

CYCLE ZOMBIES Basecoat,<br />

cyclezombies.com ;<br />

jeans BELSTAFF Longton<br />

Slim, belstaff.eu ;<br />

chaussettes STANCE<br />

Boyd 4, stance.eu.com ;<br />

chaussures VANS<br />

Sk8-Hi, vans.fr<br />

Ci-contre : moto<br />

HUSQVARNA Svartpilen<br />

125, husqvarna-motorcycles.com<br />

;<br />

veste cuir coquée Pink<br />

et crop top Laurie<br />

EUDOXIE, eudoxie.shop ;<br />

jeans SAINT Unbreakable<br />

High Rise Skinny,<br />

eu.saint.cc ;<br />

casque HEDON Hedonist<br />

Glass Ash, hedon.com ;<br />

lunettes 100 % Barstow,<br />

100percent.com ;<br />

chaussettes STANCE<br />

Slacker stance.eu.com ;<br />

chaussures VANS<br />

Sk8-Hi, vans.fr


Moto MUTT MOTOR-<br />

CYCLES Razorback<br />

125cc, muttmotorcycles.com<br />

; veste Racer<br />

MALLE LONDON ;<br />

mallelondon.com ;<br />

t-shirt EUDOXIE Flor,<br />

eudoxie.shop ; short<br />

LEVI’S 501 Mid Thigh,<br />

levi.com ; casque<br />

HEDON Heroine Classic<br />

HFI, hedon.com ;<br />

lunettes 100 %<br />

Barstow, 100percent.<br />

com ; chaussettes<br />

STANCE Boyd Staple,<br />

stance.eu.com ;<br />

chaussures VANS<br />

Sk8-Hi, vans.fr


PERSPECTIVES<br />

moto<br />

Gauche : moto HUSQVARNA Svartpilen 125, husqvarna-motorcycles.com ; casque HEDON Bike Shed Club Racer Carbon Edition,<br />

hedon.com ; veste de vol MALLE LONDON ML1, mallelondon.com ; surchemise P&CO Ripstop Fatigue, pand.co ; gants GOLDTOP<br />

Short Cuff Bobber, goldtop.co.uk ; pantalon DEUS EX MACHINA Jack Mechanics, shop.eu.deuscustoms.com. Droite : moto DUCATI<br />

Scrambler Icon Dark, ducati.com ; lunettes de soleil ZEAL OPTICS Divide, zealoptics.com ; veste P&CO Wayfare Waxed Canvas, pand.<br />

co ; sweat ASHLEY WATSON Cardington, ashleywatson.co.uk ; casque HEDON Heroine Racer, hedon.com ; gants GOLDTOP Predator,<br />

goldtop.co.uk ; pantalon DEUS EX MACHINA Indigo, deuscustoms.com ; chaussettes STANCE Joven, stance.eu.com ;<br />

DUKE + DEXTER chaussures Drake Tan Hiker, dukeanddexter.com<br />

THE RED BULLETIN 91


Casque HEDON Hedonist<br />

Tux, hedon.com ;<br />

veste en cuir EUDOXIE<br />

Pink, eudoxie.shop


Lunettes de soleil<br />

QUAY Nightfall,<br />

quayaustralia.co.uk ;<br />

veste BELSTAFF Pelham,<br />

belstaff.eu ;<br />

tee-shirt EUDOXIE<br />

Marie, eudoxie.shop ;<br />

jeans LEVI’S Ribcage<br />

Straight Ankle, levi.<br />

com ; casque HEDON<br />

Heroine Racer Two<br />

Face, hedon.com<br />

93


Moto MUTT MOTORCY-<br />

CLES Sabbath 250,<br />

muttmotorcycles.com ;<br />

casque HEDON Epicurist,<br />

hedon.com ;<br />

lunettes de soleil ZEAL<br />

OPTICS Crowley, zealoptics.com<br />

; sac à dos<br />

CHROME INDUSTRIES<br />

Barrage Freight,<br />

chromeindustries.com ;<br />

hoodie DEUS EX<br />

MACHINA Venice<br />

Address, shop.eu.deuscustoms.com<br />

; gants<br />

FUEL MOTORCYCLES<br />

Rodeo, fuelmotorcycles.<br />

eu ; pantalon P&CO 304<br />

Service Fatigue, pand.<br />

co ; chaussettes STANCE<br />

Icon, stance.eu.com ;<br />

chaussures CONVERSE<br />

Chuck 70 Classic High<br />

Top, converse.com


PERSPECTIVES<br />

moto<br />

Moto DUCATI Scrambler Icon Dark, ducati.com ; veste Sidewaze et pantalon Greasy Denim FUEL MOTORCYCLES, fuelmotorcycles.<br />

eu ; tee-shirt à manches longues BOLT Raglan, boltlondon.com ; gants GOLDTOP Quilted Café Racer, goldtop.co.uk<br />

Mannequins RAYANE B et HARRIET ROSE @ Select ; ETHAN DAVEY @ W ; DJ JAMES @ Supa ; coiffure et maquillage CÉLINE NONON<br />

avec des produits Dermalogica et Paul Mitchell<br />

THE RED BULLETIN 95


MENTIONS LÉGALES<br />

THE RED<br />

BULLETIN<br />

WORLDWIDE<br />

The <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

est actuellement<br />

distribué dans six pays.<br />

Vous découvrez ici la<br />

couverture de l’édition<br />

US, dédiée au pilote<br />

mexicain de Formule 1<br />

Sergio Pérez.<br />

Le plein d’histoires<br />

hors du commun sur<br />

redbulletin.com<br />

Les journalistes de SO PRESS n’ont<br />

pas pris part à la réalisation de<br />

The <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong>. SO PRESS n’est<br />

pas responsable des textes, photos,<br />

illustrations et dessins qui engagent<br />

la seule responsabilité des auteurs.<br />

Direction générale<br />

Alexander Müller-Macheck, Sara Car-Varming (adj.)<br />

Rédacteurs en chef<br />

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Direction créative<br />

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Martina de Carvalho-Hutter, Cornelia Gleichweit,<br />

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Projets spécifiques Arkadiusz Piatek<br />

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(communication), Jennifer Silberschneider<br />

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Nicole Glaser, Victoria Schwärzler, Yoldaş Yarar<br />

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Fabrication & Production Veronika Felder (dir.),<br />

Friedrich Indich, Walter O. Sádaba, Sabine Wessig<br />

Lithographie Clemens Ragotzky (dir.), Claudia Heis,<br />

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Finances Mariia Gerutska (dir.), Klaus Pleninger<br />

MIT Christoph Kocsisek, Michael Thaler<br />

Opérations Melanie Grasserbauer, Alexander Peham,<br />

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Schieffer, Jean-Pascal Vachon,<br />

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Relecture<br />

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Jennifer Sabejew, Johannes<br />

Wahrmann-Schär, Ellen Wittmann-<br />

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Wörndle, Sabine Zölß<br />

THE RED BULLETIN<br />

Autriche, ISSN 1995-8838<br />

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Fabienne Peters,<br />

fabienne.peters@redbull.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Suisse, ISSN 2308-5886<br />

Country Editors<br />

Stefania Telesca<br />

Révision<br />

Hans Fleißner (dir.),<br />

Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />

Billy Kirnbauer-Walek<br />

Country Project Management<br />

Meike Koch<br />

Media Sales & Brand Partnerships<br />

Stefan Brütsch (dir.),<br />

stefan.bruetsch@redbull.com<br />

Marcel Bannwart,<br />

marcel.bannwart@redbull.com<br />

Christian Bürgi,<br />

christian.buergi@redbull.com<br />

Jessica Pünchera,<br />

jessica.puenchera@redbull.com<br />

Goldbach Publishing<br />

Marco Nicoli,<br />

marco.nicoli@goldbach.com<br />

THE RED BULLETIN USA,<br />

ISSN 2308-586X<br />

Rédacteur en chef<br />

Peter Flax<br />

Rédactrice adjointe<br />

Nora O’Donnell<br />

Révision<br />

David Caplan<br />

Publishing Management<br />

Branden Peters<br />

Media Network Communications<br />

& Marketing Manager<br />

Brandon Peters<br />

Publicité<br />

Todd Peters,<br />

todd.peters@redbull.com<br />

Dave Szych,<br />

dave.szych@redbull.com<br />

Tanya Foster,<br />

tanya.foster@redbull.com<br />

96 THE RED BULLETIN


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TRBMAG


Pour finir en beauté<br />

Le monde d’après<br />

Plus qu’un plongeon extrême lors de la première étape des <strong>Red</strong> Bull<br />

Cliff Diving World Series, tenue à Saint-Raphaël le 12 juin dernier,<br />

cette image de l’athlète tchèque Michal Navratil est un symbole : celui<br />

d’une liberté bientôt retrouvée pour la France, avec les confinements<br />

et couvre-feux définitivement oubliés, quelques jours seulement après<br />

cet événement sensationnel. Un plongeon vertigineux de 27 mètres,<br />

dans le monde d’après.<br />

Le prochain<br />

THE RED BULLETIN<br />

sortira le<br />

23 septembre<br />

2021<br />

ALEX VOYER/RED BULL CONTENT POOL<br />

98 THE RED BULLETIN


L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION.

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