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74 LK TOUR DU MONDE
sont les ornements de la maison. Aussi faut-il voir avec
quels soins ils sont sculptés, dorés et peints en couleurs
éclatantes. (^'oJ•. p. 71.)
La fête funéraire d'un enterrement est la plus grande
occasion pour les Chinois de déployer leur luxe et de
faire ostentation de leurs richesses. On a vu des familles
se ruiner pour célébrer le décès d'un de leurs
membres.
Dès le matin, l'administration des pompes funèbres
établit à la porte de la maison mortuaire une espèce
d'arc de triomphe en nattes sous lequel des musiciens
fragés exécutent des airs tristes et solennels. La salle
d'entrée, drapée dans toute sa hauteur, reçoit les amis
et les connaissances du défunt, dont le portrait est placé
au-dessus des statues des
dieux domestiques et de
l'autel des ancêtres. Un repas
somptueux est servi
sur des tables dressées à
l'avance, et tous les invito
doivent par convenance s'y
asseoir et manger, car c'est
le mort, devant lequel sonl
placés ses mets favoris, qui
est supposé vous recevoir
et manger avec vous. On ne
voit pas le cercueil : il est
placé dans une chambre retirée.
Bientôt le gong annonce
le départ du cortège :
en tête s'avancent les portebannières
déployant des
drapeaux et des cadres
peints sur lesquels sont tracées
des inscriptions louangeuses
; derrière eux la
troupe des musiciens où
dominent les instruments à
vent, trompes, flûtes, cornes
et surtout l'inévitable
tam-tam , font entendre
sans interruption des mélodies
un peu monotones,
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d'aprc
mais d'un effet très-lugubre; puis viennent des bonzes
qui portent sur leurs dos des autels et les statues des divinités.
Ces prêtres précèdent la bière entourée d'une immense
catafalque et de draperies avec des glands de soie.
I^es dorures, les couleurs les plus gaies, les plus éclatantes,
et les plus bariolées ornent le char funèbre et les panneaux
du catafalque décorés de dessins sur verre. Cette
louide machine n'est pas traînée par des mulets; elle est
conduite à bras comme un palanquin, et il faut au moins
quarante hommes qui se relayent successivement pour
le transporter. Une troupe de pleureuses, tète baissée
et voilée, suivent le cercueil et accompagnent les musiciens
de leurs cris nasillards; enfin vient la famille
cachée dans deschaises h porteur toutes drapées d'élolTes
blanches. 11 est de bon goût qu'aucun ],arcnl Ju d.'i'iint
ne se laisse voir, h cause de la douleur où on suppose
qu'il doit être plongé (voy. p. 77).
Tout se passe avec le plus gi-and silence : les Chinois
qui aiment tant à tirer des pétards s'en abstiennent dans
cette occasion.
Il ne faut pas croire qu'une pompe funèbre de ce genre
soit celle d'un riche ou d'un mandarin; un pauvre ouvrier
se privera toute sa vie de manger à sa faim pour
avoir un bel enterrement, et le mendiant qui sent la
mort approcher ne trouve pas de meilleur moyen d'exciier
la générosité que de dire qu'il n'a pas de quoi
s'acheter un cercueil convenable.
Les enterrements des grands personnages se font
avec une ostentation extraordinaire
:
^ 1/" /j
iiiiiï. — Dessin de Cali
photographie.
on porte devant eux
tous les objets qui leur ont
l'i sern pendant leur vie; les
meubles, les uniformes, les
armes, les insignes des dignités;
plusieurs milliers de
personnes accompagnent le
cortège ,
mais on n'y voit '
jamais de soldats, même
pour les mandarins militaires.
11 n'y a pas de cimetières
publics à Pékin. Les
cercueils très - grands et
très-lourds sont recouverts
d'un enduit qui les rend imperméables
à l'air, et permet
de les conserver longtemps
sans inconvénient,
même dans les maisons.
Aussi les gens riches gardent
- ils quelquefois le
corps de ceux qu'ils ont
aimé, dans une pièce réservée
de leur -habitation
de ville. Mais il est généralement
d'usage d'enterrer
les morts dans la
campagne au milieu d'un
jardin qui appartient à la
famille. Quant aux pauvres, qui n'ont pas un pouce
de terrain à eux, leurs cercueils sont déposés dans
un endroit isolé ou même jetés dans les fossés do
Pékin. Lorsqu'on parcourt les environs des grandes
villes, les yeux sont frappés de la quantité de tombeaux
disséminés dans la campagne. Ce sont de petites éminences
coniques en forme de pains de sucre, émaillées
de gazon fleuri et entourée de saules pleureurs, de genévriers
et d'ai bres verts. Les cercueils posés i plat sur le
sol qui n'a pas été creusé, sont recouverts d'un monticule
de terre, mais les pluies d'orage suivies de grandes
sécheresses lavent les terres, fondent l'enduit, fout
craquer le bois, et les cadavres pounissent au grand air.
C'est un spectacle afi'reux, auquel il faut s'habituer eu
Chine. Le gouverneuient ne ])reiid aucun soiu de faire