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56 LE TOUR DU MONDE.
qui vont quelquefois consulter les sorts ou brûler du papier
peint et des bâtons de parfums aux pieds des idoles.
Ces rares aumônes ne pourraient suffire à leur entretien,
s'ils
n'y joignaient la mendicité qu'ils exercent en grand
et de la manière la plus importune. Pour le Chinois,
travailleur par excellence ,
tout prêtre est un paresseux,
un frelon qui vit dans la ruche aux dépens des abeilles;
aussi le tao-ssc en est-il réduit , dans sa vieillesse , à
louer pour quelques sapègucs l'enfant d'une famille
pauvre dont il fait son disciple ou plutôt son domestique,
et qui plus tard devient son successeur.
La religion, ou plutôt la doctrine de Confucius, est
suivie par les lettrés : l'empereur lui-même s'en est déclaré
le patriarche. Elle a
pour base
un panthéisme
philosophique diversement ;
inte!"prété suivant les épo- '
ques.
Quoique l'existence
d'un Dieu tout-puissant,
punissant le crime et récompensant
la vertu, ait
été admise par ce grand
philosophe, le peu de soin
qu'il a pris de baser ses
principes de morale sur
l'idée divine, a amené peu
à peu ses disciples au matérialisme.
Pour Confucius,
le bien et la justice
parmi les hommes sont en
conformité avec l'ordre
éternel de la nature; ce
qui est mal au point de vue
de la morale, pêche contre
l'harmonie du Grand Tout.
11 ne s'est, dans aucun de
ses ouvrages, livré aux
spéculations
philosophiques
sur l'origine, la création
ou la fin du monde
;
il n'est jamais religieux,
mais il enseigne admirablement
la piété filiale,
l'amour de l'humanité, la
charité, la renonciation de
soi-même; enfin c'est un grand moraliste qUi a donné le»
préceptes du beau et du bien, mais qui n"a voulu préjuger
en rien les destinées de l'homme et la nature de la Divinité.
Confucius, né l'an 551 avant Jésus-Christ, et mort
en 474, était donc contemporain des ])remiers philosophes
grecs, de Cyrus et d'Eschyle. Voltaire a dit de lui :
De la seule raison salutaire interprète,
Sans éblouir le monde éclairant les esprits,
Il
ne parla qu'en sage et jamais en prophète;
Cependant on le crut, et même en son piiys.
Jamais il n'a été donné à un homme d'exercer, pendant
tant de siècles, un aussi grand prestige sur ses sera-
blables. Depuis deux mille quatre cents ans, trois cents
millions d'hommes rendent un culte à la fois civil
^1.
et religieux
à ce grand citoyen. Il n'est pas une ville qui n'ait
un temple élevé en son honneur; son image se trouve
dans toutes les académies , dans les pagodes des lettrés,
dans les yamouns destinés aux examens littéraires ;
dans
les plus humbles écoles des villages les plus reculés,
maîtres et élèves se prosternent devant sa tablette au
commencement et à la fin des classes.
La religion de Confucius n'a ni images ni prêtres :
chacun la pratiquant comme il l'entend, les mandarins
ont ajouté à cette pure doctrine des cérémonies officielles
telles que le culte rendu aux ancêtres, aux astres et aux
génies du ciel et de la
terre ;
mais eux - mêmes
tournent en l'idicule ces
vieilles croyances conservées
pour garder un prestige
vis-à-vis du peuple, et
sont les premiers à se moquer
des jours fastes 'et
néfastes,
des horoscopes,
de l'astrologie et de la divination
par les sorts publiés
tous les ans par l'Almanach
impérial.
Le ])rincipal temple de
Confucius à Pékin est situé
au nord de la ville ;
nous
avons déjà parlé de ce monument;
à l'intérieur, l'œil
ne trouve rien de remarquable
que sa vaste étendue,
la grandeur des salles,
la décoration et la dorure
des plafonds, et surtout la
quantité de tablettes contenant
des maximes du philosophe
gravées en caractères
dorés qui sont suspendues
de toute part aux
murailles. Sur un piédestal
est un cadre plus grand que
les autres qui porte l'inscription
.suivante : Au trèssamt
maître Coulucius. Malheureusement les pratirpes
superstitieuses se sont glissées dans le culte, et les offrandes
déposées par les gens simples telles que les pièces
d'étoiles de soie, les vases consacrés remplis de riz, de
fruits secs et d'autres aliments servent à entretenir la
paresse des desservants, (pii balayent le temple, entretiennent
les lumières, époussètenl les tablcites, et qui
se sont constitués d'eux-mêmes les prêtres de Confucius.
La troisième religion de la Chine est le bouddhisme,
qui, on le sait, prit naissance dans l'Inde plusieurs siècles
avant Jésu.s-Christ. Son fondateur se disait appelé à réformer
l'antique religion des Indous, le brahmanisme;
il considérait tous les hommes comme égaux devant Dieu,