LE TOUR DU MONDE 1864 viaje a españa
404 LE TOUR DU MONDE.quête; celui de San Geroniino, dont nous venons de parler,était un des plus remarquables ;la chapelle seule aété conservée, et on lit encore cette inscription latinesur la façade extérieure : i Gonsalvo Fcrdinando deGordova magno Hispanorum duci, Galloruin ac Turcorumterrori. » — A Gonzalve Ferdinand de Cordoue, legrand capitaine espagnol , la terreur des Français et desTurcs. Les autres parties du couvent de San Geronimoservent aujourd'hui de caserne de cavalerie.Parmi les nombreux couvents que possédait autrefoisGrenade, peu d'ailleurs méritent d'être cités. La chapellede ÏAve Maria, où reposent les restes du célèbreHernan Pcrez del Pulgar, El de las Hazanas, « celui desexploits, » comme l'appellent les Espagnols, rappelle unde ses hauts faits : se trouvant à Alharaa à l'époque dusiège de Grenade, il fil vœu à la sainte Vierge d'entrerdans cette ville,et de fixer un flambeau et un Ave Mariasur les murs de la grande mosquée, ce qu'il exécutaponctuellement. Son tombeau se trouve entre la cathédraleet la chapelle royale, où sont enten'és les rois catholiques,ce qui a donné lieu à ce proverbe connu àGrenade : Como Puhjnr, ni denlro ni fuera, commePulgar, ni dedans ni dehors.La Chartreuse, ou Carluja, est située à peu de distancede Grenade, dans une position des plus pittoresques,d'où on domine toute la Vega; l'intérieur est orné avecle plus grand luxe ; il y a là des portes garnies d'ébène,d'écaillé et de nacre, et des ornements en marbre d'unerichesse extraordinaire. On nous fit voir quelques ruinesmoresques dans le jardin ; il est probable qu'il y avaitencore là un riche palais qui fut détruit, comme tantd'autres, pour faire place au couvent.L'église de 5a// Juan de Diox n'est remarquable quepar le luxe d'ornements du plus mauvais goût, si généralen Espagne à la fin du dix-septième siècle, et qu'una appelé ChurrigHcresco, du nom de l'architecte Cliurriguera; c'est la caricature très-exagérée de ce que nousappelons le st3'le rocaille ou rococo. L'église de las Angustias,dédiée à Notre-Dame des Douleurs, pour laquelleles Grenadins ont une vénération particulière, est égalementdans le style churrigueresque ; elle est située .surla Carrera de Genil , et c'est l'église à la mode, la paroissearislocralique de Grenade.Cette église a donné son nom à une des promenadesles plus fréquentées de la ville, la Carrera de las Anguslias; c'est là que, dans les belles soirées, si nombreusesà Grenade, la société élégante se donne rendez-vous;les femmes sont renommées pour leur beauté, témoin leproverbe : Los Ciranndi)ias son muy ftnas ;presquetoutes portent la mantille noire, que le chapeau parisien,fort heureusement, n'est pas encore parvenu à détrôner;cette élégante mantille, accompagnée d'une fleur rougesimplement placée dans les plus beaux cheveux dumonde, forme une coiffure naturelle qui peut défier lesinventions les plus ingénieuses des modistes de l'autrecôté des Pyrénées. Les femmes de Grenade sont d'unebeauté plus sévère que celles des autres parties de l'Andalousie,comme les Gaditanes cl les Sévillanes, parexemple, qui ont moins de noblesse, mais plus de coquetterieet plus de brio.A côté de la promenade, sur la place du Carnpillo, setrouvent les principaux cafés de la ville et le théâtre,monument fort simple construit par les Français pendantqu'ils occupaient Grenade : on y donne des drames,des comédies, des zarzuelas ou opéras-comiques , sanspréjudice du baile nacional (ballet national), le complémentobligé du spectacle.Sur la Pla:a de Baikn, contiguë au Campillo, s'élèved'un côté une colonne commémorative érigée à l'acteurespagnol Maiquez, par Julian Romea, Matilde Diez etd'autres de ses camarades; de l'autre le monument expiatoireélevé par r.A.yuntamiento, ou conseil municipalde Grenade, à la mémoire de l'infortunée Mariana Pineda,qu'on appelle la victime de la tyrannie royale; cettedame, d'une naissance élevée et d'une beauté remarquable,fut condamnée à mort en mai 1831, et montasur l'échafaud qu'on avait dressé sur la Plaza de Bailenpour y subir le supplice du garrote. Son crime était d'avoirpossédé un drapeau constitutionnel, qu'on trouvadans sa maison. On assure qu'elle était innocente duprétendu crime qui lui était imputé, et que son dénonciateur,un employé subalterne du nom de Pedroza,qu'elle avait rebuté, avait traîtreusement caché chez elleledrapeau qui devait la perdre. Aujourd'hui, la victimeest devenue une héroïne, et tous les ans, le jour anniversairede sa mort, son sarcophage est porté en grandepompe à la cathédrale, où un service solennel est célébréà sa mémoire.Le monument de Doiîa Mariana Pineda se composeuniquement d'un piédestal : on devait lui élever unestatue de bronze, mais soit que les fonds aient manqué,soit que l'enthousiasme politique se soit refioidi, le piédestalattend toujours la slatue.Rien n'est plus merveilleux que le spectacle dont onjouit de la Carrera de las Angustias, quand on se dirigevers le Salon, autre splendide alameda qui fait suite à laCarrera : par-dessus la haute barrière de verdure forméepar les arbres du Salon, on voit s'élever, comme uneimmense toile de fond, les cimes neigeuses de la SierraNevada; il n'existe pas dans le monde entier une promenaded'où l'on jouisse d'un pareil spectacle : vers lesoir, les sommets de l'immense montagne se revêtentdes couleurs les plus riches et les plus transparentes : lemanteau de neige qui la couvre, éclairé par les rayonsdu soleil couchant, prend des tons de nacre et d'opale,tandis que les anfractuosités restées dans l'ombre se colorentd'un bleu aussi pur mais plus doux que le saphir.Nous nous plaisions chaque soir h observer les jeux delumière et les changements incessants que le soleil, ens'abaissant vers l'horizon, mêlait h ce sublime spectacle,jusqu'à ce que, le jour finissant, les lumières etles ombres disparussent dans les demi-teintes du crépuscule;alors la Sierra Nevada ne nous apparaissaitplus que comme une grande masse d'un blanc uniforme,dont les déchirures se découpaient nettement sur un cielrougeàlre parsemé de longs nuages violacés.
Les grottes des Gitaiios, au Sacro Monte — Dessin de Gustave Doré.
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404 LE TOUR DU MONDE.
quête; celui de San Geroniino, dont nous venons de parler,
était un des plus remarquables ;
la chapelle seule a
été conservée, et on lit encore cette inscription latine
sur la façade extérieure : i Gonsalvo Fcrdinando de
Gordova magno Hispanorum duci, Galloruin ac Turcorum
terrori. » — A Gonzalve Ferdinand de Cordoue, le
grand capitaine espagnol , la terreur des Français et des
Turcs. Les autres parties du couvent de San Geronimo
servent aujourd'hui de caserne de cavalerie.
Parmi les nombreux couvents que possédait autrefois
Grenade, peu d'ailleurs méritent d'être cités. La chapelle
de ÏAve Maria, où reposent les restes du célèbre
Hernan Pcrez del Pulgar, El de las Hazanas, « celui des
exploits, » comme l'appellent les Espagnols, rappelle un
de ses hauts faits : se trouvant à Alharaa à l'époque du
siège de Grenade, il fil vœu à la sainte Vierge d'entrer
dans cette ville,
et de fixer un flambeau et un Ave Maria
sur les murs de la grande mosquée, ce qu'il exécuta
ponctuellement. Son tombeau se trouve entre la cathédrale
et la chapelle royale, où sont enten'és les rois catholiques,
ce qui a donné lieu à ce proverbe connu à
Grenade : Como Puhjnr, ni denlro ni fuera, comme
Pulgar, ni dedans ni dehors.
La Chartreuse, ou Carluja, est située à peu de distance
de Grenade, dans une position des plus pittoresques,
d'où on domine toute la Vega; l'intérieur est orné avec
le plus grand luxe ; il y a là des portes garnies d'ébène,
d'écaillé et de nacre, et des ornements en marbre d'une
richesse extraordinaire. On nous fit voir quelques ruines
moresques dans le jardin ; il est probable qu'il y avait
encore là un riche palais qui fut détruit, comme tant
d'autres, pour faire place au couvent.
L'église de 5a// Juan de Diox n'est remarquable que
par le luxe d'ornements du plus mauvais goût, si général
en Espagne à la fin du dix-septième siècle, et qu'un
a appelé ChurrigHcresco, du nom de l'architecte Cliurriguera
; c'est la caricature très-exagérée de ce que nous
appelons le st3'le rocaille ou rococo. L'église de las Angustias,
dédiée à Notre-Dame des Douleurs, pour laquelle
les Grenadins ont une vénération particulière, est également
dans le style churrigueresque ; elle est située .sur
la Carrera de Genil , et c'est l'église à la mode, la paroisse
arislocralique de Grenade.
Cette église a donné son nom à une des promenades
les plus fréquentées de la ville, la Carrera de las Anguslias
; c'est là que, dans les belles soirées, si nombreuses
à Grenade, la société élégante se donne rendez-vous;
les femmes sont renommées pour leur beauté, témoin le
proverbe : Los Ciranndi)ias son muy ftnas ;
presque
toutes portent la mantille noire, que le chapeau parisien,
fort heureusement, n'est pas encore parvenu à détrôner;
cette élégante mantille, accompagnée d'une fleur rouge
simplement placée dans les plus beaux cheveux du
monde, forme une coiffure naturelle qui peut défier les
inventions les plus ingénieuses des modistes de l'autre
côté des Pyrénées. Les femmes de Grenade sont d'une
beauté plus sévère que celles des autres parties de l'Andalousie,
comme les Gaditanes cl les Sévillanes, par
exemple, qui ont moins de noblesse, mais plus de coquetterie
et plus de brio.
A côté de la promenade, sur la place du Carnpillo, se
trouvent les principaux cafés de la ville et le théâtre,
monument fort simple construit par les Français pendant
qu'ils occupaient Grenade : on y donne des drames,
des comédies, des zarzuelas ou opéras-comiques , sans
préjudice du baile nacional (ballet national), le complément
obligé du spectacle.
Sur la Pla:a de Baikn, contiguë au Campillo, s'élève
d'un côté une colonne commémorative érigée à l'acteur
espagnol Maiquez, par Julian Romea, Matilde Diez et
d'autres de ses camarades; de l'autre le monument expiatoire
élevé par r.A.yuntamiento, ou conseil municipal
de Grenade, à la mémoire de l'infortunée Mariana Pineda,
qu'on appelle la victime de la tyrannie royale; cette
dame, d'une naissance élevée et d'une beauté remarquable,
fut condamnée à mort en mai 1831, et monta
sur l'échafaud qu'on avait dressé sur la Plaza de Bailen
pour y subir le supplice du garrote. Son crime était d'avoir
possédé un drapeau constitutionnel, qu'on trouva
dans sa maison. On assure qu'elle était innocente du
prétendu crime qui lui était imputé, et que son dénonciateur,
un employé subalterne du nom de Pedroza,
qu'elle avait rebuté, avait traîtreusement caché chez elle
le
drapeau qui devait la perdre. Aujourd'hui, la victime
est devenue une héroïne, et tous les ans, le jour anniversaire
de sa mort, son sarcophage est porté en grande
pompe à la cathédrale, où un service solennel est célébré
à sa mémoire.
Le monument de Doiîa Mariana Pineda se compose
uniquement d'un piédestal : on devait lui élever une
statue de bronze, mais soit que les fonds aient manqué,
soit que l'enthousiasme politique se soit refioidi, le piédestal
attend toujours la slatue.
Rien n'est plus merveilleux que le spectacle dont on
jouit de la Carrera de las Angustias, quand on se dirige
vers le Salon, autre splendide alameda qui fait suite à la
Carrera : par-dessus la haute barrière de verdure formée
par les arbres du Salon, on voit s'élever, comme une
immense toile de fond, les cimes neigeuses de la Sierra
Nevada; il n'existe pas dans le monde entier une promenade
d'où l'on jouisse d'un pareil spectacle : vers le
soir, les sommets de l'immense montagne se revêtent
des couleurs les plus riches et les plus transparentes : le
manteau de neige qui la couvre, éclairé par les rayons
du soleil couchant, prend des tons de nacre et d'opale,
tandis que les anfractuosités restées dans l'ombre se colorent
d'un bleu aussi pur mais plus doux que le saphir.
Nous nous plaisions chaque soir h observer les jeux de
lumière et les changements incessants que le soleil, en
s'abaissant vers l'horizon, mêlait h ce sublime spectacle,
jusqu'à ce que, le jour finissant, les lumières et
les ombres disparussent dans les demi-teintes du crépuscule;
alors la Sierra Nevada ne nous apparaissait
plus que comme une grande masse d'un blanc uniforme,
dont les déchirures se découpaient nettement sur un ciel
rougeàlre parsemé de longs nuages violacés.