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LE TOUR DU MONDE 1864 viaje a españa

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338 LE TOUR DU MONDE.

fiévreux et redoutable où nul Européen n'avait encore

osé séjourner. A l'époque de sa visite, il restait à peine

de cette capitale, qu'il appelle Kurda, quelques pans de

murailles massives ayant l'ait partie du palais et quelquesunes

des portes de la cité. Prés de llatrapan, il a pu décrire

les sculptures du temple de Grameswara et donner

par là une idée exacte des progrès que l'art avait faits dans

ces contrées loinlainesà l'époque de leur prospérité. Plus

récemment encore, en 1859, un autre voyageur rencontrait

par hasard, au milieu de champs incultes, les

restes d'une grande ville (Bhuhanesan), qu'il représente

comme une autre Palmyre entourée de teraplesen ruine.

.\ six milles de là sont les grottes de Khandigiri, taillées

dans le roc et habitées jadis par une colonie d'ermites

bouddhistes. Ils y ont laissé des inscriptions en

langue pâli, qui flatentd'au momsdeuxmille ans; bref,

et pour ne pas insister sur ces détails d'archéologie, nul

doute ne peut exister malgré l'état actuel du pays sur

l'état de civilisation auquel il était parvenu et d'où l'ont

précipité les révolutions religieuses, les désastres de plusieurs

conquêtes successives, l'intelligente tyrannie des

maîtres qu'il a tour à tour subis, jusqu'au moment (1803)

où les .\nglais l'eulevèrent aux JNIahrattes qui en possédaient

la plus grande partie depuis 1740.

La prise de possession européenne fut d'abord trèslimitée.

Le gouvernement de Calcutta, traitant avec les

principaux chefs ou rajahs, stipula simplement un tribut

de cent vingt mille roupies environ , en échange duquel

il s'engageait à exécuter quelques travaux d'utilité publique.

Du reste, il s'abstenait avec soin d'intervenir

dans les rapports jusque-là établis entre les deux principales

races du pays, l'une conquise, celle des Khonds,

l'autre conquérante, celle des Ooryahs. Aussi longtemps

que les rajahs ooryahs des basses terres garderaient

sur les Ivlionds montagnards une autorité suffisante pour

les rendre indirectement tributaires de la Compagnie, il

ne pouvait convenir à celle-ci de hasarder ses soldats au

sein d'un paysmalconnu, dépourvu déroutes et dont les

marécages pestilentiels exhalent, sous l'ardent soleil du

Bengale, les miasmes les plus délétères. Malheureusement

l'administration des rajahs n'a rien de régulier;

leur ascendant traditionnel est à chaque instant remis en

question; ils constituent une classe abjecte malgré son

orgueil, étrangère à tout principe de gouvernement et

dont la dépravation toujours croissante ne permet pas

qu'une autorité régulière leur délègue ses pouvoirs. Dépourvus

de toute culture intellectuelle, exigeants sur

l'étiquette, tirant vanité d'une généalogie souvent m)thologique

et du blason barbare qui atteste leur antique

origine, ils naissent, ils sont élevés dans une atmosphère

de vice qui les énerve avantl'àge et les rend, en général,

incapables de contribuer en quoi que ce soit

à la prospérité

des malheureuses ])euj)lades sur lesquelles ils exercent

une- autorité souvent nominale, souvent contestée

avec succès, mais qui aboutit, partout où ils peuvent la

faire reconnaître , au despotisme le plus abominable et

lo plus avilissant.

C'est par l'intermédiaire de cette aristocratie corrompue

que le gouvernement anglais a longtemps voulu

exploiter les provinces soumises à sa domination, s'épargnant

ainsi les inconvénients et les périls d'une action

plus directe. Mais il ne lui est pas toujours permis de

maintenir un pareil état de choses, et des abus dont il

voudrait jiroliter se tournant à la lougue contre lui l'obligent

à y chercher remède. Voici généralement comme

les choses se passent. Ces rajahs auxquels on demande

un tribut lixe variant de mille à huit mille livres sterling,

sont rarement en état de le jjuyer. La tolérance de l'Etat

les laisse s'arriérer peu à peu, et plus la dette grossit,

plus ils deviennent insolvables. Le moment arrive où,

après d'inutiles instances, les agents du fisc pour li([uider

le passé prennent en mains l'administration financière

du pays; mais si les arrérages sont ti-oj) élevés, si l'on

désespère de combler la dette au moyen des revenus, le

domaine du rajah se vend pour régler le compte, et le

gouvernement, presque toujours, est forcé de se portvr

acquéreur. De là les révoltes qu'il faut réprimer. Lue

d'elles fut une véritable guerre : elle occupa les deux années

1836 et 1837, ])endant lesquelles mes troupes souffrirent

cruellement. Les fatigues, les jjrivations de toutes

sortes, jointes aux malsaines iniluences du climat, décimaient

nos rangs à peine effleurés par les flèches et la

hache des Khonds. En deux ou trois circonstances néanmoins

ceux-ci j)arvinrent à cerner et à surprendre quelques

faibles détachements égarésdans les défilés de leurs

montagnes. En pareil cas, on le pense bien, il n'y avait

])as de quartier à espérer, et nos malheureux soldats

étaient littéralement hachés en morceaux. Je regrette

d'avoir à dire que deux officiers européens, mal escortés,

périrent ainsi dans-un^ passe des ?taHahs on montagnes

d'Orissa.

La guerre finie et lorsqu'il fui question d'organiser le

pays définitivement annexé, on jugea bon d'utiliser l'expérience

que j'avais acquise pendant ces deux ans de

campagne, ma connaissance du pays, les relations que

je m'étais créées avec les principaux bissois ou chefs

de clans, et je fus nommé premier assistant du commissaire

en chef, ce ([ui me donnait une autorité à la fois

fiscale et judiciaire sur les pays de (jooinsur, Sooradali,

etc., mais plus particulièrement sur les Ivlionds ou

montagnards de ces diverses contrées.

Cette dernière partie de ma mission avait un objet

spécial fort étranger à la routine administrative et le

seul dont je puisse me permettre d'occuper aujourd'hui

mes lecteurs.

II

Dans le cours de la guerre qui venait de se terminer

une découverte singulière avait été faite. Les tribus du

Khoiidistan, placées depuis près de quaranls ans sous

l'autorité nominale de la (îrande-Rrelagne mais soustraites

en réalité à tout contrôle efficace, perpétuaient

chez elles un des rites les plus monstrueux et les plus

bizarres dont se soit Jamais avisé, dans ses déviations

infinies, cet instinct de l'àiue humaine qui se livre aux

inspirations du fanatisme et aux conseils aveugles de la

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