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322 LE TOUR DU MONDK.
Lrusquement à terre, et le voyageur, s'il n'est pas prévenu
ou s'il dort, court grand risque d'être jelé à bas,
la tête la première : autrement, il doit se craicponner à
la voilure.
Tel est le mode d'attelage, d'un usage immémorial
chez ces peuples primitils et aussi dangereux pour les
postillons, qui risquent d'être éventrés si leurs chevaux
faisaient un faux pas, qu'il est pénible pour ceux qu'on
fait
rouler ainsi.
Les Mongols reipis pour le service des voyageurs sont
bien montés et e.\cellents cavaliers.
Leurs chevaux petits, à la jambe nerveuse et à tous
crins, sont presque tous de couleur isabelle, avec de?
taches fauves et «ne raie noire sur le dos; cependant,
on en trouve quelques-uns qui sont alezans ou baibruns;
les chevaux blancs sont inconnus. Quelle que
soit la couleur de l'animal, il a toujours la raie du dos,
la crinière et la queue entièrement noires ; ce qui vien
drait à l'appui de l'opinion des naturalistes qui placent
l'origine du cheval sur les hauts plateaux de l'Asie centrale
; cette livrée des chevaux mongols doit être trèsvoisine
de leur couleur primitive, car elle rappelle dune
manière sensible celle des hémiones, des onagres et
des dziggetaïs , espèces sauvages analogues habitant
encore aujourd'hui les mêmes régions.
Quant aux cavaliers, ils portent une urande robe
boutonnée et descendant jusqu'aux pieds: cette robe,
fendue sur quatre côtés, forme quatre pans pouvant se
relever au moyen d'agrafes; par-dessus est une jaquette
courte en étofl'e doublée de peaux; la robe est
serrée à la taille par une ceinture de soie à laquelle
sont fixés à l'aide de rubans de même étoffe un briquet,
une blague, une pipe placée dans son étui et un
éventail.
Les jambes sont nues jusqu'aux genoux ; le haut de
la jambe est vêtu d'un caleçon en toile, les bottes sont
très-courtes, à pointes relevées comme des souliers à la
poulaine et très-évasées en haut de la tige : elles servent
de magasin au cavalier nomade ; il y serre tous les
petits objets nécessaires à ses longues pérégrinations.
Les Mongols ne portent pas d'éperons ni d'armes apparentes
; leur coifl'ure est un bonnet en peau de renard
enfoncé jusqu'aux yeux, ou pour les oflicicrs et les élégants
une calotte en drap de couleur finissant en pointe,
au lieu d'être arrondie comme celles des Chinois, avec
des revers en laine fine ou en fourrure.
Ils
ont des moustaches et portent tous leurs cheveux
quand ils sont hommes noirs, c'est-à-dire séculiers ; les
prêtres ou lamas, qui sont requis comme les autres pour
le service de postillons, sont comiùétement rasés ; ce
sont, en langage du pays, des hom7iic.': blains.
La selle des cavaliers mongols est en bois, très-petite,
irès-étroite et fortement creusée ;
elle est tenue par une
sangle en cuir ils ;
y placent un coussin pour être assis
plus haut.
Les chevaux n'ont pas de mors à gourmettes, mais un
bridon avec deux anneaux seulement qui correspondent
à la lanière servant de bride.
Les étriers sont très-larges et eu métal massif.
Le fouet est un court bâton avec une lanière en cuir
tressée: ils le portent fixé solidement au poignet droit.
Neuf charrettes ainsi attelées composaient le convoi
français. Mme de Baluseck en avait trois outre sa calèche.
En comptant les cavaliers de relais pour chaque voiture
et les officiers d'escorte, les voyageurs étaient toujours
accompagnés par une soixantaine de Mongols.
Tous les matins, deux ou trois heures avant le départ,
une véritable caravane de chameaux, portant à dos les
gros bagages et les caisses de provisions, se rendait à
petites journées à la station où on devait coucher.
Les chameaux des ]\Iongols appartiennent à l'espèce
à deux bosses qu'on rencontre aussi dans la Russie méridionale
et en Perse ; ils sont de très-grande taille, ont
le pelage très-long et très-sojcux et supportent admirablement
la rigueur des hivers dans les steppes ;
mais au
printemps ils perdent complètement leurs poils et restent
nus pendant un mois environ : c'est avec ces poils
que les indigènes fabriquent d'épaisses étoffes de feutre,
qui leur servent à faire des matelas, à couvwr leurs
tentes, et à une foule d'autres usages domestiques. Ces
animaux, qu'on accoutume de bonne heure à porter des
fardeaux, se mènent aisément par une cheville de l'ois
qui leur traverse la cloison du nez ; dans les caravaircs,
ils sont attachés ordinairement cinq ou six à la file
uns des autres; le dernier est porteur d'une clochette;
le chamelier dirige celui de tête par la corde attachée à
la cheville du nez, et tous les autres imitent aussitôt les
mouvements du chef défile: ainsi, quand il veut les faire
arrêter, le conducteur tire fortement la corde et crie :
Sok, soi!.'
les
les chameaux poussent un grognement et s'agenouillent;
quand il veut qu'ils se remettent en route,
il touche le chef de file au flanc avec le manche de son
fouet, prononce les mots: Toutch, toutch! et tous se relèvent
avec ensemble. Cependant, si les chameaux sont
très-dociles ils sont aussi très-ombrageux, et souvent il
résulte de graves accidents de circonstances très-naturelles
en apparence, mais qui ont suffi pour jeter la panique
dans la caravane. De quelle immense utilité d'ailleurs
est cet animal, grâce à la sobriété et à la force
duquel on peut traverser sans crainte de la famine les
immenses steppes du nord de l'Asie !
Les caisses que transportaient les chameaux de la
caravane qui suivait les voyageurs, avaient été garnies
de toutes les provisions qu'on avait pu se procurer: des
liqueurs et des vins, du liiscuit de mer et du riz, du
beurre salé et des conserves alimentaires de viandes et
de légumes en boites. Quand on rencontrait des nomades
avec leurs troupeaux, ce qui n'arrivait pas souvent,
ces ])asteurs consentaient facilement à vendre des
moutons, du laitage et des fromages de brebis et de
chamelle.
L'eau ne manque pas, surtout au printemps, et on
trouve des puits à toutes les stations du désert ;
en cas
de besoin, on s'était muni d'outrés mongoles, c'est-àdire
de paniers en feutre goudronné placés dans d'autres
paniers en osier : c'est ainsi qu'on transporte dans le