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LE TOUR DU MONDE 1864 viaje a españa

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250 LE TOUR DU MONDE.

ville, et aussi ceux de l'hôtel Schmilt, où je descends et

où l'on me donne une chambre ouverte sur la rue comme

une boutiqiii'.

Tout ce qui passe devant mes yeux est si nouveau pour

moi que je reste de longues heures devant ma porte,

assis dans mon fauteuil en roting, à considérer cette

vraie lanterne magique , aux images si originales et

si variées. Des groupes do coolies et de porteurs d'eau,

sommeillent sous les arbres; d'autres chargent et déchargent

les chalans et les barques venus du large ou de

l'intérieur ; des marchands ambulants m'offrent, non plus

comme à Batavia, des marchandises d'Europe, mais mille

curieux objets en corne, en écaille et en ivoire de cachalot,

des cigares, des étoffes du pays, et, ce qui me

charme encore plus, de magnifiques oiseaux des Moluques

et de Célèbes : ce sont des kakatoès blanc saumon

à huppe rouge sang; de gros perroquets violets et marron,

des perruches vertes et grises, des huppes blanches

h. crête jaune et surtout des lorris rouges à ailes bleues

ou vertes. A mon sens, ce dernier oiseau est le plus

beau de la race des perroquets, mais, pour se bien rendre

compte de la giàce de ses mouvements et de l'éclat de

son plumage, il faut le voir en vie et dans son pays :

Java est déjà un climat trop froid pour ce bel animal.

J'achetai deux magnifiques kakatoès blancs et une

huppe jaune : mais celle-ci reprit la clef des champs dès

que je l'eus débarrassée de l'anneau de coco qui la retenait

à son perchoir mobile. Quant à mes kakatoès,

une fois installés chez moi, ils me donnèrent une représentation

complète de leur savoir faire, se balançant,

se rengorgeant, s'e.\citant mutuellement; hérissant leurs

plumes, entr'ouvrant leurs ailes, déployant leurs belles

crêtes rouges, le tout avec les poses les plus comiques :

à la fin ils se pendirent par les pieds à leurs bâtons,

en jetant des cris qui, à Paris, feraient prendre les

armes à tout un quartier.

Dans la rue, va et vient une foule bizarre, mélangée

de Chinois, de Malais, d'habitants de Madura, mais où

domine l'élément javanais. Le sarhong aux longs plis,

la veste très-collante, et, sur la tête, une sorte d'abatjour,

recouvert de drap bleu passementé d'or et d'argent

et doublé de rouge, tel est le type du costume de ces

derniers. Tout au rebours de ce que j'ai vu à Batavia,

les étoiles des costumes sont ici très-peu voyantes ; le

bleu foncé, le rouge brun, le noir dominent. Les prêtres,

facilement reconnaissables à leur ample turban et

à leur veste de mousseline blanche, sont en bien plus

grand nombre qu'à Batavia.

Des palanquins circulent sans cesse dans cette foule.

Ceux des Chinois ressemblent assez aux niches de nos

chiens, sauf leurs panneaux h jour et les peintures or

et vert qui les décorent ; ceux des Javanais, beaucoup

plus simples, se composent d'un hamac suspendu à

une traverse de bambou et abrité des rayons du soleil

par un petit toit en natte de palmier ou de bambou. Du

reste. Chinois et Javanais se laissent porter là dedans

avec une aisance parfaite, comme nos aïeules dans leurs

chaises ù porteurs.

Sur la rivière

,

passent et repassent de longs bateaux

de charge dont la poupe et la proue sont gracieusement

recourbées, et que les mariniers dirigent au moyen des

avirons qui y sont fixés. Sur l'autre rive, le kampong

chinois forme le fond du tableau.

Ma première visite est pour la ville européenne, mais

hélas! quel désenchantement ! Soërabaija, ]jIus sain ([ue

Batavia, n'est pas un vaste jardin comme elle. C'est une

ville forte, où l'espace a été ménagé, où les maisons se

touchent. Plus de pelouses couleur d'émeraude, plus de

parcs spacieux, d'allées ombreuses, de frais ruisseaux,

de brillants cottages. Ici, les rues sont étroites et brûlantes;

une seule, la plus belle de la ville, est plantée

d'arbres et ornée de bas côtés, dans les fossés desquels

on voit courir et se cacher, quand on s'en approche, des

quantités de crabes de toutes gros.seurs. L'arsenal,

l'église, le palais du résident, le grand cercle militaire

la Concordia, sont les seuls édifices de Soërabaija; car

je ne veux pas parler du théâtre qui, à l'extériem- comme

à l'intérieur, a l'aspect d'un grenier à fourrage.

Traversons plutôt le grand pont qui se trouve juste en

face de la Résidence, et lançons-nous dans le pays

chinois.

Je retrouve d'abord dans ces rues marchandes la

folle animation des populations de l'extrême Orient ; j'y

admire ces intrépides cuisiniers ambulants, toujours

exposés aux feux du soleil et à celui de leurs fourneaux,

et toujours prêts à servir à leur clientèle le itcng-deng',

séché par les rayons de l'un et réchauffé au moyen de

l'autre (voy. p. 249).

Les marchands chinois de Soërabaija sont spécialement

approvisionnés d'objets à l'usage des indigènes :

on trouve chez eux moins d'articles de Chine qu'à Batavia;

mais, en revanche, ils vendent les armes elles indiennes

les plus rares et les plus intéressantes, et des

collections de bijoux ciselés avec un goût exquis, et introuvables

partout ailleurs. Car, il faut le dire, armuriers

et orfèvres indigènes ne travaillent qu'à leur loisir,

sur commande et avec une désespérante lenteur.

A droite du quartier marchand se trouvent les maisons

des Chinois riches ;

je passe des boutiques aux

hôtels, de la rue Saint-Denis au faubourg Saint-Germain.

Ici tout est calme et silencieux. Les habitations

sont entourées de galeries, ornées de piliers de bois

laqué, brun et or, et rehaussés des tons aimés des Chinois.

Partout, dans de grands vases de faïence étincelants

au soleil, poussent des fleurs admirables, ou mieux

encore, des arbres nains, palmiers, bambous ou orangers,

le suprême de l'art de l'horticulteur. Les murailles,

les galeries supérieures sont de splendides broderies de

bois et de pierre, où la sculpture peinte et les stucs les

plus parfaits se marient aux tons merveilleux de la palette

chinoise. De temps en temps, de jolis enfants, la

tête rasée, la natte naissante, et vêtus tous de soie et

d'or, viennent animer ces délicieuses architectures et

compléter ainsi le tableau.

I. Viaridn

solo il.

l'u tu iiiuit

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