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LE TOUR DU MONDE 1864 viaje a españa

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184 LE TOUR DU MONDE.

j'avais pris mon albtim, dans l'espoir d'utiliser une

de ses paires, apercevant devant moi un de ces jolis

palmiers du genre Bactris, pourvu de son rêfrime de

drupes mi-partie noir et orange, j'entrepris de le dessiner.

Pendant que je m'absorbais dans mon iruvre,

la terre trembla sons mes pieds. Un volcan semblait

y mugir. D'un bond je me levai. Les secousses du sol

devenaient de plus en plus violentes. Les oscillations

paraissaient se diriger du sud au nord. Quant au bruit,

c'était comme le galop lointain d'un escadron de cavalerie.

Tout à coup, et comme mes regards interrogeaient

avec anxiété l'ombre du taillis, une troupe, ou

plutôi une arrai'e de pécaris, ces sangliers américains.

déboucbèrent comme la foudre à vingt pas de moi. Je

cherchai de l'œil un coin pour m'y tapir , un arbre

pour y grimper et n'apercevant à ma portée que des

lianes pendantes, je les saisis et m'enlevai à la force des

poignets comme un professeur de voltige. Le formidable

troupeau passa ventre à terre, laissant après lui une

odeur infecte. Je ne sus jamais quel effet j'avais pu

produire sur les sangliers, ainsi suspendu par les mains

et vêtu d'une robe rouge , mais au bouleversement de

mes facultés, je jugeai que ces animaux m'avaient fait

une peur atroce.

Derrière le bataillon des vétérans qui arrosaient

l'herbe de gouttes pourpres, se pressait une escouade

de marcassins. Ces bestioles , Je groin au vent et la

queue en tire -bouchon, galopant sur les traces des

grands parents avec un empressement extraordinaire,

avaient quelque chose de si grotesque, qu'en toute autre

occasion je n'eusse pas manqué d'en rire; mais ma

situation m'en empêcha. Les Conibos, hurlant, jurant,

riant, couraient après ces marcassins et les serraient

de si près, qu'ils réussirent à mettre la main sur deux

traînards. Toute celte scène avait duré cinq minutes.

J'eus enfin le mot de l'énigme. Le bruit sourd que nous

avions entendu, était causé par ces pécaris qui fouillaient

la terre à l'entour d'un arbre pour déchausser ses racines

et s'en repaitre; leur groin et leurs défenses faisaient

l'office du pic et de la bêche. Les Conibos avaient

interrompu à coups de flèches cette besogne de mineur.

Quelques animaux avaient été blessés mortellement

peut-être, mais aucun d'eux n'était resté sur le carreau.

Notre pirogue rentra dans le lit du courant. Les

Conibos s'escrimant de la rame pour regagner le temps

perdu, atteignirent après une heure d'un violent exercice

leurs compagnons à qui ils racontèrent leurs

prouesses. Les jeunes pécaris, dépouilles opimes du

combat, figurèrent le

soir même dans un auto-da-fé, à

l'issue duquel on nous les servit parfaitement rôtis sur

un plat de feuilles.

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