LE TOUR DU MONDE 1864 viaje a españa

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,132 LE TOUR DU MONDE.phes de considérer le Tunguragjia ou Maraiion, issu dulac de Lauricocha, dans la Cordillère de Bombon, commele tronc de l'Amazone'. Puis, cette opinion fut abandonnéeet les cartologues revendiquèrent pour la rivièreUcayali , continuation de l'Apu-Paro, l'honneur de cettepaternité. Seulement, comme ils n'étaient pas bien d'accordsur la naissance de l'Ucajali lui-même, que lesuns assuraient être notre Quillabamba-Santa-Ana, etles autres l'Apurimac , on ne sut trop d'abord à laquelledes deux rivières on devait rattaclier l'Amazone. Letemps finit par édaircir tous les doutes à cet égard.Aujourd'hui l'Apurimac ou Tampu est définitivementreconnu pour le tronc véritable et le ]ière du roi desfleuves. A ceu.\ qui demanderaient la raison de cettepréférence, nous répondrons que le cours de l'Apurimacest plus long de vingt-cinq lieues que celui du Quillabamba-Santa-Ana,et qu'il est navigable, ainsi que certainsde ses affluents, mais seulement pour des piroguessous des latitudes où le Quillabamba-Santa-Ana n'estencore qu'un ruisseau-torrent encombré de pierres.Les rives de l'Apurimac et celles de la plupart de sesaffluents dans la région du Pajonal, furent explorées debonne heure par des moines et des jésuites, qui avaientréuni dans les missions du Gerro de la Sal, de Jésus-Maria, de SanTadeode los Autos, etc., etc., comprenantune soixantaine de villages ,quelques milliers de catéchumènesde la nation .\ntis, divisée, comme nous l'avonsdit, en une douzaine de tribus. Pendant une périoded'un siècle et demi (cent cinquante-cinq ans) ces religieuxanimés d'un saint zèle, catéchisèrent aux dépens deleur vie , les hordes barbares de la région du Pajonal,aujourd'hui éteintes ainsi que les missions et les villagesqu'on avait fondés à leur intention. Les bibliothèquesdes couvents du Pérou abondent en relations impriméeset manuscrites qui traitent au long de ces prédicationset de ces massacres. En 1635, le moine Ximenez inscritSource de la rivière Apurimac.son nom en tête de ce martyrologe que ferme en 1790 lepère Mateo Menendez'.Pour compléter cette notice sur l'.Apurimac nous voudrionspouvoir annoncer aux statisticiens qui voient l'avenirde l'iiumanité dans les débouchés commerciaux des1. CeUe erreur naquit des suites d un procès intenté en KiSVpar les franciscains de Lima aux jésuites de Quito, au sujet duvillage ou mission de San Miguel des Conilios, que les derniersréclamaient comme leur propriété légitime. l'our baser le jugementqu'elle était appelée à rendre dans l'affaire, (o Heal Audimciade Quito demanda une carte des lieux, qui fut dressée par leP. Samuel Fritz, de la Compagnie de Jésus. Le crédit dont lejésuites jouissaient à cette époque dans le monde savant fut causequ'on adopta, sans discussion, son tracé orographique, où leTunguragua était considéré comme le tronc de l'Amazone. Cetteerreur fut reproduite pendant près d'un siècle et demi par noscartographes européens.2. C'est de la seule région du Pajonal que nous entendons parlerici et non do la contrée limitrophe, si improprement appeléePampa del Sacrajnento, et qui, elle aussi, a eu, comme sa voisine,ses apôtres et ses martyrs.peuples, que cette rivière dont ils se préoccupent depuislongtemps est une voie tracée par la nature pour fairecommuniquer la frontière du Brésil avec l'intérieur duPérou. Mais celte théorie de cabinet, prouée par certainstraités de géographie, est irréalisable dans la |)ratique àcause de la profondeur variable de l'.-Vpu-Paro, des rapides,des écucils, des bas-fonds et des dépôts alluvionnairesdont il est littéralement semé; à moins que lesvolcans voisins faisant l'office de pionniers, ne viennenten aide au commerce et à l'industrie, et par des commotionset des déchirements, ne dégagent, déblayent, élargissentet creusent celte grande voie pour la mettre enétat d'être parcourue, l'imagination recule devant lestravaux ])réi)aratoires qu'il faudrait entreprendre avantd'arriver à constater son utilité '.1. Cette voie transitable, dont se préoccupent les voyageurs et lesgéographes, est trouvée depuis longtemps. La nature a pris soinde la tracer par les rivières Pachitea, Pozuzo et Mayro, qui con-

,LE TOUR DU MONDE. 133Disons donc un adieu définitif à l'Apurimac et satisfaitd'avoir relevé correctement son cours, ne nous occuponspas plus longtemps desprétendus services qu'il estappelé à rendre dans l'avenir,aux négociants eu quinquinaet en salsepareille.Durant toute la matinée,nous naviguâmes au milieud'un véritable archipel formépar des amas de sable et decailloux qui divisaient en unemultitude de canaux, la rivièrefort large à cet endroit, maissans profondeur. Plusieurs foisilnous arriva de nous mettre àl'eau pour alléger notre piroguedont la coque froissait avecun bruit rauque les cailloux dufond; d'énormes troncs d'arbres,tombés de l'une ou l'autrerive, étaient venus, pousséspar le courant, s'échouerà l'entrée des canaux et enrendaient la navigation sinonpérilleuse, du moins très-fatigante.A midi nous dépassions ledernier îlot pierreux de cet archipel,auquel succédait uneîleboisée dont l'extrémité s'allaitperdre derrière une courbede la rivière. Un soleil de feudardait ses rayons sur nos tûtes.L'Apu-Paro semblait roulerdes flots d'argent liquideet nos yeux éblouis cherchaientsur sa surface lumineuse,le sillage, hélas ! effacé,des pirogues de nos compagnons.A l'inquiétude de n'avoirdécouvert encore aucunede leurs traces, se joignaientles sollicitations de plus enplus pressantes de notre estomac,leurré plutôt que satisfaitpar les sardines de la veille,et demandant de ce ton brutalqui n'appartient qu'à luiune nourriture solide.Comme nous approchionsde l'île boisée que nos Chonduisentà la ville de Huanuco, et decelle-ci, au cœur de la Sierra. Lesmissionnaires du collège d'Ocopa,qui Gyneriumvont et viennent de ce séminaireaux missions de Sarayacu et de Ïierra-Blanca, sur l'Ucayali, donnentà cet égard des renseignements précis. « Du cerro de Pasco,distant de Liniade trente lieues, disent-ils, on compte quinze lieuestaquiros appelaient Santa-Rosa, d'effroyables cris retentirentdans les fourrés. Une douzaine d'indigènes quiguettaient apparemment notrearrivée à en juger par la satisfactionque témoignèrent nosrameurs en les apercevant, sejetèrent dans une pirogue quivola sous l'eifort de leurs rameset vinrent nous prendre àla remorque. En quelques minutes,nous eijmes atteint lapartie de l'île où nos compagnonsavaient trouvé depuis laveille, bon souper, bon gîte etnombre de gens avides de couteauxet hameçons.L'accueil que nous fit la populationde cette île qui comptaitsoixante et une personnesy compris les femmes et lesenfants , fut aussi empresséque celui du comte de la- Blanche-Épinefut superbement dédaigneux.A peine ce noblemonsieur nous eut-ilaperçusqu'il pivota sur ses talons etnous tourna le dos, comme sinous eussions apporté quelqueépidémie. De sa façon d'agir,j'augurai que notre absenceprolongée avait dû l'intriguer,puis l'inquiéter et qu'il enavait tiré la conclusion logique,que nous ne nous étionsarrêtés en chemin que pourmachiner un complot ténébreuxcontre sa personne. Desinsinuations vagues de l'aidenaturalistefaisant fonctions desecrétaire, nous confirmèrentdans notre opinion.L'idée que le chef de lacommission française avait punous prendre pour des conspirateurs,aiguisant dans l'ombreleurs couteaux de pacotilleà défaut du poignard classique,ne nous empêcha pas de fêterle poisson bouilli à l'eau etsans sel ni poivre, qu'on nousservit avec quelques racines.Chacun plongeant la main dansjusqu'à la rivière Mayro et quatorzelieues de cette rivière à l'anciennemission du Pozuzo ;total, vingt-neufcharoïdeslieues. En ouvrant un chemin duMayro au Pozuzo et jetant un pont sur cette dernière rivière, onéviterait de faire un détour par la cité de Huanuco e» l'on abrégeraitde quarante-neuf lieues le voyage d'Ocopa à Sarayacu. »

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LE TOUR DU MONDE. 133

Disons donc un adieu définitif à l'Apurimac et satisfait

d'avoir relevé correctement son cours, ne nous occupons

pas plus longtemps des

prétendus services qu'il est

appelé à rendre dans l'avenir,

aux négociants eu quinquina

et en salsepareille.

Durant toute la matinée,

nous naviguâmes au milieu

d'un véritable archipel formé

par des amas de sable et de

cailloux qui divisaient en une

multitude de canaux, la rivière

fort large à cet endroit, mais

sans profondeur. Plusieurs fois

il

nous arriva de nous mettre à

l'eau pour alléger notre pirogue

dont la coque froissait avec

un bruit rauque les cailloux du

fond; d'énormes troncs d'arbres,

tombés de l'une ou l'autre

rive, étaient venus, poussés

par le courant, s'échouer

à l'entrée des canaux et en

rendaient la navigation sinon

périlleuse, du moins très-fatigante.

A midi nous dépassions le

dernier îlot pierreux de cet archipel,

auquel succédait une

île

boisée dont l'extrémité s'allait

perdre derrière une courbe

de la rivière. Un soleil de feu

dardait ses rayons sur nos tûtes.

L'Apu-Paro semblait rouler

des flots d'argent liquide

et nos yeux éblouis cherchaient

sur sa surface lumineuse,

le sillage, hélas ! effacé,

des pirogues de nos compagnons.

A l'inquiétude de n'avoir

découvert encore aucune

de leurs traces, se joignaient

les sollicitations de plus en

plus pressantes de notre estomac,

leurré plutôt que satisfait

par les sardines de la veille,

et demandant de ce ton brutal

qui n'appartient qu'à lui

une nourriture solide.

Comme nous approchions

de l'île boisée que nos Chonduisent

à la ville de Huanuco, et de

celle-ci, au cœur de la Sierra. Les

missionnaires du collège d'Ocopa

,

qui Gynerium

vont et viennent de ce séminaire

aux missions de Sarayacu et de Ïierra-Blanca, sur l'Ucayali, donnent

à cet égard des renseignements précis. « Du cerro de Pasco,

distant de Liniade trente lieues, disent-ils, on compte quinze lieues

taquiros appelaient Santa-Rosa, d'effroyables cris retentirent

dans les fourrés. Une douzaine d'indigènes qui

guettaient apparemment notre

arrivée à en juger par la satisfaction

que témoignèrent nos

rameurs en les apercevant, se

jetèrent dans une pirogue qui

vola sous l'eifort de leurs rames

et vinrent nous prendre à

la remorque. En quelques minutes,

nous eijmes atteint la

partie de l'île où nos compagnons

avaient trouvé depuis la

veille, bon souper, bon gîte et

nombre de gens avides de couteaux

et hameçons.

L'accueil que nous fit la population

de cette île qui comptait

soixante et une personnes

y compris les femmes et les

enfants , fut aussi empressé

que celui du comte de la- Blanche-Épine

fut superbement dédaigneux.

A peine ce noble

monsieur nous eut-il

aperçus

qu'il pivota sur ses talons et

nous tourna le dos, comme si

nous eussions apporté quelque

épidémie. De sa façon d'agir,

j'augurai que notre absence

prolongée avait dû l'intriguer,

puis l'inquiéter et qu'il en

avait tiré la conclusion logique,

que nous ne nous étions

arrêtés en chemin que pour

machiner un complot ténébreux

contre sa personne. Des

insinuations vagues de l'aidenaturaliste

faisant fonctions de

secrétaire, nous confirmèrent

dans notre opinion.

L'idée que le chef de la

commission française avait pu

nous prendre pour des conspirateurs,

aiguisant dans l'ombre

leurs couteaux de pacotille

à défaut du poignard classique,

ne nous empêcha pas de fêter

le poisson bouilli à l'eau et

sans sel ni poivre, qu'on nous

servit avec quelques racines.

Chacun plongeant la main dans

jusqu'à la rivière Mayro et quatorze

lieues de cette rivière à l'ancienne

mission du Pozuzo ;

total, vingt-neuf

charoïdes

lieues. En ouvrant un chemin du

Mayro au Pozuzo et jetant un pont sur cette dernière rivière, on

éviterait de faire un détour par la cité de Huanuco e» l'on abrégerait

de quarante-neuf lieues le voyage d'Ocopa à Sarayacu. »

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