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LE TOUR DU MONDE 1864 viaje a españa

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94 Li: TOC H iJi; .M().\])i;.

mestre. Cette feuille, imprimée en l'onue de Ijroclnire,

est ua carré lonj: qui a uue douzaine de pages et dont la

couverture porte l'image du philosophe ]\Ien-tseu (voy.

p. 92). On y trouve un aperçu de toutes les afl'aires publiques

et des principaux événements, les placets et les

mémoires adressés à l'empereur, ses décrets, les édits

des vice-rois des provinces , les fastes judiciaires et les

lettres de grâce, des tarifs de douane, un courrier de la

cour, les nouvelles diverses, incendies, crimes, etc., enfin

les événements lieureu.\ ou malheureux de la guerre

contre les rebelles Tai-ping. On y convient même d'avoir

été battu , franchise qu'il est bon de signaler aux journaux

ofliciels de l'Europe et de l'Amérique.

Les Chinois attachent un respect traditionnel et (juasi

religieux à la conservation des papiers imprimés et

écrits; on les recueille soigneusement et on les brûle

quand on les a lus, afin de les dérober à toute profanation.

On prétend même que des sociétés se sont formées

qui payent des porteurs chargés d'aller de rue en rue

avec d'énormes corbeilles pour en ramasser tous les

ragments. Ces chiffonniers d'un nouveau genre reçoivent

une prime pour le sauvetage des épaves de la pensée

humaine.

Les arts, comme la littérature, ont été poussés assez

loin dans le sens utilitaire et industriel. L'art plastique,

le beau absolu sont des idées incomprises.

Si l'on a pu reconnaître la supériorité avec laquelle

les Chinois ont traité l'économie sociale, la philosophie,

l'histoire, toutes les sciences morales et politiques basées

sur l'expérience et le raisonnement ; il faut bien

avouer aussi la rareté des œuvres purement littéraires.

Il ne faut point en conclure qu'il n'y ait pas en

Chine comme en tout pays civilisé abondance de poètes,

de romanciers et d'auteurs dramatiques, mais leurs

productions peu estimées et peu rétribuées sont éphémères

; on fabrique une ode , une pièce de circonstance

; on la récite, on la joue au milieu des applaudissements;

le lendemain il n'en reste plus rien'.

Ce n'est pas que le goût des reiirésentalions théâtrales

ne soit très-vif dans la nation, mais on rougirait

d'attacher une trop grande importance à un divertissement

futile. Les directeurs des troupes sont le plus souvent

les fabricants des pièces qu'ils font représenter, ou

du moins ils les modifient suivant les exigences des acteurs

et la convenance des coslumes. Il n'existe pas de

théâtres permanents, ni autorisés à Pékin : le gouvernement

en tolère la construction provisoire sur les places

de la ville pour un temps limité à l'époque des fêtes publiques,

mais il y eu a dans beaucoup de maisons de

thé analogues à nos cafés chantants, et chez tous les gens

riches qui, chaque fois qu'ils ont loué une troupe d'acteurs

pour se réjouir ou pour célébrer un anniversaire

de famille, ont soin dans un but de popularité de laisser

entrer librement la foule dans la partie de leur maison

réservée au théâtre.

1. Voir pour la litlfralure chinoise les travaux et les traductions

remarquables tl'.Micl do Rémiisal. de Stanislas Julien, de

Pauthier,

etc.

Je viens d'assister, dit M. Trêves, à une représentation

théâtrale donnée par le secrétaire d'Etat Tcliount]-

louen dans le jardin de son palais de la ville Tartare en

l'honneur de la nouvelle année. Le théâtre ressemble à

ceux que l'on élève h Paris sur l'esplanade des Invalides,

lors de la fête de reuq)ereur : c'est un grand quadrilatère

de la forme d'un temple grec soutenu de chaque

côté par quatre colonnes rubannées de bleu de

ciel, de jaune d'or et d'éoarlate, et dont le fronton est

surchargé de sculptures et d'ornements. La scène beaucoup

plus large que profouile est une plate-forme parquetée

et surélevée de deux mètres environ. Un vaste

paravent la sépare des coulisses situées à l'arrière où

les acteurs s'habillent et se fardent. Les décors n'existent

pas; il y a seulement deux ou trois chaises et un

tapis. La salle circulaire, et très-vaste en proportion de

la scène, est dallée sur le devant en pierre de marbre ;

elle est à ciel ouvert, et les spectateurs n'ont d'autre

abri que les grands arbres qui l'ombragent.

« Nous prenons place sur une estrade réservée, élevée

ex])rès pour nous en face de la scène; des deux côtés

sont des loges grillées avec des jalousies en bambou

d'où les femmes de notre hôle et celles de ses invités

assistent au spectacle ; de peur qu'on ne les entrevoie,

elles se sont voilé la figure avec un filet de soie à réseau.

Les visiteurs d'un rang moins élevé sont assis au

premier rang sur des chaises disposées autour de petites

tables pouvant contenir quatre ou cinq personnes. Derrière

eux on voit onduler comme une fourmilière de

têtes humaines : c'est la foule des spectateurs populaires

qui se pressent et s'entassent pour jouir du spectacle

qu'ils doivent à la munificence de l'illustre Tchounglouen.

A Pékin comme ù Paris, les gens du peuple affrontent

volontiers pour leur plaisir la fatigue de se

tenir debout et sans point d'appui pendant des heures

entières. Quelques bons pères de famille ont deux ou

trois enfants juchés sur leur dos et sur leurs épaules,

mais je n'aperçois aucune femme.

« Cependant, sur un signe parti de notre tribune,

l'orchestre placé sur un des côtés de la scène et composé

de deux flûtes, d'un tambour et d'une harpe, attaque un

charivari qui tient lieu d'ouverture; puis le paravent

s'écarte, les acteurs paraissent tous ensemble en costume

de ville, et, après s'élre inclinés si profondément que

leur front touche la terre, ils détachent près de la rampe

le chef de la troupe qui vient nous réciter le répertoire

pompeux des œuvres dramatiques qu'ils vont représenter.

Il parait que nous allons voir un drame tragique représentant

la conquête de la Chine par les Tartares, et une

fable en action, le mariage de l'Océan et de la Terre.

« La première pièce débute par l'entrée subite d'un

officier en costume du temps des JMing suivi de deux

eslafiers : il entame un long récitatif chanté avec accompagnement

de voltige et de tours de force qui consistent

yjar exemple à tenir sa lance en équilibre sur le bout

de son nez; c'est l'exposition! Peu k peu l'action dramatique

se déroule : l'officier sort, et est remplacé par

la princesse el ses suivantes ;

cette belle personne qui

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