Spectrum_03_2021
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DOSSIER
Texte Eleonora Bobbia
Photo Les Diptik
Les Diptik : le duo de clowns du
quatrième mur
Céline Rey, la moitié de cet original Diptyque gagnant du
prix suisse de la scène 2020, se raconte à Spectrum.
iptyque : terme utilisé en peinture ou
D en écriture pour désigner une œuvre
d’art qui a deux parties qui sont complémentaires.
À composer le diptyque sont
Céline Rey et David Melendy. Céline Rey
nous raconte que pendant ses études en
sciences de l’éducation à l’Université de Fribourg,
elle a décidé d’approfondir sa passion
pour le théâtre en suivant un cours
pendant un an auprès du Conservatoire
de Fribourg. C’est durant
cette expérience que ses doutes
disparaissent et qu’elle développe
une passion pour la scène : une
nouvelle porte s’ouvre sur son
avenir professionnel. Elle étudie à
l’« Accademia Dimitri » au Tessin.
C’est pendant ses études qu’elle
fait la connaissance de David Melendy.
Céline Rey nous raconte :
« David et moi, nous étions dans
la même classe. Après l’école, nous
nous sommes proposé·e·s pour
travailler entant que clown au
Cirque Monti. Chacun a fait sa demande
tout·e seul·e de son côté, et
c’est bien le cirque qui nous a proposé
de travailler ensemble. Nous
avons alors élaboré notre premier
spectacle de clown. Tout s’est bien
passé, mais nous n’étions pas certain·e·s de
continuer. Le cirque nous a ensuite demandé
de participer au Young Stage International
Festival à Bâle. Ce dernier nous a ouvert
des portes et nous avons décidé de créer
notre propre compagnie en 2015 ».
Pourquoi « clown » ?
Céline Rey nous explique qu’elle était toujours
attirée par le monde de la poésie et
qu’elle se passionnait notamment des rires
qui témoignent les spectacles du clown.
Pendant l’école Dimitri, où des petites
scènes de clowns sont parfois à l’ordre du
jour, elle décide de s’investir plus profondément
dans ce monde. David Melendy, de son
côté, étudiant alors en Californie, avait déjà
plus d’expérience avec la profession. Le métier
de clown est très vaste aujourd’hui, mais
la plupart, à la différence de duo suisse, n’ont
ni un texte, ni sont munis d’un quatrième
mur – création d’un espace où le publique
n’existe pas, comme l’explique Céline Rey :
« Au début, on faisait des spectacles où il n’y
avait pas de texte avec des mots inventés.
Avec le temps, ça nous manquait de raconter
une histoire et de partir dans un monde plus
farfelu ! C’est pour cette raison que l’on a
commencé à rajouter du texte. Le clown est
à la recherche d’un état. On ne pense plus
de façon conventionnelle, on cherche une liberté,
celle de faire des choses inattendues,
nulles ! On doit rechercher une certaine fragilité,
une authenticité où l’on essaye de ne
plus avoir des barrières de protection entre
nous et le public ».
Les défis du Covid-19
L’incertitude de Covid-19 a aussi affecté le
monde du théâtre, lequel s’est trouvé à annuler
momentanément tout spectacle. Lors du
premier confinement en mars 2020, le duo
n’a pas trop ressenti de la situation, puisqu’il
n’avait pas de spectacle programmé. La situation
pouvait donc être vue comme une
opportunité de prendre une petite pause.
L’incertitude de la situation et le changement
soudain de décisions par rapport à la
fermeture du théâtre – fermeture, ouverture
pour un maximum de 50 personnes, puis
re-fermeture – étaient facteurs
de difficultés non seulement au
niveau organisationnel, mais aussi
moralement : « Entre octobre
et novembre on a eu beaucoup de
spectacles annulés. La partie administrative
pour les remboursements
était difficile en soi : c’était
parfois au théâtre de rembourser,
parfois au canton. Je pense que
ce qui était difficile moralement,
c’était bien de tenir le coup face
à l’incertitude du lendemain. En
septembre de cette année, les
théâtres seront vraisemblablement
de nouveau pleins à craquer.
Notre création qui va être mise en
scène en septembre aurait dû être
une tournée, mais je crois que cela
va être impossible à cause de tous
les reports. La pandémie, pour le
théâtre en général, aura causé une
situation qui va être longue à récupérer »,
nous explique Céline Rey.
La situation paradoxale du théâtre est
qu’après plusieurs années et après la mise
en scène d’un spectacle, il y a toujours une
certaine anxiété, les jambes qui tremblent, la
peur de se montrer, comme le partage Céline
Rey : « C’est paradoxal, avant de monter
en scène, je me sens mal, et ensuite, à la fin
de la représentation, je me sens bien. C’est
cette situation, où l’on se demande comment
l’on peut être si con à se mettre dans
cette situation, qui nous rend vivant·e ». P
16 spectrum 05.21