MOHAMMED VI : LA DIPLOMATIE GAGNANTE
ENTRETIENle Roi a d’ailleurs rappelé la positionmarocaine en s’entretenant avec lePrésident américain. C’est dire quele Maroc est logique avec lui-même.Quand on accepte la solution à deuxÉtats, c’est que l’on reconnaît de factoces deux États. C’est celui qui affirmequ’il est « pour la solution à deuxÉtats, mais…», qui doit alors clarifiersa position.Je rappelle aussi que les relationsmaroco-israéliennes ne datent pasd’aujourd’hui. Il y avait déjà dansles années 1990 un bureau de liaisonsitué au Boulevard Mehdi Ben Barkaà Rabat. Nous avons aussi notreBureau en Israël qui n’a d’ailleursjamais été abandonné même s’il nefonctionnait pas. Et qui demandeles reprises des relations ? ce sontles Palestiniens eux-mêmes. J’ai descollègues dans les Affaires étrangèresqui avaient travaillé dans le bureaude liaison en Israël. Ils me rapportentque c’étaient des Palestiniens quiy venaient le plus souvent poursolliciter des interventions. L’unvenait trouver de l’appui pourrécupérer sa charrette confisquée surlaquelle il vendait des marchandises,l’autre voulait rouvrir sa boutiquefrappée d’une décision de fermeture...Les éléments que constituent ladiaspora judéo-marocaine, le bureaude liaison et la communication avecIsraël ont été utilisés par le Marocdepuis les années 1970 au service dela paix.Le Maroc n’a pas d’intérêt particulierau Moyen-Orient. Il n’a ni terrescolonisées ni frontières communes,mais a cette particularité de disposerde canaux qu’il est le seul à avoir.Cette particularité émane de saconstitution, votée par les Marocains,qui consacre le judaïsme commepartie intégrante de l’identitémarocaine. Au Moyen-Orient, quandquelqu’un croise un juif, à 99% il croitcroiser un Israélien. En revanche,quand un Marocain croise un juif, ilse demande d’abord s’il ne s’agit pasd’un Marocain. L’autre particularitéde notre pays est l’institution deQuand on accepte lasolution à deux États,c’est que l’on reconnaît defacto ces deux États. C’estcelui qui affirme qu’il est« pour la solution à deuxÉtats, mais…», qui doitalors clarifier sa position.la Commanderie des croyants.Pourquoi les Israéliens accrochentdes effigies de S.M le Roi sur leursmurs ? Pourquoi il y eu une si grandeliesse dans les rues israéliennesaprès l’annonce de la reprise desrelations du Maroc avec Israël ? C’estparce qu’il s’agit d’une relation bienenracinée entre le Souverain et cettediaspora.Tout ceci ne vous empêche pasde refuser l’usage du mot «normalisation »…Malheureusement, les chaînessatellitaires ont métamorphosé notrelexique. Ce terme est moyen-oriental.Ailleurs, quand un Arabe salut unIsraélien, on crie à la normalisation.Ici, on ne peut pas en dire de mêmepuisque cet Israélien qu’on salut peutavoir été un voisin ou un ami quivivait au Maroc, son pays. D’ailleurs,quand il rentre au bercail, c’est avecun passeport marocain qu’il le fait.En cela, il n’est en rien différenddu Marocain qui revient de Suèdeou d’autres pays. D’ailleurs, 70.000Israéliens ont visité le Maroc l’annéedernière. Les Marocains d’ici lesont côtoyés et les ont bien accueillis.J’insiste, il y a une particularitémarocaine qu’on doit veiller à ne pasdissoudre dans le contexte moyenoriental.Vous le disiez, il est impossible decouper le cordon ombilical qui reliela diaspora judéo-marocaine auMaroc qui est aussi leur pays…Et tout ceci, je le rappelle, au servicede la paix et donc de la causepalestinienne.Le Maroc pourrait-il jouer un rôledans un nouveau processus de paixisraélo-palestinien ?Le Maroc a toujours œuvré pourla paix à travers les outils dontje viens de parler. Ils ont étémomentanément inutilisés, mais ilsvont se mettre à refonctionner. Je lerépète, le Maroc n’a nul autre intérêtque servir la paix. Il faut savoir queles principales phases qu’a connuesla cause palestinienne se sontdéroulées au Maroc, justement euégard à la particularité que je viensd’évoquer. Et on ne peut absolumentpas œuvrer pour la paix sans avoirdes canaux de communication et leMaroc en dispose naturellement.Nous avons constaté, depuis il y adéjà un an, qu’au moins au niveaudes dirigeants palestiniens, il y aune conviction quant à la justessede la position marocaine. La partiedirectement concernée est doncréceptive alors que d’autres s’agitent.L’Autorité palestinienne acceptedonc la position marocaine, selonvous ?Les responsables palestinienscomprennent bien la positionmarocaine et ont confiance enle Maroc et en son Souverain.D’ailleurs S.M le Roi MohammedVI a veillé à s’entretenir avec lePrésident de l’Autorité palestinienne,Abou Mazen, directement après sonentretien avec le Président américainpour tout lui dire. Le Souveraina rassuré le dirigeant palestinienque le Maroc reste fidèle à la causepalestinienne et que sa positionn’obéit à aucune surenchère.D’ailleurs, le Maroc n’a fait queréactiver des canaux que l’Autoritépalestinienne avait approuvés dansles années 1990.Au stade actuel, le Marocpourrait-il se faire représenter par14 L’Observateur Du 18 au 24 décembre 2020
un ambassadeur en Israël etvice versa ?L’essentiel aujourd’hui est que leMaroc va appliquer les engagementsqu’il a pris. Si le Maroc voulaiteffectuer une quelconque nouvelleaction, il l’aurait annoncé.Tout ce qui est fait est annoncépubliquement, il n’y a rien qui sepasse dans les coulisses ?Il n’y a rien qui est fait en catimini.Ce qui est annoncé, c’est ce quiexiste et c’est ce qui sera appliqué.Il y a des milliers de Marocains quiviennent d’Israël pour célébrer auMaroc certains évènements religieuxou participer à d’autres cérémonies.Pour ce faire, ils étaient contraintsde se rendre en Italie où ils louaientun charter. Pourquoi tout celouvoiement ? Nous sommes pour latransparence. Il s’agit de Marocainsqui peuvent désormais venir visiterleur pays quand ils veulent. Je leredis, la solution à deux États est unereconnaissance de fait des deux Étatsconcernés. Il s’agit là d’un principesur lequel Arabes et Palestinienss’étaient mis d’accord et dont le pointde départ était l’initiative de Fès en1981. C’est encore une fois à celuiqui veut interpréter cette solutionà sa façon de clarifier sa position.Le Marocn’a pas d’intérêtparticulier au Moyen-Orient. Il n’a ni terrescolonisées ni frontièrescommunes, mais acette particularité dedisposer de canauxqu’il est le seul àavoir…Quant au Maroc, il affiche uneposition claire à ce sujet depuis lesannées 1990. S.M le Roi MohammedVI insiste sur «Attomouh waAl Wodouh» (l’ambition et latransparence) qui sont les piliers de lapolitique étrangère du Royaume.Malgré cette clarté, même au niveaunational, il y a certains courantspolitiques et quelques courantsprosélytes qui parlent de trahisonen dénonçant la normalisation.Ils estiment que les décisionsfavorables à la cause nationaleont été obtenues au détrimentde la cause palestinienne. Votrecommentaire ?Il ne faut pas déprécier les avancéesréalisées par le Maroc en faveur desa cause nationale. Il ne faut pasnon plus lier les deux causes niutiliser une terminologie n’ayantrien à avoir avec ce qui a été décidé.Au risque de me répéter, certainstermes sont des intrus au Maroc,qui a la spécificité ont j’avais parléet pour laquelle il est envié. LeRoyaume est le seul pays qui a encoreune communauté juive résidente,faisant partie de sa population, etqui a ses propres lieux de culte et sespropres tribunaux. « Bayt Dakira» (La Maison de la mémoire) que leSouverain a inaugurée il y a un an etdemi n’existe nulle part ailleurs. Sid’autres pays ou des organisationsétrangères ne comprenant pas lecontexte marocain réagissent d’unecertaine manière, c’est une chose.Mais c’en est une autre quand ils’agit de Marocains qui doivent seréférer à leur constitution avanttout.On ne peut pas terminer cetteinterview sans parler de notrevoisine, l’Algérie. Les dirigeantsalgériens montrent qu’ils sontcontrariés par l’intervention desFAR à Guergarate et par la récenteannonce américaine. Quel seraitvotre message à ceux qui présidentaujourd’hui aux destinées de cepays ?Le message, déjà été envoyé par S.Mle Roi dans sa lettre de 2016, est celuide la main tendue. Le Maroc veutconstruire l’Union Maghrébine. Lesdéfis, sécuritaires et économiques àrelever, imposent aujourd’hui unenouvelle logique dans les relationsentre le Maroc et l’Algérie. Il fautdonc qu’on change de logiciel etqu’on s’oriente vers l’avenir.Pensez-vous que l’Algérie pourraitchanger de logiciel à l’heureactuelle ?J’ai pour principe de ne jamais parlerau nom de l’Algérie. Ce que je peux dire,c’est sur quoi le Souverain avait insistéen 2018 dans son discours de la Marcheverte sur la disposition du Maroc àouvrir un dialogue franc et direct avecl’Algérie, dans le strict respect de lasouveraineté marocaine sur la totalitéde son territoire. Rappelons-le, desMarocains ont perdu leur vie pourdéfendre l’intégrité territoriale deleur patrie et la cause nationale resteau-dessus de toutes les considérations.Ne pas comprendre cette constancereviendrait à agir de la même façon quequelqu’un qui fixe le doigt du sage alorsque ce dernier veut plutôt lui montrerla lune✱Du 18 au 24 décembre 2020 L’Observateur15
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un ambassadeur en Israël et
vice versa ?
L’essentiel aujourd’hui est que le
Maroc va appliquer les engagements
qu’il a pris. Si le Maroc voulait
effectuer une quelconque nouvelle
action, il l’aurait annoncé.
Tout ce qui est fait est annoncé
publiquement, il n’y a rien qui se
passe dans les coulisses ?
Il n’y a rien qui est fait en catimini.
Ce qui est annoncé, c’est ce qui
existe et c’est ce qui sera appliqué.
Il y a des milliers de Marocains qui
viennent d’Israël pour célébrer au
Maroc certains évènements religieux
ou participer à d’autres cérémonies.
Pour ce faire, ils étaient contraints
de se rendre en Italie où ils louaient
un charter. Pourquoi tout ce
louvoiement ? Nous sommes pour la
transparence. Il s’agit de Marocains
qui peuvent désormais venir visiter
leur pays quand ils veulent. Je le
redis, la solution à deux États est une
reconnaissance de fait des deux États
concernés. Il s’agit là d’un principe
sur lequel Arabes et Palestiniens
s’étaient mis d’accord et dont le point
de départ était l’initiative de Fès en
1981. C’est encore une fois à celui
qui veut interpréter cette solution
à sa façon de clarifier sa position.
Le Maroc
n’a pas d’intérêt
particulier au Moyen-
Orient. Il n’a ni terres
colonisées ni frontières
communes, mais a
cette particularité de
disposer de canaux
qu’il est le seul à
avoir…
Quant au Maroc, il affiche une
position claire à ce sujet depuis les
années 1990. S.M le Roi Mohammed
VI insiste sur «Attomouh wa
Al Wodouh» (l’ambition et la
transparence) qui sont les piliers de la
politique étrangère du Royaume.
Malgré cette clarté, même au niveau
national, il y a certains courants
politiques et quelques courants
prosélytes qui parlent de trahison
en dénonçant la normalisation.
Ils estiment que les décisions
favorables à la cause nationale
ont été obtenues au détriment
de la cause palestinienne. Votre
commentaire ?
Il ne faut pas déprécier les avancées
réalisées par le Maroc en faveur de
sa cause nationale. Il ne faut pas
non plus lier les deux causes ni
utiliser une terminologie n’ayant
rien à avoir avec ce qui a été décidé.
Au risque de me répéter, certains
termes sont des intrus au Maroc,
qui a la spécificité ont j’avais parlé
et pour laquelle il est envié. Le
Royaume est le seul pays qui a encore
une communauté juive résidente,
faisant partie de sa population, et
qui a ses propres lieux de culte et ses
propres tribunaux. « Bayt Dakira
» (La Maison de la mémoire) que le
Souverain a inaugurée il y a un an et
demi n’existe nulle part ailleurs. Si
d’autres pays ou des organisations
étrangères ne comprenant pas le
contexte marocain réagissent d’une
certaine manière, c’est une chose.
Mais c’en est une autre quand il
s’agit de Marocains qui doivent se
référer à leur constitution avant
tout.
On ne peut pas terminer cette
interview sans parler de notre
voisine, l’Algérie. Les dirigeants
algériens montrent qu’ils sont
contrariés par l’intervention des
FAR à Guergarate et par la récente
annonce américaine. Quel serait
votre message à ceux qui président
aujourd’hui aux destinées de ce
pays ?
Le message, déjà été envoyé par S.M
le Roi dans sa lettre de 2016, est celui
de la main tendue. Le Maroc veut
construire l’Union Maghrébine. Les
défis, sécuritaires et économiques à
relever, imposent aujourd’hui une
nouvelle logique dans les relations
entre le Maroc et l’Algérie. Il faut
donc qu’on change de logiciel et
qu’on s’oriente vers l’avenir.
Pensez-vous que l’Algérie pourrait
changer de logiciel à l’heure
actuelle ?
J’ai pour principe de ne jamais parler
au nom de l’Algérie. Ce que je peux dire,
c’est sur quoi le Souverain avait insisté
en 2018 dans son discours de la Marche
verte sur la disposition du Maroc à
ouvrir un dialogue franc et direct avec
l’Algérie, dans le strict respect de la
souveraineté marocaine sur la totalité
de son territoire. Rappelons-le, des
Marocains ont perdu leur vie pour
défendre l’intégrité territoriale de
leur patrie et la cause nationale reste
au-dessus de toutes les considérations.
Ne pas comprendre cette constance
reviendrait à agir de la même façon que
quelqu’un qui fixe le doigt du sage alors
que ce dernier veut plutôt lui montrer
la lune✱
Du 18 au 24 décembre 2020 L’Observateur
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