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UNIPOLITIQUE
Texte Meredith Stella et Leonardo Mariaca
Photos Mathias Reynard/PSS, Sam Konrad/Nomes
Vous souvenez-vous d’Erasmus ?
Le programme de mobilité Erasmus+ fait son grand retour
dans le débat public suisse. Retour sur un imbroglio
politique et diplomatique.
Notre rédactrice soupire. Son
échange en philologie classique
à Tallinn avec le fameux professeur
Merike Kurisoo vient de passer à la
trappe. « Désolé·e, Madame, mais il
n’existe aucun accord entre nos universités.
» Épuisée, elle regarde son téléphone.
Une pétition circule pour que la
Suisse adhère au programme Erasmus+
2021-2027. Elle émane de l’UNES
(Union des étudiant·e·s de Suisse). Prise
d’un élan révolutionnaire, elle signe,
comme la plupart de ses compatriotes
étudiant·e·s. Mais au fait, c’est quoi ça,
Erasmus+ ?
2014, une année noire
« Erasmus+ est le programme-cadre de
l’UE dans le domaine de l’éducation
et de la formation des jeunes pour la
période 2014-2020 », explique Raphaël
Bez, coprésident du Conseil suisse des
activités de jeunesse (CSAJ). Un programme
européen qui concerne autant
les étudiant·e·s que les enseignant·e·s
et les apprenti·e·s : « Il se concentre sur
l’interface entre l’éducation et le monde
du travail et sur la formation professionnelle
», souligne-t-il.
Mais le 9 février 2014, les Suisse·sse·s
sont appelé·e·s aux urnes. Au
programme : l’UDC propose l’initiative
populaire « contre l’immigration de
Mathias Reynard, conseiller national socialiste
depuis 2011.
masse» dans le but de mettre un frein à la
libre circulation des personnes entre la
Suisse et l’UE. Une proposition critiquée
pour son caractère jugé xénophobe,
mais que les initiant·e·s qualifiaient de
« modérée et mesurée. » Acceptée à
50,3 % des suffrages exprimés, avec un
faible taux de participation des électeur·rice·s
les plus jeunes, les retombées
politiques ont été conséquentes.
« La Suisse s’est fait jeter du pro gramme ! »,
se désole Mathias Reynard, conseiller
national socialiste.
Des emplâtres sur des jambes de bois
Depuis lors, que se passe-t-il concrètement
lorsque l’on veut partir en échange ?
« Depuis mars 2014, les universités
ont mis en place des accords pour
permettre une certaine mobilité»,
nous répond Raphaël Bez. Il ajoute :
« Différents programmes ont vu le jour,
mais pas aussi efficaces qu’Erasmus».
Les nouvelles solutions ne sont pas
du goût de tout le monde : « Tous les
contrats doivent être conclus individuellement,
et ils ne prennent pas en
compte les jeunes en formation professionnelle
! », critique Mathias Reynard
en précisant : « Erasmus est beaucoup
plus englobant, les possibilités sont plus
nombreuses ».
Ce qui retarde aujourd’hui l’adhésion
de la Suisse au programme, c’est le prix.
« Ça coûte plus cher à court terme d’y
adhérer », admet Mathias Reynard.
«Mais c’est une question de priorités sociales
! » En 2017, une motion avait été
adoptée au Parlement afin de demander
la reprise des négociations pour une
réadhésion à Erasmus. Elle est restée
lettre morte.
Le monde de demain
Les avantages du programme Erasmus
sont multiples. « Une adhésion permettrait
à la Suisse d’avoir accès aux
outils numériques d’Erasmus, comme
Raphaël Bez, co-président du CSAJ.
certaines études en ligne ou des cours de
langues », souligne Raphäel Bez. « Aussi,
cela augmenterait l’attractivité des
hautes écoles suisses, du fait que nous
ne serions plus considéré·e·s comme un
pays tiers. » Un spectre de possibilités
donc, idée qu’ont défendue au Parlement,
aux côtés de Mathias Reynard, les
prix Nobel de physique de 2019 Michel
Mayor et Didier Queloz.
Finalement, que retenir d’Erasmus+ ?
Pour Raphäel Bez : « En matière de
mobilité, il ne sert à rien de vouloir faire
cavalier seul. Permettre ces séjours à
l’étranger, c’est un investissement et
des opportunités auxquelles il serait
regrettable de renoncer ». Pour Mathias
Reynard, « il est important de continuer
à se mobiliser auprès des élu·e·s
fédéraux·ales pour que ces questions
deviennent des priorités ». Il conclut :
« Cela passe par la persévérance des
jeunes qui se battent pour leurs droits et
leurs opportunités. Ce sont elles et eux,
notre avenir ». Reste à espérer que la pétition
de l’UNES mettra un coup de pied
dans la fourmilière de la Berne fédérale.
Pour signer la pétition de l’UNES
« Pleine adhésion de la Suisse à
Erasmus+ dès 2021 ! », scannez le
code QR ci-dessus.
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