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Canard Gascon n°88 Octobre-Novembre 2020

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<strong>Octobre</strong>-<strong>Novembre</strong> <strong>2020</strong><br />

L'automne<br />

en pleine forme<br />

en Gascogne !<br />

Peinture<br />

Willem Heijkoop<br />

Un été en chansons<br />

Julie Aimée Debes<br />

Macha Méril<br />

chez Françoise Corbel<br />

Concerts<br />

Les Musique'Halles<br />

Festival Avoz Art<br />

Béatrice Fernando<br />

Les jardins de Coursiana<br />

Famille Delannoy<br />

L'escalier monumental<br />

d'Auch<br />

Histoire<br />

Blaise de Monluc<br />

High-Tech<br />

Marc Lassus<br />

Sauvons la<br />

langue occitane<br />

Dans les coulisses<br />

du foie gras<br />

Dominique Urso<br />

...l'autre Michel-Ange ?<br />

Sahel Gascogne<br />

Patrick Robert<br />

Médecine du futur<br />

Jean-François Toussaint<br />

Le musée école<br />

de Saint-Clar<br />

Saint-Mont<br />

en fête<br />

Carrefour Market<br />

Affaires d'automne<br />

Denis Polesello<br />

Mécanique agricole


Édito<br />

Le Gers, d’un pré à l’autre<br />

...d’un bonheur à l’autre<br />

Il faut être un département très solide<br />

psychologiquement pour oser, en plein<br />

marasme sanitaire et économique, organiser<br />

un sommet sur… le bonheur. Oui,<br />

vous avez bien lu, le bonheur, cette chose<br />

dont le souvenir est à la fois récent et<br />

lointain. Au moins avant le 16 mars, la<br />

faute à qui vous savez. Donc il y a eu le<br />

31 août en pleine pampa gersoise, dans le<br />

village écolo-charmant de Lagraulet, non<br />

loin de Condom, un sommet sur le bonheur.<br />

Plus exactement, un « Gers Camp »,<br />

dénomination un peu vague mais tout à<br />

fait « high-tech ». Ce jour-là, 200 citoyens<br />

sont rassemblés autour de Philippe Martin,<br />

le président du Département, pas pour<br />

compter les tournesols, mais bien pour<br />

réfléchir ensemble sur des engagements<br />

et des projets autour du « bonheur de demain<br />

». La référence au film d’Étienne<br />

Chatiliez sorti il y a (déjà) 25 ans, est<br />

plus que subliminale. En 1995, cette comédie avec Michel<br />

Serrault donnait du Gers l’image d’un coin heureux, il paraît<br />

intéressant de vérifier ce qu’il en est aujourd’hui, et de savoir<br />

quelles actions entreprendre à l’avenir pour que les habitants<br />

s’y sentent toujours aussi bien. Habitants et futurs habitants<br />

d’ailleurs. Il se dit, sans qu’on puisse vraiment l’étayer, que<br />

le Gers a été le deuxième département, après l’Yonne (Sens,<br />

Auxerre), pour le nombre de personnes qui sont venues vivre<br />

le confinement, soit 12 000 arrivées de Paris et des grandes<br />

métropoles. Toutes ne voulaient pas repartir…<br />

2 Gersois sur 3 optimistes<br />

Selon l’enquête réalisée préalablement au « Gers Camp »<br />

auprès de 3000 personnes, 88 % des gens qui vivent dans<br />

le Gers se disent heureux, 83 % pensent qu’on y vit mieux<br />

qu’ailleurs, et 66 % se disent optimistes<br />

quand ils songent à l’avenir. Ce dernier<br />

chiffre est supérieur de 10 points à la<br />

moyenne nationale, on peut donc dire<br />

que vivre dans le Gers est bon pour le<br />

moral, même quand tout va de travers !<br />

Parmi les points forts cités, l’espace, la<br />

qualité de vie, la protection de l’environnement,<br />

les circuits courts d’alimentation,<br />

une certaine forme de « coolitude<br />

», etc. Les 200 citoyens, beaucoup<br />

d’associatifs d’un certain âge, devaient<br />

donc traduire ces constats en intentions<br />

ou projets d’action à 25 ans, et ce par<br />

atelier.<br />

Des carences et des solutions<br />

Un travail fécond, restitué in vivo. Et<br />

qui a immanquablement souligné les carences<br />

du Gers – il y en a – en matière de<br />

déplacements routiers et ferroviaires, de<br />

répartition d’offre de soins médicaux, de maintien des services<br />

publics de proximité, d’attractivité économique, de liaisons<br />

internet, même s’il paraît que le Gers est le département<br />

le plus avancé pour le déploiement de la fibre en Occitanie.<br />

Des problèmes bien connus, depuis des lustres, pas tous réglés,<br />

loin de là. Des idées ont fusé, c’est bien l’intérêt de ce<br />

type de réunion. Une était (a priori) très simple, elle consiste,<br />

pour chaque commune, de mettre à disposition<br />

de ses concitoyens un véhicule<br />

particulier, qu’on réserverait pour une<br />

course, un rendez-vous chez le médecin,<br />

le coiffeur. Simple comme le bonheur.<br />

Hugues de Lestapis<br />

Le <strong>Canard</strong> <strong>Gascon</strong><br />

13, place Descamps - 32700 Lectoure Tél. : 06 61 34 29 32<br />

Web : www.lecanardgascon.com. Mail : info@lecanardgascon.com<br />

Rédaction :<br />

Directeur de la publication : Hugues de Lestapis.<br />

Rédaction : Aurélien Pastouret, Ingrid Carlander, Atelier Histoire du<br />

Clan, Ostau <strong>Gascon</strong>, Jean-Claude Ulian, Jean-Louis Le Breton,<br />

Hugues de Lestapis.<br />

Illustrations du canard : Elger - Louguit : Franck Raynal<br />

Mots croisés : François Sumien<br />

Impression : Imprimé en Espagne à 15 000 exemplaires<br />

Publicité et diffusion : 06 61 34 29 32<br />

Editeur :<br />

Les Éditions Guilleragues<br />

13, place Descamps - 32700 Lectoure<br />

Dépôt légal 3 e trimestre <strong>2020</strong><br />

Photo de couverture: © Fotolia.com - Autres photos : Le <strong>Canard</strong> <strong>Gascon</strong>, ou D.R.<br />

Le Floc et l’Armagnac s’invitent à Toulouse<br />

ontre vents, masques et marées, le<br />

Ctraditionnel « Cassoulet au Capitole,<br />

Toulouse à Table » a pu avoir lieu le<br />

5 septembre. L’occasion pour le Comité<br />

interprofessionnel du Floc de Gascogne<br />

et le Bureau national interprofessionnel<br />

de l’Armagnac (BNIA) de faire (re) découvrir<br />

deux produits emblématiques<br />

du Gers. Avec l’appui de la Région et de<br />

la Ville de Toulouse, plus de 1 200 personnes<br />

ont pu déguster en apéritif le Floc<br />

de Gascogne, sublimé en cocktail par des barmen professionnels, ainsi qu’un<br />

Armagnac hors d’âge pour terminer en apothéose ce banquet géant.<br />

H.L.<br />

3


Album d'été<br />

Ça s’est (quand même) passé cet été<br />

Le <strong>Canard</strong> <strong>Gascon</strong> y était...<br />

Album d'été<br />

Loin du désert culturel annoncé pour cause de pandémie, il y a eu finalement des événements marquants<br />

en juillet et août dans le Gers. Retour en images.<br />

Saint-Clar<br />

Willem Heijkoop à l’Arcade<br />

Le peintre hollandais, Saint-Clarais<br />

d’adoption, a présenté des tableaux<br />

exceptionnels sur la tauromachie à la<br />

galerie l’Arcade du 21 juin au 19 juillet.<br />

Plus de 100 personnes ont assisté<br />

au vernissage le 27 juin, et l’artiste, facétieux,<br />

portait lui-même un masque de<br />

taureau fort impressionnant ! Gilles Nicoud,<br />

le président de l’Arcade, a parlé<br />

du talent de Willem Heijkoop, comme<br />

de ses qualités de cœur. La saison estivale<br />

s’est poursuivie avec la peintre<br />

Anne Monge, le peintre Jay Rocksay<br />

et la sculptrice céramiste Marion<br />

Gayraud. Sans oublier Gilles Nicoud<br />

déjà cité, auteur-photographe dont on<br />

pouvait voir l’exposition Canyons et<br />

parcs de l’Ouest américain à la galerie<br />

Lumières de Lomagne – jusqu’au 5 octobre.<br />

Termes d’Armagnac<br />

Des artisans et un marché<br />

comme autrefois<br />

Si les Fêtes Médiévales de la Tour de<br />

Termes n’ont pu avoir lieu, la municipalité<br />

et les associations se sont mises<br />

en quatre pour proposer des animations<br />

chaque jour dès le 11 juillet. Un festival<br />

éclectique avec de l’artisanat, de la<br />

musique, des contes. Le week-end des<br />

8 et 9 août se tenait un marché médiéval<br />

dans le village d’artisans construit<br />

pour l’occasion. Il faisait près de 40 degrés,<br />

encore plus dans l’entourage du<br />

forgeron qui tapait volontiers sur le<br />

métal rougi. Non loin de là, dûment<br />

costumée, une jeune femme confectionnait<br />

des bardeaux (tuiles de bois),<br />

à l’ancienne.<br />

Lupiac<br />

Farandole d’artistes<br />

à la salle des fêtes<br />

Montée à la hâte, comme nombre<br />

d’événements cet été, mais très réussie,<br />

l’exposition Intérieur-Extérieur a<br />

réuni pas moins de douze artistes dans<br />

la salle des fêtes de la ville, peintres,<br />

photographe, sculpteurs. Le <strong>Canard</strong><br />

<strong>Gascon</strong> a particulièrement aimé la série<br />

de bustes « astrologiques » en terre<br />

cuite de Christine Alias (ici, le signe<br />

du taureau), les fleurs de Marie-Pascale<br />

Lerda, les étranges sculptures de Cathy<br />

Duclos, ou les chevaux d’Yves Duffour.<br />

Montréal-du-Gers<br />

Julie Aimée Debes<br />

aux Nocturnales de Séviac<br />

Organisées par ELUSA Capitale Antique,<br />

les Nocturnales de la Villa de<br />

Séviac, un site célèbre pour ses mosaïques,<br />

confirment depuis 2018 la<br />

pertinence d’un rendez-vous mêlant<br />

musique, gastronomie et patrimoine.<br />

Le 13 août, la chanteuse Julie Aimée<br />

Debes donnait un récital sur le site gallo-romain,<br />

entre reprises et créations<br />

originales, qui a conquis le public. La<br />

visite de la Villa s’est déroulée après le<br />

tour de chant, sous les étoiles. Julie Aimée<br />

Debes, qui vit à Lectoure, a eu un<br />

été particulièrement rempli, se produisant<br />

plusieurs fois avec succès dans sa<br />

ville d’adoption, mais aussi à Condom<br />

à l’hôtel Continental en duo avec son<br />

parolier Gérard Guidi, et à l'hôtel des<br />

Doctrinaires à Lectoure.<br />

Lectoure<br />

Les dames de Swan Scalabre<br />

Début août, le temps de quelques jours<br />

dans un superbe endroit (la tour Corhaut,<br />

boulevard du Nord), l’artiste<br />

Swan Scalabre a dévoilé des œuvres réalisées<br />

pour partie lors du confinement<br />

de printemps. Des femmes, tour à tour<br />

incandescentes, fragiles, précieuses,<br />

nostalgiques dans leur robe couleur<br />

nuit, ou embellies par un souffle inconnu,<br />

un grand vent. Beaucoup de poésie<br />

et d’imaginaire chez Swan Scalabre,<br />

des réflexions profondes sur le temps<br />

aussi, et des réalisations minutieuses,<br />

serties dans des tableaux de dimension<br />

resserrée, comme dans une boîte.<br />

Lectoure<br />

Le succès des nuits festives<br />

À Lectoure, la traditionnelle fête du<br />

Melon a dû renoncer à son rendez-vous<br />

traditionnel de la mi-août. Mais grâce à<br />

l’engagement des commerçants regroupés<br />

au sein de l’ACAL, on ne s’est pas<br />

ennuyé cet été dans la capitale de la Lomagne.<br />

Entre le 13 juillet et le 28 août,<br />

les « Nuits du lundi » et « Le vendredi<br />

c’est ici » ont réservé aux estivants et<br />

aux touristes des animations hautes en<br />

couleur, avec force exposants, artisans,<br />

jazz-band, percussions, commerces<br />

ouverts, chanteurs de la région parmi<br />

lesquels Serge Mauro connu pour ses<br />

chansons sur le rugby et le melon de<br />

Lectoure.<br />

Lectoure<br />

Des lecteurs<br />

sous les marronniers<br />

Une édition certes spéciale, mais une<br />

édition malgré tout. Lectoure à voix<br />

haute a réuni des artistes, auteurs et<br />

comédiens parmi lesquels Laetitia<br />

Brecy, Valérie Diome, Nine de Montal<br />

ou Pierre Martot, pour des lectures<br />

publiques devant un public captivé.<br />

L’occasion de découvrir des textes<br />

comme Soie de Alessandro Barrico,<br />

ou d’entendre (peut-être à nouveau) La<br />

peste de Camus, opportunément.<br />

Lomagne<br />

Attention cyclistes !<br />

Grosse attraction dans une ville qui<br />

est plus habituée à fêter le melon qu’à<br />

applaudir des cyclistes. La 44 e édition<br />

de la Route d’Occitanie – La Dépêche<br />

du Midi avait fait de Lectoure, en ce<br />

4 août, la ville-départ de la 4 e et dernière<br />

étape. Un départ marqué par un<br />

hommage au Gersois Nicolas Portal,<br />

directeur sportif du team Ineos, décédé<br />

en mars dernier à 40 ans. Les 136 cyclistes<br />

encore en lice devaient rejoindre<br />

Rocamadour, via Flamarens, Lauzerte<br />

et Labastide-Murat. Comme un air de<br />

Tour de France, avec le peloton, les<br />

motards, les voitures des équipes truffées<br />

de vélos de rechange, des gros autobus.<br />

Un vrai spectacle !<br />

4 5


Album d'été<br />

Album d'été<br />

Lavardens<br />

Le Japon au château<br />

Après plus de trois mois de fermeture<br />

contrainte, l’équipe du Centre international<br />

de communication artistique<br />

a enfin pu rouvrir à la visite le château<br />

de Lavardens début juillet. Christophe<br />

Jankowiak et son directeur Jérémie<br />

Martinez ont réussi le tour de force de<br />

présenter une exposition de haute volée,<br />

particulièrement sur les arts et l’artisanat<br />

japonais (peinture, calligraphie, kimono,<br />

céramique, sculpture, photographie…).<br />

10 salles du château pour s’immerger<br />

dans cette culture à la fois moderne et<br />

ancestrale et pour faire des découvertes<br />

comme celle du peintre Kogiro Akagi,<br />

qui représente les monuments de Paris<br />

avec une incroyable minutie.<br />

Plieux<br />

Regards de peintres<br />

Encore un franc succès pour l’exposition<br />

estivale Regards sur le Gers,<br />

organisée par l’association Plieuxarts.<br />

Quatre peintres mondialement connus<br />

6<br />

et un sculpteur français qui ont découvert<br />

la Lomagne gersoise en séjournant<br />

à Plieux. Leurs œuvres sont le fruit de<br />

ces déambulations artistiques et inspirées.<br />

Mention pour Martyn Dukes, un<br />

Anglais qui vit désormais entre Mauvezin<br />

(Gers) et la Suisse, et ses « Four<br />

Trees » plantés dans un grand tableau<br />

où l’on retrouve ce qu’on aime du Gers<br />

et de sa nature irréductible. Autre coup<br />

de chapeau au Bourguignon Jean-Pierre<br />

Dumont, médecin retraité, passionné<br />

par la représentation du monde animal<br />

qu’il habille malicieusement.<br />

Eauze<br />

Macha Méril en dédicace<br />

Venue en voisine de Montréal-du-Gers,<br />

où elle a acheté une maison voilà une<br />

dizaine d’années, Macha Méril était<br />

le 8 août dernier à Eauze, à la librairie<br />

Corbel pour faire… ce qu’elle n’avait<br />

pu faire en mars pour raison sanitaire,<br />

soit une dédicace de son dernier roman<br />

Vania, Vassia et la fille de Vassia,<br />

qui parle peu ou prou de sa famille<br />

de Russes blancs. À 80 ans, veuve du<br />

compositeur Michel Legrand, l’auteure<br />

a une énergie contagieuse, et ses lecteurs<br />

étaient nombreux autour d’elle,<br />

en gardant bien sûr les distances nécessaires<br />

! Macha Méril a aussi signé à la<br />

librairie Le Chat Pitre à Condom.<br />

Maumusson-Laguian<br />

Paysages contemporains<br />

à la galerie MauMU<br />

Entre le 18 juillet et le 30 août, la galerie<br />

MauMU a accueilli les artistes peintres<br />

Anne Brérot, Christophe Lachize,<br />

Marion Tivital, Christian Ronceray,<br />

Charlotte de Maupeou, une exposition<br />

conçue par Ludovic Duhamel, l’éditeur<br />

du magazine Miroir de l’Art. Parmi<br />

les œuvres, un coup de cœur peutêtre<br />

pour celles de Marion Tivital, qui<br />

réussit à rendre mystérieux des sites…<br />

industriels, par le jeu d’une peinture à<br />

l’huile douce et lumineuse. La galerie<br />

MauMU, superbement aménagée,<br />

se trouve dans une dépendance du<br />

château de Maumusson-Laguian, qui<br />

appartient à Héloïse et Emmanuel<br />

Barbet, amateurs d’art, lesquels ont<br />

patiemment remis en état la bâtisse<br />

située au milieu du vignoble de<br />

Madiran. Il y a même des chambres<br />

d’hôtes et un espace-café déco. Et<br />

depuis peu un « pont artistique » avec<br />

la galerie L’Ane Bleu à Marciac.<br />

Les bonnes notes de<br />

Musique’Halles de Lomagne<br />

Il faudra désormais compter avec ce nouveau festival de musique classique dans le Gers,<br />

qui a régalé cet été un public d’amateurs.<br />

Guilhem Fabre en concert à Flamarens le 23 juillet (©Photo Matthew Weinreb)<br />

Pari audacieux, mais pari gagné pour l’association Piano-<br />

Novo. Il fallait en effet du cran pour lancer un nouveau<br />

festival dans le Gers cet été <strong>2020</strong>, quand tant d’autres jugeaient<br />

plus prudent de renoncer pour cause de pandémie.<br />

« Musique’ Halles de Lomagne », entre répertoire classique<br />

et créations actuelles, a programmé pas moins de quatorze<br />

concerts entre le 22 juillet et le 14 août en plein air ou semi<br />

plein air, dans le respect des règles sanitaires. Quatre à Lectoure<br />

(cour de la mairie), quatre à Flamarens (église Saint-Saturnin),<br />

avec grillades à suivre, quatre à Saint-Clar (halle) et<br />

deux à Gimont (halle). Des sites patrimoniaux choisis aussi<br />

pour leur acoustique. Le public a été très séduit, emporté par<br />

des programmes jamais entendus. On a pu découvrir l’étonnant<br />

camion-scène du pianiste virtuose Guilhem Fabre, qui<br />

a des attaches dans le Gers, l'acteur François Michonneau,<br />

le pianiste-compositeur Yannaël Quenel, le jeune et brillant<br />

Philia Trio autour du violoniste François Pineau-Benois, et<br />

les Triptikh, trio russe avec le grand violoncelliste Dimitri<br />

Maslennikov, qui a rendu un époustouflant hommage au regretté<br />

Ennio Morricone.<br />

Forte de cette première expérience réussie, l’association lectouroise<br />

PianoNovo voudrait devenir un acteur de la scène<br />

culturelle gersoise, au-delà de la Lomagne, spécialisé dans le<br />

piano et les cordes, concerts d’hiver, festival d’été, apprentissages<br />

Aurélien Pastouret<br />

Contact<br />

pianonovo.org / 06 13 52 94 86<br />

Yannael Quenel en concert à Saint-Clar le 14 août.<br />

Triptikh Trio en concert à Lectoure le 5 août.<br />

7


Hellen Halftermeyer<br />

Album d'été<br />

Festival de sculptures Avoz’Art<br />

7 e édition à Mourède cet été<br />

Chaque année, ce festival de sculptures nous enchante en mettant en avant<br />

des artistes de qualité venus des quatre coins de France.<br />

Le Quad SPORTIF / utilitaire / ludique<br />

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Rendez-vous<br />

à la Foire de<br />

Lectoure<br />

les 6, 7 & 8 novembre <strong>2020</strong><br />

SARL GARAGE CARDEILLAC<br />

32330 GONDRIN - Tél. 05 62 28 07 49<br />

ggecardeillac@gmail.com - www.quads-autos-gers.fr<br />

Le festival Avoz'Art se tient dans l'église de Mourède et sur son parvis...<br />

Chaque été depuis 2014, l’église de<br />

Mourède se transforme en galerie<br />

d’art pour sculpteurs. On doit cette<br />

initiative originale à Béatrice Fernando,<br />

elle-même sculptrice professionnelle<br />

qui réside dans ce tout petit village<br />

gersois, à quelques encablures de<br />

Vic-Fezensac. Et chaque fois le plaisir<br />

est renouvelé de découvrir la trentaine<br />

d’exposants que Béatrice a sélectionné<br />

« par goût, par affinité, par plaisir de la<br />

découverte » explique-t-elle. On s’accordera<br />

donc à dire qu’elle a très bon<br />

Béatrice Fernando, présidente... et sculptrice...<br />

goût, car les œuvres présentées, du 1 er<br />

au 16 août derniers, étaient d’excellente qualité et offraient un panel varié<br />

de créateurs aux sensibilités différentes. Dans ce lieu atypique (qui<br />

sait garder le frais en ces temps de canicule) on se recueille volontiers<br />

devant le talent des artistes.<br />

L’épidémie n’a pas porté tort à l’exposition au contraire. Jamais autant<br />

de visiteurs n’ont fréquenté le festival, et ils ne sont pas venus seulement<br />

pour regarder : ils ont beaucoup acheté ! N’est-ce pas à la fois la<br />

preuve du haut niveau de ces sculpteurs et la meilleure façon d’encourager<br />

l’art ?<br />

Cette année (en toute subjectivité), nous avons particulièrement apprécié<br />

les compositions filaires d’Hellen Halftermeyer, les créations<br />

originales de Farid Achezegag mélangeant acier et galets, les sculptures<br />

mouvementées d’Henri Hadida, les bustes de Nicolas Viry et bien<br />

d’autres artistes que vous retrouverez sur le site d’Avoz’Art ou sur sa<br />

page Facebook... et dont nous vous présentons ici quelques œuvres…<br />

Jean-Louis Le Breton<br />

www.avozart.fr<br />

Facebook : Avoz Art<br />

Farid Achezegag<br />

Nicolas Viry<br />

Nadine Vergues<br />

Béatrice Fernando<br />

9


Peinture<br />

Dominique Urso<br />

Il refait la chapelle Sixtine<br />

Voilà près de 15 ans que le peintre gersois a entrepris de reconstituer, avec sa propre inspiration, les fresques<br />

de la chapelle Sixtine. Un projet fou, et aussi un « concept » pour des villes à la recherche d’animation originale.<br />

Dominique Urso, peintre et créateur de fresques<br />

Il ne se prend pas pour Michel-Ange,<br />

évidemment*. Mais Dominique Urso<br />

peint depuis l’âge de 8 ans et au fil<br />

des années, il a acquis son style et se<br />

sent malgré tout très proche du génie<br />

de la Renaissance. « Il peint comme je<br />

peins », dit-il sans ambages. Et en effet,<br />

lorsqu’on entre dans son atelier de la<br />

rue Nationale à Lectoure, on est saisi<br />

par un premier panneau, pas le moins<br />

célèbre de la Sixtine, celui de Dieu accordant<br />

le don de la vie à Adam, avec<br />

le doigt tendu. Dominique Urso partage<br />

avec le peintre florentin un art consommé<br />

de peindre les corps, de jouer avec<br />

les ombres et les lumières, de créer<br />

une sorte de perspective, presque du<br />

trompe-l’œil avec un ton pierre, et<br />

de dessiner de sublimes drapés qui<br />

semblent en mouvement perpétuel.<br />

Ni copie ni réplique<br />

Il ne s’agit « pas de réplique ni de copie<br />

», tient à préciser Dominique Urso.<br />

« J’interprète Michel-Ange, je m’en<br />

inspire, il m’inspire ». Le résultat est<br />

quand même assez ressemblant ! Le<br />

peintre, Gersois d’adoption depuis 15<br />

ou 20 ans, était jusqu’alors connu pour<br />

ses talents de portraitiste et d’artiste<br />

original. Il a été exposé dans de nombreuses<br />

galeries entre la Gironde, le<br />

Lot-et-Garonne et le Gers.<br />

Et puis il y a eu le choc Michel-Ange<br />

au milieu des années 2000, presque une<br />

rencontre personnelle à cinq siècles de<br />

distance. Un premier tableau, et d’emblée<br />

une affinité. Dominique Urso se<br />

passionne pour l’histoire des plafonds<br />

peints de la Sixtine, soit 40 m de long<br />

et 14 m de large. Il se documente sur<br />

la technique employée, ce qu’on en a<br />

su en tout cas. Il peaufine sa propre approche<br />

: dessin au crayon de bois, puis<br />

un premier passage à la peinture acrylique,<br />

et cinq à six couches de peinture<br />

à l’huile. L’idée de reconstituer une<br />

Devant Dieu et Adam à la collégiale de L'Isle Jourdain lors des<br />

dernières Journées du patrimoine, le public a été bluffé.<br />

grande partie des éléments, il y en a 36<br />

dont quatre de 3 m sur 1,50 m, est parfaitement<br />

folle. En <strong>2020</strong>, Dominique<br />

Urso peut s’enorgueillir d’avoir fait<br />

plus de 40 % du chemin. Il en a d’ailleurs<br />

montré les 19 et 20 septembre à<br />

la collégiale de L’Isle-Jourdain, 7 prophètes,<br />

5 sibylles, et la célèbre création<br />

d’Adam.<br />

Happening visuel<br />

Idée folle ? Folie passionnelle ? Peut-être<br />

pas tout à fait. Dominique Urso, qui a été<br />

autrefois peintre en bâtiment puis peintre<br />

décorateur, imagine proposer son « concept »<br />

à des collectivités et autres parcs-expos qui<br />

chercheraient des animations visuelles originales<br />

capables de retenir l’attention du public.<br />

Il a déjà en tête les éléments porteurs,<br />

échafaudages, l’espace requis (un couloir de<br />

30 m de long et de 7 m de large), une partie<br />

des œuvres suspendues en hauteur, des tissus<br />

magnifiques en soie de couleur pour relier<br />

l’ensemble. Comme des drapés. Ce concept<br />

« se louerait le temps d’une semaine », indique<br />

Dominique Urso. Avis aux amateurs.<br />

Parmi ses œuvres récentes, on doit citer<br />

cette Vierge et l’Enfant (1,40 m x 1m)<br />

inspirée par une sculpture de Michel-Ange,<br />

qui est censée prendre<br />

place dans la cathédrale Sainte-Marie<br />

d’Auch, afin de combler une partie<br />

inachevée et manquante. Une belle initiative<br />

de l’Auscitain Michel Zancanaro,<br />

bénite par Mgr. Maurice Gardès le<br />

28 juin dernier, à laquelle Dominique<br />

Urso a bien voulu prêter son concours<br />

bénévole.<br />

Hugues de Lestapis<br />

*À noter la sortie au cinéma le 21 octobre<br />

d’un film sur Michel-Ange.<br />

Dominique Urso dans son atelier de Lectoure, caverne de toiles.<br />

11


Nature<br />

Les jardiniers de Coursiana<br />

Une famille de passionnés<br />

Aux portes de La Romieu, les Delannoy veillent sur un ensemble végétal extraordinaire<br />

qui fait le bonheur des visiteurs.<br />

Arnaud, Véronique et Jean Delannoy avec… Natie, le chien de la famille (photo Claire Delannoy)<br />

Chef d’œuvre médiéval, étape spirituelle,<br />

la collégiale de La Romieu<br />

s’élève fièrement au-dessus du chemin<br />

de Compostelle. À quelques pas, autre<br />

site remarquable, les jardins de Coursiana<br />

apportent un sentiment de paix au<br />

visiteur qui s’aventure dans ce monde<br />

de fleurs et d’arbres. Flâner, se perdre,<br />

traquer le mystère des plantes, retrouver<br />

parfois des bouts de son enfance.<br />

Impossible de promener de sombres<br />

pensées dans ces parages.<br />

Héritage botanique<br />

Les jardins sont privés, et Véronique<br />

et Arnaud Delannoy sont les maîtres<br />

des lieux. Coursiana est leur œuvre,<br />

leur héritage botanique, leur vie, vécue<br />

avec leurs sept enfants. Ici, « rien n’a<br />

été calculé d’avance », affirme la jardinière<br />

en chef. « J’ai des surprises, je fais<br />

des découvertes par hasard, comme ce<br />

soir, en passant, soudain j’aperçois de<br />

magnifiques étoiles éclatantes de blancheur<br />

là, dans ce buisson d’hortensias.<br />

Regardez, l’an dernier, il n’était pas si<br />

réussi !»<br />

L’histoire est belle. En 1901, un enfant<br />

du Gers, Gilbert Cours Darne, voit le<br />

jour ici même, sur la ferme, à La Romieu.<br />

Il sera un grand explorateur, un<br />

éminent botaniste, responsable de la<br />

recherche scientifique et technique<br />

d’outre-mer. À son retour au pays, il<br />

cède à sa passion des arbres, et en 1974,<br />

crée un arboretum de six hectares en<br />

plein Gers agricole, distingué par le très<br />

célèbre prix Olivier de Serres de l’Académie<br />

d’Agriculture. Sa collection de<br />

tilleuls sera classée collection nationale,<br />

composée de plus de soixante espèces<br />

et variétés.<br />

Attirés par son savoir et son aura, les<br />

Delannoy rejoignent le grand botaniste.<br />

En 1995, ils acquièrent l’ensemble de<br />

la propriété. Rare exemple de coopération,<br />

Gilbert Cours Darne va les accompagner<br />

de ses conseils techniques<br />

et amicaux demeurant sur ses lieux de<br />

naissance jusqu’à la fin de sa vie – il<br />

y avait construit sa propre maison qui<br />

existe toujours – partageant avec eux<br />

inquiétudes et espoirs.<br />

Œuvre fragile<br />

Un jardin est une œuvre tellement fragile.<br />

Il aidera ce jeune couple doué<br />

d’une insatiable énergie, qui ne connaît<br />

pas encore grand-chose à la botanique,<br />

mais est totalement habité par la passion<br />

des plantes. Véronique a le goût<br />

de la terre, elle la connaît déjà intimement.<br />

Elle sait planter, à la dure,<br />

dans cette terre rebelle de La Romieu,<br />

quasi intraitable, si on n’arrive pas à<br />

la dompter. Un vrai corps à corps. Humain<br />

contre nature. Rien ne peut être<br />

calculé d’avance, on plante, on arrache,<br />

on replante, jusqu’à ce que s’épanouissent<br />

fleurs et arbustes, à la grâce de<br />

Dieu. Jusqu’à atteindre au fil des ans<br />

une richesse incomparable. Venue du<br />

Nord, près de Lille avec ses parents<br />

agriculteurs, la future jardinière accomplit<br />

son cursus universitaire, puis<br />

elle suit des études paysagères avancées<br />

à l’Institut de Gembloux, près de<br />

Namur en Belgique. Arnaud est né ici,<br />

fils d’industriel gascon. Son désir et son<br />

ambition : en dépit des souhaits de sa<br />

famille, il décide d’être paysan, il sera<br />

chef de culture au château de Gensac.<br />

Lui ne sait pas encore planter, elle le<br />

lui apprend. Elle s’initie à la botanique<br />

auprès du savant. Son mentor l’initie à<br />

un art, une science difficile, l’étiquetage<br />

de chaque arbuste, plante et fleur<br />

du domaine. Aujourd’hui, ce travail<br />

très délicat qui concerne tous les botanistes,<br />

« en herbe » ou professionnels,<br />

est réalisé à 80 %. Ainsi le visiteur aura,<br />

par exemple, la surprise de découvrir<br />

des plantes de Madagascar, en souvenir<br />

de Gilbert Cours Darne, spécialiste<br />

des forêts de l’île. On voit souvent des<br />

gens qui se penchent ou se mettent carrément<br />

à quatre pattes pour déchiffrer<br />

un nom magique.<br />

Jardin médicinal<br />

Pour Arnaud Delannoy, le bois et la<br />

pierre, construction et « bricolage »<br />

inventif, mobilisent son énergie et ses<br />

dons. Son épouse avoue être en admiration<br />

devant ses trouvailles, et même<br />

sa « débrouillardise » ! Il restaure le<br />

très beau pigeonnier, et les bâtiments<br />

anciens de la ferme, qui deviennent la<br />

maison familiale, puis construit le bâtiment<br />

d’accueil en pierres. Pour le jardin<br />

médicinal, il élabore un plan savant,<br />

avec élégants murets et quatre bassins<br />

dont la fraîcheur diffuse les arômes des<br />

santolines, valérianes, verveines, pélargoniums<br />

et autres plantes toniques,<br />

sans oublier les pavots de Californie.<br />

Un ensemble entièrement dédié à la<br />

santé et au bien-être. Avec aussi l’appui<br />

d’une entreprise gersoise, Fleurance<br />

Nature.<br />

Dernière construction en date, une<br />

vaste halle recouverte d’une charpente<br />

en bois – superbes poutres à l’ancienne<br />

– destinée à accueillir de joyeux événements,<br />

mariages et autres. Autre lourde<br />

responsabilité pour le maître d’œuvre,<br />

25 hectares de pruniers à soigner. La famille<br />

participe aux récoltes des prunes.<br />

Elle conditionne et vend les pruneaux.<br />

Coursiana se décline en plusieurs jardins,<br />

dont l’arboretum de six hectares,<br />

700 espèces importées du monde entier,<br />

ou le jardin dit « à l’anglaise », une<br />

profusion de fleurs, trois cents roses en<br />

motifs, volumes, masses, en tapis à côté<br />

d’une rare variété de mousses. « Sans<br />

fleurs, je ne peux pas vivre » a coutume<br />

de dire Véronique Delannoy. Elle veut<br />

que les couleurs s’harmonisent, que<br />

chaque massif ait sa personnalité, elle<br />

sait que c’est là une œuvre d’art qui ne<br />

supporte pas l’erreur. Pas de schéma<br />

directeur. Rien au cordeau. Inspiration,<br />

imagination, fantaisie guident les choix<br />

de la jardinière, le hasard parfois. Ici la<br />

beauté n’est pas un rêve, c’est un exploit.<br />

Ingrid Carlander<br />

Les Jardins de Coursiana<br />

32480 La Romieu<br />

Ouvert jusqu’au 24 octobre <strong>2020</strong><br />

Tél. : 05 62 68 22 80 / 06 61 95 01 89<br />

12 13


Solidarité<br />

HDM : la cuvée humanitaire<br />

pour Sahel-Gascogne<br />

1 € par bouteille pour creuser des puits au Mali : la cave de Nogaro et l’ONG Sahel Gascogne<br />

font cause commune depuis des années, et c’est payant.<br />

La remise du chèque par Patrick Farbos, Président de HDM à Patrick Robert de l'ONG Sahel Gascogne.<br />

Entre le pays d’Armagnac et celui<br />

des Dogons au Mali, il y a un pont.<br />

Et sur ce pont, des gens généreux et<br />

courageux, opiniâtres même. Depuis<br />

sept ans, l’ONG Sahel Gascogne (ex<br />

via Sahel) et la cave coopérative de<br />

Nogaro « Les hauts de Montrouge »<br />

(HDM) font fructifier un partenariat<br />

basé sur une idée simple : 1 € de plus<br />

par bouteille vendue pour une cuvée<br />

spéciale, soit 1 € qui se retrouve directement<br />

dans le budget de l’association<br />

humanitaire, et encore plus directement<br />

dans les plaines semi-désertiques<br />

maliennes, où la question de l’accès à<br />

l’eau est cruciale. Le 17 septembre à<br />

la cave de Nogaro, Patrick Farbos, le<br />

maître des lieux, a remis un chèque de<br />

1 200 € à Patrick Robert, le président de<br />

l’ONG. Une fidélité notable au moment<br />

où nombre d’associations voient leurs<br />

sources de financement se tarir à cause<br />

de la crise économique. « Quand Farbos<br />

dit qu’il commence quelque chose,<br />

il ne s’arrête pas !», a d’ailleurs averti<br />

le président d’HDM, avant d’évoquer<br />

sa fierté, comme agriculteur, de pouvoir<br />

épauler d’autres agriculteurs.<br />

L’objectif de Sahel Gascogne est d’aider<br />

les paysans du pays dogon à mieux<br />

vivre chez eux, à se développer de façon<br />

autonome. Tout l’argent récolté par<br />

l’ONG (entre 10 et 20 000 € par an) part<br />

au Mali. L’association est composée,<br />

en France, de bénévoles, ces derniers<br />

payent leur séjour s’ils se rendent sur<br />

le terrain, il n’y a donc quasiment aucuns<br />

frais de fonctionnement. Là-bas,<br />

l’eau est un défi, une promesse, l’enseignement<br />

aussi. Qui plus est, depuis le<br />

putsch du 5 juin dernier (une junte s’est<br />

installée au pouvoir), des agriculteurs<br />

vivent sous la menace de pillards. « Ils<br />

cultivent parfois avec une kalachnikov<br />

sur l’épaule », indique Patrick Robert.<br />

Ce retraité de l’Éducation nationale,<br />

aussi gérant d’un camping à la ferme à<br />

Marciac, connaît bien l’Afrique. Il repartira<br />

au Mali, « si tout va bien », à la<br />

fin décembre.<br />

Puits, barrages, forages<br />

En quelques années, l’ONG aura réussi<br />

à faire creuser 1000 puits (les villageois<br />

œuvrent sous la houlette technique<br />

de l’association), édifier trois<br />

châteaux d’eau, créer des périmètres<br />

Le chantier de l’adduction d’eau de Neni,<br />

achevé en début d’année <strong>2020</strong>.<br />

Le barrage de Yéné, fini en septembre <strong>2020</strong>.<br />

Un périmètre maraîcher, de quoi cultiver et nourrir le village.<br />

maraîchers autour de certains puits<br />

(sur 1 ha, de quoi nourrir près de 1000<br />

personnes), réaliser des barrages (2 en<br />

<strong>2020</strong>), et même créer un syndicat des<br />

eaux. L’essentiel a été réalisé dans le<br />

département de Bandiagara au Mali,<br />

bien au nord de Bamako. En 2021, il<br />

y a un projet de forage à Toyougou, et<br />

la réalisation en commun avec l’ONG<br />

Adour Pyrénées Sahel des adductions<br />

d’eau de Ireli et Amani. Il faut regarder<br />

la page Facebook de l’ONG, régulièrement<br />

actualisée, pour se rendre compte<br />

des difficultés, et donc des incroyables<br />

réussites, de cette œuvre collective. Qui<br />

a sa source, aussi, en pays d’Armagnac.<br />

Hugues de Lestapis<br />

Contact association, adhésions :<br />

vsgong@yahoo.fr<br />

Santé<br />

Le gratin de la médecine...<br />

...en Lomagne gersoise<br />

Un rassemblement de sommités médicales vient d’avoir lieu pour la deuxième année consécutive à Fleurance.<br />

Pour penser le futur et profiter un peu du Gers.<br />

Arnauld Cabelguenne, cheville ouvrière de l’université d’été, fier<br />

du succès, du nombreux public, dont quatre députés.<br />

Le Gers connaît des problèmes de<br />

désertification médicale… sauf une<br />

fois par an ! Un événement rassemble<br />

en Lomagne des professeurs de renom,<br />

médecins généralistes, chercheurs,<br />

jeunes internes, étudiants en médecine<br />

et autres métiers de la santé. Le dernier<br />

s’est déroulé à Fleurance les 19 et 20<br />

septembre, et en voyant tous ces gens<br />

instruits, compétents, parfois brillants,<br />

on se disait deux choses : 1) c’est le<br />

moment de tomber malade, au moins<br />

on sera bien soigné. 2) si on pouvait<br />

prendre en otage quelques internes et<br />

les garder à demeure dans le Gers, on<br />

résoudrait une partie du déséquilibre de<br />

l’offre de soins dans le département.<br />

Un duo de choc aux manettes<br />

Ces mauvaises pensées chassées, il<br />

faut saluer la belle énergie d’Arnauld<br />

Cabelguenne, fondateur de ce rendez-vous<br />

de très haut niveau créé en<br />

2019, dont l’objet n’est rien d’autre<br />

que de penser la médecine de demain,<br />

en particulier à la campagne. Le pharmacien<br />

de Lectoure a un fameux complice,<br />

le professeur Brice Gayet, chirurgien<br />

digestif reconnu mondialement,<br />

lui-même fils et petit-fils de médecin.<br />

Gersois d’adoption, il a accueilli et encouragé<br />

l’initiative du D r Cabelguenne,<br />

en ouvrant aussi son carnet d’adresses<br />

pour avoir les intervenants les plus<br />

légitimes, « ceux qui produisent des<br />

connaissances ». Le 19 septembre, il<br />

était par exemple question de « changement<br />

climatique et santé du futur<br />

en France ». Au micro, entre autres,<br />

Jean-François Toussaint, Jean-François<br />

Guégan et Étienne Minvielle, trois<br />

professeurs de renom. Si l’on s’aventure<br />

à lister leurs titres et responsabilités<br />

(GIEC, INRAE, Polytechnique,<br />

CNRS…), l’article est fini, faute de<br />

place.<br />

Brice Gayet a des attaches dans le Gers depuis 23 ans, du côté<br />

de Berrac.<br />

Jean-François Toussaint, mieux connu depuis la crise sanitaire,<br />

c’est lui qui assure qu’« il n’y a pas un élément scientifique en<br />

faveur du confinement ».<br />

L’odyssée du moustique-tigre<br />

L'exposé du professeur Toussaint sur le<br />

changement climatique et ses impacts<br />

sur la santé était limpide, et parfaitement<br />

inquiétant. On a appris, entre<br />

autres, que le réchauffement a déjà des<br />

conséquences sur le développement du<br />

fœtus dans certaines régions du globe,<br />

10 % de poids en moins en neuf mois si<br />

la température moyenne est plus élevée<br />

de 4 degrés ! Jean-François Toussaint<br />

relève qu’il aura fallu une pandémie,<br />

celle de la covid-19, pour que la pollution<br />

s’évanouisse, le temps d’un arrêt<br />

forcé de l’économie. Jean-François<br />

Guégan a emmené son auditoire (200<br />

personnes) vers l’Afrique pour établir,<br />

ou plutôt ne pas établir, le lien entre la<br />

modification du climat et les nouvelles<br />

maladies infectieuses. Plein d’informations,<br />

dont celle-ci, un peu iconoclaste :<br />

le moustique-tigre serait arrivé d’Albanie<br />

en Italie, puis en France par le<br />

transport de… pneus à rechaper encore<br />

humides. Au reste, les insectes à problèmes<br />

n’ont pas forcément besoin de<br />

températures affolantes pour migrer, ils<br />

prennent le train, la voiture, le bateau<br />

au besoin. Il y a eu encore un exposé<br />

– remarquable – d’un chirurgien du<br />

service de santé des armées, Federico<br />

Rodriguez, sur la gestion de crises sanitaires.<br />

Et le lendemain, c’est la philosophe<br />

et psychanalyste Cynthia Fleury,<br />

rien de moins, qui a fait la conclusion<br />

prospective de cette université d’été si<br />

riche. Rendez-vous l’année prochaine.<br />

Avec autant de médecins svp.<br />

Hugues de Lestapis<br />

14 15


Gastronomie<br />

La filière foie gras<br />

se relance dans la transparence<br />

Participation aux Journées du patrimoine, opération séduction tous azimuts, la filière foie gras<br />

déploie une belle énergie pour faire valoir ses atouts, lutter contre un certain dénigrement, et stimuler les achats.<br />

Gastronomie<br />

Du pré au bocal<br />

la (courte) vie du canard en photos<br />

De l’accouvage à la transformation, en passant par l’élevage et l’engraissement,<br />

il y a quatre phases pour aboutir à une production d’excellence en quatre mois.<br />

Michel Fruchet, président du Cifog, venu soutenir la filière.<br />

Ici avec Pierre Peres, qui élève et vend des produits finis, avec ses frère et fils à Saint-Michel.<br />

Rarement une filière aura été aussi à vif. Entre les épisodes<br />

dévastateurs d’influenza aviaire, la loi Egalim qui limite<br />

désormais à 25 % les volumes vendus sous promotion, la<br />

crise du coronavirus et ses conséquences sur la restauration<br />

et la consommation, sans oublier les vidéos affolantes de<br />

l’association militante L 214, l’interprofession du foie gras<br />

navigue par gros temps.<br />

À la barre, Michel Fruchet, président du Cifog, et aux rames<br />

quelque 100000 emplois directs et indirects en France. La<br />

plupart entre les Landes, les Pyrénées-Atlantiques et bien sûr<br />

le Gers. La conviction du capitaine, c’est que la filière contribuera<br />

à déminer les attaques ou les fantasmes qui l’assaillent<br />

en montrant ce qu’elle sait faire, comment elle le fait, avec<br />

qui. « Faire voir », résume Michel Fruchet, échanger avec les<br />

professionnels, héritiers d’un savoir-faire historique.<br />

Rien à cacher<br />

On parle quand même de l’emblème de la cuisine française,<br />

reconnu « patrimoine culturel et gastronomique protégé »<br />

dans le code rural. Les 19 et 20 septembre derniers, des<br />

professionnels du foie gras ont ainsi décidé d’ouvrir<br />

leurs portes à l’occasion des Journées du patrimoine. Une<br />

première, et la preuve que la filière n’a rien à cacher, surtout<br />

pas l’engagement d’éleveurs motivés qui travaillent pour<br />

proposer des produits d’excellence à partir d’animaux dont<br />

ils prennent soin. Eh oui, pour ceux qui en douteraient, ils<br />

s’occupent du bien-être de leurs bêtes. Eh oui, à la fin des fins,<br />

ils les tuent pour nourrir la population. On est obligé d’écrire<br />

cette évidence après avoir entendu Pierre Pérès, producteur<br />

de canards au sud de Mirande, raconter qu’au cours d’une<br />

visite une personne lui a demandé en s’étranglant : « Ah, vous<br />

tuez les animaux ? ». Deux mondes…<br />

Opération Comptoir du canard<br />

Donc, « faire voir ». Aux familles, aux consommateurs via<br />

l’opération Comptoir du canard qui sera organisée du 6 octobre<br />

au 8 novembre avec la grande distribution (en insistant<br />

aussi sur le magret et le confit), et aussi aux « influenceurs »,<br />

autrement dit la presse, les médias. Les 10 et 11 septembre,<br />

le Cifog a organisé un voyage de deux jours pour quelque<br />

25 journalistes de grands titres, un jour dans les Landes, le<br />

second dans le Gers, dans cinq sites : la maison Lafitte, à<br />

Montaut, 100 ans d’histoire dans la transformation, les frères<br />

Dupouy, éleveurs et engraisseurs à Castelnau-Tursan, les<br />

sœurs Brethes et leurs oies à Montaut, la Gaec Dubosc-Robin<br />

à Viella, et la Ferme de la Patte d’Oie à Saint-Michel,<br />

l’exploitation familiale des Pérès.<br />

Immersion nécessaire pour évacuer les idées reçues (en<br />

fait, les palmipèdes passent 90 % de leur vie en plein air)<br />

et « voir » de près les différentes phases de cette production<br />

d’excellence. Et vous savez quoi ? Non seulement les professionnels<br />

croisés sur leur exploitation n’ont pas honte de ce<br />

qu’ils font, gavage compris, mais ils en sont très fiers ! Ma<br />

foi, ils ont peut-être bien raison.<br />

Hugues de Lestapis<br />

1<br />

4<br />

7<br />

C’est mignon un caneton, ceux-là ont déjà trois<br />

semaines, ils peuvent prendre la lumière et<br />

commencer à profiter du jardin.<br />

L’engraissement dure 10 jours. Le foie passe de<br />

100 g à 500 g environ, le canard a dû ingérer 7<br />

à 8 kg de nourriture. Ici, de la farine de maïs qui<br />

sera humidifiée. Avec 20 % de maïs en grain.<br />

Le canard a été abattu, son foie extrait et<br />

refroidi. Le tri des foies est effectué à main nue,<br />

au toucher, on ne garde que les meilleurs.<br />

2<br />

5<br />

Les canards passent environ trois mois et demi<br />

chez l’éleveur, entre canetière chauffée et<br />

parcours extérieurs. 90 % de sa vie se passe<br />

en plein air.<br />

Durant cette phase, à couvert, les canards (15<br />

à 20) sont dans des parcs au sol de 3 m x 1 m.<br />

L’engraisseur s’assied au milieu d’eux. 4 à 5<br />

secondes suffisent.<br />

8 9<br />

Opération déveinage (12 déveineuses chez Lafitte<br />

au rythme de 12 à 15 kg traités par heure),<br />

avant le portionnage et l’assaisonnement, sel,<br />

La France est le 1 er pays producteur et consommateur de foie gras au monde. La filière fait vivre<br />

30.000 familles dans les zones rurales et génère 100.000 emplois.<br />

poivre, épices.<br />

oublier les plumes…<br />

16 17<br />

3<br />

6<br />

Le canard mulard, croisement naturel d’un<br />

canard de Barbarie et d’une cane Pékin, assure<br />

95 % de la production du foie gras, le reste<br />

pour l’oie.<br />

La technique employée respecte l’anatomie<br />

particulière des canards (et des oies). Ces<br />

palmipèdes ont un œsophage élastique, qui<br />

leur permet de stocker du gras et de faire une<br />

réserve énergétique.<br />

Transformation tous azimuts. Magret, confits,<br />

cuisses, aiguillettes, manchons, on garde même<br />

les pattes de canard pour les Japonais, sans


Éducation<br />

Musée de Saint-Clar<br />

Retour sur les bancs de l’école<br />

L’un des musées les plus attachants du Gers se trouve à Saint-Clar.<br />

Il retrace la grande histoire de l’École publique. Interview d’Élodie Lacrampe, son ambassadrice enthousiaste.<br />

Tourisme<br />

Saint-Mont<br />

Un terroir, des vignerons, une fête<br />

Décalée en septembre pour des raisons sanitaires, Saint-Mont Territoire en fête<br />

a mobilisé un public nombreux autour de ses vins et de ses domaines emblématiques.<br />

Elodie Lacrampe « en compagnie » de Jules Ferry (1832-1893),<br />

l’homme qui a rendu l’école obligatoire et laïque, et permis aux<br />

filles d’accéder au secondaire.<br />

Le <strong>Canard</strong>.<strong>Gascon</strong> : Pouvez-vous<br />

nous décrire le musée ?<br />

Élodie Lacrampe : Notre musée est<br />

situé dans le village de Saint-Clar, au<br />

nord-est du Gers, à 15 min de Fleurance,<br />

dans la première école communale,<br />

dont l’originalité est d’être antérieure<br />

aux lois Ferry (1881-1882). Pour<br />

le visiter, on doit d’abord s’engouffrer<br />

dans la cour de récréation par une petite<br />

porte qui donne directement sur la rue<br />

piétonne. Il faut contourner le marronnier<br />

puis traverser la cour pour arriver<br />

à la porte d’entrée. Le musée, qui peut<br />

paraître petit, ne compte pas moins de<br />

huit salles d’exposition permanente,<br />

Le musée ne paie pas de mine d’extérieur, mais à l’intérieur,<br />

c’est un superbe espace de plus de 600 mètres carrés.<br />

une grande salle d’expositions temporaires,<br />

une authentique salle de classe<br />

et enfin une boutique de souvenirs.<br />

Les visiteurs ont généralement besoin<br />

d’une heure et demie pour découvrir et<br />

apprécier les lieux.<br />

L.C.G : Peut-on dire qu’il s’agit d’un<br />

« grand » musée ?<br />

E. L. : Sans aucun doute ! C’est un<br />

grand et beau musée qui gagne à être<br />

connu. Il est grand par la richesse et la<br />

pluralité de ses collections, mais aussi<br />

par sa volonté de présenter en même<br />

temps l’histoire de l’école publique en<br />

France et le quotidien en Gascogne des<br />

maîtres d’école, des élèves et de leurs<br />

familles, dans les années 1900-1930.<br />

C’est donc un espace culturel ancré<br />

Porte plumes, plumes Baignol & Farjon, cahier d’écriture, le<br />

matériel de base de l’époque.<br />

dans l’élément le plus important de la<br />

vie : l’enfance. Mais c’est aussi une<br />

visite qui amène à s’interroger sur les<br />

tenants et les aboutissants d’une école<br />

pour tous et pour toutes, indépendante<br />

de toute emprise politique, économique,<br />

religieuse ou idéologique.<br />

L.C.G : C’est un espace muséographique<br />

qui peut toucher tout le<br />

monde ?<br />

E. L. : La principale caractéristique de<br />

ce musée est de ne laisser personne indifférent.<br />

L’histoire de l’École publique<br />

est infiniment riche et variée et elle<br />

peut être appréhendée de différentes<br />

Les pupitres, les grandes cartes [coloniales], les planches de<br />

sciences naturelles… certains lecteurs du <strong>Canard</strong> <strong>Gascon</strong> s’en<br />

souviennent sûrement.<br />

manières selon les centres d’intérêts<br />

de chacun. On découvre le musée par<br />

des jeux de rôle dans la vieille classe,<br />

par le déguisement dans les vestiaires,<br />

par la lecture grâce aux différents panneaux<br />

pédagogiques qui jalonnent<br />

l’exposition, par les sons des différents<br />

moniteurs audio, par l’observation de<br />

différents objets des collections, par<br />

l’expérimentation en participant à une<br />

séance d’écriture à la plume métallique,<br />

mais aussi par le dialogue avec les personnes<br />

en charge de l’accueil.<br />

Propos recueillis par Jean-Claude Ulian<br />

Musée de l’École publique<br />

1, rue de la Poste, 32 380 Saint-Clar<br />

Tél. 05 62 66 32 78<br />

Ouvert d’octobre à mai de 14 h à 18 h.<br />

Temps fort de Saint-Mont Territoire en fête, le pique-nique à l’ombre du monastère, devenu depuis un restaurant réputé<br />

et un hôtel haut de gamme<br />

Certains ont couru le « Trail Epicurien<br />

» au cœur des vignes, d’autres<br />

ont pris le bus pour être déposés de château<br />

en château pour déguster les cuvées<br />

du lieu, anciennes parfois, d’autres encore<br />

ont préféré le pique-nique musical<br />

au monastère de Saint-Mont, mais quel<br />

que soit le transport ou l’équipage, le<br />

chemin ne menait au fond qu’à un seul<br />

endroit : au verre. D’ordinaire, ce grand<br />

rendez-vous culturel et gastronomique<br />

se tient le dernier week-end de mars. La<br />

coopérative de Plaimont, grand ordonnateur<br />

de l’événement, a dû se résoudre<br />

à le décaler fin septembre. Le public,<br />

venu du Gers mais aussi des Landes et<br />

de Haute-Garonne, a suivi. 1000 inscrits<br />

le samedi 18 septembre, en dépit d’une<br />

météo capricieuse.<br />

Rosé lunaire des Bois Mathieu<br />

L’occasion pour Plaimont d’insister sur<br />

les vins de l’AOC Saint Mont, sur ce<br />

qu’elle arrive à en faire, et de montrer<br />

ses châteaux, Les Bois Mathieu, Saint-<br />

Go et Sabazan, ce dernier absolument<br />

magique. Il y a d’ailleurs un Parcours<br />

Châteaux, une visite guidée en bus d’un<br />

peu plus de trois heures, où l’on est accueilli<br />

par des vignerons qui maîtrisent<br />

leur sujet (œnologique, géologique,<br />

historique…), où l’on boit, notamment,<br />

ce rosé « lunaire » des Bois Mathieu,<br />

car cultivé suivant le cycle de lune, ou<br />

ce Sabazan rouge de 1999, d’une tenue<br />

incroyable avec des tanins encore là et<br />

toujours un peu d’acidité. À Saint-Go,<br />

en pleines vendanges, les chocolats<br />

des Gourmandises d’Alice ont permis<br />

des associations aromatiques renversantes,<br />

tant avec les blancs qu’avec les<br />

rouges. Fin du voyage au monastère de<br />

Saint-Mont, dont les murs majestueux<br />

appartiennent à la coopérative. Le président<br />

Joël Boueilh est là, son directeur<br />

général Olivier Bourdet-Pees, un œil<br />

sur le conservatoire de cépages voisin.<br />

« Plaimont est très engagé en recherche<br />

et développement, on recrute des chercheurs,<br />

en fait surtout des chercheuses.<br />

Ce sont les femmes qui vont faire l’avenir<br />

de la coopérative ! ».<br />

Hugues de Lestapis<br />

Olivier Bourdet-Pees a fait en sorte que le monastère de<br />

Saint-Mont entre dans le patrimoine de la coopérative.<br />

Damien au chevet des grosses grappes de Saint-Go,<br />

il est temps de vendanger.<br />

À Sabazan, on ne plaisante pas avec la taille du verre !<br />

18 19


Culture<br />

SOS langue occitane<br />

Un risque de disparition<br />

De moins en moins de locuteurs, toujours plus âgés, et en même temps une grosse cote d’amour,<br />

tels sont les résultats ambivalents d’une enquête sociolinguistique sur la pratique de la langue occitane, révélés fin août.<br />

High-Tech<br />

L’incroyable histoire de Marc Lassus<br />

L’ex-géant des cartes à puces<br />

Le Béarnais à l’origine de la société française Gemplus, leader mondial des cartes à puce,<br />

a vécu une descente aux enfers qui l’a laissé ruiné. Il vient d’en faire un livre et fourmille à nouveau de projets.<br />

La croix occitane<br />

Parlons-en donc de cette langue occitane,<br />

dont le gascon est (pour<br />

certains) un dialecte. Elle n’est pas<br />

au mieux selon l’enquête pilotée ces<br />

derniers mois par l’Office public de la<br />

langue occitane (OPLO), groupement<br />

d’intérêt public né en 2016. Le bilan,<br />

dévoilé le 31 août, est à première vue<br />

alarmant : parmi les quelque 8000 personnes<br />

interrogées entre les régions<br />

Nouvelle-Aquitaine et Occitanie (+<br />

le Val d’Aran en Espagne), seulement<br />

7 % d’entre-elles déclarent le parler,<br />

soit 3 à 4 points de moins que la précédente<br />

consultation de 2010. Les locuteurs<br />

sont à 66 % des hommes, habitant<br />

pour 56 % d’entre eux en zone rurale, et<br />

ils ont appris l’occitan à 70 % dans leur<br />

propre famille, ce qu’on imagine assez<br />

bien. On ne trouve que 14 % de parents<br />

d’enfants de moins de 18 ans pour indiquer<br />

que leur progéniture suit ou a suivi<br />

des cours d’occitan.<br />

Un plébiscite pour le maintien<br />

Ceux qui parlent (encore) occitan le<br />

font dans la sphère privée à 79 %, et<br />

c’est surtout dans la presse de proximité<br />

qu’ils déclarent la lire à 66 %. Le <strong>Canard</strong><br />

<strong>Gascon</strong>, qui retrouve sa page bilingue<br />

dans ce numéro après une courte<br />

interruption, fait donc œuvre utile.<br />

Mais ce n’est pas suffisant ! L’OPLO<br />

le dit sans détour, il y a un « risque<br />

de disparition » de la langue occitane<br />

à terme, alors même, insiste l’office,<br />

que les deux régions « enquêtées » font<br />

partie des destinations préférées des<br />

Français. Et alors même, surtout, que<br />

85 % des 8000 personnes interrogées<br />

estiment que l’occitan permet aux gens<br />

de s’attacher à leur territoire, et qu’elles<br />

sont 92 % à souhaiter son maintien ou<br />

son développement. Notamment via<br />

une présence renforcée dans les médias,<br />

entre presse écrite et podcast pour<br />

les plus jeunes. Deux tiers d’entre eux<br />

estiment que l’occitan doit sortir de la<br />

Un flûtiste de renommée internationale, François Veilhan, et<br />

deux conteuses, Danièle Bertin, et Véronique Destrat (ici), une<br />

soirée légendaire et bilingue dans la vieille église de Saint-Clar.<br />

sphère privée, à l’école en premier lieu,<br />

et huit sur dix se disent favorables à<br />

des actions publiques, par exemple des<br />

pratiques bilingues au théâtre. L’enseignement<br />

est un levier naturel, et<br />

puissant. L’enquête montre que dans<br />

les départements où l’offre scolaire est<br />

significative, le nombre de locuteurs<br />

décroît moins qu’ailleurs. Pyrénées-Atlantiques,<br />

Aveyron ou Lozère, voilà le<br />

trio des résistants. Mis bout à bout, il y<br />

aurait encore quelque 542 000 locuteurs<br />

de langue occitane en Nouvelle-Aquitaine<br />

et Occitanie.<br />

On apprend au passage que l’Éducation<br />

nationale a doublé ses subventions<br />

pour <strong>2020</strong>-2021, et que l’OPLO développe<br />

une « stratégie territoriale » visant<br />

à valoriser les langues régionales,<br />

concurrencées au lycée par les langues<br />

étrangères.<br />

Au carrefour<br />

des langues romanes<br />

Pour Charline Claveau, présidente de<br />

l’OPLO, « l’occitan, situé au carrefour<br />

des langues romanes, se positionne<br />

comme une clé d’entrée vers ses voisines<br />

espagnoles, italiennes et portugaises<br />

». On ne peut qu’applaudir à ces<br />

intentions et dans un prochain numéro,<br />

nous verrons ce qu’il en est dans le<br />

Gers, spécifiquement. De temps à autre,<br />

on a la chance de pouvoir assister à des<br />

représentations pour partie bilingues.<br />

Comme le 5 septembre dernier à Saint-<br />

Clar dans la vieille église sous la houlette<br />

de Jean-Claude Ulian et de Roger<br />

Teissier, avec le concours de la galerie<br />

l’Arcade. Comme une veillée d’autrefois,<br />

avec en toile de fond les dessins<br />

du regretté Pertuzé, fin connaisseur des<br />

contes occitans.<br />

Hugues de Lestapis<br />

Carte des langues occitanes<br />

Marc Lassus, ex PDG de Gemplus, ici à Orthez.<br />

L<br />

’homme a eu les honneurs du Wall<br />

Street Journal et du Times. En<br />

France, le Nouvel Économiste en avait<br />

fait « L’Homme de l’Année » en 1994.<br />

C’est le même que l’on rencontre en<br />

Béarn, 26 ans plus tard, à l’occasion<br />

d’un livre qu’il vient de co-écrire*<br />

sur sa vie en forme de toboggan :<br />

des marches qui l’ont mené jusqu’à<br />

l’Olympe, puis une chute vertigineuse,<br />

fomentée, affirme-t-il, par les services<br />

secrets américains CIA et NSA. Au<br />

cœur de l’histoire, il y a une puce, ce<br />

circuit intégré que des chercheurs ont<br />

réussi un beau jour à insérer dans une<br />

carte de moins de 1 mm d’épaisseur.<br />

Une révolution dont Marc Lassus a<br />

été l’un des acteurs. Rien ne prédisposait<br />

ce fils d’instituteurs béarnais, natif<br />

d’Orthez, à devenir le personnage qu’il<br />

a été. Sinon de solides études d’ingénieur<br />

à l’INSA de Lyon, et la chance<br />

de s’être trouvé employé aux US par la<br />

firme américaine Motorola à la fin des<br />

années 1960. C’est l’époque des nouveaux<br />

composants électroniques, ces<br />

semi-conducteurs qui préfigurent les<br />

actuels microprocesseurs. Il se trouve<br />

que Marc Lassus a une passion : la miniaturisation.<br />

Il est au bon endroit. Les<br />

progrès sont foudroyants. Songez qu’à<br />

l’époque, pour transporter une mémoire<br />

d’un mégaoctet, il fallait un camion de<br />

15 tonnes. Aujourd’hui, pour 1000 fois<br />

plus de mémoire, 1 gramme suffit…<br />

Des milliards de cartes<br />

En 1979 Marc Lassus croise le concept<br />

de la carte qui pourra porter la puce.<br />

L’idée a été brevetée en 1974 par un<br />

certain Roland Moreno, qui a eu lui<br />

aussi son heure de gloire. Peu importe,<br />

Marc Lassus en pressent tout de suite<br />

le potentiel : portable, sécurisé et universel.<br />

Mais on est encore au stade du<br />

prototype. Loin de l’industrialisation.<br />

Embauché chez Matra-Harris par Jean-<br />

Luc Lagardère, puis chez Thomson-Semi-conducteurs<br />

par Alain Gomez, Marc<br />

Lassus creuse la question. En 1989,<br />

malgré le scepticisme environnant, il<br />

crée Gemplus avec quatre camarades<br />

ingénieurs en hypothéquant ses biens,<br />

avec pour seul et unique client France<br />

Télécom. Il va fabriquer pour eux ces<br />

cartes que nous mettions autrefois dans<br />

les « publiphones », la première vraie<br />

application d’une carte à mémoire (on<br />

n’en est pas encore aux opérations de<br />

paiement). En 1997, l’entreprise produisant<br />

des milliards de cartes pour servir<br />

le monde – cartes SIM notamment –<br />

est numéro un mondial de la fabrication<br />

de cartes à puces, avec des partenaires<br />

puissants autour de table comme General<br />

Electric, Dassault, le géant japonais<br />

des Télécoms KDD, la prestigieuse famille<br />

allemande Quandt (BMW).<br />

Ombrières photovoltaïques<br />

pour les vignobles<br />

L’affaire déraille au moment de l’entrée<br />

d’un fonds américain au capital, Texas<br />

Pacific Group (TPG), vu comme une<br />

promesse d’entrée sur le marché américain,<br />

qui privilégie depuis toujours une<br />

autre technologie, un système à piste<br />

magnétique. Marc Lassus est mis peu à<br />

peu hors-jeu par son nouvel actionnaire<br />

majoritaire, qui va s’employer à le discréditer,<br />

à le couper de ses employés,<br />

jusqu’à l’accuser de détournement<br />

d'argent au détriment de Gemplus. Un<br />

cauchemar. Dans son livre, Marc Lassus<br />

donne sa vérité. « Le petit gars du<br />

Sud-Ouest n’aura pas pesé bien lourd<br />

face à l’armada yankee », déterminée<br />

à utiliser ce produit pour espionner le<br />

monde entier, soupire-t-il encore aujourd’hui.<br />

Il est toutefois passé à autre<br />

chose. Un concept de serre autonome<br />

et numérique, des ombrières photovoltaïques<br />

sur les cultures sensibles et les<br />

vignobles, des panneaux solaires pour<br />

exploiter l’immense réserve foncière<br />

des transports ferroviaires, des systèmes<br />

de dessalement d’eau via sa société<br />

Watenergy, des enjeux vitaux pour<br />

la planète comme l’exploitation de la<br />

technologie LiFi utilisant le potentiel<br />

extraordinaire de la lumière bien plus<br />

performante et sécuritaire que les ondes<br />

radio (WiFi notamment). Il a l’oreille<br />

de deux autres Béarnais : François<br />

Bayrou, tout nouveau Commissaire au<br />

Plan, et aussi du nouveau PDG de la<br />

SNCF. Marc Lassus, pas mort !<br />

Hugues de Lestapis<br />

*La Puce et le Morpion, par Marc Lassus et<br />

Bruno Charlaix, Édition Librinova :<br />

19,90 € et 8,99 € (e-book)<br />

20 21


Histoire<br />

L'escalier monumental d'Auch<br />

Le monument le plus visité du Gers<br />

Achevé en 1863, l’édifice relie le cœur historique à la ville basse sur 35 m de dénivellation avec 234 marches<br />

(374 au total avec les doubles volées). On y trouve l’effigie du plus célèbre des <strong>Gascon</strong>s, d’Artagnan.<br />

L'escalier monumental d'Auch (© Fotolia.com)<br />

Encore traumatisés par la répression<br />

des opposants au coup d’État de Napoléon<br />

III (465 émeutiers jugés et 355<br />

déportations prononcées ) et à l’écart de<br />

l’essor industriel que connaît le pays, le<br />

Gers et Auch tout particulièrement subissent<br />

la crise. La décennie 1850-1860<br />

enregistre deux périodes de chute des<br />

prix agricoles. Misère et chômage sont<br />

le lot courant. Après des émeutes politiques<br />

va-t-on faire face à des émeutes<br />

de la faim ? Le député bonapartiste Adolphe<br />

Granier de Cassagnac exhorte régulièrement<br />

préfet et président du tribunal<br />

à réprimer tout mouvement avec la plus<br />

grande vigueur. C’est lui qui, quelques<br />

années plus tard, introduit à la cour et<br />

ayant l’oreille de l’impératrice Eugénie,<br />

sera le leader du groupe de pression favorable<br />

à la guerre contre la Prusse.<br />

Une politique de grands travaux<br />

Deux personnages éminents ont l’idée et<br />

se donnent les moyens d’une politique<br />

de grands travaux d’urbanisme à même<br />

d’embellir la ville d’Auch, mais également<br />

– intelligence politique – de donner<br />

du travail à des centaines d’Auscitains<br />

pendant des années : le préfet Paul<br />

Féart et l’archevêque Antoine de Salinis.<br />

Féart est en poste de 1852 à 1858 et a<br />

donc été l’organisateur de la répression<br />

évoquée en introduction. Mais il entend<br />

désormais pacifier les rapports de la population<br />

avec le nouveau régime. Quant<br />

à Mgr de Salinis, il est à même, par son<br />

entregent parisien, d’obtenir les subventions<br />

nécessaires.<br />

Le Conseil Général rechigne un temps<br />

à voter les crédits sollicités. Le maire<br />

d’Auch, Jean-Paul Soullier, avec l’aide<br />

de l’imprimeur et conseiller municipal<br />

Jean Foix convainc le Conseil Municipal<br />

de souscrire l’emprunt nécessaire. La<br />

liste des travaux serait trop longue, citons-en<br />

trois : l’édification du tribunal en<br />

haut des allées d’Etigny, la modernisation<br />

du champ de foire en contrebas nord<br />

des mêmes allées (avec la suppression<br />

de bâtiments municipaux qui tenaient à<br />

la fois de la grange agricole en ruine et<br />

du dépôt d’ordures,) et, enfin et surtout,<br />

l’escalier monumental.<br />

Édifié entre 1858 et 1863<br />

L’escalier peu après sa construction et la passerelle Saint-Pierre<br />

en bas (Photographie Eugène Trutat, après 1863)<br />

Tout d’abord s’imposait la démolition du<br />

quartier de la chanoinie, actuelle place<br />

Salinis. Il s’agissait des restes du cloître<br />

et d’une série de maisons individuelles<br />

inoccupées et en mauvais état. Les chanoines,<br />

issus de la bonne société auscitaine,<br />

logeaient ailleurs plus luxueusement.<br />

Cette place constituerait un beau<br />

balcon sur le Gers et la basse ville. Mais<br />

que faire des gravats ? Et si l’on créait<br />

une liaison piétonnière entre la haute et<br />

la basse ville digne des édifices voisins :<br />

cathédrale, Officialité, tour d’Armagnac<br />

? Le plan retenu est dû à Léopold<br />

Gentil, architecte départemental et diocésain.<br />

Les travaux commencent en 1858<br />

et, en 1863, un édifice de 234 marches<br />

(374 au total en comptant celles de la<br />

partie à double volée) pour un dénivelé<br />

de 35 m rappelant certaines prestigieuses<br />

réalisations italiennes est inauguré. Malheureusement,<br />

le soubassement issu des<br />

démolitions, disparate et donc mal compacté,<br />

finit par ébranler l’édifice. De plus<br />

la pierre du bâti est friable et les inondations<br />

de 1897 puis 1977 provoquent<br />

l’effondrement de la partie basse.<br />

L’usure du temps<br />

puis la renaissance<br />

Des crédits publics et un mécénat important<br />

(grandes entreprises, particuliers,<br />

Américains amoureux de l’architecture<br />

de la vieille Europe) permettent, de 2009<br />

à 2017, une restauration dans les règles<br />

de l’art. Lieu de visites touristiques, de<br />

simple flânerie, liaison la plus directe<br />

entre basse et haute ville, mais aussi lieu<br />

festif, l’escalier monumental renaît. Bien<br />

sûr, on trouve sur son palier inférieur une<br />

statue de d’Artagnan, le plus célèbre des<br />

<strong>Gascon</strong>s, œuvre de Firmin Michelet datant<br />

de 1931 ; judicieusement escamotée<br />

pendant la Seconde Guerre mondiale,<br />

elle a évité d’être fondue à la différence<br />

de nombreuses sculptures gersoises en<br />

bronze. Sur le palier supérieur, on peut<br />

voir une autre œuvre, « l’Observatoire<br />

du Temps », de Jaume Pensa qui commémore<br />

les terribles inondations de 1977.<br />

Agrémenté d’essences diverses et, en<br />

particulier depuis 2017, de plus de<br />

400 pieds de vigne grâce aux vignerons<br />

de Saint-Mont, l’escalier connaît déjà<br />

l’amorce de festivités vinicoles à l’instar<br />

de Montmartre, en attendant une cuvée<br />

spéciale. Il s’y déroule aussi une course<br />

pédestre contre la montre.<br />

Atelier Histoire du Clan<br />

Histoire<br />

Blaise de Monluc<br />

De sang et d’encre<br />

Cadet de Gascogne devenu maréchal, Monluc est une haute figure des guerres de religion du XVI e siècle.<br />

C’est aussi un écrivain remarquable et, pour certains, un soudard sans moralité.<br />

Un des portraits de Blaise de Monluc, vu à Saint-Puy.<br />

Le peintre lui a redonné son nez !<br />

Cinq batailles rangées, dix-sept assauts<br />

de forteresses, onze sièges de<br />

cités, ce sont les faits d’armes de Messire<br />

Blaise de Monluc de Lasseran de<br />

Massencomme, seigneur gascon né à<br />

Saint-Puy en 1502.<br />

Simple soldat à dix-sept ans, Blaise de<br />

Monluc mourra maréchal de France. Le<br />

soldat fait le choix de son arme, ce sera<br />

l’infanterie, les compagnies de gens<br />

de pied. S’en suivront trente années<br />

glorieuses en Italie sous le commandement<br />

de François I er , pendant lesquelles<br />

il s’illustrera à Sienne et Pavie. Distingué<br />

par Henri II, il est ensuite dans les<br />

petits papiers de Catherine de Médicis.<br />

La régente le charge de défendre la<br />

Guyenne, la plus grande province de<br />

l’époque. Contre qui ?<br />

Un pays déchiré<br />

La vague des huguenots, qui progresse à<br />

une vitesse fulgurante. Déjà un dixième<br />

de la population française est protestant<br />

! C’est le début des guerres de religion,<br />

elles déchirèrent la France autant<br />

que la Révolution de 1789. Blaise de<br />

Monluc prend le parti « d’user de toutes<br />

les cruautés qu’il pourrait ». Au vrai,<br />

catholiques et réformés vont rivaliser<br />

d’excès. À Bazas, les huguenots brisent<br />

les autels à la hache tandis qu’on chante<br />

la messe à la cathédrale, pillent les sacristies,<br />

massacrent moines et prêtres.<br />

Sur le chemin de Nérac, Monluc donne<br />

ordre de passer « sur le ventre » d’un<br />

contingent de protestants. Les rescapés<br />

s’enfuient. On tire sur tous ces malheureux<br />

comme sur du gibier, le reste<br />

se noie dans la Baïse. « Nous étions si<br />

peu, dit Blaise le catholique, que nous<br />

ne pouvions suffire à tuer tout. » Dans<br />

Lectoure protestante, les catholiques<br />

s’engouffrent par la fontaine Diane. La<br />

ville capitule, mais trahison, on tire sur<br />

les parlementaires catholiques. Riposte<br />

de Monluc, furieux : à Terraube, il fait<br />

tuer tous les prisonniers. « Après cet<br />

horrible carnage, on les jetait dans un<br />

puits profond ! ».<br />

Le château de Monluc, à Saint-Puy, est aussi le berceau du<br />

Pousse-Rapière, fameux cocktail gascon à base de liqueur<br />

d’armagnac et d’oranges amères.<br />

Masque de cuir<br />

À Condom et à La Romieu, le protestant<br />

Montgommery fait des siennes, il pille<br />

même les fabuleux trésors de la collégiale.<br />

Monluc n’en peut mais. C’est la<br />

disgrâce. Le voilà expédié en Béarn<br />

pour mener un autre siège. Soudain, un<br />

coup d’arquebuse lui arrache le nez et<br />

la joue. Le guerrier est en sang, à peine<br />

vivant. Mais rien ne peut l’arrêter, il attaque<br />

la ville, elle demande une trêve.<br />

Le <strong>Gascon</strong> promet la vie sauve aux<br />

habitants. Et sitôt introduit dans le château,<br />

il ordonne de massacrer les habitants.<br />

Certains diront que le masque de<br />

cuir qu’il portera le reste de sa vie « cachait<br />

la hideuse férocité de son âme. »<br />

Laissant derrière lui les champs de bataille,<br />

Monluc range son épée et prend<br />

la plume pour rédiger ses Commentaires<br />

dans son château d’Estillac. L’écrivain<br />

au masque de cuir va construire sa légende<br />

de son vivant. Doué d’une mémoire<br />

prodigieuse, Monluc a enregistré<br />

toutes les batailles, toutes les pendaisons,<br />

et le moindre aspect de terrain.<br />

Monluc plaide en passant sa cause :<br />

« Les péchés que j’ai commis, ou plutôt<br />

que la guerre m’a fait commettre, car<br />

avec douceur vous ne viendriez jamais<br />

à bout de ces gens-là. » Cela ne l’empêche<br />

pas de proclamer que la guerre est<br />

le plus noble des métiers, s’il est exercé<br />

avec une exigence de vertu morale.<br />

Au cours des siècles, les Commentaires<br />

ont été lus et relus par les gens de<br />

guerre, les historiens et les politiques.<br />

Accusé d’être fanatique et cruel, sinon<br />

soudard, le <strong>Gascon</strong>, amoureux de la<br />

qualité du style, appartient quand même<br />

à la culture de la Renaissance. N’était-il<br />

pas lié au philosophe Montaigne ?<br />

Ingrid Carlander<br />

22 23<br />

Blaise de Monluc


Bonnes adresses<br />

Carrefour Market<br />

La réponse à tout<br />

Les Carrefour Market de Fleurance, Nogaro, Mirande et Gimont ont bien passé le pic de la rentrée.<br />

Un succès lié à un nombre toujours accru de références.<br />

Des animations gustatives qui tournent, ici la cuisine créole Le rayon marée, symbole de la qualité-fraîcheur du magasin Fournitures scolaires et bureautique, le plein de références<br />

«<br />

Ici, on trouve tout », résume Frédéric Floriant<br />

en pointant l’abondance du rayon<br />

main à la pâte, et il fait goûter les spécialités,<br />

Accords directs<br />

comme la planète. Un animateur met la<br />

avec les producteurs locaux<br />

Rentrée : cahiers, stylos, feuilles, cartouches<br />

les acras, boudins, houmous, kefta… « Une<br />

À Fleurance, Frédéric Floriant fait un effort<br />

singulier sur les rayons Marée et Frais,<br />

d’imprimantes, etc. Le directeur du Carrefour<br />

Market de Fleurance a fait le choix d’un<br />

leurs sens », commente Frédéric Floriant en<br />

façon de distraire les gens et d’ouvrir aussi<br />

n’hésitant pas à passer des accords directs<br />

assortiment très large pour les fournitures de<br />

connaisseur. Tout cela se fait naturellement<br />

avec des producteurs locaux. D’où cette<br />

bureau, qui le place un cran au-dessus de la<br />

dans le respect des consignes sanitaires du<br />

belle collection de fromages, certains du<br />

concurrence dans sa zone de chalandise. Ses<br />

moment.<br />

terroir, qui émerge et vient chatouiller les<br />

homologues de Nogaro, Mirande et Gimont papilles. Sur le grand écran posé en surplomb,<br />

un film vient raconter la philosophie<br />

Retour aux horaires d’hiver<br />

ont fait le même pari, payant. Les Carrefour<br />

Market, au contraire d’autres enseignes,<br />

Depuis le 6 septembre, le Carrefour Market<br />

de l’enseigne et montre les savoir-faire des<br />

gardent une latitude sur la composition de<br />

de Fleurance est revenu à ses horaires disons<br />

gens du cru. Une « grande surface » certes,<br />

leurs rayons. Les gérants connaissent leurs<br />

habituels, soit 8 h 30 -19 h 30 du lundi au samedi<br />

et 9 h - 12 h 30 le dimanche. Ces plages<br />

mais très ancrée dans son territoire. Et au<br />

clients qu’ils croisent tous les jours, ils sont besoin joyeuse. À Fleurance, des animations<br />

donc les mieux placés pour répondre à leurs<br />

avaient été élargies entre le 29 juin et le 5 septembre<br />

dernier.<br />

« gustatives » accueillent les clients. Cuisine<br />

créole, libanaise, asiatique, ça demandes, voire les anticiper.<br />

tourne,<br />

Vos magasins Carrefour Market<br />

Bonnes adresses<br />

Garage Polesello Fils (Montréal-du-Gers)<br />

La réparation agricole en héritage<br />

Denis Polesello et les engins Joper<br />

Denis Polesello<br />

Denis Polesello a de qui tenir.<br />

En premier lieu de son père,<br />

Orlando, créateur en 1982 d’un garage<br />

de mécanique agricole à son<br />

nom, à Montréal-du-Gers, qui se<br />

situe sur la route oblique de l’église<br />

de Saint-Genens, à l’entrée du village<br />

en venant de Condom. Orlando<br />

était un ancien forgeron, la forge<br />

trône toujours dans l’actuel établissement.<br />

Denis, qui a travaillé chez<br />

STPAG de Valence-sur-Baïse puis<br />

Sarreméjean au début de sa carrière,<br />

a pris la succession d’Orlando<br />

en 2011, il y a presque 10 ans.<br />

Il a réaménagé et agrandi le site en<br />

2018. Il a hérité de la clientèle paternelle<br />

qu’il a su conserver grâce à<br />

son expertise dans la réparation de<br />

machines agricoles et d’engins de<br />

motoculture. Seul à la manœuvre,<br />

Denis Polesello a beaucoup de<br />

clients de la filière viticole, nombreux<br />

dans le secteur de Montréal<br />

et alentour.<br />

Agent exclusif<br />

de quatre marques<br />

Révision de machines à vendanger,<br />

réparations au besoin<br />

avant la saison, interventions et<br />

dépannages rapides quand le<br />

matériel est de sortie, Denis est<br />

un partenaire indispensable des<br />

vignerons et autres agriculteurs,<br />

qui lui commandent aussi du matériel<br />

neuf. Il est agent exclusif, « le<br />

seul dans le Gers », de marques<br />

réputées : TMC Cancela (broyeurs<br />

et girobroyeurs), Tomix (pulvérisateurs),<br />

Joper (travail au sol), et<br />

Stagric (rogneuses et rampes).<br />

Des outils de qualité, fiables, dont il<br />

a les principales pièces détachées<br />

dans son garage, ou alors qu’il<br />

peut faire venir rapidement. Les<br />

clients apprécient cette réactivité.<br />

Travaux de soudure<br />

Denis n’a pas choisi ces marques<br />

au hasard, il connaît les constructeurs<br />

à qui il fait remonter le ressenti<br />

client. Denis est aussi agent<br />

CASE IH (tracteurs), et pour la<br />

motoculture de plaisance (tondeuses,<br />

tronçonneuses, débroussailleuses…),<br />

qui est pour lui une<br />

activité importante, il vend — et répare<br />

— les marques Stihl-Viking et<br />

Cub-Cadet et beaucoup d’autres.<br />

Derrière son comptoir, des pièces<br />

de rechange, et aussi des consommables<br />

(huiles Mobil, la solution<br />

AdBlue, filtres, boulonnerie…).<br />

Denis Polesello n’a vraiment pas le<br />

temps de souffler. Quand il a fini de<br />

réparer, il effectue des travaux de<br />

soudure et réalise des choses sur<br />

mesure. Ce jour-là, il finissait une<br />

grille pour une école communale.<br />

Mais il fabrique aussi des regards,<br />

des puits, des portails, etc.<br />

Garage Polesello Fils<br />

32250 Montréal-du-Gers<br />

Tél. : 05 62 29 42 44/06 86 78<br />

57 10<br />

denispolesello@hotmail.fr<br />

Carrefour Market<br />

Fleurance<br />

Carrefour Market<br />

Mirande<br />

Carrefour Market<br />

Gimont<br />

Market<br />

Nogaro<br />

Frédéric Floriant<br />

à Fleurance<br />

Valérie Tisné<br />

à Mirande<br />

Christelle Aubier<br />

à Gimont<br />

Dominique<br />

Séguet à Nogaro<br />

Route de Lectoure<br />

32500 Fleurance<br />

05 62 06 63 65<br />

Bd des Pyrénées<br />

32300 Mirande<br />

05 62 66 86 60<br />

Bd du Nord<br />

32200 Gimont<br />

05 62 67 74 75<br />

Avenue Périé<br />

32110 Nogaro<br />

05 62 09 03 55<br />

24 25


Livres, musique...<br />

Lire, sentir et écouter<br />

Nouveautés d'ici et d'ailleurs<br />

Parlons gascon - Parlem gascon<br />

Le retour de la rubrique bilingue<br />

Longtemps confiée à Bertrand Duthil, salut amical à lui, la rubrique Parlem gascon est désormais réalisée<br />

en partenariat avec l’Ostau <strong>Gascon</strong>, fédération auscitaine qui regroupe 27 associations, dont Radio Pais.<br />

Toi, le Gers qui as su nous<br />

prendre dans tes bras.<br />

Jean-Michel Rodriguez<br />

Les Éditions Sydney Laurent<br />

21,90 €<br />

Un joli (et long) titre, plein de reconnaissance<br />

aussi. L’auteur relate la<br />

saga de la famille Martini depuis<br />

son arrivée en France en 1926,<br />

dans le Gers. Ce sont des immigrés<br />

italiens, ils ont fui le fascisme, et ont<br />

trouvé en Gascogne une terre d’accueil.<br />

Le livre est traversé par les<br />

grands soubresauts du XX e siècle,<br />

qui ont provoqué tant de mouvements<br />

de population. Jean-Michel<br />

Rodriguez, né lui-même en Algérie,<br />

sait de quoi il parle. Il entend<br />

témoigner du rôle des immigrés<br />

dans l’histoire française, et place<br />

la famille Martini dans une propriété<br />

agricole de Gascogne, qui<br />

va connaître la mécanisation et la<br />

modernisation. Un bouleversement.<br />

Bien des lecteurs retrouveront des<br />

figures, attitudes, mentalités, qu’ils<br />

ont connues. Jean-Michel Rodriguez<br />

a été un temps sur la propriété<br />

familiale avant de devenir<br />

paysagiste, et de travailler comme<br />

agent technique fruits et légumes à<br />

Bordeaux. Une fois marié au début<br />

des années 1980, il a pris les commandes<br />

d’un camion-magasin qui<br />

s’en est allé vendre des articles de<br />

mercerie sur les marchés. Il a fait<br />

ça jusqu’à la retraite, ruminant sans<br />

doute les livres qu’il allait écrire,<br />

qu’il se devait d’écrire.<br />

H.L.<br />

Fahrenheit -Zone 51<br />

Ki-Mono Records<br />

15 €<br />

Distribution RIM<br />

Fahrenheit, un de plus anciens<br />

groupes de rock de la région,<br />

se rappelle à notre bon souvenir<br />

et revient avec l’opus Zone 51.<br />

Originalité, l’album a été pressé<br />

en… vinyl sous le label Ki-Mono<br />

Records, celui de Philippe Vernay<br />

du Vinyl Café de Mont-de-Marsan.<br />

Fahrenheit, c’est du rock francophone,<br />

à mi-chemin de Trust et Téléphone.<br />

La pochette de Zone 51,<br />

assez frappante, est signée Tommy<br />

Lorente. Et les huit morceaux envoient<br />

du bois comme on dit chez<br />

les sportifs, avec des textes qui<br />

roulent des mécaniques et versent<br />

volontiers dans la provoc’ et le 2e<br />

degré : « Je fonce sur la voix du<br />

rail à la quête de mon herbe ». Un<br />

peu de Little Bob, de ZZ Top aussi,<br />

bref ça balance pas mal, et ça dit<br />

des choses « écrites à l’encre de<br />

Chine et composées sous influence<br />

R’N’R), comme on peut le lire sur<br />

la pochette. A chacun de trouver la<br />

signification de R’N’R… Fahrenheit,<br />

ce sont quatre complices/lascars,<br />

Philippe Lamaignère, Jean Duguay,<br />

Jean-Pierre Cortes et Paul Bastide.<br />

Le 5 septembre, ils se sont produits<br />

à Cazaubon, le 3 octobre ils seront<br />

à Graulhet. Sûrement bientôt dans<br />

le Gers. En attendant, on peut<br />

écouter certains titres sur www.reberbnation.com/fahrenheit40.<br />

A noter que le disque est distribué<br />

par le RIM (Réseau des indépendants<br />

de la musique), qui rayonne<br />

depuis Bordeaux.<br />

H.L.<br />

Une farouche liberté<br />

Gisèle Halimi<br />

avec Annick Cojean<br />

Grasset<br />

14,90 €<br />

Gisèle Halimi nous a quittés le 28<br />

juillet. Ce livre d’un entretien récent<br />

avec la journaliste Annick Cojean<br />

retrace le parcours de la petite fille<br />

juive, née en Tunisie qui va devenir<br />

l’une des plus grandes avocates<br />

françaises. Dès l’enfance, elle fait<br />

preuve d’une incroyable détermination<br />

et d'un fort caractère pour<br />

suivre des études, contre la volonté<br />

de son père et l’inertie de sa mère.<br />

Parents qui finiront par admirer leur<br />

fille quand elle connaîtra le succès<br />

de ses combats et de ses engagements.<br />

On retrouvera son esprit<br />

combattif lorsque, devenue ténor<br />

du barreau, elle brillera dans des<br />

procès retentissants pour défendre<br />

la cause des femmes en matière<br />

de viol et de droit à l’interruption<br />

volontaire de grossesse. Aussi débordante<br />

d’énergie à la fin de sa vie<br />

qu’au début, elle lance, au terme<br />

de cet entretien, trois conseils aux<br />

jeunes filles d’aujourd’hui : ayez<br />

votre indépendance financière,<br />

soyez égoïste (pensez à vous et<br />

à ce qui vous plaît pour vous épanouir),<br />

et enfin refusez l’injonction<br />

millénaire de faire des enfants à<br />

tout prix. (Elle ajoute à cela qu’ellemême<br />

a enfanté trois fois par « curiosité<br />

féministe »…)<br />

J.-L. L.B.<br />

Pucelle (tome 1 : Débutante)<br />

Florence Dupré La Tour<br />

Dargaud<br />

19,99 €<br />

Cette bande dessinée autobiographique<br />

raconte l’enfance et l’adolescence<br />

de Florence élevée dans<br />

un cocon et surprotégée par une<br />

famille d’expatriés très bourgeois<br />

où toute allusion à la sexualité n’a<br />

pas sa place. Lors de l’arrivée de<br />

son petit frère, elle est donc fermement<br />

convaincue que son papa<br />

a placé une graine dans le nombril<br />

de sa maman et que celle-ci a germé.<br />

Son imagination s’emballe et<br />

les questions se multiplient dans<br />

la tête de la gamine. Les rapports<br />

avec son père souvent absent, autoritaire,<br />

rétif à la discussion et sa<br />

mère soumise n'arrangent pas les<br />

choses. Plus dure sera la découverte<br />

de la réalité ! Et lors de l’arrivée<br />

de ses premières règles, c'est<br />

le choc… Adolescente, la jeune fille<br />

se referme alors que sa soeur, plus<br />

jolie, commence à attirer le regard<br />

des garçons. Avec humour, talent et<br />

une criante vérité, Florence Dupré<br />

La Tour nous décrit ses angoisses<br />

devant le poids de la tradition et sa<br />

façon de réagir au fil des découvertes<br />

de la vraie vie…<br />

J.-L. L.B.<br />

L’ase de Montestruc<br />

A la bisa de la glèisa de Montastruc, i a un clòt comun.<br />

Aquí los boèrs abeuran lo bestiar, e las hemnas lavan<br />

la bugada.<br />

Un ser, de caps a sies oras, e au temps deu mes mòrt,<br />

la lua se miralhava dens l’aiga deu clòt, coma auré hèit<br />

dens un gran miralh. En aqueth moment, un òme arribèc,<br />

entà hèr béver son ase. Mentre que l’ase bevèva, lo vent<br />

virèc tot d’un còp, e encrumèc lo cèu per tota la nueit.<br />

Alavetz l’òme, espaventat, partiscoc en tot cridar :<br />

- A ! Mon Diu ! A ! Mon Diu ! Mon ase s’a bevut la<br />

lua ! Mon ase s’a bevut la lua !<br />

En aqueths crits, tots los de Montastruc corrón espaventats.<br />

- Que dises, malurós ?<br />

- Mon ase s’a bevut la lua ! Mon ase s’a bevut la lua !<br />

Las gents de Montastruc espiavan dens lo cèu, dens lo clòt, e bramavan<br />

en plorar :<br />

- On ase s’a bevut la lua ! Son ase s’a bevut la lua !<br />

Autanlèu, los cònsols s’assemblèn, entà avisar, davant la pòrta de la<br />

glèisa.<br />

- Amiatz-nos l’ase que s’a bevut la lua.<br />

Los amièn l’ase peu cabestre.<br />

- Ase ! Es donc tu que t’as bevut la lua ?<br />

L’ase levèc la coa, e se botèc a bramar.<br />

- As bèth díser, aquò es tu que t’as bevut la lua. Coma haram, d’ara<br />

enlà, entà i véser pendent la nueit ?<br />

L’ase relevèc la coa, e se tornèc botar a bramar.<br />

- A ! Aquí lo cas que hès de la justicia. E ben ! Te condamnam a<br />

mòrt. Vas estar penjat.<br />

Dètz minutas mes tard, l’ase èra penjat a un aubre.<br />

Alavetz, un deus cònsols se ravisèc.<br />

- Mons amics, ça digoc, avèm despassat nòstes poders de jutges.<br />

Cèrtas, nos es permés de condamnar a mòrt ; mès n’avèm pas lo dret<br />

de hèr morir. Aqueth dret n’aparteng pas qu’au jutge-màger de Leitora.<br />

A sa plaça, jo prenguerí fòrt mau çò que veng de se passar. Entà<br />

tornar hèr la patz dab eth, enviem-lo fòrça poralha. Hasquem-lo portar<br />

tanben l’ase mòrt. Lo jutge-màger causirà un çurgent entà hèr sortir la<br />

lua presonèra deguens lo vente de la bèstia. E manca pas a Leitora de<br />

granas escalas doblas. En ne dreçar ua suu cloquèr de Sent Gervasi, un<br />

sarralhèr fòrt e hardit troberà, m’ac pensi, la manièra de tornar claverar<br />

la lua a sa plaça dens lo cèu.<br />

Çò qu’estèc dit estèc hèit. Dotze gojats de Montastruc partiscón còp<br />

sec, cargats de polardas, de capons, d’aucas e de piòcs, endeu jutge<br />

màger. Dotze onc s prengón sus las espaulas ua longa barra de casse,<br />

on penjava l’ase mòrt, estacat peus quate pès. Donc après Florença, tot<br />

angoc plan. Mès aquí, los lops de l’Arramèr sentiscón l’audor de l’ase<br />

mòrt, e arribèn a tropas, en bramar coma possedats deu Diable. Los<br />

gojats, espaventats, fotón en tèrra la poralha e mes l’ase, e s’escapèn<br />

au galòp de caps a Montastruc. En un moment, tota la poralha qu’èra<br />

empassada, e l’ase roganhat onc aus òssis.<br />

Lo lendoman, la lua arrajava dens lo cèu coma de costuma. Alavetz, los<br />

cònsols de Montastruc se sentiscón plan solatjats.<br />

- Los lops de l’Arramèr, ça digón, nos an hèit un famós servici. Ara<br />

que l’ase es minjat, lo jutge màger saberà pas que l’avèm hèit penjar.<br />

E, per la lua que s’avèva bevuda, vesètz qu’es mes fina que los lops. Se<br />

n’es escapada tota sola, e s’es tornada quilhar a sa plaça dens lo cèu.<br />

L'âne de Montestruc<br />

Au nord de l’église de Montestruc, il y a une mare communale.<br />

C’est là que les bouviers abreuvent le bétail, et<br />

que les femmes lavent le linge.<br />

Un soir, vers six heures, au mois de décembre, la lune<br />

se reflétait dans l’eau de la mare, comme elle aurait fait<br />

dans un grand miroir. À ce moment, un homme arriva<br />

pour faire boire son âne. Pendant que l’âne buvait, le<br />

vent tourna tout à coup et le ciel se couvrit pour la nuit.<br />

Alors l’homme, épouvanté, partit en criant :<br />

- Ah ! Mon Dieu ! Ah ! Mon Dieu ! Mon âne a bu la lune !<br />

Mon âne a bu la lune !<br />

À ces cris, tous les habitants de Montestruc accoururent<br />

affolés.<br />

- Que dis-tu malheureux ?<br />

- Mon âne a bu la lune ! Mon âne a bu la lune !<br />

Les gens de Montestruc regardaient le ciel, la mare, et gémissaient<br />

en pleurant :<br />

- Son âne a bu la lune ! Son âne a bu la lune !<br />

Aussitôt le conseil se réunit afin d’aviser devant la porte de l’église.<br />

- Amenez l’âne qui a bu la lune.<br />

On leur amena l’âne par le licol.<br />

- Âne ! Est-ce donc toi qui as bu la lune ?<br />

L’âne leva la queue, et se mit à bramer.<br />

- Tu as beau dire, c’est toi qui as bu la lune. Comment allons-nous<br />

faire, maintenant, pour y voir la nuit ?<br />

L’âne releva la queue, et se remit à bramer.<br />

- Ah ! Voilà toute la considération que tu as de la justice. Et bien !<br />

Nous te condamnons à mort. Tu seras pendu.<br />

Dix minutes plus tard, l’âne pendait à un arbre.<br />

Alors, un des consuls se ravisa.<br />

- Mes amis, dit-il, nous avons outrepassé nos pouvoirs de juges.<br />

Certes, nous pouvons condamner à mort ; mais nous n’avons pas le<br />

droit d’exécuter la sentence. Ce droit n’appartient qu’au juge de Lectoure.<br />

À sa place, je prendrais fort mal ce qui vient de se passer. Pour<br />

faire la paix avec lui, envoyons-lui une bonne quantité de volaille. Et<br />

faisons lui porter aussi l’âne mort. Le juge choisira un chirurgien pour<br />

faire sortir la lune prisonnière du ventre de la bête. Il ne manque pas<br />

à Lectoure de grandes échelles doubles. Et en en dressant une sur le<br />

clocher de Saint-Gervais, un serrurier fort et hardi trouvera, je pense,<br />

la manière de reclouer la lune à sa place dans le ciel.<br />

Ce qui fut dit fut fait. Douze jeunes hommes de Montestruc partirent<br />

sur l’heure, chargés de poulardes, de chapons, d’oies et de dindes,<br />

chez le juge. Douze autres prirent sur leurs épaules une longue barre<br />

de chêne, où l’on pendit l’âne mort, par les quatre pieds. Jusqu’après<br />

Fleurance, tout se passa bien. Mais là, les loups de l’Arramer sentirent<br />

l’odeur de l’âne mort, et accoururent en troupes, en hurlant comme<br />

des possédés du Diable. Les jeunes, épouvantés, laissèrent sur place la<br />

volaille et l’âne, et s’enfuirent au galop vers Montestruc. En un instant,<br />

toute la volaille fut engloutie, et l’âne nettoyé jusqu’à l’os.<br />

Le lendemain, la lune rayonnait dans le ciel comme d’habitude. Alors,<br />

les consuls de Montestruc se sentirent bien soulagés.<br />

- Les loups de l’Arramer, dirent-ils, nous ont rendu un fameux service.<br />

Maintenant que l’âne est mangé, le juge ne saura pas que nous<br />

l’avons fait pendre. Et, pour la lune qu’il avait bue, vous voyez qu’elle<br />

est plus maligne que les loups. Elle s’est échappée toute seule, et elle<br />

est retournée à sa place dans le ciel.<br />

26 27


Agenda<br />

Sortir en automne<br />

Une sélection de rendez-vous<br />

Ce qui suit n’est donné que sous réserves compte tenu de la crise sanitaire qui n’en finit pas.<br />

Notre conseil : rapprochez-vous des organisateurs avant de prévoir votre sortie.<br />

Auch<br />

16-25 octobre<br />

33 e édition du festival CIRCa<br />

Lectoure<br />

29 octobre — 1 er novembre<br />

Halle polyvalente<br />

Un festival vraiment bizarre<br />

5 e édition du festival « Bizarre, vous avez dit bizarre ? »,<br />

expositions, conférences, concerts, contes, musique<br />

(Jimmy Fortier alias Jim floyd), théâtre, avec le soir<br />

du 31 octobre, à la Comédie, le spectacle « Dans la<br />

peau de la panthère », par Anne-Gaëlle Duvochel. Une<br />

programmation attrayante proposée par l’association<br />

Le 122.<br />

Le rendez-vous des passionnés de cirque compte<br />

bien se tenir. Plus de 30 ans d’âge, un événement<br />

d’envergure nationale, sinon européenne, 10 jours,<br />

toute la filière présente (artistes, écoles de cirque,<br />

programmateurs), 27 spectacles au total pour 70<br />

représentations, la plupart à Auch, certaines à Marciac,<br />

Montaut-les-Créneaux et Pavie. Difficile de faire une<br />

sélection ici, tout semble attractif pour petits et grands,<br />

entre cirque, théâtre, musique, des créations aussi, bref<br />

un grand festival, adapté aux mesures sanitaires, et qui<br />

fera du bien. L’occasion enfin de soutenir les artistes qui<br />

sont actuellement en situation de fragilité. Et s’il fallait<br />

quand même recommander un spectacle, ce serait<br />

celui de FIQ ! (Réveille-toi !), un groupe acrobatique<br />

de Tanger, entre pyramides humaines et tours de<br />

plusieurs niveaux, entre les 19 et 22 octobre à la salle<br />

du Mouzon.<br />

Lagarde-Fimarcon<br />

17-18 octobre<br />

24 h de course à pied !<br />

Une première dans le Gers pour les coureurs aguerris,<br />

et les autres ! Une nouvelle épreuve de 24 heures en<br />

pleine campagne, sur un parcours spécifique de 5,2 km<br />

constitué de quelques petites montées, à accomplir<br />

en 24, 12 ou 6 heures, en individuel ou en relais, à la<br />

course comme à la marche. Lagarde Fimarcon est un<br />

castelnau gersois d’un peu plus d’une centaine d’âmes,<br />

situé entre Condom et Lectoure. L’initiative est due à<br />

Patrick Malandain, fameux coureur d’ultrafond, et à son<br />

organisation PatRun, avec l’appui du comité des fêtes<br />

de Lagarde. L’événement bénéficie aussi du soutien<br />

du groupe Troisel, de Laulhère (bérets français) et de<br />

Merch & Cie.<br />

20-22 novembre<br />

Hôtel de ville<br />

12 e Rencontres avec les métiers d’art<br />

Trois jours pour venir découvrir et admirer le travail<br />

d’une cinquantaine d’artistes et d’artisans d’art. Un large<br />

éventail d’activités, de la sculpture à la photographie,<br />

en passant par la poterie, le travail du verre, du cuir,<br />

du bois, de la mosaïque, la restauration de tableaux, la<br />

création de chapeaux, de vêtements, etc.<br />

Lectoure-Eauze-Lavardens-Fleurance-<br />

Terraube-Condom-Flaran<br />

À partir du 24 octobre<br />

Nuits musicales en Armagnac<br />

Décalé en fin d’année, cet important festival consacré<br />

à la musique classique présente une programmation<br />

variée (danse, opéra, master class…). Ouverture le 24<br />

octobre avec une Promenade Musicale à Lavardens,<br />

Aurélie Fargues soprano et Bertrand Gibert à la guitare.<br />

À noter le 29 novembre à Eauze, La Flûte Enchantée<br />

de Mozart, par la compagnie du Chœur des Chants de<br />

Garonne.<br />

Marciac<br />

À partir du 2 octobre<br />

La cantine de La Peñac<br />

La Peñac, café associatif culturel et citoyen, existe<br />

depuis 10 ans à Marciac. C’est un lieu de pratiques<br />

culturelles atypiques et novatrices, pratiquant des tarifs<br />

solidaires, avec bar et petite restauration en circuits<br />

courts et/ou biologiques.<br />

2 octobre, ouverture officielle de la saison, Titty Twister<br />

Brass Band (Quintet) – Ethio/électrique.<br />

17 octobre = Kamaleon (Trio) – Flamenco/jazz.<br />

7 novembre = Piak (Trio) – Free jazz/noise et transe.<br />

21 novembre = spectacle solo de clown « Olga » de/par<br />

Nathalie Vinot – Onirique, sensuel, cruel et poétique.<br />

À noter, tous les derniers vendredis du mois à compter<br />

d’octobre = scène ouverte, « La voix est libre ». Contact<br />

Facebook : La Penac.<br />

21 novembre<br />

L’Astrada<br />

Dessay chante Nougaro<br />

Un projet commun avec le musicien Yvan Cassar,<br />

une soirée exceptionnelle en perspective. La soprano<br />

Natalie Dessay embrasse avec aisance le répertoire du<br />

grand Claude, et entend explorer « la part féminine » du<br />

regretté chanteur toulousain.<br />

Ordan-Larroque<br />

11 octobre<br />

Les plantes rares à l'honneur<br />

La 18 e Journée des Plantes<br />

rares d'Ordan-Larroque,<br />

proposée par l'association<br />

Culture et Loisirs au Village,<br />

aura bien lieu dimanche 11<br />

octobre <strong>2020</strong>, de 9 h à 18 h.<br />

La Journée des Plantes rares<br />

d'Ordan-Larroque, entre<br />

Vic-Fézensac et Auch, est<br />

le rendez-vous des amoureux du jardin. Vous pourrez<br />

échanger avec plus de 40 pépiniéristes et producteurs<br />

de plantes spécialisés.<br />

Les mots croisés de François Sumien<br />

(Solution page 30)<br />

Horizontalement :1 – Conforme. 2 – Voir la fin – C’est une clef.<br />

3 – Avec lui, c’est du vent. 4 – Porte de l’infini – Pas à l’heure.<br />

5 – Toujours couché – Durée légèrement variable – Morceau de<br />

ténia. 6 – Sans mouvement de croûte terrestre. 7 - En outre<br />

- Fatigues. 8 – Article – Près d’elles – Précède la spécialité. 9<br />

– Contrat de travail abrogé en 2008 – Vient du saule. 10 – Il a<br />

de fortes mâchoires – Fait l’article chez les ibères – Service de<br />

renseignements français. 11 – Redistribuai.<br />

Verticalement :A – Approvisionner. B – Artisan assez commode<br />

– Directeur de mine. C – Culotée – Pas toujours facile à tenir.<br />

D – Pour boucher – Amoindrit. E – Rendus plus longs – Se pose<br />

au mur. F – Unité de mesure étrangère – Actionnés – En ajoute<br />

toujours. G – Enlevais un organe – Vague humaine. H – Avec les<br />

pieds immobiles au sol. I – Abattre – Il peut être brun, à collier,<br />

à lunettes, etc. J – Examinée attentivement – Elle s’occupe de<br />

lanceurs. K – Regarni.<br />

28 29


Avant de se quitter<br />

Facile<br />

Grilles de Sudoku<br />

(Solution dans notre prochain numéro)<br />

Difficile<br />

Vous êtes 50 000 lecteurs du <strong>Canard</strong> <strong>Gascon</strong> !<br />

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chacun étant lu par plus de trois personnes différentes. Il est déposé dans plus<br />

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ou un an. Né il y a 15 ans en Armagnac, il a été repris en 2019 par un Lectourois, Hugues de<br />

Lestapis, professionnel de la presse. Il en est l'éditeur et le rédacteur en chef.<br />

Éditions Guilleragues, 13 place Descamps - 32700 Lectoure - lecanardgascon32@gmail.com

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