ICI MAG - OCTOBRE 2020
Magazine d'actualités 100% infos locales de Biscarrosse, Mimizan, Parentis-en-Born, Sanguinet et environs : infos, agenda, événements, clubs, associations, ...
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Contes et légendes
Les joueurs de Boha
Louison, comme on l’appelait affectueusement depuis
son enfance, était l’âme joyeuse du village. Il était musicien
et chanteur. Il aimait à jouer de tout instrument de
musique qui pouvait lui tomber dans les mains. Très renommé
dans le Pays de Born, on l’invitait volontiers pour
pour tous les moments importants de la vie du village et
des alentours, les baptêmes, les noces, les maïades (fêtes)
ou fin de veillées pour faire danser jeunes et moins jeunes...
Il se donnait ainsi en spectacle au sein d’un trio de copain.
Sa voix de baryton accompagnait à merveille le son de ses
deux acolytes l’un à la flubuta (flûte à trois trous) et l’autre
à la sansonha (vielle à roue).
Un jour au détour d’une allée de la foire de la saint-Michel, il
rencontra un vieil homme qui lui proposa un nouvel instrument.
Un instrument à vent. Il était unique en son genre lui
dit-il. Le vieux lui montra comment s’en servir. Louison porta
le pihet à ses lèvres. Le vieux lui dit « souffle et fait jouer
tes doigts ». Comme par magie une mélodie harmonieuse
sortit de l’instrument, comme s’il en avait joué depuis des
années. Le son l’envoûta et il constata vite que les gens aux
alentours avait cessé toute activité pour écouter sa mélopée.
D’abord fébrile, le vieux marchand était maintenant
rassuré, l’instrument avait trouvé son nouveau maître, son
travail était fini. Lorsque Louison se retourna vers le marchand
pour lui demander combien pouvait valoir un tel
chef-d’oeuvre, celui-ci avait disparu, laissant juste un mot
sur la table. « Ceci est une boha (cornemuse gasconne),
prends en le plus grand soin car il t’aidera à surmonter les
mauvais moments et donnera du bonheur à ceux qui entendront
ses notes ». Il repartit donc tout heureux, avec
son nouvel instrument sous le bras.
des Landes
Au début, il eut peur que l’instrument ne soit envoûté. Il le
saisit après maintes hésitations et en joua une seule note.
Il reposa l’instrument et attendit quelques jours. Rien ne
se passa. Il répéta l’opération quelques fois et un jour, n’en
pouvant plus d’impatience, s’empara de sa boha pour y
souffler à plein poumons la totalité de son répertoire. Ce
jour-là, on raconte que le vent tomba d’un coup et qu’un silence
attentif s’empara du village et des alentours. Depuis,
dès qu’il soufflait ce n’était que joie et belles notes et jamais
on n’entendit de sa bouche le moindre couac. Le trio continua
sa triomphale carrière jusqu’à ce jour où le grand âge
emporta notre Louison. On lui fit le plus beau des au revoir
et c’est coiffé de son béret, de sa peau de mouton et de
ses sabots qui avaient tant usé le sol à rythmer la musique
qu’il partit au pays des musiciens immortels. Tous avaient
encore les yeux mouillés lorsque le soleil déclina. C’est à
ce moment là qu’aux confins dans la lande retentit un air
mélancolique, loin d’abord puis se rapprochant peu à peu.
Tous reconnurent ce son si caractéristique. C’était la Boha.
On l’avait cherché toute la journée mais en vain. On avait
même accusé un de ses élèves de l’avoir volée. La boha
de Louison masquée par la végétation sonnait maintenant
haut et fort la perte de son ami. La mélopée dura plusieurs
minutes puis disparut avec le crépuscule. Personne ne put
retrouver l’instrument.
Les mois passèrent et un jour une rumeur arriva jusqu’au
village, un nouveau sonneur venait de s’installer et soufflait
une ritournelle connue de tous. On invita le musicien
et quelle ne fut pas la surprise des villageois quand ils découvrirent
que notre bohaire était une femme. Dès les premières
notes, un silence de mort parcourut l’assemblée,
elle jouait la ritournelle de Louison. On lui arracha la Boha
pour vérifier le pihet (tuyau de la cornemuse). Elle était là,
l’encoche que Louison y avait faite à la mort de sa femme.
La musicienne fut assaillie de questions et dut raconter son
histoire.
Elle avait acheté l’instrument il y a quelques mois à un vieux
marchand de la foire de la Saint-Michel. Les premiers sons
qu’elle avait soufflé étaient ceux-là. Elle avait trouvé l’air
très gai et le jouait depuis lors. Ils lui rendirent alors la boha
et la fête reprit. Depuis, on a appris à fabriquer les bohas
mais aucune n’a pu redonner le son si caractéristique de
celle de Louison.
Selon la légende, il parait que l’on peut, une fois par génération,
encore l’entendre au détour d’une maïade aux
confins d’un village landais pour le plus grand bonheur des
festayres...
D’après un texte de Sylvie PONTIER
Biscarrosse Plage
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