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Jai rendez-vous dans l’énorme villa<br />
des Osbourne à Hancock Park, une<br />
enclave de célébrités dans le West<br />
Hollywood. Le chanteur d’origine<br />
britannique vit ici dans une imposante<br />
baraque de treize millions de dollars, avec sept<br />
chambres à coucher, six salles de bains, douze chiens,<br />
un assistant personnel, une gouvernante et un écriteau<br />
à la porte qui affiche : « Attention au propriétaire ».<br />
Le dangereux propriétaire porte des lunettes de soleil,<br />
marche avec une canne, baille – encore somnolent peu<br />
après 13 heures – et se met parfois à bégayer au point<br />
qu’il en devient incompréhensible. Pour échapper à l’agitation<br />
des chiens, il suggère que nous passions au soussol,<br />
dans son cinéma privé, meublé de fauteuils rembourrés.<br />
Sur les murs de l’escalier : ses disques d’or et de<br />
platine – ils brillent comme si l’on venait de les astiquer.<br />
Celui qui a fondé le heavy metal dans les années 70<br />
avec son groupe Black Sabbath prend une gorgée d’eau<br />
Fiji, se penche en avant dans son fauteuil et s’enquiert<br />
avec sollicitude de l’heure d’arrivée de mon vol, d’où je<br />
suis parti et de mon état général. « Tu souffres du putain<br />
de décalage horaire ? Je connais ça… »<br />
the red bulletin: Pour quelqu’un qui était sur<br />
le point de mourir il y a quelque temps, vous avez<br />
l’air incroyablement joyeux.<br />
ozzy osbourne : Oh oui...<br />
C’était sérieux à ce point ?<br />
L’année dernière a été un cauchemar. Avant cela aussi.<br />
Ça a vraiment été un truc après l’autre. Pourtant, j’ai<br />
arrêté de fumer et de boire il y a longtemps. Et je ne<br />
prends plus aucune drogue, rien du tout. Mais il y a<br />
toujours cette merde qui me tombe dessus. En gros,<br />
ce sont encore les conséquences de l’accident de quad<br />
en 2003 quand je me suis cassé le cou, la clavicule et<br />
plusieurs côtes.<br />
Se pourrait-il qu’avec l’âge, vous soyez devenu plus<br />
sensible à ces blessures ?<br />
Il semblerait. Parfois, c’est de ma faute. Par exemple,<br />
une fois, je me suis réveillé la nuit parce que j’avais<br />
envie de pisser. Je suis allé aux toilettes et en revenant,<br />
il faisait si sombre que j’ai trébuché et je me suis étalé<br />
de tout mon long. Je suis tombé, le dos contre le sol.<br />
Il y a eu un bruit horrible et j’ai vu des éclairs. Ma première<br />
pensée a été : « Espèce d’idiot ! » J’ai passé les<br />
trois mois suivants à l’hôpital.<br />
LA MAISON OZZY<br />
Le Prince des Ténèbres ne se cogne plus<br />
dans les murs : il dispose d’espace pour ses<br />
antiquités et ses fauteuils rembourrés.<br />
Le grand Ozzy Osbourne se soucie-t-il de la mort<br />
comme le suggèrent certaines de ses chansons,<br />
telles que Under <strong>The</strong> Graveyard (trad. sous le<br />
cimetière) ?<br />
Qui ne le fait pas ? Après tout, la mort est inévitable…<br />
Nous allons tous y passer un jour ou l’autre. Et puis,<br />
on ne peut rien emporter avec nous.<br />
L’enregistrement d’Ordinary Man, votre nouvel<br />
album, avait-il quelque chose de thérapeutique,<br />
comme un défi, un coup de pied au cul ?<br />
Absolument ! Je me sentais prisonnier dans ma propre<br />
maison. Quand tu restes allongé sur ton canapé toute<br />
la journée, et que tu fais toujours la même chose – et<br />
en plus, vraiment pas grand-chose –, tu deviens fou,<br />
lentement mais sûrement. Tu perds complètement la<br />
boule et tu te dis sans cesse : « Voilà. T’es fini. » Mais<br />
quand on a fait l’album, ça s’est brusquement arrêté.<br />
Ordinary Man m’a sauvé.<br />
Pourquoi n’avez-vous pas sorti d’album depuis si<br />
longtemps ? Cela fait dix ans depuis Scream.<br />
Parce que l’industrie a complètement changé. Il y a des<br />
trucs comme Spotify ou je ne sais quoi. Je n’ai aucune<br />
idée de ce que c’est ni de comment cela fonctionne. Je<br />
ne sais pas non plus ce que l’on reçoit pour sa musique.<br />
C’est un mystère pour moi. Tant de choses ont changé<br />
au cours des dix dernières années que je suis complètement<br />
dépassé.<br />
Vous ne pourriez donc pas imaginer commencer<br />
aujourd’hui une carrière comme celle que vous<br />
avez eue ?<br />
Je ne saurais pas quoi faire – je n’en ai vraiment pas<br />
la moindre idée.<br />
THE RED BULLETIN 67