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Master Informatique<br />

Master Informatique<br />

Épistémologie de l’Informatique<br />

TRAVAIL d’ÉTUDE & de RECHERCHE<br />

Par<br />

Fabrice De Fondaumière<br />

Sujet proposé par<br />

Richard Terrat<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong><br />

Décembre 2007<br />

1


Master Informatique<br />

2


RESUME<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> est une science qui a pris son essor lors du<br />

IV e siècle avant J.C avec Aristote. Il mit en avant des<br />

grands principes de la <strong>logique</strong> telles que l’inférence, les<br />

propositions et le syllogisme. A cette même période naît<br />

également un autre mouvement de pensée qui s’oppose à<br />

cette <strong>logique</strong> aristotélicienne : c’est la <strong>logique</strong><br />

mégarique. Celle-ci s’inscrit dans la tradition sophistique<br />

et souligne les paradoxes qui semblent remettre en<br />

question certaines notions fondamentales de la <strong>logique</strong>.<br />

Après ces nombreuses découvertes, la <strong>logique</strong> va être<br />

considérée comme achevée. De ce fait pendant environ<br />

dix siècles, nous ne parlerons plus de découvertes en ce<br />

qui concerne la <strong>logique</strong>. C’est au début du XI e siècle que<br />

la <strong>logique</strong> revient sur le devant de la scène avec la<br />

<strong>logique</strong> scolastique qui comprend la querelle des<br />

universaux et la <strong>logique</strong> de « Port Royal ». Vers le<br />

XVIII e siècle, un grand logicien apporte des idées<br />

novatrices afin de faire avancer la <strong>logique</strong>. C’est Leibniz<br />

qui tente de mettre en place une « langue universelle »<br />

qui serait connue par tous pour exprimer un discours et<br />

un « calcul <strong>logique</strong> universel » qui aurait pour but de<br />

réduire le raisonnement à un calcul. C’est à ce moment<br />

que la <strong>logique</strong> va connaître une grande rupture<br />

épistémo<strong>logique</strong> car la <strong>logique</strong> telle que nous la<br />

connaissons à cette époque va se diviser pour donner<br />

naissance à la <strong>logique</strong> mathématique. Vers le XX e siècle,<br />

les logiciens cherchent de plus en plus à automatiser le<br />

raisonnement mathématique, de ce fait une nouvelle<br />

rupture épistémo<strong>logique</strong> intervient car elle voit la <strong>logique</strong><br />

mathématique donner naissance à la <strong>logique</strong><br />

informatique.<br />

1. INTRODUCTION<br />

L’origine de la <strong>logique</strong> remontrait selon certains récits<br />

fantaisistes à l’époque de Noé et de Prométhée. C’est ce<br />

qu’affirme Pierre de la Ramée, plus connu sous le nom<br />

de Pétrus Ramus (1515-1572) physicien et philosophe<br />

français. D’autres ouvrages attestent que la <strong>logique</strong><br />

apparaît au IV e siècle av. J-C avec Xénocrate (396 – 314<br />

av. J-C) et Aristote (384 – 322 av. J-C). Xénocrate est un<br />

philosophe platonicien grec, directeur de l'Académie de -<br />

339 à sa mort. Aristote, quant à lui est un philosophe<br />

grec. En effet, c’est Xénocrate qui donna le nom<br />

« <strong>logique</strong> », puis Aristote « théorisa » pour la première<br />

fois les règles qui permettent de tirer des conclusions<br />

Master Informatique<br />

LA LOGIQUE<br />

proposé par Richard Terrat<br />

Fabrice De Fondaumière<br />

3<br />

valides à partir d’arguments. Depuis l’antiquité grecque,<br />

de nombreuses personnes instruites considéraient que la<br />

<strong>logique</strong> était achevée et que depuis Aristote rien ne<br />

s’était produit d’important. Kant exprimait une opinion<br />

commune quand il écrivait cette formule célèbre : « la<br />

<strong>logique</strong> n’avait pu faire un seul pas en avant depuis<br />

Aristote et qu’elle était, selon toute apparence close et<br />

achevée » [1]. Cette croyance a régné presque sans<br />

contexte jusqu’à la fin du XIX e siècle et même quelque<br />

peu au delà. Certes ces personnes ne pouvaient pas le<br />

savoir puisque les bouleversements dont nous allons<br />

parler se sont produits à partir de la fin du XIX e siècle<br />

seulement, puis de manière plus radicale dans les années<br />

1960. Au moment même où la <strong>logique</strong> se réveillait d’un<br />

long sommeil, Victor Brochard par exemple, n’hésitait<br />

pas à assurer encore « la <strong>logique</strong> est une science faite.<br />

L’ère des découvertes, on peut l’affirmer sans crainte est<br />

close pour elle » [1]. Afin de mettre en avant ces<br />

bouleversements, nous nous intéresserons à l’histoire de<br />

la discipline, afin d’établir un contraste entre une<br />

conception ancienne de la <strong>logique</strong>, très malmenée<br />

aujourd’hui et une conception contemporaine où la<br />

<strong>logique</strong> joue pleinement son rôle de discipline<br />

mathématique apte à modéliser des phénomènes<br />

scientifiques.<br />

2. LA LOGIQUE PRE-MODERNE<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> vient de l’adjectif grec « logikos »,<br />

« logikê » au féminin, dérivé de logos, qui signifie à la<br />

fois « raison », « langage » et « raisonnement ». <strong>La</strong><br />

<strong>logique</strong> est dans une première approche l'étude des règles<br />

formelles que doit respecter toute déduction correcte.<br />

Elle est depuis l'antiquité l'une des grandes disciplines de<br />

la philosophie.<br />

2.1. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> aristotélicienne<br />

Aujourd’hui sans aucune hésitation, nous pouvons dire<br />

qu’Aristote est à l’origine de la <strong>logique</strong>. Le témoignage<br />

d’Aristote lui-même nous pousse dans ce sens. Certes il<br />

aurait pu avoir des enseignements purement oraux ou à<br />

partir de textes qui ont disparu. Lorsqu’il aborde l’étude<br />

d’une question, Aristote à l’habitude en bon professeur<br />

de commencer par rappeler ce que d’autres ont dit avant<br />

lui sur le sujet. Or non seulement il ne le fait pas mais il<br />

explique pourquoi. A la fin de l’ouvrage qui servira de<br />

point de départ à ses études de la <strong>logique</strong>, il déclare en<br />

effet : « sur cette question, il n’y avait pas une partie déjà<br />

élaborée et une autre non : il n’existait absolument rien »


[1]. Et un peu plus loin : « s’il y avait sur la rhétorique,<br />

beaucoup de travaux anciens, sur le raisonnement au<br />

contraire, nous n’avons rigoureusement rien à citer et<br />

nous avons dû nous livrer, non sans peine, à des<br />

recherches qui nous ont pris beaucoup de temps » [1].<br />

Les écrits d’Aristote sur la <strong>logique</strong> sont réunis<br />

dans un traité appelé « Organon » (instruments), édité<br />

par Andronicus de Rhodes vers 60 avant J-C. Le choix<br />

du terme « organon » n’est pas d’Aristote mais traduit<br />

bien l'idée du philosophe qu'était Aristote. « Organon »<br />

est mentionné pour la première fois par Diogène <strong>La</strong>ërce.<br />

C’est le plus ancien traité de <strong>logique</strong> qui soit parvenu<br />

jusqu'à nous.<br />

« L'Organon » comprend ainsi :<br />

• « Catégories » une analyse des éléments les plus<br />

simples des propositions.<br />

• « De l'interprétation », étude de la proposition.<br />

• « Premiers Analytiques », qui exposent les règles<br />

et les formes de la démonstration en général.<br />

• « Seconds Analytiques », qui exposent la théorie<br />

du syllogisme nécessaire.<br />

• « Les Topiques », qui exposent les lieux de la<br />

dialectique.<br />

• « Les Réfutations Sophistiques », qui exposent<br />

les principaux sophismes et les moyens de les<br />

réfuter.<br />

L’ordre de présentation de « l’Organon » ne<br />

correspond pas à l’ordre dans lequel Aristote les a écrit.<br />

2.1.1. <strong>La</strong> proposition selon Aristote<br />

L'objet de la <strong>logique</strong> d'Aristote est l'analyse des<br />

formes de pensée permettant de construire un discours<br />

(logos en grec) philosophique cohérent. Selon lui, la<br />

<strong>logique</strong> est l'instrument du savoir et non le savoir luimême.<br />

Elle doit donc permettre de distinguer les<br />

raisonnements corrects des raisonnements incorrects. Son<br />

intérêt pour les sciences conduisit Aristote à l'étude des<br />

propositions dites catégoriques. <strong>La</strong> proposition<br />

catégorique attribue un prédicat à un sujet. Elle est du<br />

type « Quantificateur-Sujet-copule-Prédicat ». « Tout<br />

homme est mortel » est une proposition catégorique. Le<br />

quantificateur permet d’exprimer une notion de quantité<br />

(universelle « tous » ou particulière « quelques ») de la<br />

proposition. <strong>La</strong> copule exprime la qualité (affirmative<br />

« est » ou négative « n’est pas ») de la proposition. Le<br />

prédicat est attribué au sujet afin de lui donner un état.<br />

Aristote, dans ses recherches n’a étudié que<br />

l’énoncé déclaratif, celui qui décrit un état de fait et qui,<br />

par conséquent, est susceptible de vrai ou de faux. Ils<br />

s’intéressent peu aux énoncés interrogatifs ou impératifs<br />

car nous ne pouvons pas prétendre si ils sont vrais ou<br />

faux. Les propositions catégoriques peuvent donc varier<br />

au niveau de la quantité et de la qualité ; c'est-à-dire<br />

qu’elles peuvent être par exemple à la fois affirmatives et<br />

universelles ou affirmatives et particulières, etc. Donc en<br />

4<br />

combinant la qualité et la quantité, Aristote a mis en<br />

avant quatre types de propositions catégoriques :<br />

A Universelle Affirmative : Tous les hommes sont mortels.<br />

E Universelle Négative : Aucun homme n’est pas mortel.<br />

I Particulière affirmative : Quelques hommes sont mortels.<br />

O Particulière Négative : Quelques hommes ne sont pas mortels.<br />

Aristote note ces différentes propositions avec les<br />

lettres A,E,I,O qui sont les premières voyelles de<br />

l’alphabet latin et qui proviendraient des mots AffIrmo et<br />

nEgO qui traduisent « j’affirme, je nie ».<br />

De plus, Aristote avait eu une idée novatrice qui<br />

consiste à symboliser par des lettres les termes des<br />

propositions : c’est de cette manière que nous pouvons<br />

dégager une forme. Ainsi si nous reprenons les quatre<br />

types de propositions catégoriques, nous obtenons :<br />

A Universelle Affirmative : Tout X sont P<br />

E Universelle Négative : Aucun X n’est pas p<br />

I Particulière affirmative : Quelques X sont P<br />

O Particulière Négative : Quelques X ne sont pas P<br />

<strong>La</strong> lettre X remplace le sujet « Homme » et la<br />

lettre P remplace le prédicat « mortel ». Les lettres sont<br />

d’authentiques « variables » autrement dit des symboles<br />

destinés à être substitués au moyen de n’importe quels<br />

« termes ».<br />

2.1.2. L’inférence selon Aristote<br />

L'action d'inférer consiste à tirer d'une ou de<br />

plusieurs propositions données et connues comme vraies<br />

ou fausses, une ou plusieurs propositions nouvelles<br />

jugées vraies ou fausses : cela en fonction de la relation<br />

<strong>logique</strong> que nous avons établie entre les nouvelles<br />

propositions et les propositions d’origine. <strong>La</strong> proposition<br />

d’origine est appelée « prémisse » quant à la nouvelle<br />

proposition, elle est appelée « conclusion ».<br />

Exemple : Inférence<br />

Prémisse :<br />

Tous les chimpanzés ne sont pas des femelles. � Vrai<br />

Conclusion :<br />

Certains chimpanzés sont des femelles. � Vrai<br />

ou<br />

Tous les chimpanzés sont des femelles. � Faux<br />

Les inférences qui partent d’une seule<br />

proposition vraie ou fausse sont des inférences<br />

immédiates. Aristote s’intéresse aux inférences<br />

immédiates valides, c'est-à-dire celles qui, débutent avec<br />

une prémisse supposée vraie et finisssent par une<br />

conclusion nécessairement vraie. Ainsi Aristote établit<br />

une distinction entre la validité formelle d’un<br />

raisonnement et la vérité des propositions qui le<br />

constituent. Pour lui, un raisonnement peut être valide<br />

malgré que certaines de ces propositions soient fausses.<br />

Les termes « valide » et « invalide » sont utilisés pour<br />

indiquer si l'ensemble des arguments se présente sous


une forme correcte. Le terme « vérité » s'applique plus à<br />

une seule proposition.<br />

Exemple : raisonnement valide, conclusion fausse<br />

Tous les animaux sont carnivores<br />

<strong>La</strong> vache est un animal<br />

Donc la vache est carnivore<br />

Des relations de <strong>logique</strong> sont établies entre les<br />

différentes propositions A, E, I et O. Le carré <strong>logique</strong> les<br />

représente toutes.<br />

Figure 1. Le carré <strong>logique</strong> des relations d’Aristote<br />

D'après ce que nous avons défini précédemment,<br />

nous avons vu que deux propositions qui avaient le<br />

même sujet et le même prédicat pouvaient s’opposer par<br />

la qualité et la quantité. Ainsi les relations qui peuvent<br />

être créées sont les suivantes :<br />

• Deux propositions contradictoires sont des<br />

propositions qui s'opposent par la qualité et la<br />

quantité.<br />

• Deux propositions contraires sont des propositions<br />

universelles qui s'opposent par la qualité.<br />

• Deux propositions subcontraires sont des<br />

propositions particulières qui s'opposent par la qualité<br />

• Deux propositions subalternes sont des propositions<br />

qui s'opposent par la quantité.<br />

2.1.3. <strong>La</strong> relation de conversion<br />

Le carré <strong>logique</strong> met en avant des relations entre les<br />

propositions, mais Aristote ne s’arrête pas là. Il exprime<br />

d’autres relations dont la plus importante est la<br />

conversion. <strong>La</strong> relation de conversion permet de passer<br />

d’une proposition à une autre en permutant le sujet et le<br />

prédicat tout en gardant la même valeur de vérité. <strong>La</strong><br />

structure « Quantificateur-Sujet-Copule-Prédicat »<br />

devient « Quantificateur-Prédicat-Copule-Sujet ».<br />

Figure 2. <strong>La</strong> relation de conversion<br />

5<br />

<strong>La</strong> conversion n’est valide seulement si la quantité<br />

du sujet et la quantité du prédicat restent inchangées.<br />

C'est-à-dire que si un sujet est pris universellement dans<br />

la proposition de départ, il doit être également pris<br />

universellement dans la proposition convertie.<br />

Il existe une relation de conversion pour les<br />

propositions catégoriques de type A, E, I, sauf pour O.<br />

L'inférence est indécidable parce que O est trop libérale<br />

en ce qui concerne les rapports entre les extensions de P<br />

et de S.<br />

Exemple: Conversion de E à E<br />

Aucun homme n'est mortel Aucune (chose) mortelle n'est homme<br />

2.1.4. Obversion et contraposition<br />

Nous avons vu précédemment, qu’Aristote tente de<br />

manipuler les éléments mis en jeu (sujet, copule,<br />

prédicat, négation affirmation, universalité, particularité)<br />

afin de mettre en avant des nouvelles propositions qui<br />

auraient la même valeur de vérité que la proposition de<br />

départ. Seulement ces nouvelles propositions<br />

respecteraient une autre forme.<br />

L’obverse d’une proposition, c’est la modification de<br />

la structure « Quantificateur-Sujet-Copule-Prédicat » qui<br />

devient « Quantificateur-Sujet-Copule(négative)-<br />

Prédicat(négatif )».<br />

Figure 3. L’obversion<br />

Exemple: Obervsion<br />

Tous les hommes sont mortels Aucun homme n’est immortel<br />

<strong>La</strong> quantité, la qualité et la valeur de vérité des<br />

propositions ne changent pas après la transformation par<br />

obversion.<br />

<strong>La</strong> contraposée d’une proposition s’obtient en<br />

inversant le sujet et le prédicat pour les nier ensuite tous<br />

les deux. <strong>La</strong> quantité et la qualité des propositions ne<br />

changent pas après la transformation par contraposée et<br />

la valeur de vérité est la même.<br />

Figure 4. <strong>La</strong> contraposée<br />

Exemple : Contraposée<br />

Tous les hommes sont mortels Toutes (choses) immortel est un<br />

non homme


2.1.5. Le syllogisme<br />

Nous avons vu comment construire des inférences<br />

immédiates. Aristote, dans son exposé de la syllogistique<br />

examine les inférences plus complexes comme les<br />

inférences « médiates » et plus particulièrement le<br />

syllogisme. Selon Aristote le syllogisme est l’étude d’un<br />

raisonnement <strong>logique</strong> à deux propositions, également<br />

appelées prémisses. <strong>La</strong> première est dite la majeure et la<br />

seconde est dite la mineure. Ces prémisses sont des<br />

propositions données et supposées vraies permettant de<br />

vérifier la véracité formelle de la conclusion. Il les<br />

présente comme suit :<br />

« Si a est prédiqué de tout b,<br />

Et b prédiqué de tout c,<br />

Donc a est prédiqué de tout c »<br />

Exemple: Syllogisme<br />

Tous les hommes sont mortels,<br />

Les Grecs sont des hommes,<br />

Donc les Grecs sont mortels<br />

Ces trois propositions contiennent toujours, au total<br />

trois :<br />

• un terme majeur<br />

• un terme mineur<br />

• un terme médian<br />

Le terme médian peut être identifié sachant qu'il<br />

est présent dans les deux prémisses et pas dans la<br />

conclusion (ici, il s'agit du terme « homme »). « Les<br />

mortels » est le terme majeur car présent dans la<br />

prémisse majeure, et « les grecs » est le terme mineur car<br />

présent dans la prémisse mineure.<br />

Selon la place qu'occupe le terme médian dans les<br />

prémisses, Aristote définit quatre figures:<br />

• Terme médian sujet dans la majeure, prédicat dans la<br />

mineure (1 ère figure).<br />

• Terme médian prédicat dans les deux prémisses (2 ème<br />

figure).<br />

• Terme médian sujet des deux prémisses (3 ème figure).<br />

• Terme médian prédicat dans la majeure et sujet de la<br />

mineure (4 ème figure).<br />

Ce qui intéresse Aristote, c'est de distinguer les<br />

formes de syllogismes valides. Pour procéder à une telle<br />

distinction, il est possible de procéder intuitivement, en<br />

remarquant, par exemple, que des séries de type IAA ou<br />

OOA, qui tirent des conclusions universelles de<br />

prémisses particulières, ne peuvent être valides. Une<br />

autre méthode, celle qui fut adoptée par Aristote, est de<br />

réduire la validité des syllogismes à la validité de<br />

quelques formes syllogistiques qu’ils tiennent pour<br />

immédiatement valides grâce à leur évidence. Ce sont les<br />

quatre modes fondamentaux de la première<br />

figure. Aristote les appelait les syllogismes parfaits<br />

6<br />

(AAA, EAE, AII, EIO). Cette réduction se fait à l'aide de<br />

transformations.<br />

Le projet de départ d’Aristote est ambitieux puisqu’il<br />

développe une syllogistique (science qui étudie toutes les<br />

formes de syllogismes) à laquelle nous pouvons ajouter<br />

des modificateurs car il avait remarqué que l’affirmation<br />

prédicative pouvait se faire suivant diverses modalités :<br />

• Affirmation assertorique (Tous les hommes sont<br />

mortels).<br />

• Affirmation problématique (Il est probable qu’aucun<br />

homme ne soit mortel).<br />

• Affirmation Catégorique (Nécessairement, tous les<br />

hommes sont mortels).<br />

Cette division en trois parties permet de nouvelles<br />

combinaisons. Cependant par la suite, Aristote s’est<br />

limité à la syllogistique assertorique.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> aristotélicienne fait déjà preuve<br />

d’abstraction. Ainsi Aristote fait reposer la validité de<br />

son raisonnement sur un enchaînement de formes. Nous<br />

pouvons donc bien parler à son propos déjà de « <strong>logique</strong><br />

formelle ».<br />

A la mort d’Aristote, c’est Théophraste (v.372 av. J.-<br />

C. – v.287 av. J.-C.) qui continuera à diffuser la<br />

connaissance d’Aristote. Théophraste, ainsi surnommé<br />

parce qu’il parlait divinement bien est un élève<br />

d’Aristote et son successeur immédiat à la tête de l’école<br />

«le Lycée». Ses œuvres, dont nous savons qu’elles furent<br />

nombreuses sont aujourd’hui pour la plupart perdues et<br />

c’est notamment le cas de celles qui traitent de la<br />

<strong>logique</strong>. <strong>La</strong> fonction qu’il occupait, lui dictait de<br />

propager l’enseignement du maître. Mais en l’exposant,<br />

il s’est permis d’y apporter des nouveautés, comme<br />

l’introduction du syllogisme hypothétique à côté du<br />

syllogisme catégorique qui sont simplement des<br />

additions. Sur d’autres points, en particulier dans son<br />

traitement des modalités, sa manière revenait à substituer<br />

à la théorie d’Aristote, une autre théorie réellement<br />

différente, en conservant le même vocabulaire.<br />

Aristote avait mis en place des syllogismes<br />

parfaits en fonctions des différentes figures,<br />

Théophraste en rajouta cinq.<br />

Exemple : Syllogisme hypothétique<br />

« S’il fait beau, je sors<br />

Je ne sors,<br />

Donc je il ne fait pas ».<br />

2.2. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> mégarique<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> mégarique fut développée par l’école de<br />

Mégare qui fut fondé par Euclide de Mégare (450 av.<br />

J-C - 380 av. J.-C.) et qui tire son nom du lieu d'origine<br />

de son fondateur. L’école mégarique est une école de<br />

philosophie grecque fondée entre le V e et IV e siècle av.<br />

J.-C. Elle s'inscrit dans la tradition sophistique,<br />

opposée à l'école aristotélicienne. Un sophisme est un


aisonnement qui apparaît comme rigoureux et <strong>logique</strong><br />

mais qui en réalité ne l’est pas.<br />

Les mégariques ont été les premiers à souligner<br />

l'importance de paradoxes <strong>logique</strong>s qui semblent<br />

remettre en question certaines notions fondamentales<br />

de la <strong>logique</strong>, telle la notion de vérité. Eubulide de<br />

Milet (-360) a par exemple, énoncé le paradoxe du<br />

menteur qui demande à son interlocuteur de fixer la<br />

valeur de vérité de l'énoncé « Je mens !». Le paradoxe<br />

du menteur est dérivé du paradoxe du Crétois (ou<br />

paradoxe d'Épiménide). Nous pouvons y voir deux<br />

interprétations :<br />

• en tant qu'énoncé, cette phrase dit : « Cette phrase est<br />

fausse. »<br />

• en tant que propos, il faut comprendre : « Je mens<br />

maintenant. »<br />

Un philosophe stoïcien, Chrysippe (281- 205 av. J.-<br />

C.), jouissait, semble-t-il, d'une grande réputation dans<br />

l'antiquité. <strong>La</strong> tradition a négligé ses découvertes pour<br />

leur préférer la syllogistique. Chrysippe, dans ses<br />

« Définitions dialectiques » définit la proposition comme<br />

« ce qui est vrai ou faux, ou un état de choses complet<br />

qui, pour autant qu'il est lui-même concerné, peut être<br />

asserté » [2]. Une proposition vraie « est ce qui est »[2],<br />

et une proposition fausse « est ce qui n'est pas » [2]:<br />

« Quelqu'un dit « il fait jour » semble proposer qu'il fait<br />

jour. Dès lors, s'il fait jour, la proposition avancée se<br />

révèle vraie, et sinon, elle se révèle fausse».<br />

<strong>La</strong> distinction la plus générale entre les<br />

propositions est celle qui sépare propositions simples et<br />

propositions non simples. Les propositions simples sont<br />

celles qui ne sont pas composées. Les propositions non<br />

simples sont celles qui sont composées.<br />

Exemple: proposition non simple<br />

• « S'il fait jour, il fait clair ».<br />

• « Ou il fait jour, ou il fait nuit ».<br />

Les Stoïciens distinguent parmi les propositions<br />

simples, trois types de propositions simples : les définies,<br />

les indéfinies, les intermédiaires.<br />

• Les propositions définies s'expriment par une<br />

référence ostensive: « Celui-ci est assis ».<br />

• Les propositions indéfinies ont pour sujet un<br />

particulier: « Quelqu'un est assis ».<br />

• Les propositions intermédiaires : « Socrate marche ».<br />

Les Stoïciens discernent des rapports de<br />

dépendance quant à la vérité entre ces types de<br />

propositions. Si une proposition définie est vraie, la<br />

proposition indéfinie qui peut en être dérivée est<br />

également vraie (« Celui-ci marche » est vraie ; donc<br />

« quelqu'un marche » est vraie).<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> mégarique est la <strong>logique</strong> des<br />

propositions, c'est-à-dire une <strong>logique</strong> qui analyse les<br />

7<br />

raisonnements sans entrer dans la structure interne de<br />

leurs propositions.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> d'Aristote est quant à elle, une <strong>logique</strong><br />

des termes, des classes ou des prédicats. Elle est donc<br />

moins élémentaire qu'une <strong>logique</strong> des propositions.<br />

L'un de ces «indémontrables» stoïciens est le modus<br />

ponens : Si le premier, alors le second. Or le premier,<br />

Donc le second. Les expressions «le premier» et le «le<br />

second» sont en fait des variables représentant n'importe<br />

quelles propositions. Ils ne se préoccupaient pas de la<br />

structure interne d'aucune d'entre elles, mais ils<br />

décomposaient la prémisse de forme «si...alors...» qui est<br />

une proposition complexe, ou composée, en deux<br />

propositions plus simples.<br />

2.3. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> indienne<br />

A une époque voisine, une autre <strong>logique</strong> se développa<br />

également en Inde. Cette <strong>logique</strong> est comparable à celle<br />

d’Aristote mais qui n’a de forme écrite qu’a partir du II e<br />

siècle après J-C. Cette <strong>logique</strong> a été traitée<br />

principalement dans les écoles de la pensée indienne<br />

appelées Nyaya-sutra et les Vaisheshika. Elle aussi est<br />

basée au départ sur la méthodologie de la discussion, et<br />

joue donc un rôle important vers le V e et VI e siècle dans<br />

les débats entre les Brahimanistes, Jaïnistes et<br />

Bouddhistes. Dans la forme achevée des Nyayas-sutra,<br />

l’exemple classique de raisonnement est le suivant :<br />

Proposition : Il y a du feu sur la montagne<br />

Raison : parce qu’il y a de la fumée sur la montagne<br />

Exemple : comme dans une cuisine et pas dans un lac<br />

Application : il est ainsi<br />

Conclusion : donc il y a du feu<br />

Le raisonnement apparaît formé de cinq parties,<br />

et non de trois comme cela est le cas chez Aristote : c’est<br />

que le logicien indien intègre toujours exemple et contreexemple<br />

à sa démonstration. Ce qui est abstraction chez<br />

le philosophe grec est exemplification chez le logicien<br />

indien. Plus tard le sage bouddhiste Dignaga (V e siècle)<br />

ramènera le nombre de parties à trois, sans toutefois<br />

obtenir le type de forme abstraite qui fait l’intérêt du<br />

syllogisme.<br />

3. LA LOGIQUE SCOLASTIQUE<br />

<strong>La</strong> scolastique vient du latin « schola » qui signifie<br />

école. A l’époque de la renaissance, la scolastique<br />

représentait principalement les écoles « ecclésiastiques ».<br />

Ces écoles comme l’indique leur nom montrent une<br />

certaine appartenance à l’église et au clergé. <strong>La</strong><br />

scolastique va développer et enseigner en français une<br />

philosophie dans ces écoles afin de réconcilier la<br />

philosophie première d’Aristote et la théologie<br />

chrétienne. Depuis cette période, nous disposons de la<br />

quasi-totalité de la <strong>logique</strong> d’Aristote. Dans ces écoles,<br />

selon une tradition, les élèves consacraient une année<br />

entière à l’étude de la <strong>logique</strong>, science réputée d’accès<br />

difficile en raison de son abstraction. L'emprise de la<br />

scolastique se divise en deux grandes périodes, même si


l'influence de celle-ci s'étend au-delà. Pendant ces<br />

périodes quatre grandes doctrines de pensées<br />

émergeront : le nominalisme, le conceptualisme et le<br />

réalisme. Au cours de la première période une querelle<br />

éclate entre les différents mouvements de pensées. Puis<br />

au cours de la seconde période, la <strong>logique</strong> de Port-Royal<br />

apparaît.<br />

3.1. Querelle des universaux (début du XI e siècle à<br />

la fin du XVI e siècle)<br />

Durant cette première période, la Querelle des<br />

universaux marquera les esprits. Les universaux sont des<br />

types, des propriétés ou des relations qui caractérisent ce<br />

qui est invariable dans le temps et dans l'espace (comme<br />

humanité, animal, beauté...). Les universaux s'opposent<br />

donc aux particuliers et leur assimilable.<br />

Le débat qui est à l’origine de cette querelle,<br />

c’est de déterminer si les universaux ne sont « que des<br />

mots » ou « que des choses ».<br />

Les nominalistes sont représentés par Roscelin<br />

(1050-1120) qui affirme que les universaux sont avant<br />

tout des abstractions, qui n'ont d'existence que dans<br />

l'esprit de celui qui les forme et au moyen des mots ou<br />

des noms dont on les désigne.<br />

Les réalistes menés par Nicole Oresme (1325-<br />

1382) prétendent que les universaux existent en soi et<br />

que les choses particulières n'existent que par<br />

subordination à cette essence qui leur est commune. Le<br />

principe de cette doctrine est basé sur cette expression<br />

« les choses sont » donc que toutes les choses sont<br />

réelles.<br />

Quant à la troisième position, le conceptualisme<br />

d'Abélard (1079-1142), défend la théorie selon laquelle<br />

les idées générales qui nous servent à organiser notre<br />

connaissance sont des instruments intellectuels forgés par<br />

notre esprit et n'existent pas en dehors de lui. Cette<br />

doctrine était intermédiaire bien qu'assez proche du<br />

nominalisme.<br />

Durant cette période, les œuvres d’Aristote sont<br />

traduites, par des équipes de philosophes chrétiens, juifs<br />

et arabes notamment Averroès de même que les traités<br />

scientifiques grecs et arabo-mulsumans.<br />

De la fin du XIIe siècle jusqu’à la fin du XIIIe siècle,<br />

la scolastique est à son apogée. Elle est appelée pour<br />

cette raison « la grande scolastique ». Les œuvres<br />

d'Aristote sont traduites du grec au latin par Albrecht<br />

Von Bollstädt (1193 - 1280) et par Guillaume de<br />

Moerbeke (vers 1215 - 1286), secrétaire de Thomas<br />

d'Aquin (1225 - 1274), et introduites dans les universités.<br />

Les XIVe siècle et XVe siècle représentent une<br />

phase de repli. Guillaume d'Occam (1280-1347) prend<br />

position pour les nominalistes, et devient « son docteur<br />

invincible ». Il écrit ensuite son fameux principe du<br />

rasoir selon lequel il ne faut pas multiplier les entités audelà<br />

de ce qui est nécessaire. Occam soutient que seules<br />

les choses particulières ont une existence réelle et que les<br />

universaux ne sont que des conventions commodes<br />

8<br />

adoptées par le genre humain. Il écrit « Summa totius<br />

logicae » (Somme de toute <strong>logique</strong>) en 1323. C’est une<br />

œuvre d’une importance capitale dans son combat contre<br />

le réalisme.<br />

Cependant d’un notre coté, certaines personnes<br />

estiment que la <strong>logique</strong> enseignée dans les écoles ne sert<br />

pas à grand chose car elle néglige l’essentiel pour se<br />

fixer sur l’accessoire. Ils estiment que la <strong>logique</strong> n’est<br />

pas une affaire de théorie mais de pratique.<br />

3.2. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> de « Port Royal » (XVII e siècle)<br />

En 1662 la <strong>logique</strong> de Port-Royal se développe. Elle est<br />

issue d’un traité parut anonymement sous le titre « <strong>La</strong><br />

<strong>logique</strong> ou l’art de penser ». Il est finalement attribué à<br />

Antoine Arnauld (1612 – 1694) et Pierre Nicole (1625 –<br />

1695). Cet ouvrage a connu un essor exceptionnel.<br />

Pendant deux siècles, c’est avec lui que les gens qui<br />

cherchent à s’instruire vont apprendre la <strong>logique</strong>,<br />

principalement en France. Nous comptons plus d’une<br />

cinquantaine d’éditions en français au cours de ces deux<br />

siècles : plusieurs traductions en anglais et une douzaine<br />

de traductions latines. Ces dernières visaient<br />

principalement les pays germaniques mais aussi<br />

l’enseignement dans les collèges en France. De ce fait,<br />

nous pouvons nous apercevoir de la force et de l’intérêt<br />

pour cet ouvrage car à cet époque ce sont les jésuites qui<br />

avaient la charge de l’enseignement et ils n’étaient pas<br />

forcement prêts à accueillir à bras ouverts un traité<br />

portant la marque de Port-Royal. Car c’est dans cette<br />

banlieue parisienne où a été inventée une forme de<br />

doctrine religieuse : « le Jansénisme ». Jésuites et<br />

Jansénistes s’y sont vivement opposés. Leurs visions sont<br />

diamétralement opposées : les Jésuites insistent sur la<br />

liberté personnelle dans toute décision, alors que les<br />

Jansénistes sont fatalistes et pensent que tout est écrit à<br />

l'avance.<br />

Ce traité fut d’abord écrit par Arnauld afin de<br />

montrer qu’en quelques jours, il pouvait apprendre à<br />

n’importe qui les éléments utiles de la <strong>logique</strong>. Il<br />

enseigna donc en peu de temps les aspects utiles de la<br />

<strong>logique</strong> au jeune duc de la Chevreuse. Ce traité fut alors<br />

remanié et complété ensuite avec la collaboration de<br />

Nicole en vue d’une publication.<br />

Dans ce traité, nous retrouvons beaucoup<br />

d’exemples afin de favoriser l’habitude de l’appliquer<br />

dans la vie de tous les jours. Ils se font un devoir de<br />

chercher ces illustrations soit dans des raisonnements qui<br />

ont cours effectivement dans divers domaines de la<br />

pensée, allant de la géométrie à la morale ; ou soit dans<br />

les textes des écrits classiques.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> de Port-Royal est donc en totale<br />

opposition avec la <strong>logique</strong> enseignée dans les écoles<br />

ecclésiastiques de l’époque. Comme nous pouvons nous<br />

apercevoir dans le titre de ce traité, la <strong>logique</strong> est vue<br />

comme un art pour apprendre à mieux penser et non<br />

comme une science. Il veut donc passer d’une « <strong>logique</strong><br />

sèche » [3] que nous oublions après l’école à une<br />

« <strong>logique</strong> plus divertissante » [3] avec un effet plus<br />

étendu et plus durable.


Cette <strong>logique</strong> de Port-Royal n’est pas formelle,<br />

elle est dans son projet même hostile au formalisme. En<br />

effet la <strong>logique</strong> formelle commence avec des variables or<br />

nous avons bien compris que ce traité les écarte<br />

totalement (aucune forme schématique). Cet appel<br />

constant aux idées claires et distinctes est fait dans le but<br />

de ne pas risquer de relâcher la vigilance de la pensée.<br />

Dans les trois premières parties de ce traité qui<br />

développent successivement des idées, des jugements et<br />

du raisonnement sont basées sur les fonds aristotéliciens.<br />

<strong>La</strong> quatrième partie, il la consacre à la méthode et c’est<br />

ainsi que nous nous apercevons qu’un tel élargissement<br />

du champ de la <strong>logique</strong> est parfaitement conforme à<br />

l’idée d’un art de diriger la pensée.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> de Port-Royal se distingue donc<br />

d’Aristote et de sa méthode, d’abord par la substitution<br />

du mot « Idée » à celui de « concepts ». Ensuite, Arnauld<br />

fait la distinction dans les idées entre leur compréhension<br />

et leur étendue. Il note dans la compréhension de l’idée,<br />

les attributs qu’elle enferme en soi et que nous ne<br />

pouvons pas lui ôter sans la détruire. <strong>La</strong> compréhension<br />

de l’idée du triangle enferme figure, trois lignes, trois<br />

angles et l’égalité de certains de ses angles. Sous<br />

l’influence de Blaise Pascal (1623 - 1662) une définition<br />

de la « dénomination » s’impose. <strong>La</strong> dénomination est le<br />

fait d’imposer un nom pour désigner une certaine notion<br />

(Exemple : pair pour désigner l’ensemble des nombres<br />

divisibles par 2).<br />

A la <strong>logique</strong> d’Aristote, Arnauld rajoute les<br />

propositions composées. Ces propositions sont obtenues<br />

par la composition de plusieurs propositions simples<br />

liées par les connecteurs « et », « ou », « non » et « si...,<br />

alors... ». Il assimile également les singulières à des<br />

universelles et finalement il rajoute quelques règles au<br />

syllogisme d’Aristote :<br />

• Nul terme ne peut être plus général dans la<br />

conclusion que dans les prémisses.<br />

• Le terme médian doit être plus une fois<br />

universellement.<br />

• Dans la 4 éme figure du syllogisme, le médian se<br />

combinera avec le terme majeur et le terme mineur.<br />

Depuis le début de la renaissance et de<br />

l’enseignement, de bons esprits lassés de ce superflu<br />

scolastique sous lequel ils ensevelissaient les élèves,<br />

aspiraient à une rénovation également de l’éducation<br />

intellectuelle. Tous ces esprits ne voyaient dans la<br />

réforme que le rejet total de cet enseignement. Donc avec<br />

l’émergence de la <strong>logique</strong> de Port-Royal, c’est une<br />

réforme moins brutale qui voit le jour et permet à la<br />

<strong>logique</strong> de « faire peau neuve ».<br />

Cependant, la scolastique va subir des assauts<br />

qui aboutiront progressivement à sa disparition. Mais<br />

également car l’apparition de la théorie de<br />

l’héliocentrisme, émet des doutes sur les principes<br />

énoncés par Aristote car celui-ci avait écrit dans ses<br />

ouvrages que la Terre est le centre de l’univers. <strong>La</strong><br />

9<br />

scolastique qui se basait énormément sur les ouvrages<br />

d’Aristote perdit progressivement toute crédibilité.<br />

De l’antiquité grecque au XVIIe siècle, la<br />

<strong>logique</strong> se voit contester certains de ses principes : elle<br />

est parfois remaniée mais tout cela dans le but d’un<br />

perfectionnement de cette science ou de cet art de penser.<br />

<strong>La</strong> distinction habituelle entre l’Antiquité , le moyen Age<br />

et cette période n’a presque aucun sens car nous venons<br />

de montrer une certaine continuité entre la <strong>logique</strong> prémoderne<br />

d’Aristote et la <strong>logique</strong> enseignée dans les<br />

écoles ecclésiastiques.<br />

4. LA LOGIQUE CLASSIQUE<br />

Jusqu'à présent, nous avons observé une continuité dans<br />

l’histoire de la <strong>logique</strong> mais nous verrons qu’avec la<br />

<strong>logique</strong> classique et les idées novatrices apportées par<br />

Leibniz (1646-1716) une rupture semble s’annoncer.<br />

Leibniz est d’origine allemande, c’est un philosophe,<br />

mathématicien et homme de loi allemand mais de langue<br />

française.<br />

4.1. Les idées novatrices de Leibniz<br />

Les logiciens modernes s’accordent pour voir en lui le<br />

grand pionnier, et pour le mettre à l’origine de leur<br />

lignée. Il est tenu pour « le créateur de la logistique »,<br />

« le premier mathématico-logicien », « le père de la<br />

<strong>logique</strong> symbolique ». « L’histoire de la <strong>logique</strong><br />

symbolique et de la logistique commence, à proprement<br />

parler, avec Leibniz » [4] déclare Lewis (1832-1898).<br />

« Prononcer Leibniz, s’écrie Scholz (1884-1956), c’est<br />

parler d’un lever de soleil » [1]. Avec lui, en effet, un<br />

nouveau jour semble s’être levé pour la <strong>logique</strong>. Ce<br />

qu’Aristote était pour l’ancienne, Leibniz le serait pour la<br />

nouvelle, marquant la grande coupure dans le<br />

développement historique de cette science. Scholz écrit :<br />

« l’histoire de la <strong>logique</strong> [….] se divise [….] en deux<br />

sections bien distinctes. <strong>La</strong> première section : la forme<br />

classique de la <strong>logique</strong> formelle, qui va de Aristote à<br />

l’époque actuelle et qui comprend tout ce qui n’est pas<br />

inspiré par l’idée leibnizienne de la logistique . <strong>La</strong><br />

deuxième section, c’est la forme moderne de la <strong>logique</strong><br />

formelle qui commence avec Leibniz et qui comprend<br />

tout ce qui a été inspiré, consciemment ou<br />

inconsciemment, par l’idée leibnizienne de la<br />

logistique » [1].<br />

Seulement une restriction s’impose aussitôt, comme<br />

Scholz et Józef Maria Bocheński (1902 - 1995) ne<br />

pouvaient manquer de le reconnaître : le rapport de la<br />

<strong>logique</strong> leibnizienne à la <strong>logique</strong> mathématique<br />

contemporaine doit s’entendre comme un rapport<br />

d’anticipation plutôt que de paternité.<br />

Ses travaux sur la <strong>logique</strong> se présentent comme<br />

une multitude d’ébauches, plus ou moins poussées. De<br />

plus, ces essais s’enchaînent rarement selon un progrès<br />

linéaire. A chaque fois dans la plupart de ses récits, il<br />

repart à la recherche d’une nouvelle voie. Nous ne


pouvons parler de « la <strong>logique</strong> » de Leibniz que comme<br />

d’une reconstruction à partir des éléments épars et guidée<br />

par quelques idées maîtresses. Sa manière est de<br />

reprendre ce qu’ont fait les autres, en l’acceptant pour<br />

seulement l’approfondir. Car elle n’est en réalité ce que<br />

personne n’a encore bien vu ; qu’une première réalisation<br />

d’un très vaste projet. Son but, c’est d’assurer<br />

« l’infaillibilité » du raisonnement, son moyen, de réduire<br />

celui-ci à la forme. Or le syllogisme n’est que l’une de<br />

ces formes, dont l’usage est beaucoup trop restreint de<br />

même pour le calcul algébrique.<br />

Leibniz établit « le catalogue des inventions »<br />

qui retrace les différentes découvertes de la <strong>logique</strong>.<br />

Partant de la syllogistique d’Aristote, Leibniz, dés l’âge<br />

de 18 ans, introduit dans celle-ci, comme d’autres avaient<br />

fait avant lui, quelques modifications. Il construit<br />

méthodiquement, selon l’art combinatoire, la totalité des<br />

modes possibles pour opérer ensuite des éliminations et<br />

des réductions. Il admet la quatrième figure comme aussi<br />

valable que la première. Il complète la liste des modes<br />

concluants en comptant les modes subalternes : par<br />

exemple Barbabri (AAI) et Celeront (EEO) dans la<br />

première figure, qui se trouvent ainsi compter deux<br />

modes supplémentaires. <strong>La</strong> deuxième figure s’accroît elle<br />

aussi de deux modes et d’un seul dans la quatrième. Des<br />

lors, au lieu des 14 modes aristotéliciens, ou des 19 si<br />

nous ajoutons les 5 de Théophraste, nous obtenons un<br />

tableau parfaitement régulier de 24 modes, ou chaque<br />

figure compte 6 modes. Leibniz s’enchante de cette<br />

symétrie, qui lui paraît témoigner qu’il a atteint la vérité<br />

définitive et donné à la théorie sa forme achevée.<br />

En démontrant les différents modes de chaque<br />

figures, Leibniz fait apparaître une sorte de hiérarchie<br />

entre les figures, la première étant « la principale », la<br />

deuxième et la troisième les « moins principales » et la<br />

quatrième la « moins principale indirecte ».<br />

4.1.1. Caractéristiques d’une langue universelle<br />

(characteristica universalis)<br />

Leibniz imagine la « caractéristique universelle » ou, en<br />

latin, « characteristica universalis » qui est une langue<br />

universelle. En latin, "caracteristica" signifie "signe". Il<br />

aurait voulu qu’elle permette le développement de tous<br />

les discours rationnels et même esthétiques imaginables :<br />

métaphysique, droit, notes musicales, éthique,<br />

mathématiques, physique etc.<br />

<strong>La</strong> première étape pour la constitution de la <strong>logique</strong><br />

formelle avait été accomplie par Aristote, lorsqu’il s’était<br />

avisé de remplacer les termes concrets par des variables<br />

symboliques. Mais chez lui, comme ensuite chez les<br />

stoïciens et les médiévaux, la <strong>logique</strong> continuait à<br />

s’énoncer dans la langue naturelle : le grec d’Aristote, le<br />

latin de Boéce (470 - 525) ou d’Occam (v.1285 - 1347),<br />

le français de Ramus et des Messieurs de Port-Royal.<br />

Chaque langue étant différente les unes des autres, il est<br />

difficile d’en extraire une langue universelle. Un<br />

exemple très simple : « Quand nous voyons écrit « A =<br />

B », nous prononçons « A est égal à B » ou encore « A<br />

égale B ». Nous exprimons ainsi au présent ce qui est<br />

10<br />

exprimé intemporellement. De plus, nous transformons<br />

une formule de relation dans le 1 er cas en une formule<br />

d’attribut (phrase nominale) dans le second cas : c’est<br />

une formule marquant une action (phrase verbale).<br />

Prononcer « A égale B », c’est proprement dire « le sujet<br />

A est en train de faire l’action égale à B » » [1]. Nous<br />

nous apercevons que la parole ne retransmet pas<br />

totalement ce que nous écrivons. A cette époque, la<br />

parole est plus importante que l’écrit. L’écrit n’est<br />

qu’une approximation. Actuellement, c’est tout à fait le<br />

contraire, l’écrit est devenu plus important que la parole.<br />

L’oral est une approximation plus ou moins exacte.<br />

Le professeur qui donne son cours de<br />

mathématique écrit f(x) et il dit en même temps à voix<br />

haute « x est f » ou encore « f de x » or la parole trahit les<br />

signes. « x est f » renverse l’idée, sépare la copule du<br />

prédicat et introduit une nuance temporelle ; et « x de f »<br />

n’est pas une proposition.<br />

Selon Leibniz, la création d'une caractéristique<br />

universelle est la première étape vers la création d'un<br />

calcul <strong>logique</strong> universel. C’est en essayant de rendre<br />

possible la transformation du raisonnement en calcul qui<br />

va faire franchir maintenant un second pas à la <strong>logique</strong>.<br />

4.1.2. Calcul <strong>logique</strong> universel (calculus raticinator)<br />

Le calcul <strong>logique</strong> universel est l’idée de réduire un<br />

raisonnement à un calcul. Il s’inscrit dans une lignée,<br />

dans laquelle les noms qu’il cite sont ceux de Raymond<br />

Lulle (v. 1235 - 1315) et de Thomas Hobbes (1588 –<br />

1679). Leibniz voudrait à cette époque que quand les<br />

philosophes se mettent à discuter ou à faire un discours<br />

cela revienne à faire un calcul.<br />

Malgré ses efforts, il ne réussit pas à élaborer ni<br />

cette langue et ni ce calcul. Il avait conscience que la<br />

<strong>logique</strong> aristotélicienne était insuffisante pour raisonner<br />

sur les relations, mais il était trop attaché à la<br />

syllogistique aristotélicienne pour lui apporter les<br />

remaniements nécessaires à son projet de calcul <strong>logique</strong><br />

universel.<br />

4.2. Les apports des mathématiques<br />

Après Leibniz, et comme il avait commencé d’en donner<br />

l’exemple, la <strong>logique</strong> va tendre peu à peu à se dédoubler.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> dite classique, regardée comme relevant de la<br />

philosophie se contentera le plus souvent de se<br />

prolonger, avec quelques avancées plus au moins<br />

heureuses. Mais dans le même temps, cette <strong>logique</strong> sera<br />

cultivée par quelques mathématiciens qui introduiront<br />

des idées et des méthodes nouvelles. Auparavant pendant<br />

deux siècles, nous avons assisté à des tentatives variées<br />

pour introduire dans l’étude de la <strong>logique</strong>, l’esprit et les<br />

méthodes des mathématiques. Ce sont les faits les plus<br />

dignes d’intérêt dans l’histoire de la <strong>logique</strong> à cette<br />

période. <strong>La</strong> rupture entre les deux courants ne se<br />

consommera que dans la seconde moitié du XIXe siècle.<br />

Girolamo Sacheri (1667-1733) fut l’un des<br />

premiers mathématiciens qui tentera de démontrer le<br />

postulat des parallèles par une « réduction à l’absurde de


sa négation ». Il ne réussit que partiellement. Il met en<br />

avant le raisonnement par l’absurde pour prouver des<br />

propositions mathématiques, il est dit « que nous faisons<br />

un détour par le faux pour arriver au vrai » [4].<br />

Comme nous avons vu, Leibniz n’a pas réussi à<br />

créer un calcul <strong>logique</strong> mais d’autres mathématiciens<br />

dont <strong>La</strong>mbert, De Holland et de Castillon vont tenter de<br />

faire de même. Nous nous intéresserons d’avantage au<br />

travail de <strong>La</strong>mbert que certains apprécient vraiment à<br />

cette époque et qui nous semble le plus digne d’intérêts.<br />

Johan Henrich <strong>La</strong>mbert (1728-1777) écrit un ouvrage<br />

sur la <strong>logique</strong> fort intéressant « Newes Organon » parut<br />

en 1764 et en même temps il publia également un essai<br />

sur le « calcul <strong>logique</strong> ». Il avait consacré auparavant six<br />

essais à la caractéristique et au calcul <strong>logique</strong>. Tout au<br />

long de « Newes Organon », nous retrouvons l’idée de la<br />

mathématique universelle. Dans un concours réalisé en<br />

1763 par l’académie de Berlin, <strong>La</strong>mbert prétend que<br />

toutes les notions métaphysiques et morales se<br />

rapprochent de la rigueur et la certitude des<br />

mathématiques. Ainsi la seul façon d’arriver au<br />

mathématiques universelles, c’est d’universaliser les<br />

procédés mathématiques de symbolisation et de calcul. Il<br />

essaye de remplacer les pensées par des représentations<br />

sensibles et claires des signes. Ensuite, il veut que tout<br />

problème de <strong>logique</strong> soit réductible à un calcul. Ce calcul<br />

revient à appliquer les procédés de l’algèbre à une<br />

structure conceptuelle (<strong>logique</strong> traditionnelle). Il fait<br />

donc des analogies entre les opérations algébriques et<br />

opérations <strong>logique</strong>s. L’addition et la multiplication de<br />

l’algèbre ont des correspondances visibles avec<br />

l’addition et la multiplication <strong>logique</strong>. Cependant les<br />

correspondances entre la soustraction et la division<br />

semblent moins évidentes, de même que pour les<br />

nombres négatifs. Ensuite <strong>La</strong>mbert comme presque tous<br />

ceux qui se sont essayés au calcul <strong>logique</strong> à cette période<br />

vont l’entreprendre à la façon de Leibniz, c'est-à-dire<br />

d’un point de vue de la compréhension des concepts.<br />

<strong>La</strong>mbert remarque que dans les mathématiques les<br />

concepts et les propositions qui ont le plus de généralité<br />

ont aussi la composition la plus riche. Nous y laissons<br />

indéterminées toutes les circonstances et toutes les<br />

grandeurs mais sans faire abstraction; même plus, nous<br />

en tenant compte dans le calcul. Si nous prenons les<br />

équations du 3éme degré, des cas singuliers se retrouvent<br />

résumés avec une brièveté extraordinaire.<br />

<strong>La</strong>mbert imagine également une représentation<br />

« diagrammatique » des divers modes du syllogisme.<br />

Nous considérons A comme terme médian, B le terme<br />

majeur et C le terme mineur. Afin de mettre en avant<br />

cette représentation, nous nous intéressons seulement à la<br />

première figure (Voir Table 1). Les pointillés montrent<br />

l’indétermination qui est la caractéristique des<br />

propositions particulières. Grâce à cette schématisation,<br />

il est permit d’obtenir tous les rapports possibles entre<br />

les trois termes. Il suffit de construire les deux prémisses<br />

pour que la conclusion apparaisse sur le dessin même.<br />

11<br />

BARBARA<br />

AAA<br />

CELARENT<br />

EAE<br />

Darii<br />

AII<br />

FERIO<br />

EIO<br />

B B<br />

A A<br />

C C<br />

A A B B<br />

C C<br />

B B<br />

A A<br />

----------C----------<br />

A A B B<br />

-----C-----<br />

Table 1. Schématisation du syllogisme selon <strong>La</strong>mbert<br />

Quand nous avons le syllogisme suivant («<br />

Quelques A sont B, Et Quelques A sont C »), nous ne<br />

pouvons pas faire de conclusion. <strong>La</strong>mbert cherche donc à<br />

atténuer l’indétermination des particulières en indiquant<br />

par une fraction le rapport des cas où le prédicat peut<br />

être attribué au sujet (¾ de A sont B, et 2/3 de A sont C).<br />

Nous pouvons déduire alors que Quelques C sont B (2/4<br />

+ 2/3 >1 donc au moins 2/12 des A qui sont à la fois B et<br />

C).<br />

Leonard Euler (1707-1783) fait une<br />

représentation des figures du syllogisme à l’aide des<br />

diagrammes.<br />

Par le moyen des figures tout saute aux yeux.<br />

BARBARA<br />

AAA<br />

CELARENT<br />

EAE<br />

Darii<br />

AII<br />

FERIO<br />

EIO<br />

Table 2. Schématisation du syllogisme selon Euler


4.3. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> philosophique tente de se prolonger<br />

De manière générale, les grands philosophes de l'époque,<br />

Kant (1724-1804) et Hegel (1770-1831), étaient des<br />

adversaires de la <strong>logique</strong> formelle où ils estimaient que la<br />

<strong>logique</strong> était une science qui était sortie achevée de la<br />

plume d'Aristote.<br />

Kant n’a pas totalement négligé la <strong>logique</strong> mais<br />

ses apports restent minimes. Il ramène la table des<br />

jugements à quatre titres donc chacun contient trois<br />

moments :<br />

• Quantité (universelle, particulière, singulière)<br />

• Qualité (affirmative, négative, indéfinie)<br />

• Relations (catégoriques, hypothétiques, disjonctifs)<br />

• Modalités (assertoriques, apélictiques et<br />

problématiques)<br />

Cela juste pour un besoin de symétrie, mais rien ne<br />

garantit que le tableau soit complet.<br />

<strong>La</strong> thèse de Kant a laissé des traces durables<br />

dans le vocabulaire <strong>logique</strong> et la distinction qu’il fait<br />

entre le jugement analytique et le jugement synthétique,<br />

selon qui la notion du prédicat est ou non contenue dans<br />

celle du sujet. Kant développe ainsi une <strong>logique</strong> originale<br />

qui se présente comme le système formel auquel toute<br />

connaissance qui entend posséder un caractère objectif et<br />

concret sur le plan de son contenu doit se conformer. <strong>La</strong><br />

<strong>logique</strong> transcendantale ou <strong>logique</strong> kantienne est définie<br />

comme le système des concepts et des principes auxquels<br />

toute pensée doit se soumettre si elle entend avoir un<br />

caractère scientifique et objectif (le concept doit désigner<br />

un objet situé dans l'espace et dans le temps, susceptible<br />

de varier en intensité et en degré; il doit posséder les<br />

qualités d'une substance qui sont la durabilité et la<br />

permanence …).<br />

Selon Hegel (1770-1831), nous ne pouvons<br />

séparer dans la connaissance, sa forme de son contenu. Il<br />

n’est pas d’accord avec Leibniz sur le calcul <strong>logique</strong><br />

universel. « Hegel a élaboré une <strong>logique</strong> objective qui se<br />

veut non pas seulement une théorie des formes<br />

nécessaires de la pensée mais aussi une théorie objective<br />

du développement de tout ce qui est et de tout ce qui<br />

devient (notamment de l'histoire, de l'art…) »[1].<br />

Tandis que les philosophes post-Kantiens<br />

engageaient la <strong>logique</strong> dans des voies aventureuses, chez<br />

d’autres elle commença à empiéter de plus en plus sur les<br />

domaines de la psychologie et l’épistémologie<br />

J. Stuart Mill (1806-1873) est le grand<br />

promoteur de l'induction (procédé consistant à tirer<br />

d'observations particulières des vérités universelles). A<br />

ses yeux, ce procédé est plus original que la déduction<br />

qui le présuppose toujours. C'est dans son ouvrage « A<br />

system of logic », qu'il présentera sa <strong>logique</strong> inductive.<br />

Leibniz est le premier mathématicien à essayer de<br />

créer un système universel de raisonnement, cependant il<br />

n’y arrive pas jusqu’au bout. Ses travaux inachevés vont<br />

12<br />

inspirer bien d’autres mathématiciens qui veulent au fur à<br />

mesure arriver à différencier la <strong>logique</strong> philosophique de<br />

la <strong>logique</strong> mathématique. Nous allons donc assister<br />

durant cette période à une grande révolution dans<br />

l’histoire de la <strong>logique</strong>.<br />

5. LA LOGIQUE MODERNE<br />

Avec le concept du calcul <strong>logique</strong> universel de Leibniz et<br />

le développement des mathématiques lors de la première<br />

moitié du XIXe siècle, les logiciens ont instauré le<br />

concept d’une nouvelle <strong>logique</strong>. Cette autre forme de<br />

<strong>logique</strong>, d’inspiration mathématique, allait voir le jour au<br />

milieu du XIXe siècle. C’est au mathématicien Georges<br />

Boole (1815-1864) que nous faisons en général référence<br />

car il est l’initiateur de ce mouvement. Certes, nous<br />

avons vu qu’il y a eu des précurseurs comme Leibniz et<br />

<strong>La</strong>mbert. Cependant chez eux ce n’était que des<br />

ébauches alors qu’avec Boole nous recevons une<br />

première réalisation.<br />

5.1. Boole et l’algèbre de la <strong>logique</strong><br />

Dans ses deux ouvrages, « The Mathematical Analysis of<br />

Logic » en 1847, puis « An Investigation Into the <strong>La</strong>ws of<br />

Thought, on Which are Founded the Mathematical<br />

Theories of Logic and Probabilities » en 1854, Boole y<br />

développe une nouvelle forme de <strong>logique</strong>, à la fois<br />

symbolique et mathématique. Ce système peut être<br />

qualifié d’achevé malgré les imperfections qu’il<br />

comporte. Il remarque lui-même la rupture entre cette<br />

nouvelle conception et la <strong>logique</strong> ancienne. Boole<br />

dit : « Nous ne devons plus associer la <strong>logique</strong> à la<br />

métaphysique mais au mathématiques… Comme la<br />

géométrie repose sur des vérités axiomatiques et ses<br />

théorèmes sont construits selon la théorie générale du<br />

symbolisme qui constitue le fondement de ce qui est<br />

reconnu comme l’analyse » [1]. <strong>La</strong> <strong>logique</strong><br />

mathématique que nous connaissons actuellement est<br />

différente de la <strong>logique</strong> de Boole. Ce n’est pas non plus<br />

une extension: le seul point commun, c’est d’avoir élargi<br />

le champ de la <strong>logique</strong> traditionnelle en reprenant la base<br />

et en la reconstruisant selon l’esprit mathématique. Si<br />

Boole a donné l’impulsion, ce n’est pas lui mais Frege<br />

que les logiciens d’aujourd’hui reconnaissent comme<br />

fondateur de leur science.<br />

Avec le développement des mathématiques, il<br />

apparaissait plus facilement que les lois qui régissaient<br />

l’algèbre dans un sens plus général (ses calculs)<br />

pouvaient s’appliquer à la <strong>logique</strong>. Boole écrit les « lois<br />

de la pensée » qui vont permettre un traitement de la<br />

pensée telle qu’elle s’exprime dans notre langage. Boole<br />

cherche d’abord en partant du raisonnement algébrique à<br />

classer les signes d’après leurs fonctions. Puis il cherche<br />

une analogie dans les formes du langage ordinaire de<br />

façon à traduire celles-ci en des signes analogues aux<br />

signes algébriques. Il aboutit au résultat suivant :<br />

« Toutes les opérations du langage, considérées comme<br />

instruments de raisonnement peuvent être menées à bien<br />

par un système de signes composés des éléments<br />

suivants :


1. Des symboles littéraux tels que X, Y etc.<br />

représentant les choses qui font l’objet de nos<br />

conceptions.<br />

2. Des signes d’opérations tels que +, *, et –<br />

représentant les opérations de l’esprit par<br />

lesquelles les conceptions des choses combinées<br />

ou résolues, de façon à former des conceptions<br />

nouvelles en développant les mêmes éléments.<br />

3. Le signe de l’identité « = » »<br />

Le premier groupe comprend les noms, propres<br />

ou communs, les adjectifs, les expressions descriptives.<br />

Dans le deuxième groupe, il fait entrer des mots comme<br />

« et », « ou » et « excepté ». Quant au troisième, nous y<br />

retrouvons tous les verbes. Les symboles du premier<br />

groupe représenteront des classes, ceux du second des<br />

opérations mentales pas lesquelles nous combinant des<br />

parties; et dans le troisième, il représente la copule<br />

(relation simple ou composé entre les classes).<br />

x y = y x<br />

x + y = y + x<br />

z ( x + y) = z x + z y<br />

z (x – y ) = z x – z y<br />

(x = y + z) = (x –z = y)<br />

Table 3. Algèbre de Boole<br />

Moutons blancs<br />

=<br />

Blancs Moutons<br />

Moutons et Bœufs<br />

=<br />

Bœufs et Moutons<br />

Les européens (hommes et femmes)<br />

=<br />

les européens hommes et les<br />

européens femmes<br />

Les européens (hommes et non<br />

femmes)<br />

=<br />

Les européens hommes mais pas les<br />

européens femmes<br />

Les astres sont des soleils et les<br />

planètes<br />

=<br />

les astres exceptées les planètes sont<br />

des soleils.<br />

Il y a un point essentiel où l’analogie entre la<br />

pensée ordinaire et le calcul algébrique se retrouvent en<br />

défaut. Dans la pensée <strong>logique</strong> ordinaire, la loi (x n = x)<br />

est valable (Exemple : « <strong>La</strong> classe des français »<br />

combinée à « la classe des français » donne « la classe<br />

des français » alors qu’en algèbre, ce n’est pas le cas.).<br />

L’élévation des puissances ne donne jamais le terme<br />

initial sauf pour la valeur « 0 » ou « 1 ». Dans ces cas<br />

spéciaux, nous retrouvons l’analogie entre le langage<br />

ordinaire et l’algèbre. Il en résulte que la <strong>logique</strong> peut<br />

être assimilée à une espèce particulière d’algèbre: une<br />

algèbre dans laquelle les symboles numériques (x, y ect.)<br />

ne seraient susceptibles de recevoir d’autres valeurs que<br />

13<br />

« 0 » et « 1 ». Alors les axiomes et les opérations d’une<br />

telle algèbre seront identiques, dans toute leur étendue,<br />

avec les lois, les axiomes et les opérations d’une algèbre<br />

de la <strong>logique</strong>. Seules les différentes interprétations les<br />

sépareront. Le problème de Boole est donc double :<br />

1. Etablir les lois d’une algèbre spéciale, telle qu’elle<br />

n’admette que les valeurs « 0 » et « 1 ».<br />

2. Trouver pour ces valeurs « 0 » et « 1 » une<br />

interprétation <strong>logique</strong> acceptable, de manière que<br />

nous puissions regarder cette algèbre spéciale comme<br />

algèbre <strong>logique</strong>.<br />

Boole reprend son système de signes et le modifie afin<br />

qu’il puisse correspondre aux nouvelles définitions.<br />

1. Classes (« 0 » et « 1 »).<br />

2. Addition (+) → réunion.<br />

Multiplication (*) → intersection.<br />

3. « = » deux classes qui s’incluent mutuellement.<br />

Boole interprète le « 1 » comme classe<br />

universelle et le « 0 » comme classe vide ou nulle. Cette<br />

interprétation introduit une nouveauté importante dans la<br />

<strong>logique</strong> des classes traditionnelles. <strong>La</strong> soustraction va<br />

pouvoir assurer la négation.<br />

Exemple : x représente la classe des être vivants.<br />

(1 - x) →<br />

<strong>La</strong> classe universelle sauf les êtres vivants donc (1-x)<br />

c’est la classe des êtres inanimés.<br />

(1-x) a le même sens que non-x<br />

De même, le principe de la contradiction<br />

s’écrira en utilisant à la fois les deux symboles « 0 » et<br />

« 1 » :<br />

x (1 – x) = 0 → x, la classe des êtres vivant.<br />

x – x = 0 →<br />

<strong>La</strong> classe des êtres vivants sauf la classe des êtres<br />

vivants donc notre classe est bien vide.<br />

Ce principe est une conséquence de la loi (x n = x).<br />

Quant aux propositions traditionnelles de la<br />

<strong>logique</strong> classique, il les exprime en les traduisant de<br />

manière à marquer leur rapport à la classe vide.<br />

Exemple : Considérons les deux universelles (A et E) :<br />

x ( 1- y ) = 0 → Il n’y a pas de x non y →<br />

x y = 0 →<br />

Il n’y a pas de x y →<br />

Tout x est y.<br />

Nul x n’est y.<br />

Comme pour les propositions universelles, pour<br />

les particulières, il veut marquer leur rapport par rapport<br />

à la classe vide. Pour cela Boole utilise la notation ≠ et<br />

l’ensemble vide.


Exemple : Considérons les deux particulières (I et O) :<br />

x y ≠ 0 →<br />

x ( 1 – y ) ≠ 0 →<br />

Quelque x est y.<br />

Quelque x ne sont pas y.<br />

William Stanley Jevons (1835-1882) s’inscrit<br />

dans le sillage de Boole mais il apporte à son système<br />

des modifications importantes, qui en changent l’aspect.<br />

Selon lui la <strong>logique</strong> chez Boole a été trop asservie aux<br />

mathématiques. Il nous fait remarquer dans son ouvrage<br />

« Pure Logic or the Logic of Quality apart from<br />

Quantity » que l’addition numérique de Boole fait<br />

correspondre dans le langage le mot « et» qui marque<br />

ainsi la conjonction <strong>logique</strong>. Or l’addition numérique ne<br />

peut pas jouer sur des termes mutuellement exclusifs<br />

(Exemple : 7 musiciens et 5 médecins = 12 personnes<br />

que si il n’y a pas de musicien médecin). Cette condition<br />

d’exclusivité est d’ailleurs indispensable pour la<br />

soustraction.<br />

Dans les années qui suivirent, il s'attacha à la<br />

construction d'une machine <strong>logique</strong>, appelée « Logic<br />

Piano », qu'il présenta à la Royal Society en 1870. Cette<br />

machine permettait d'arriver mécaniquement aux<br />

conclusions induites par un jeu de prémisses. Cette<br />

machine découle de ce qu'il considérait comme le<br />

« grand et universel principe de tout raisonnement » qu'il<br />

exposa en 1869 sous le titre « The Substitution of<br />

Similars ». L'idée est que toute proposition considèrée du<br />

point de vue formel consiste à poser l’identité du sujet et<br />

du prédicat. Il met en avant trois sortes d’identité :<br />

1. Identité simple (A = B)<br />

2. Identité partielle (A= AB)<br />

3. Identité limite (AB = AC)<br />

Il exprimera la négation par la lettre minuscule. Il écrira :<br />

A est B → A = AB<br />

A n’est pas B → A = Ab<br />

Nous allons montrer ces différentes identités à travers un<br />

syllogisme :<br />

Barbara (AAA)<br />

A = AB<br />

B = BC<br />

AB = ABC<br />

Sodium = sodium métal Tout sodium est un<br />

métal<br />

Métal= métal bon conducteur Tout métal est un<br />

bon conducteur<br />

Sodium métal = sodium<br />

métal bon conducteur<br />

Tout sodium est un<br />

bon conducteur<br />

De Morgan (1806-1871) a laissé sa marque sur<br />

notre <strong>logique</strong> actuelle. Dans son ouvrage « <strong>logique</strong><br />

formelle », il s’intéresse au développement du<br />

syllogisme. Les aristotéliciens disent qu'à partir de deux<br />

14<br />

propositions particulières comme « quelques M sont des<br />

A » et « quelques M sont des B » rien de nécessaire n'est<br />

obtenu dans la relation des A et B. Mais ils vont plus loin<br />

et disent que toute relation à propos des A et des B doit<br />

suivre par nécessité le terme médian qui doit être pris<br />

universellement dans l'une des prémisses. De Morgan<br />

signala qu'à partir de « la plupart des M sont des A » et<br />

« la plupart des M sont des B » nous pouvons déduire<br />

que « quelques A sont des B ». Il formula le syllogisme<br />

numérique qui met ce principe dans une forme<br />

quantitative précise. Supposons que le nombre de M est<br />

m, des M qui sont des A est a, et des M qui sont des B<br />

est b; alors il y a au moins (a + b − m) A qui sont des B.<br />

Par exemple avec 1000 personnes sur un bateau dont 500<br />

sont dans le salon et 700 meurent il est obligatoire qu'au<br />

moins 700+500-1000, donc 200 de ceux qui étaient le<br />

salon furent des victimes. Ici De Morgan fit une avancé<br />

en introduisant la quantification des termes. Il a<br />

découvert, ou plus exactement redécouvert, une dualité<br />

intéressante entre la somme et le produit et son nom est<br />

resté attaché à deux lois qui l’expriment. Dans la<br />

formalisation de ces lois, il utilise des termes contraires<br />

qui signifient le « négat », « agrégat » la somme <strong>logique</strong>,<br />

et « composé » le produit <strong>logique</strong>. Voici comment, il<br />

l’énonce : « Le contraire d’un agrégat est le composé des<br />

contraires des agrégents ; le contraire d’un composé est<br />

l’agrégat des contraires des composants en écriture<br />

symbolique »[1]. Nous obtenons donc les formules<br />

suivantes :<br />

•<br />

x + y = x × y (1)<br />

• x y = x + y<br />

× (2)<br />

5.2. Frege et son « idéographie »<br />

<strong>La</strong> grande époque pour la <strong>logique</strong> mathématique<br />

s’ouvre en 1879 avec l’ouvrage de Frege (1848 - 1925)<br />

« Idéographie ». Il est avant tout un mathématicien. C'està-dire<br />

que ce sont les besoins mathématiques qui vont le<br />

conduire à rénover la <strong>logique</strong>, cela dans le but d’atteindre<br />

une parfaite rigueur. Le problème de Frege est de<br />

parvenir à une chaîne de raisonnements où ne manque<br />

aucun maillon; une chaîne sans lacune. Or il s’est aperçu<br />

qu’un tel idéal exige l’emploi d’un symbolisme. Les<br />

mathématiques possèdent leur symbolisme, mais pas le<br />

raisonnement mathématique qui s’exprime en partie dans<br />

le langage ordinaire. C’est le fait que le langage ordinaire<br />

souffre de certaines déficiences qui lui donne l’idée de<br />

« l’idéographie ». Son premier objectif est de nous<br />

fournir les critères les plus sûrs pour rendre un<br />

raisonnement mathématique valide à l’aide d’une chaîne<br />

d’inférence. Cette chaîne nous permettrait donc de<br />

pouvoir remonter jusqu'à la source.<br />

5.2.1. Le calcul propositionnel<br />

<strong>La</strong> proposition est un terme qui a fait l’objet de<br />

nombreux débat au cours de l’histoire de la <strong>logique</strong>. Les<br />

propositions sont envisagées comme des fonctions de<br />

vérités. Ce sont des énoncés descriptifs d’un état de fait


et susceptibles d’être vrais ou faux. En <strong>logique</strong><br />

mathématique, le calcul des propositions est la première<br />

étape dans la définition de la <strong>logique</strong> et du raisonnement.<br />

Il définit des règles de déductions qui relient les<br />

propositions entre elles, sans examiner leur contenu.<br />

C'est-à-dire que la <strong>logique</strong> propositionnelle s’intéresse<br />

aux relations entre propositions et aux opérations sur ces<br />

dernières sans analyser la composition des propositions.<br />

Pour réaliser la formalisation des énoncés du langage<br />

naturel, le calcul propositionnel fournit trois outils : les<br />

variables propositionnelles (p, q, r,...), les constantes ou<br />

opérateurs <strong>logique</strong>s ( , , , et ) et les signes de<br />

ponctuation (principalement les parenthèses).<br />

Nom Symbole Utilisation<br />

Négation p<br />

Conjonction (p q)<br />

Disjonction (p q)<br />

Implication (p q)<br />

Bi-implication (p q)<br />

Table 4. Les opérateurs <strong>logique</strong>s<br />

<strong>La</strong> négation est un opérateur qui ne porte que sur<br />

une proposition, il est unaire ou monadique. « Il ne pleut<br />

pas » s'écrit p. Cet énoncé est vrai si et seulement si p<br />

est faux. L'usage classique de la négation est caractérisé<br />

par la loi de double négation : p est équivalent à p.<br />

<strong>La</strong> conjonction « et » somme <strong>logique</strong> est un opérateur<br />

binaire. Elle met en relation deux propositions : « Tout<br />

homme est mortel » et « Socrate est mortel » s'écrit (p<br />

q). (p q) est vrai si et seulement si p est vrai et q est<br />

vrai.<br />

<strong>La</strong> disjonction « ou » produit <strong>logique</strong> est, elle aussi,<br />

un opérateur binaire : (p q) est vrai si et seulement si p<br />

est vrai ou q est vrai. Nous pouvons comprendre ce ou de<br />

deux façons : soit de manière inclusive, soit de manière<br />

exclusive. Dans le premier cas (p q) est vrai si p est<br />

vrai, si q est vrai ou si p et q sont tous deux vrais. Dans<br />

le second cas, (p q) est vrai si p est vrai ou si q est vrai<br />

mais pas si les deux le sont. <strong>La</strong> disjonction du calcul<br />

propositionnel est le ou inclusif et nous donnons au ou<br />

exclusif le nom d'alternative.<br />

L'implication est également un opérateur binaire. Elle<br />

correspond, au schéma linguistique Si...alors... . « Si j'ai<br />

le temps, j'irai au cinéma » s'écrit (p q). (p q) est<br />

faux si p est vrai et q est faux. Si le conséquent (ici q) est<br />

vrai, l'implication (p q) est vraie. Lorsque l'antécédent<br />

(ici p) est faux, l'implication est toujours vraie. Cette<br />

dernière remarque peut être comprise si nous nous<br />

référons à des énoncés de type : « Si nous pouvons<br />

mettre Paris en bouteille, nous utiliserons la tour Eiffel<br />

comme bouchon ». En résumé, une implication est fausse<br />

si et seulement si son antécédent est vrai et son<br />

conséquent est faux.<br />

15<br />

<strong>La</strong> bi-implication est, également, binaire : elle<br />

symbolise les expressions ... si et seulement si... et ... est<br />

équivalent à... L'équivalence entre deux propositions est<br />

vraie si celles-ci ont la même valeur de vérité. <strong>La</strong> biimplication<br />

exprime donc aussi une forme d'identité et<br />

c'est pourquoi elle est souvent utilisée dans les<br />

définitions.<br />

Il est possible d'établir des équivalences entre<br />

ces opérateurs. Nous avons voyons comment maintenant<br />

former d'autres équivalences.<br />

(p q) (p q)<br />

(p q) ( p q)<br />

(p q) ( p q)<br />

(p q) (p q)<br />

Sont à noter également les deux lois de De Morgan :<br />

(p q) ( p q)<br />

(p q) ( p q)<br />

Une expression qui est toujours vraie quel que soit le<br />

contenu linguistique des variables qui la compose est<br />

appelée « tautologie ». Nous pouvons définir de deux<br />

manières qu’une proposition est une loi de la <strong>logique</strong><br />

(expression valide).<br />

<strong>La</strong> première emploie les procédures non<br />

axiomatiques: elle a été mise en place par Ludwig<br />

Wittgenstein (1889-1951). C’est une méthode basée sur<br />

les tables de vérités. Il est dit que la valeur de vérité<br />

d’une expression complexe est fonction de la valeur de<br />

vérité des énoncés simples qui la composent.<br />

p q (p q) ((p q) p) (((p q) p) q)<br />

1 1 1 1 1<br />

1 0 0 0 1<br />

0 1 1 0 1<br />

0 0 1 0 1<br />

Table 5. Table de vérités (tautologie)<br />

<strong>La</strong> deuxième manière mise en place par Jan<br />

Łukasiewicz (1878-1956) en 1930, c’est de recourir à<br />

des procédures axiomatiques et démonstratives. C'est-àdire<br />

que nous partirons d’un ensemble d’axiomes<br />

permettant en un nombre fini d’étapes, selon des<br />

procédures mécanisables et des règles, de déterminer si<br />

la proposition est vraie. Un tel procédé s’appelle une<br />

« démonstration ». Les principales règles de déduction<br />

sont :<br />

• la substitution, c'est-à-dire qu’à partir des axiomes<br />

que nous avons nous essayons de substituer certaines<br />

variables propositionnelles.


Exemple : Nous avons a = b.c et c = a.e<br />

alors par substitution c = (b.c).c<br />

• le modus ponens selon lequel si nous obtenons p et<br />

(p q), alors nous pouvons obtenir q.<br />

5.2.2. Le calcul des prédicats<br />

Le calcul des propositions comporte quelques lacunes. Si<br />

nous considérons les propositions suivantes :<br />

• Tous les hommes sont mortels<br />

• Quelque homme est mortel<br />

• Leibniz est mortel<br />

Pour le calcul propositionnel, ce sont là trois<br />

propositions simples symbolisables par les variables p, q,<br />

r. Or, cette non différenciation pose problème car les<br />

différences existant entre ces trois propositions sont<br />

pertinentes du point de vue <strong>logique</strong>. <strong>La</strong> théorie de<br />

l'inférence immédiate et la syllogistique reposent en<br />

partie sur l'exploitation de ces différences. <strong>La</strong> <strong>logique</strong><br />

des prédicats se présente comme un élargissement du<br />

calcul propositionnel. Toutes les tautologies de la<br />

<strong>logique</strong> propositionnelle restent valides au plan de la<br />

<strong>logique</strong> des prédicats et peuvent être traduites dans le<br />

formalisme de cette dernière. Le calcul des propositions<br />

traduit toute proposition par une lettre minuscule, par<br />

exemple p. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> des prédicats recourt, elle aussi, à<br />

ce formalisme, mais elle y ajoute la notion de<br />

quantification à l'aide de fonctions propositionnelles ou<br />

formules du type f(x). Une fonction propositionnelle<br />

simple ou atomique est composée d'une variable d'objet x<br />

et d'une variable de prédicat f. f marque la place d'un<br />

prédicat quelconque et x celle d'un nom satisfaisant ou<br />

non le prédicat. Ainsi nous pouvons traduire l'expression<br />

« x est mortel » à l'aide de f(x). Les formules complexes<br />

s'obtiennent en combinant des formules atomiques avec<br />

des connecteurs propositionnels et des quantificateurs :<br />

( x), ( x). f(x) est une fonction propositionnelle qui<br />

n'est en elle même ni vraie ni fausse. Elle acquerra une<br />

valeur de vérité lorsqu'elle deviendra une expression<br />

propositionnelle.<br />

A l'aide du nouvel outil qu'est le calcul des prédicats,<br />

nous pouvons maintenant formaliser les quatre types<br />

d'énoncés catégoriques utilisés par Aristote, comme cidessous<br />

:<br />

A = Homme<br />

B = Mortel<br />

Tout homme est mortel ( x) (ax bx)<br />

Aucun homme n'est mortel ( x) (ax bx)<br />

Quelques hommes sont mortels ( x) (ax bx)<br />

Quelques hommes ne sont pas mortels ( x) (ax bx)<br />

Table 6. Symbolisme du calcul des prédicats<br />

16<br />

5.3. De peano, Hilbert, Russel à Godël la <strong>logique</strong><br />

continue à avancer<br />

Giuseppe Peano (1858-1932) est un mathématicien mais<br />

l’essentiel de ses travaux sont effectués sur la <strong>logique</strong><br />

mathématique et la théorie des ensembles. Nous lui<br />

devons la création d'un système de notations susceptibles<br />

d'énoncer et de démontrer les propositions<br />

mathématiques en utilisant un minimum de signes<br />

compatibles avec le raisonnement déductif reposant sur<br />

des notions premières acceptées (axiomes). Parmi de<br />

nombreuses autres notations, nous lui devons les<br />

symboles ensemblistes actuels , , , qu'il<br />

appliqua à la <strong>logique</strong>. Pour Peano, les signes et<br />

signifiaient le « ET » et le « OU » <strong>logique</strong>. Le signe<br />

de Peano signifie encore, l'implication <strong>logique</strong>. Au sens<br />

ensembliste, A B exprime que tout élément de A est<br />

aussi un élément de B. Ces travaux sur les notations du<br />

langage de la <strong>logique</strong> mathématique évoluèrent jusqu'en<br />

1908, année du volume 5 de ses formulaires, où Peano<br />

étudie et compare ses notations à celles de ses<br />

contemporains.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> propositionnelle de l'algèbre de Boole ne<br />

suffit pas au raisonnement mathématique: il lui manquait<br />

les indispensables (et désormais célèbres)<br />

quantificateurs:<br />

• existentiel (E renversé) , "il existe au moins<br />

un...", dû à Peano dans son « Formulario ».<br />

• universel : (A renversé) , de l'allemand<br />

Allsatz, "quel que soit...", sans doute dû à<br />

Hilbert, absent des formulaires de Peano mais<br />

dans la continuité des notations de ce dernier<br />

qui utilisa un V pour signifier "tout".<br />

L'ensemble de ces symboles permit la construction<br />

d'un véritable langage symbolique, espéré par Leibniz,<br />

où la "pensée" mathématique intervient dans la<br />

conditionnalité (valeur de vérité) des propositions.<br />

Hilbert (1862-1943), à l'occasion d'un congrès<br />

international de mathématiciens tenu en 1900 à Paris,<br />

propose sa fameuse liste des 23 problèmes. Ces<br />

problèmes de Hilbert sont aussi une sorte de manifeste<br />

qui permet l'éclosion de l'école formaliste, l'une des trois<br />

écoles majeures du XX e siècle en mathématiques. Selon<br />

cette école, les mathématiques existent en dehors de<br />

toute intention et de toute pensée. Elles sont des<br />

symboles qui demandent à être manipulés selon des<br />

règles formelles. Cependant, il n'est pas certain<br />

qu'Hilbert ait une vue aussi simple et mécanique des<br />

mathématiques. En 1920, il propose explicitement un<br />

programme de recherche en métamathématique qui sera<br />

éventuellement le programme de Hilbert. Il souhaite que<br />

les mathématiques soient solidement et complètement<br />

formulées en s'appuyant sur la <strong>logique</strong>. Hilbert croit que<br />

c'est possible, car :


1. Toutes les mathématiques découlent d'un<br />

ensemble fini d'axiomes correctement choisis.<br />

2. Il peut être démontré que cet ensemble est<br />

cohérent.<br />

Il semble que Hilbert s'appuie sur des arguments à la<br />

fois techniques et philosophiques pour proposer un tel<br />

programme. Les systèmes à la Hilbert servent à définir<br />

les déductions formelles en suivant un grand nombre<br />

d'axiomes <strong>logique</strong>s exprimant les principales propriétés<br />

de la <strong>logique</strong> que nous combinons au moyen de quelques<br />

règles (notamment la règle de modus ponens) pour<br />

dériver de nouveaux théorèmes. Les systèmes à la Hilbert<br />

héritent du système défini par Gottlob Frege et<br />

constituent les premiers systèmes déductifs. Le théorème<br />

de complétude de Gödel (que nous développerons par la<br />

suite) indique sommairement que nous ne pourrons pas<br />

trouver de nouveaux principes de raisonnement purement<br />

<strong>logique</strong>s autres que ceux déjà connus. Cela semble aller<br />

dans le sens de Hilbert. D'autres résultats qu'Hilbert<br />

obtient avec Wilhelm Ackermann (1896 - 1962) dans les<br />

mêmes années semblent aller également dans ce sens.<br />

Cependant le second théorème d'incomplétude montre<br />

que nous ne pouvons pas prouver dans cette théorie sa<br />

propre cohérence, et donc certainement pas celle de<br />

théories plus fortes qui assureraient la fondation des<br />

mathématiques. C'est donc l'échec du programme de<br />

Hilbert. Il est d'ailleurs probable que Gödel, motivé par<br />

le programme de Hilbert, avait tout d'abord voulu<br />

prouver la cohérence de l'arithmétique.<br />

Russell (1872-1970) comme d’autres logiciens<br />

dans l’antiquité avait constaté la présence de nombreux<br />

paradoxes. En fait, nous pouvons dire que malgré leur<br />

nombre, ces paradoxes ne sont que les illustrations d'un<br />

petit nombre de structures paradoxales. Nous nous<br />

intéresserons ici à une structure présente dans les<br />

paradoxes mégariques, du type «le menteur». Pour lui, il<br />

existe deux types de classes : celles qui se contiennent<br />

elles-mêmes (ou classes réflexives ) et celles qui ne se<br />

contiennent pas elles-mêmes (ou classes irréflexives). <strong>La</strong><br />

question posée est la suivante : la classe des classes<br />

irréflexives est-elle, elle même réflexive ou irréflexive?<br />

Si elle est réflexive, elle se contient et se trouve rangée<br />

dans la classe des classes irréflexives qu'elle constitue: ce<br />

qui est contradictoire. Si elle est irréflexive, elle doit<br />

figurer dans la classe des classes irréflexives qu'elle<br />

constitue et devient ipso facto réflexive: nous sommes<br />

face à une nouvelle contradiction. Pour illustrer ce<br />

paradoxe, il donna le très célèbre exemple des<br />

catalogues : « Dans une bibliothèque, il existe deux types<br />

de catalogues. Ceux qui se mentionnent eux-mêmes et<br />

ceux qui ne se mentionnent pas. Un bibliothécaire doit<br />

dresser le catalogue de tous les catalogues qui ne se<br />

mentionnent pas eux-mêmes. Arrivé au terme de son<br />

travail, notre bibliothécaire se demande s'il convient ou<br />

non de mentionner le catalogue qu'il est précisément en<br />

train de rédiger. A ce moment, il est frappé de<br />

perplexité. S’il ne le mentionne pas, ce catalogue sera<br />

un catalogue qui ne se mentionne pas et qui devra dès<br />

lors figurer dans la liste des catalogues ne se<br />

17<br />

mentionnant pas eux-mêmes. D'un autre côté, s'il le<br />

mentionne, ce catalogue deviendra un catalogue qui se<br />

mentionne et qui ne doit donc pas figurer dans ce<br />

catalogue, puisque celui-ci est le catalogue des<br />

catalogues qui ne se mentionnent pas. »<br />

Si nous considérons une variante du paradoxe du<br />

menteur connu avec les mégariques, Russel définit<br />

provisoirement le mensonge comme l'action de formuler<br />

une proposition fausse. Alors nous avons « Le poète<br />

crétois Epiménide affirme : «Tous les Crétois sont des<br />

menteurs» », la proposition p. Comment décider de la<br />

valeur de vérité de p ? Si p est vraie, comme Epiménide<br />

est Crétois, p doit être fausse. Il faut donc que p soit<br />

fausse pour pouvoir être vraie, ce qui est contradictoire.<br />

p est donc fausse. Remarquons que nous ne pouvons pas<br />

en déduire, comme dans le véritable paradoxe du<br />

menteur, que p doit aussi être vraie. Le paradoxe du<br />

menteur, par exemple, aboutit à une contradiction du fait<br />

que l'énoncé "je mens" ou "les crétois mentent" figure<br />

lui-même parmi les énoncés qu'il décrit comme<br />

mensongers. Pour sortir de la contradiction, il convient,<br />

pour Russel, de distinguer des niveaux de langage (ou<br />

"types"), de manière à interdire un usage autoréférentiel<br />

du discours. Ainsi, nous dirons que l'énoncé "je mens"<br />

est un énoncé de niveau 1 qui décrit des énoncés de<br />

niveau 0 pour lesquels l’énoncé de niveau 1 constitue un<br />

méta énoncé. Les énoncés de niveau 1 ne faisant pas<br />

partie des énoncés décrits par les énoncés de niveau 1,<br />

l'énoncé "je mens" ne pourra pas se prendre lui-même<br />

pour objet, à moins de procéder à une erreur de<br />

détermination de type d'énoncé.<br />

Gerhard Gentzen (1909 - 1945) a inventé deux<br />

systèmes de déduction pour la <strong>logique</strong> du premier ordre:<br />

la déduction naturelle et le calcul des séquents. Pour ce<br />

dernier, il a démontré son Hauptsatz (théorème<br />

principal), publié en 1934 dans ses « Recherches sur la<br />

déduction <strong>logique</strong> ». Le théorème fondamental affirme<br />

que toute démonstration purement <strong>logique</strong> peut se<br />

ramener à une forme normale déterminée, qui n'est<br />

d'ailleurs nullement univoque. Nous pouvons formuler<br />

les propriétés essentielles d'une telle démonstration<br />

normale à peu près de la façon suivante : elle ne<br />

comporte pas de détours. Nous n'y introduisons aucun<br />

concept qui ne soit pas contenu dans son résultat final et<br />

qui, par conséquent, ne doive pas nécessairement être<br />

utilisé pour obtenir ce résultats. »<br />

<strong>La</strong> déduction naturelle est un formalisme pour décrire<br />

les preuves du calcul des prédicats, dont l'idée était de<br />

coller au plus près de la manière dont les mathématiciens<br />

raisonnent. C’est Dag Prawitz (né en 1936) qui démontra<br />

en 1965 un théorème analogue pour la déduction<br />

naturelle. <strong>La</strong> déduction naturelle redonne à la <strong>logique</strong> le<br />

caractère d’un cheminement naturel. <strong>La</strong> principale idée<br />

de départ de Gentzen était simple : pas d’axiomes<br />

<strong>logique</strong>s, que des règles de déduction et autant qu’il en<br />

faut pour reproduire toutes les formes élémentaires et<br />

naturelles de raisonnement. Pour réaliser cette idée,<br />

Gentzen a développé un formalisme où les déductions ne


sont pas des suites de phrases mais des arbres, faits de<br />

colonnes de phrases qui se rejoignent jusqu’à la<br />

conclusion. Cette méthode est très suggestive pour<br />

l’intuition et elle a conduit Gentzen à faire de belles<br />

découvertes mais elle nuit à l’idée originale qui était de<br />

reproduire les formes naturelles de raisonnement.<br />

Gödel (1906-1978) se consacra à la <strong>logique</strong><br />

dans le cadre du fondement des mathématiques et<br />

formula des théorèmes fondamentaux portant sur les<br />

relations indécidables et la consistance des théories<br />

mathématiques. Au sein d'une théorie, nous qualifions<br />

d'indécidable une relation dont nous ne pouvons pas dire,<br />

au moyen des axiomes de la théorie, qu'elle est vraie ou<br />

fausse. Une théorie est dite contradictoire, ou non<br />

consistante, si le système d'axiomes qui la définit aboutit<br />

à une contradiction, c'est à dire s’il y a existence d'un<br />

théorème qui serait, dans la théorie elle-même, à la fois<br />

vrai et faux.<br />

En 1929, dans sa thèse de doctorat, sur la<br />

complétude du calcul <strong>logique</strong>. Il affirme que le calcul des<br />

prédicats est complet au sens où on connaît des listes<br />

finies et complètes de tous ces principes. Autrement dit<br />

toute démonstration mathématique peut en principe se<br />

formaliser en calcul des prédicats.<br />

Il prouve en 1930 la complétude de la <strong>logique</strong><br />

classique du premier ordre, c'est-à-dire que toute formule<br />

valide est démontrable. Ce résultat fut publié par<br />

l'Académie des Sciences de Vienne. En 1931, il publie<br />

son célèbre théorème d'incomplétude dans « Über formal<br />

unentscheidbare Sätze der Principia Mathematica und<br />

verwandter Systeme ». Il prouve dans cet article que pour<br />

tout système axiomatique assez puissant pour décrire les<br />

nombres naturels, on peut affirmer que :<br />

1. Il ne peut être à la fois cohérent et complet.<br />

2. Si le système est cohérent, alors la cohérence des<br />

axiomes ne peut pas être prouvée au sein même du<br />

système.<br />

Ces théorèmes mirent fin à des siècles de<br />

tentatives de proposer un jeu d'axiomes définitif pour<br />

situer l'ensemble des mathématiques sur une base<br />

axiomatique à la manière des « Principia Mathematica »<br />

et du formalisme de Hilbert. Il implique aussi qu'il y a<br />

des questions mathématiques qui sont valides, mais qui<br />

ne sont pas démontrables.<br />

Le principe du théorème d'incomplétude est<br />

simple. Gödel a essentiellement bâti une formule qui<br />

énonce qu'elle n'est pas démontrable dans un système<br />

formel donné. Si cette formule est démontrable, alors elle<br />

n'est pas démontrable, d'où la contradiction. Donc cette<br />

formule n'est pas démontrable, donc valide. Il existe<br />

donc une formule valide, non démontrable.<br />

Beaucoup de logiciens à son époque n’ont pas<br />

compris son résultat. Le désir de mieux comprendre le<br />

théorème de Gödel a permis le développement de la<br />

théorie de la récursion et la clarification de la <strong>logique</strong>.<br />

Cette dernière est devenue une discipline à part<br />

entière dans les décennies de 1930 et de 1940. Elle forme<br />

le point de départ de ce qui est aujourd'hui appelée<br />

18<br />

l'informatique théorique, développée par Alonzo Church<br />

(1903 – 1995) et Alan Mathison Turing (1912 - 1954).<br />

6. LA LOGIQUE INFORMATIQUE<br />

<strong>La</strong> fin du XIX e siècle et le début du XX e siècle sont<br />

marqués par les difficultés qu'ont les mathématiciens à<br />

établir leur discipline sur des fondations solides. C'est ce<br />

que nous appelons la crise des fondements. David<br />

Hilbert comme nous l’avons vu précédemment présenta,<br />

lors d'un congrès international, 23 problèmes ouverts, et<br />

qui selon lui, demandaient une attention toute particulière<br />

car leur résolution permettrait des avancées majeures en<br />

mathématiques. Hilbert posait notamment la question de<br />

savoir s'il existait un procédé mécanisable à caractère fini<br />

qui permettrait de résoudre toutes les questions<br />

mathématiques récalcitrantes. Au milieu du XXe siècle,<br />

la <strong>logique</strong> mathématique vie une véritable révolution. En<br />

effet, le fait de vouloir s’attaquer à l'automatisation des<br />

calculs et des démonstrations, aux fondements théoriques<br />

de la conception des systèmes, à la programmation et à<br />

l'intelligence artificielle a permis d’entre voir de belles<br />

perspectives à cette nouvelle conception, qui est la<br />

<strong>logique</strong> informatique. C’est dans le fait de vouloir<br />

mécaniser les raisonnements, voire de les automatiser,<br />

que la <strong>logique</strong> mathématique crée cette nouvelle branche<br />

dans le domaine de la <strong>logique</strong>.<br />

Une machine de Turing est un modèle abstrait du<br />

fonctionnement des appareils mécaniques de calcul, tel<br />

un ordinateur et sa mémoire, créé par Alan Turing en<br />

vue de donner une définition précise au concept<br />

d'algorithme ou « procédure mécanique ». Ce modèle est<br />

toujours largement utilisé en informatique théorique, en<br />

particulier pour résoudre les problèmes de complexité<br />

algorithmique et de calculabilité. <strong>La</strong> thèse Church-Turing<br />

postule que tout problème de calcul basé sur une<br />

procédure algorithmique peut être résolu par une<br />

machine de Turing. Cette thèse n'est pas un énoncé<br />

mathématique, puisqu'elle ne suppose pas une définition<br />

précise de procédure algorithmique. En revanche, il est<br />

possible de définir une notion de « système acceptable de<br />

programmation » et de démontrer que le pouvoir de tels<br />

systèmes est équivalent à celui des machines de Turing<br />

(Turing-complet). À l'origine, le concept de machine de<br />

Turing, inventé avant l'ordinateur, était censé représenter<br />

une personne virtuelle exécutant une procédure bien<br />

définie, en changeant le contenu des cases d'un tableau<br />

infini, en choisissant ce contenu parmi un ensemble fini<br />

de symboles. D'autre part, la personne doit mémoriser un<br />

état particulier parmi un ensemble fini d'états. <strong>La</strong><br />

procédure est formulée en termes d'étapes très simples,<br />

du type : « si vous êtes dans l'état 42 et que le symbole<br />

contenu sur la case que vous regardez est '0', alors<br />

remplacer ce symbole par un '1', passer dans l'état 17, et<br />

regarder une case adjacente (droite ou gauche) ».<br />

Dans les années 1930, Jacques Herbrand (1908 -<br />

1931) avait posé les conditions de validité d'une<br />

démonstration automatique. Il veut donc démontrer la<br />

validité d’une formule de la <strong>logique</strong> du 1er ordre. Il met<br />

en place un algorithme qui trouve les interprétations qui<br />

falsifient une formule (s’il y en a) ou qui s’arrête au bout


d’un nombre fini d’étapes (s’il n’y en a pas). Herbrand<br />

met donc en place un système et un univers. Avant de<br />

rentrer dans cet univers la formule doit subir quelques<br />

transformations.<br />

<strong>La</strong> mise sous forme prénexe d’une formule est la<br />

première étape à lui faire subir dans le traitement<br />

nécessaire à la présenter à un algorithme de résolution<br />

(démonstrations automatisées de théorèmes). Une<br />

formule est dite sous forme prénexe lorsque tous les<br />

quantificateurs sont en tête de cette formule. Par<br />

exemple, la formule C ∨ ∀xA(x)<br />

devient<br />

∀ x( C ∨ A(<br />

x))<br />

.<br />

Ensuite la formule qui est maintenant sous forme<br />

prénexe doit subir une autre transformation. Cette<br />

transformation a été rendue possible par Thoralf Albert<br />

Skolem (1887 -1963) qui a écrit un théorème qui permet<br />

de mettre sous forme de Skolem cette formule prénexe.<br />

Nous appelons forme de Skolem, la formule obtenue en<br />

éliminant tous les quantificateurs de symbole ( ∃ ) . Dans<br />

la forme de Skolem d’une formule ne subsistent donc que<br />

des quantificateurs universels. Par exemple, la formule<br />

∀ x∃yp(<br />

x,<br />

y)<br />

devient ∀ xp(<br />

x,<br />

f ( x))<br />

; f est définie<br />

grâce au théorème. Dans la forme de Skolem d’une<br />

formule ne subsistent donc que des quantificateurs<br />

universels.<br />

Ensuite cette formule doit subir une dernière<br />

opération qui est la mise sous clause (disjonction entre<br />

deux littéraux). Une formule est dite sous forme de<br />

clause lorsque son expression n’utilise plus de<br />

quantificateurs, et que les seuls connecteurs qui y<br />

subsistent sont les connecteurs ¬ et ∨ . Une clause<br />

(avec ou sans variables) est donc de la forme:<br />

A ∨ B ∨ ¬ C ∨ ..... . Un littéral est une formule<br />

atomique ou la négation d’une formule littérale. A, B, C<br />

sont les littéraux de la clause, ils apparaissent sous forme<br />

positive (A) ou négative ( ¬ C ). Il s’agit du premier<br />

algorithme de « démonstration automatique ». D’un point<br />

de vue théorique, il ne fait rien de plus que celui qui<br />

consisterait à produire toutes les conséquences possibles<br />

(à l’aide des règles d’inférence) des formules de<br />

l’ensemble de départ, pour essayer de trouver la formule<br />

finale comme conséquence de cet ensemble. Il est<br />

cependant plus facile à mettre en oeuvre, et donne<br />

souvent le résultat plus rapidement que la méthode des<br />

tables de vérité. Cependant, il doit être clair qu’il s’agit<br />

d’un algorithme qui s’arrête au bout d’un temps fini<br />

(éventuellement long) si l’ensemble de clauses est<br />

insatisfiable, mais qui ne s’arrête pas dans le cas<br />

contraire (conséquence désagréable de l’indécidabilité du<br />

calcul des prédicats...). <strong>La</strong> méthode de Herbrand est<br />

longue est fastidieuse si le nombre de formules est<br />

importantes.<br />

En 1965, Robinson donnait sa « Méthode de<br />

Résolution » : il basait une démonstration automatique<br />

sur les conditions d'Herbrand, avec un raisonnement par<br />

l'absurde utilisant des énoncés <strong>logique</strong>s mis sous forme<br />

clausale, et une Règle de Résolution, extension à l'ordre<br />

19<br />

« 1 » de la règle de Quine. Les premiers essais<br />

montrèrent que l'idée y était, mais qu'il restait à en<br />

trouver une expression efficace : ce sera Prolog<br />

(programmation Logique). Robinson n’utilise pas le<br />

même procédé pour mettre les formules sous forme de<br />

clauses. Il utilise les clauses de Horn qui ont été mise en<br />

place par Alfred Horn (1918 - 2001). Il est le premier<br />

qui mit en évidence l’intérêt de telles clauses en 1951,<br />

dans l’article « On sentences which are true of direct<br />

unions of algebras » publié dans le Journal of Symbolic<br />

Logic, numéro 16. Une clause de HORN est une des<br />

expressions suivantes :<br />

1 1<br />

p p<br />

• P t ,......, t ) → Q ( t ,...... t ),... Q ( t ,...... t ) (3)<br />

( 1 n 1 1 n1<br />

p 1 np<br />

• t ,......, t ) →<br />

P (4)<br />

( 1 n<br />

1 1<br />

p p<br />

• → Q t ,...... t ),... Q ( t ,...... t ) (5)<br />

1( 1 n1 p 1 n p<br />

où R,Q1, . . . ,Qp sont des symboles de relation et t1, tn, tj k<br />

sont des termes. L’exécution d’un programme prolog<br />

revient à appliquer la méthode de résolution jusqu’à<br />

trouver la clause vide.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> de Hoare, parfois appelée <strong>logique</strong> de<br />

Floyd-Hoare, est une méthode formelle définie par le<br />

chercheur en informatique britannique Charles Antony<br />

Richard Hoare (1934) dans un article de 1969 intitulé<br />

« An axiomatic basis for computer programming ». <strong>La</strong><br />

méthode de Hoare met en place un formalisme <strong>logique</strong><br />

permettant de raisonner sur la correction des programmes<br />

informatiques. Hoare s'est inspiré du travail sur les<br />

méthodes formelles dans les organigrammes de Robert<br />

W. Floyd (1936 - 2001) . <strong>La</strong> <strong>logique</strong> de Hoare décrit les<br />

évolutions possibles de l'état d'un programme<br />

informatique. Les évolutions sont modélisées par des<br />

règles et l'état d'un programme est symbolisé par un<br />

triplet { P } C { Q}<br />

où P et Q sont des prédicats et C<br />

est une commande (une action sur le programme). <strong>La</strong><br />

condition P est appelée la précondition, et Q la<br />

postcondition. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> de Hoare a des axiomes et des<br />

règles d'inférence pour toutes les instructions de base<br />

d'un langage de programmation impératif. Hoare rajoute<br />

dans son papier originel des règles pour les procédures,<br />

les sauts, les pointeurs et la concurrence.<br />

Le lambda-calcul (ou λ-calcul) est un langage de<br />

programmation théorique inventé par Alonzo Church<br />

dans les années 1930. Il permet aux mathématiciens de<br />

travailler notamment sur les notions de fonction et<br />

d'application. Il trouve également de nombreuses<br />

applications dans le domaine de la preuve. Ce langage a<br />

été le premier utilisé pour définir et caractériser les<br />

fonctions récursives. Il a une grande importance dans la<br />

théorie de la calculabilité, à l'égal des machines de<br />

Turing et du modèle de Herbrand-Gödel. Il s'agit d'un<br />

modèle de calcul, c’est-à-dire une formalisation de la<br />

notion de calcul. On peut simuler la normalisation des λtermes<br />

à l'aide d'une machine de Turing, et simuler une<br />

machine de Turing par des λ-termes. Ces deux modèles<br />

sont donc équivalents (ou Turing-équivalents). <strong>La</strong> thèse<br />

de Church-Turing affirme que tout algorithme peut être<br />

calculé par le lambda-calcul, donc par l'équivalence que<br />

tout algorithme peut être calculé par une machine de


Turing. Un programme étant un algorithme permettant de<br />

résoudre un problème donné, nous avons là le premier<br />

langage de programmation. Les lambda calculs typés<br />

sont à l'origine des langages de programmation<br />

fonctionnels comme Lisp, Caml ou Haskell : la théorie<br />

des types leur apporte une sémantique forte et sûre. Le<br />

lambda-calcul est apparenté à la <strong>logique</strong> combinatoire<br />

due à Haskell Brooks Curry (1900 - 1982).<br />

7. LES LOGIQUES NON CLASSIQUES<br />

Les <strong>logique</strong>s non classiques ont commencé de se<br />

développer à partir des années 1920. Le développement<br />

des <strong>logique</strong>s modales répond au souci de résoudre les<br />

paradoxes de l'implication ( → ), notamment le fameux<br />

« E falso sequitur quodlibet » (du faux, on peut déduire<br />

n'importe quoi) où ( p ∧ ¬ p)<br />

→ q . Les <strong>logique</strong>s<br />

modales devaient également permettre le traitement<br />

d'énoncés qui ne sont pas vérifonctionnels (soit vrais, soit<br />

faux), notamment les énoncés normatifs (« Il faut<br />

partir »).<br />

Les <strong>logique</strong>s multivalentes répondent au souci<br />

d'attribuer une valeur autre que le vrai ou le faux<br />

(l'indéterminé, le probable,...) à certains types d'énoncés,<br />

notamment les énoncés relatifs au futur.<br />

En résumé, les <strong>logique</strong>s non classiques se<br />

répartissent en deux grandes catégories : les <strong>logique</strong>s<br />

modales caractérisées par l'emploi de certains nouveaux<br />

opérateurs, tels que la « Nécessité » et la « Possibilité »,<br />

et les <strong>logique</strong>s multivalentes caractérisées par l'admission<br />

de valeurs autres que le vrai ou le faux.<br />

7.1. Les <strong>logique</strong>s multivalentes<br />

7.1.1. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> trivalente de Lukasiewicz<br />

Cette <strong>logique</strong> est née de considérations proprement<br />

philosophiques qui portaient sur un certain<br />

«impérialisme» supposé de la <strong>logique</strong> contemporaine<br />

classique (bivalente). Selon Lukasiewicz, c'est la liberté<br />

humaine qui est ici en jeu. Si l'on pense qu'a priori tout<br />

ce qui est sensé être vrai ou faux et jamais simplement<br />

possible, indéterminé, ou sous déterminé, alors il faut<br />

penser que, entre autres, les énoncés concernant le futur<br />

sont de tous temps déjà vrais ou faux. Dans son projet de<br />

syllogistique modale et dans l'attention portée aux<br />

propositions concernant le futur, Aristote avait déjà pris<br />

conscience de la contingence de certains événements et<br />

de leur dépendance vis-à-vis de la liberté d'action.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> trivalente permet la prise en compte et<br />

la formalisation d'énoncés du type « Pierre viendra peutêtre<br />

» en introduisant une tierce valeur : le neutre, le<br />

possible,...<br />

Autour des années 20, Lukasiewicz propose une<br />

axiomatique trivalente dont les théorèmes reprennent<br />

ceux de la <strong>logique</strong> bivalente et en introduisent d'autres.<br />

Cette <strong>logique</strong> trivalente ne reconnaît pas le principe du<br />

tiers exclu (p p).<br />

20<br />

7.1.2. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> affaiblie ou intuitionniste<br />

Pour comprendre le sens de la démarche de Lukasiewicz,<br />

il faut aborder la question des fondements et de la<br />

formalisation <strong>logique</strong> des mathématiques. Durant la<br />

première moitié du XXe siècle, une polémique a opposé<br />

ceux qui croyaient en l'irréductibilité des mathématiques<br />

(Luitzen Egbertus Jan Brouwer (1881-1966)) et ceux qui<br />

pensaient pouvoir en rendre compte à l'aide de la <strong>logique</strong><br />

formelle (il s'agit du logicisme de Russell et de Frege et<br />

du formalisme de Hilbert). Brouwer et les<br />

mathématiciens intuitionnistes estiment qu'il n'est pas<br />

légitime d'inférer la vérité d'une proposition de la<br />

fausseté de sa négation ( p p). Il faut, selon eux,<br />

admettre que, dans certains cas, un énoncé p demeure<br />

indécidé, et ce même si la fausseté de p est établie,<br />

aussi longtemps que p n'a pas été démontré positivement.<br />

Cette dernière affirmation met en question la validité des<br />

preuves par l'absurde qui, pour affirmer une thèse,<br />

prouvent que sa négation est fausse.<br />

Cette querelle sur l'irréductibilité des mathématiques<br />

trouve son origine dans les travaux de Hilbert (1862-<br />

1943) qui jugeait essentiel d'exprimer les mathématiques<br />

dans le langage formel et axiomatisé de la <strong>logique</strong>. Il lui<br />

fallait, pour cela, commencer par prouver la consistance<br />

(la non-contradiction) des mathématiques en montrant<br />

qu'il est impossible de démontrer comme théorème à la<br />

fois une proposition et sa négation. Selon Hilbert, c'était<br />

la seule façon de démontrer que les mathématiques sont<br />

fondées. Les travaux de ce type forment ce que nous<br />

appelons la théorie de la démonstration ou<br />

métamathématique.<br />

Hilbert a échoué dans sa tentative de démonstration<br />

de la non contradiction formelle des mathématiques. Ce<br />

sont les travaux de Kurt Gödel (et son fameux théorème<br />

d'incomplétude) sur les limites internes de la<br />

formalisation qui clarifièrent ce qui peut et ce qui ne peut<br />

pas être réalisé dans un système formel axiomatisé.<br />

7.2. Les <strong>logique</strong>s modales<br />

Les <strong>logique</strong>s modales ont permis de résoudre certains des<br />

paradoxes consécutifs à l'utilisation de l'implication ( ).<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> propositionnelle produit des théorèmes dont<br />

l'interprétation pose problème. Ainsi p (q p) est un<br />

théorème de la <strong>logique</strong> propositionnelle que l'on peut<br />

traduire comme suit : « S'il existe des barbus alors si le<br />

vinaigre est acide, il existe des barbus ». Et nous<br />

identifions ici le signe <strong>logique</strong> ( ) avec la tournure<br />

linguistique Si...alors.... Or dans cet exemple, le premier<br />

signe ( ) indique le «passage de la barre» dans un<br />

schéma d'inférence, tandis que l'autre symbolise une<br />

relation conditionnelle entre deux propositions. Ce sont<br />

deux choses différentes que nous ne pouvons pas<br />

interpréter à l'aide de la même tournure linguistique Si...<br />

alors...<br />

Vers 1930, Lewis a tenté de construire un système<br />

permettant d'éviter cette ambiguïté. Pour ce faire, il a<br />

introduit la notion d'implication stricte que l'on peut<br />

représenter à l'aide d'un opérateur modal ajouté au


conditionnel matériel : N (p q). « Nécessairement, si p<br />

alors q ».<br />

Il existe de nombreuses <strong>logique</strong>s qui s'inspirent de la<br />

<strong>logique</strong> modale. <strong>La</strong> plus connue est la <strong>logique</strong><br />

déontique. Cette discipline tente de traiter formellement<br />

le discours normatif qui exprime des obligations, des<br />

permissions,.... . Elle se distingue de l'éthique et de la<br />

théorie du droit, auxquelles elle s'applique, dans la<br />

mesure où elle ne fournit aucun contenu aux énoncés<br />

normatifs dont elle traite.<br />

7.3. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> floue<br />

À l'inverse de la <strong>logique</strong> booléenne, la <strong>logique</strong> floue<br />

permet à une condition d'être en un autre état que vrai ou<br />

faux. Il y a des degrés dans la vérification d'une<br />

condition.<br />

Considérons par exemple la vitesse d'un véhicule sur<br />

une route nationale. <strong>La</strong> vitesse normale est de 90 km/h.<br />

Une vitesse peut être considérée comme élevée au-dessus<br />

de 100 km/h, et comme plus du tout élevée en dessous de<br />

80 km/h.<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> booléenne envisagerait les choses de<br />

la manière suivante (voir figure 4) :<br />

• <strong>La</strong> vitesse est considérée à 100 % comme<br />

élevée à partir de 100 km/h, et à 0 % en<br />

dessous.<br />

Figure 5. Interprétation avec la <strong>logique</strong> booléenne<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> floue, à l'inverse, permet des degrés<br />

de vérification de la condition « <strong>La</strong> vitesse est-elle<br />

élevée ? » (Voir figure 5) :<br />

• <strong>La</strong> vitesse est considérée comme pas du tout<br />

élevée en dessous de 80 km/h. On peut donc<br />

dire qu'en dessous de 80 km/h, la vitesse est<br />

élevée à 0 %.<br />

• <strong>La</strong> vitesse est considérée comme élevée audessus<br />

de 100 km/h. <strong>La</strong> vitesse est donc élevée<br />

à 100 % au-dessus de 100 km/h.<br />

• <strong>La</strong> vitesse est donc élevée à 50 % à 90 km/h, et<br />

à 25 % à 85 km/h.<br />

Figure 6. Interprétation avec la <strong>logique</strong> floue<br />

21<br />

<strong>La</strong> <strong>logique</strong> floue est une technique utilisée en<br />

intelligence artificielle. Elle a été formalisée par Lotfi<br />

Askar Zadeh (1921) en 1965 et utilisée dans des<br />

domaines aussi variés que l'automatisme (freins ABS), la<br />

robotique (reconnaissance de formes), la gestion de la<br />

circulation routière (feux rouges), le contrôle aérien,<br />

l'environnement (météorologie, climatologie,<br />

sismologie), la médecine (aide au diagnostic), l'assurance<br />

(sélection et prévention des risques) et bien d'autres. En<br />

fait, le simple fait de noter, déjà sous Jules Francois<br />

Camille Ferry (1832 - 1893), un élève dans différentes<br />

disciplines et de lui calculer un rang par application de<br />

coefficients à ses notes était déjà faire de la <strong>logique</strong> floue<br />

sans le savoir.<br />

Nous avons vu à travers cet exposé que la <strong>logique</strong> est<br />

une science qui a pris son essor avec Aristote et qu’elle<br />

est aujourd’hui présente dans différents grands domaines<br />

comme la philosophie, les mathématiques et<br />

l’informatique. Cette <strong>logique</strong> a longtemps stagné après<br />

Aristote, puis par la suite elle a pris son envol et a subit<br />

quelques ruptures épistémo<strong>logique</strong>s et certaines<br />

continuités. Les grandes ruptures importantes que nous<br />

devons garder en mémoire sont la division de la <strong>logique</strong><br />

en deux branches: la <strong>logique</strong> philosophique et la <strong>logique</strong><br />

mathématique au cours du XIXe siècle. Cette <strong>logique</strong><br />

mathématique a vu le jour car ils voulaient à l’époque<br />

que les mathématiques s’appuient sur des bases solide de<br />

raisonnement que personne ne pourrait ébranler. Puis la<br />

rupture qui a lieu au XXe siècle avec la <strong>logique</strong><br />

mathématique donne naissance à la <strong>logique</strong> informatique<br />

afin de rendre automatique le raisonnement<br />

mathématique. Aristote, Euclide, Leibniz, Boole et Frege<br />

me semblent être les personnes qui ont le plus contribué<br />

à l’avancée de cette science.<br />

8. REFERENCES<br />

[1] Blanché, R. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> et son histoire d’Aristote<br />

à Russell. Editorial Amand Colin, Paris, 1970.<br />

[2] Couillaud, B. Raisonner en vérité - Analytique,<br />

dialectique, rhétorique, sophistique. Editorial F.-X. de<br />

Guibert, Paris, 2007<br />

[3] Fouillée, A. <strong>La</strong> <strong>logique</strong> de Port Royal. Editorial<br />

Nouvelle, 1878.<br />

[4] Lewis, C. Logique sans peine. Editorial Hermann,<br />

Paris, 1972.

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