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ROSE BONBON - Cégep du Vieux Montréal

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Collection PRISE 1<br />

Collection PRISE 1<br />

Cynthia Durand<br />

Amélie Abgral<br />

UN TABLEAU NOIR ET<br />

DES <strong>ROSE</strong> BOUTS <strong>BONBON</strong> DE CRAIE


Amélie Abgral<br />

Rose bonbon<br />

1


Rose bonbon est le soixante-septième recueil de textes publié dans la collection<br />

Prise I. Cette collection a été créée afi n de permettre à des jeunes auteurs<br />

<strong>du</strong> cégep <strong>du</strong> <strong>Vieux</strong> <strong>Montréal</strong> de publier une première œuvre.<br />

© Tous droits réservés Amélie Abgral et le CANIF,<br />

Centre d’animation de français <strong>du</strong> cégep <strong>du</strong> <strong>Vieux</strong> <strong>Montréal</strong>. Décembre 2005.<br />

Renseignements : 982-3437, poste 2164<br />

Dépôt légal : Décembre 2005<br />

Bibliothèque nationale <strong>du</strong> Québec<br />

Bibliothèque nationale d Canada<br />

Infographie et impression : Communications <strong>du</strong> CVM (26256)<br />

et Centre de reprographie <strong>du</strong> CVM<br />

<strong>Cégep</strong> <strong>du</strong> <strong>Vieux</strong> <strong>Montréal</strong><br />

255, rue Ontario Est<br />

<strong>Montréal</strong> (Québec)<br />

H2X 1X6<br />

Conception graphique de la couverture : Dominic Prévost<br />

2


Je dédie ce recueil à deux personnes bien spéciales.<br />

Tout d’abord à René Gour pour sa collaboration précieuse et ses commentaires<br />

toujours justes et pertinents,<br />

et à toi, garçon cactus, pour toutes les étoiles et les épines que tu as mises dans<br />

ma vie.<br />

À lire dans le bain en faisant des bulles et en écoutant The Pastels, « I Wonder<br />

Why », en mangeant une tonne de glace au chocolat.<br />

Attention ! Risques d’électrocution.<br />

« L’amour n’est pas seulement un sentiment,<br />

il est aussi un art. »<br />

Honoré de Balzac<br />

3


Préliminaires<br />

Il était une fois un garçon et une princesse...<br />

— Salut.<br />

— Salut.<br />

Regards timides.<br />

— Es-tu une fi lle ou je me trompe ?<br />

Silence. Regards timides.<br />

— Une fi lle ? C’est quoi une FILLE nom d’une petite culotte ! ! ? % ?» ?<br />

— J’en sais trop rien... Quelque chose qui fait courir les garçons très vite.<br />

On dit qu’elles sont belles, gentilles et qu’elles portent des robes.<br />

— Beurk... Ça n’a pas l’air très amusant d’être une fi lle !<br />

Moi, je suis méchante, très bête et je DÉTESTE les robes !<br />

Je ne suis pas une fi lle, je suis une princesse. Et toi ?<br />

— Moi, je suis un garçon.<br />

— Un garçon ? C’est quoi un garçon nom d’une tarte au citron ! ? ! ? % $ ? ?<br />

— Un garçon, c’est grand, fort et ça possède une antenne.<br />

— Une antenne ? Quel genre d’antenne ?<br />

Le garçon lui montre son zizi.<br />

— Ce genre-là.<br />

Elle rit.<br />

— Ça te sert à capter quoi, ce machin ?<br />

— À capter des fi lles. Ça peut envoyer des ondes partout même jusqu’aux<br />

fi lles<br />

de l’espace.<br />

Elle rit.<br />

— Chouette !<br />

Décidément, il était bien drôle ce garçon satellite, pensa la princesse. Et elle<br />

s’enfuit aussitôt cueillir des fl eurs roses et des framboises dans son jardin de<br />

princesse, le coeur rempli d’étoiles.<br />

5


Parfait<br />

Il n’y a jamais eu de toi et moi.<br />

J’ai rêvé tout ça.<br />

Tu n’existes pas.<br />

Je ne t’aime pas.<br />

Tu ne m’aimes pas.<br />

Tu es dans ma tête et je suis fêlée.<br />

Je veux te tuer.<br />

Il ne m’aime pas.<br />

Il l’aime.<br />

Il va faire ce qu’il veut,<br />

vivre sa vie.<br />

Lui écrire des chansons, la marier,<br />

lui faire l’amour toutes les nuits.<br />

Ils n’existent pas.<br />

J’ai rêvé tout ça.<br />

Elle est dans sa tête et il est fêlé.<br />

Il va se marier.<br />

Je ne l’aime pas.<br />

Il n’existe pas.<br />

Je vais le tuer.<br />

Il n’est pas là,<br />

je ne le vois pas.<br />

Il ne reviendra pas.<br />

Je l’aime.<br />

Va-t-il venir ?<br />

Est-il passé par là ?<br />

Où est-il ?<br />

Pense-t-il à moi ?<br />

Est-ce qu’il m’aime un peu ?<br />

Est-ce que j’existe ?<br />

Il faut se tuer.<br />

Ce sera parfait.<br />

6


Foutre<br />

Je transpire ton odeur.<br />

Je te vois,<br />

je te sens.<br />

Tu es là, mais tu ne me vois pas.<br />

Je ris, je pleure, je crie, mais tu n’entends pas.<br />

J’attends, je prie, j’espère, mais tu ne reviens pas.<br />

Je te hais comme je t’aime, mais tu n’y penses pas.<br />

Je te touche.<br />

Je me touche.<br />

Foutre.<br />

Fous-moi.<br />

Fous-toi de moi.<br />

Orgasmique bonheur provisoire.<br />

Le prozac fait défaut,<br />

j’hallucine.<br />

Fellation hydrofuge d’hypocondriaque gâteux.<br />

J’affectionne ces moments hypocrites, enlacés.<br />

Ton souffl e dans mon cou respire le mensonge.<br />

Il n’y a pas de lendemains.<br />

Où vas-tu mon amour ? Une petite vite, ça t’irait ?<br />

Je connais trop bien la suite.<br />

Se maquiller. Partout. Ne plus voir.<br />

Je beurre mes seins de pommade.<br />

Mon mamelon disparate me fait de l’oeil.<br />

Il pleure le mascara de cette mascarade ridicule.<br />

TRANSCENDER LE RÉEL<br />

POUR HYPOTHÉQUER MON ÂME,<br />

ME LIBÉRER DES ARTIFICES COMPLAISANTS<br />

QUI ME RETIENNENT PRISONNIÈRE DE TA TORPEUR.<br />

TE PRENDRE COMME UN SAINT ET DÉVIERGER TOUS TES VISAGES.<br />

CRUCIFIER MON SEXE AU TIEN POUR QU’IL TE RETIENNE, ENFIN, EN VAIN.<br />

AMEN.<br />

7


Assise sous un ciel électrique,<br />

peinturluré de mauve,<br />

de gris,<br />

et de jaune,<br />

je suis dépravée.<br />

Je sniffe quelques étincelles poudrées,<br />

et reprends la valse à vive allure.<br />

Le tempo est décalé.<br />

Je danse seule.<br />

Moi et ma patère.<br />

Moi sur une lanterne.<br />

Mauve<br />

Je te dessine des étoiles au plafond et tout ce qui peut exister,<br />

espérant t’attirer.<br />

Aspirant à contenir mes larmes usées.<br />

Je reste dans mon lit toute la journée.<br />

Était-ce seulement une blague ?<br />

Est-ce que je l’aime vraiment ?<br />

On n’a plus rien.<br />

Il n’y a que le silence qu’on partage.<br />

Un silence si froid.<br />

Des mots de pacotille qu’on échange pour meubler le vide trop lourd.<br />

J’ai été la reine de ton univers un moment.<br />

Tu as souri pour moi dans le noir.<br />

Puis je suis morte à nouveau.<br />

Je me lève et je crève,<br />

je me couche et je crève.<br />

Tu m’as laissée en lambeaux,<br />

désaxée, asexuée,<br />

démunie.<br />

Je n’écrirai plus jamais ton nom.<br />

8


Tes écailles<br />

Ton refl et est ici et partout,<br />

ton odeur trop familière.<br />

Le goût de tes papilles reste collé au fond de ma gorge,<br />

salivant breuvage à déglutir.<br />

Sourde de tes paroles,<br />

je ne pense qu’à toi.<br />

Je me dis tout bas que je te déteste.<br />

Je te hais.<br />

Tu ne me fais plus d’effet.<br />

Je me dis tout bas reviens-moi.<br />

Reviens-moi, salaud, que je te haïsse encore une fois.<br />

10


Meat sauce<br />

La coupe à blanc<br />

Spray tan<br />

Revlon<br />

Barbie<br />

L’anorexie<br />

Made in China<br />

Coca cola<br />

La coke<br />

Prozac<br />

Xbox<br />

Le hockey<br />

L’infi délité<br />

Trojan<br />

Viagra<br />

Le sida<br />

La télé<br />

Les plats congelés<br />

Les agendas<br />

L’argent qui coule à fl ot<br />

Les rivières qui se taisent<br />

La page blanche<br />

La guerre<br />

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11


La mouche I<br />

Mon évasion préméditée fut un déclic appréhendé.<br />

« Appuie sur la gâchette, Harry. »<br />

Anonyme<br />

Je suis molle quand tu es là.<br />

Mon coeur farfouille, survole, batifole<br />

au contact de tes commissures exubérantes sucrées.<br />

Je m’envole quand tu es là.<br />

M’emballe.<br />

M’éparpillote.<br />

Gonzelle, tu me brûles par les deux bouts.<br />

Quand je m’endors entre tes reins charnus, je me sens Jézabelle, pécheresse<br />

divinement saccagée, torturée de toi mon amour fl étri.<br />

PLACEBO POUR AMOURS FRIVOLES.<br />

SAIGNE-MOI,<br />

BOMBE NUCLÉAIRE.<br />

VIENS DANS MON ATMOSPHÈRE.<br />

UN MONDE IDÉAL EST UN MONDE SANS NOM.<br />

12


Monologue d’une minijupe<br />

La gueule pleine de rêves,<br />

le crâne terrassé d’effroi,<br />

je vis un coma autodestructeur.<br />

Faire de moi une femme ?<br />

Je refuse le processus de sélection.<br />

On me branche deux tubes dans le nez.<br />

On m’ausculte, m’inspecte, m’analyse.<br />

La machine s’installe, me possède.<br />

On m’alimente de débats fortement politisés.<br />

Faire croire à mon opinion.<br />

Jouer l’a<strong>du</strong>lte, ça s’apprend.<br />

Le regard, le ventre et le menton fuyants, la mine déconfi te,<br />

on tente de m’imposer un style de vie.<br />

Parader comme une pute noire, esclave d’une poignée de change salvateur,<br />

des miettes de dollars pour ce qu’il reste de dignité.<br />

Faire <strong>du</strong> chantage aux big shots.<br />

Rester pro<strong>du</strong>ctifs.<br />

Rouler comme on peut<br />

sur la nicotine, les amphétamines, la caféine.<br />

Tabasser les loosers dans la cour de récré.<br />

LÀ, dans mes viscères,<br />

il y a des gens qui observent les gens s’observer et qui se trouvent cons.<br />

Opération réussie.<br />

J’ai peur de vieillir, peur <strong>du</strong> noir, peur de rater ma vie.<br />

Je veux un stylo chromé, une voiture chromée, de plus gros seins chromés,<br />

une existence terne et sans nuances.<br />

Mais d’ici à ce que j’en crève, au fond de mes entrailles,<br />

je resterai insoumise, criminelle, teigne, pustule dérangeante sur la peau impec<br />

de l’humanité.<br />

Si elle me veut vraiment, qu’elle m’achève cruellement.<br />

Qu’elle suce tout, la chienne, et surtout qu’elle avale tout !<br />

13


Cet été-là<br />

Je suffoquais cet été-là.<br />

L’insomnie volait toutes mes nuits.<br />

Le néant m’appelait sauvagement.<br />

Cette vie bête, brutale et chienne m’en voulait.<br />

L’estomac noué, <strong>du</strong> vent dans le coeur,<br />

ma peau pelée me demande qui suis-je ?<br />

Je gratte,<br />

je me gratte sans cesse.<br />

Arracher cette vérité atroce qui me colle trop bien à la peau.<br />

Un soir, j’ai rencontré mon ombre,<br />

elle ne m’a pas reconnue.<br />

Puis je l’ai vu. Vue ?<br />

Aussitôt je l’ai aimé.<br />

Mais cet été-là,<br />

je suis morte plus d’une fois.<br />

Je lui ai laissé un souvenir amer,<br />

celui d’une vie trop éphémère.<br />

Le néant m’appelait sauvagement.<br />

Cette vie bête brutale et chienne m’en voulait.<br />

Mon sourire craque sous la pression.<br />

Une ride de plus qui me cerne, me casse.<br />

Je n’ai plus d’émotions,<br />

seulement l’anxiété de ne pas crever.<br />

J’ai la faim, pas les moyens et je souffre pour ceux qui ne souffrent pas.<br />

Je m’enfonce, docile, dans la torpeur.<br />

Je pleure plus facilement.<br />

Je ne vais pas changer le monde.<br />

Je ne vais pas l’aimer.<br />

Je ne suis plus rien.<br />

14


À FAIRE AUJOURD’HUI<br />

— PEINTURER MA CHAMBRE EN <strong>ROSE</strong>.<br />

— COMMENCER UNE COLLECTION.<br />

— ACHETER DES EFFACES QUI SENTENT LES FRUITS.<br />

— POUSSER QUELQU’UN JUSTE POUR LE PLAISIR.<br />

— TEINDRE MES CHEVEUX EN <strong>ROSE</strong>.<br />

— ESPIONNER UN INCONNU.<br />

— MANGER UNE BOÎTE COMPLÈTE DE POPSICLE.<br />

— RIRE.<br />

— IMITER UN CHIMPANZÉ CHAQUE FOIS QUE J’ENTENDS LE MOT « ARGENT ».<br />

— EMBRASSER UN BÉBÉ.<br />

— TUER UN CHASSEUR.<br />

— JOUER À LA MARELLE.<br />

— REGARDER LES ÉTOILES.<br />

— VOIR LA VIE EN <strong>ROSE</strong>.<br />

— CHANGER LE MONDE.<br />

15


La mouche II<br />

Elle m’idéalise.<br />

M’autorise à abuser d’elle noblement.<br />

Et si elle a fl anché sous l’étreinte de mon godemiché lustré,<br />

il n’en fallait pas moins pour que je l’empale, la pucelle.<br />

Toi.<br />

Tu cours dans ma tête et je suis rompue.<br />

À bout, je manque de souffl e.<br />

Nauséeuse,<br />

je me languis dans mes chairs.<br />

Avortée, je navigue entre ciel et terre.<br />

aucun enfer assez brûlant pour moi.<br />

Rien pour consumer cette douleur qui m’habite.<br />

DÉAMBULER, SOMNAMBULE DANS UN UNIVERS CORROSIF.<br />

TEINDRE SA PEAU BRÛLÉE COULEUR SANG.<br />

LE SCALPER, LUI, MON AMOUR, MON TRÉSOR,<br />

CARESSER SON ÉCHINE ÉPINEUSE.<br />

EN FAIRE MON TROPHÉE.<br />

PEUPLER NOS NUITS DE DOUX SOUVENIRS AMERS, MA CHÉRIE.<br />

16


Prismacolor<br />

« Je n’aime pas la lumière pour ce qu’elle a d’effervescent. »<br />

Anonyme<br />

On fait <strong>du</strong> bruit.<br />

On écoute <strong>du</strong> bruit.<br />

On ne regarde pas.<br />

On ne mange pas.<br />

On s’aime mal.<br />

On se fait mal.<br />

On ne sait plus comment faire.<br />

Les tornades envahissent tout.<br />

On a coupé tous les arbres.<br />

Il ne reste que de maigres pylônes pour se protéger.<br />

On vit dans des cages de béton<br />

derrière les barbelés de notre souffrance.<br />

Insonorisé, l’écho de nos cris se perd éternellement.<br />

On se fout une nuit ou deux.<br />

On se fout de tout.<br />

On s’arrose de tout ce qui sent fort,<br />

tout ce qui peut camoufl er.<br />

On veut se désinfecter,<br />

frotter, astiquer, arracher.<br />

Monstres de métal bien huilé, on per<strong>du</strong>re<br />

même si on sait qu’on a fait plus que son temps.<br />

On se noie quotidiennement d’illusions.<br />

On veut les mêmes voitures que dans les fi lms à la télé.<br />

On ne rit pas, on chiale.<br />

On ne parle plus.<br />

On perd tout.<br />

La mémoire, des clefs, des amis.<br />

On oublie d’éteindre la lumière,<br />

de rentrer un matin, un jour ou plus <strong>du</strong> tout.<br />

On ne meurt jamais parce qu’on n’a pas vraiment vécu.<br />

Nous sommes récifs.<br />

18


Larve<br />

Mes yeux larmoyants s’écoulent sur toi.<br />

Chaque fois que la lumière fait place à la noirceur, c’est immanquable,<br />

je vomis.<br />

Je suis une larve.<br />

Sur mon corps nervuré pullulent des poils disgracieux.<br />

Mais je m’en fous.<br />

Je parais mieux que bien des hommes,<br />

et j’ai une vie plutôt aisée.<br />

Moi, qui cavale dans les cavités des nez repoussants<br />

ou entre les entrailles des chiens errants,<br />

je glisse, je me faufi le, je m’agglutine.<br />

Je suce.<br />

Tout.<br />

Il n’y a plus rien sur mon passage.<br />

Je me nourris de la vie des autres.<br />

De leur décrépitude, de leur laideur,<br />

de leur inconstance, de leur ennui,<br />

de leur médiocrité, de leurs mensonges,<br />

de leur je-m’en-foutisme national et intersidéral<br />

et interminable.<br />

Je suis une plaie,<br />

une lésion.<br />

Je suffoque.<br />

Je me fi ge dans votre sang pour mieux vous glacer les os,<br />

sale parasite intestinal qui ne meurt jamais.<br />

Tempus edax rerum<br />

le temps qui détruit tout.<br />

19


L’homme stalagmite<br />

L’homme stalagmite,<br />

je l’aime.<br />

Il est froid comme un glaçon et voilà que ça m’allume.<br />

Il porte des bretelles sous son pantalon juste pour exciter les fi lles.<br />

Il les préfère sans soutien-gorge,<br />

c’est plus facile à déshabiller.<br />

Mon décolleté lui redonnait un goût certain pour la virginité.<br />

J’étais encore chaste, pure et intacte.<br />

Propre, inutile et bien comme ça.<br />

Je me suis mise nue.<br />

Bandé de moi, il a joui.<br />

J’avais gagné la partie.<br />

Froissée, tor<strong>du</strong>e à ses pieds,<br />

je lui ai tout vomi mon amour dessus.<br />

Ça l’a dégoûté.<br />

En plein visage hurlant,<br />

cet amour bleu et noir glissait doucement de mes lèvres décharnées.<br />

Je lui ai dit t’as de belles ailes.<br />

Tout de suite on a recommencé.<br />

On y a mis des jours entiers.<br />

20


Les poupées bien habillées<br />

me font rêver au jour où j’en posséderai une bien à moi.<br />

Ce jour-là, je ne viendrai pas.<br />

Je dirai non pour que ça <strong>du</strong>re.<br />

Les seins ten<strong>du</strong>s vers le ciel,<br />

elle pensera à moi.<br />

Elle sera à moi.<br />

Je serai son sauveur, son ange, son démon déchu, son bourreau tortionnaire en<br />

quête d’allégresse passagère.<br />

Je la démolirai à coup de machettes pour mieux la reconstruire.<br />

Pourquoi je ne sais pas aimer les fi lles ?<br />

Cet homme vermicelle,<br />

je ne l’ai pas aimé.<br />

Mais dis-moi.<br />

Comprends-moi.<br />

Mais dis-moi.<br />

Comprends-moi.<br />

C’est déjà terminé ?<br />

C’est la balade des métastases qui pullulent glorieuses sur mon corps pourri.<br />

21


Polichinelle<br />

Mon cœur bat pour toi.<br />

Se cogne contre toutes les parois.<br />

Me déchire,<br />

lié à tes moindres gestes.<br />

En rêve, mes lèvres effl eurent les tiennes.<br />

Fusionnés, nos corps sont enfi n réunis.<br />

Nos caresses deviennent somptueuses,<br />

nos baisers, trop gourmands.<br />

Toi et moi, c’est le moment.<br />

C’est un soupir gémissant coulant hors de ma gorge.<br />

Un lait chaud dont tu peux t’abreuver.<br />

C’est le fl uide de ta passion pervertie répan<strong>du</strong>e en mon sein et en mes veines.<br />

À un autre que toi, je ne pourrai jamais m’offrir.<br />

Jamais conjuguer le verbe créer que pour toi.<br />

Ni d’ailleurs jouer, manger, parler, rire.<br />

Ni même y songer.<br />

Ni aimer.<br />

Je voudrais être une boisson pour que tu m’avales,<br />

Dégustée lentement,<br />

en parfaite harmonie, pour un instant,<br />

jusqu’à ce que tu m’urines et m’ensevelisses de tes restes visqueux.<br />

Je voudrais être ton parfum, inhalé sans arrêt.<br />

Devenir ton oxygène, le poison de ta vie,<br />

ta drogue, ton ennemie.<br />

Je serai ton pouls, ta mélodie,<br />

ton œuvre d’art, immortalisée dans ta mémoire,<br />

pour apaiser tes sens à jamais.<br />

22


Lettre à une princesse<br />

Entre une lune et deux gratte-ciel,<br />

tu te balançais.<br />

Tu souriais.<br />

Peut-être pleurais-tu un peu ?<br />

Cette nuit-là, il pleuvait.<br />

Une pluie de météorites.<br />

C’est moi qui les avais commandés.<br />

Je voulais tant te délivrer,<br />

nettoyer tes jolis yeux d’avoir trop regardé,<br />

te soulager un peu.<br />

La tête à l’envers, un orage atomique éclaterait bientôt<br />

dans mon coeur.<br />

Si j’avais su parler, je t’aurais demandé ce qu’on<br />

t’avait raconté pour que tu sois si belle.<br />

Toi et les étoiles.<br />

Toi et les fl eurs.<br />

Toi et moi.<br />

J’ai la tête à l’envers de t’avoir tant cherchée.<br />

Cachée sous mon lit,<br />

je n’ai pas assez dormi.<br />

Mais je n’ai plus peur.<br />

Je veux être avec toi.<br />

Dors, dors, princesse,<br />

la nuit t’attend.<br />

Oublie tout,<br />

je ne t’oublie pas.<br />

Viens dans mes bras.<br />

23


Maman ne m’aime pas<br />

Pendant qu’on noie des bébés dans le cyanure,<br />

qu’on perce leurs tympans à coups de pioche,<br />

on tue l’enfant en nous.<br />

Entre deux siestes préméditées,<br />

je te regarde t’oxyder à mes côtés.<br />

Coeur de métal, chair de pierre,<br />

tu rouilles et je m’embrouille.<br />

Ma langue farcie de beaux mots polis<br />

s’évertue à retrouver sa raison.<br />

SOURNOISE apparition métallurgique d’un enfant dinosaure.<br />

Le mien, le tien, né de notre non-amour.<br />

Enfi n, comment pourrait-il survivre dans la stratosphère Anéanti ?<br />

Serait-ce que cet incessant bourdonnement qu’il émanait ?<br />

Ou suintait-il la marmelade ?<br />

Je ne me rappelle plus trop...<br />

Il conservait ce gazouillis subtil qui m’enchantait et m’extirpait de mon apoplexie.<br />

Tel un arracheur de dents, il a fait ÉClaTeR mes molaires.<br />

Il a pris la place de notre ego corrompu,<br />

en a fait de la boUillie pour les pauvres.<br />

Ces pauvres plus riches que nous.<br />

Journée incongrue, hypothétique, froide et cynique.<br />

Du bonheur en canne pour me guérir de cette vie synthétique et caoutchouteuse.<br />

Les oreilles gourmandes de la rue salivent sur nous, nous engloutissent.<br />

Clouent notre bouche pleine de fi ssures.<br />

En vérité, je vous le jure, mon bébé anorexique vous fait un pied de nez<br />

en plongeant dans une marée de meringue.<br />

PISSEUX, GALLEUX, VIEUX BAVEUX, MORVEUX, TÊTE DE NOEUD,<br />

ERREUR DE JEUNESSE.<br />

25


Lettre à un cowboy<br />

Cowboy,<br />

je te préfère simple, nu et indolent.<br />

Comme absent.<br />

Ignoré de moi, tu te dévoiles, et ce périple vers toi me fascine.<br />

Tu es digne d’être une caresse,<br />

une lampée de crème fouettée passée doucement sous la langue.<br />

Pur moment de jouissance.<br />

Tes yeux me donnent envie de m’y noyer,<br />

d’y tremper longtemps et de fondre.<br />

Tu excites toutes les particules de mon être,<br />

me captives et tu es parfait.<br />

26


Amour<br />

« L’amour a son instinct,<br />

il sait trouver le chemin <strong>du</strong> coeur<br />

comme le plus faible insecte marche à sa fl eur<br />

avec une irrésistible volonté. »<br />

Honoré de Balzac<br />

Il y a de ces jours qui veulent tout dire.<br />

De ces jours qui changent le cours de l’histoire.<br />

Aujourd’hui,<br />

ma vérité s’est envolée.<br />

L’amour m’a fait faux bond.<br />

Un grand écart sur la glace de mon coeur qui n’en fi nit plus de me tenailler.<br />

J’ai mal, trop mal.<br />

Je vais chez le docteur.<br />

Son diagnostic : je suis malade de trop aimer.<br />

Ils m’ont fouillée de fond en comble et ont trouvé quelque chose au fond de mon<br />

ventre.<br />

Un virus qui ne veut pas mourir ni même s’endormir.<br />

Sur la corde raide, je défi le.<br />

Funambule farandole funeste.<br />

Et je tombe pen<strong>du</strong>e et décousue à tes pieds.<br />

Tu es un mauvais souvenir dont je ne peux me débarrasser,<br />

un goût d’amertume et de regret au bord des lèvres.<br />

Je t’immolerais, immonde et fi ère.<br />

Je n’ai rien contre l’amour, ni même contre toi.<br />

Ton absence ne me dérange pas tellement.<br />

C’est le temps qui me fuit.<br />

Parce que la vie est précaire.<br />

Faite de petits riens qui peuvent voler en éclats à tout moment.<br />

N’importe où et pour n’importe quoi.<br />

Quand on ne vaut rien aux yeux de personne, vaut mieux éteindre toutes les<br />

lumières<br />

et laisser tranquillement le sommeil nous gagner.<br />

27


Quelques jours plus tard....<br />

— Salut princesse.<br />

— Salut garçon.<br />

Silence. Regards timides.<br />

Elle rougit.<br />

— Dis, tu veux faire un tour sur ma bicyclette magique ?<br />

— D’accord, mais ne va pas trop vite, OK ?<br />

— Ne t’en fais pas, c’est juste un 10 vitesses.<br />

Elle monte derrière lui.<br />

— Agrippe-toi bien à moi.<br />

— Et si je tombais ?<br />

— Je ne te laisserai jamais tomber !<br />

Elle sourit.<br />

Et le garçon et la princesse s’envolèrent dans le ciel pour toujours.<br />

28

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