You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
dans les eaux<br />
saumâtres<br />
<strong>de</strong>s lagunes
8<br />
Dans les eaux saumâtres <strong>de</strong>s lagunes<br />
Anguilla, anguilla paglina, anguilla capottu<br />
Anguille<br />
Anguilla anguilla<br />
Les mots anguilla et anguille viennent<br />
<strong>de</strong> anguis qui fut le premier nom du<br />
serpent en latin et témoignent encore<br />
<strong>de</strong> l’ignorance sinon <strong>de</strong> l’aversion dans<br />
lesquelles sont tenues <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s<br />
siècles ces passionnantes créatures.<br />
Bien que vivant la majeure partie <strong>de</strong> leur<br />
âge dans les eaux douces, les anguilles<br />
se doivent néanmoins <strong>de</strong> figurer dans<br />
cet ouvrage consacré aux poissons <strong>de</strong> la<br />
Méditerranée <strong>corse</strong>. Elles connaissent<br />
<strong>de</strong>ux épiso<strong>de</strong>s marins importants, le<br />
premier tout au long <strong>de</strong> leur vie larvaire,<br />
le second lorsqu’elles migrent vers la<br />
mer <strong>de</strong>s Sargasses pour s’y reproduire.<br />
Bien sûr, les anguilles aiment les fonds<br />
sableux ou vaseux <strong>de</strong>s embouchures,<br />
voire <strong>de</strong>s zones portuaires les plus<br />
polluées mais, paradoxalement, elles se<br />
plaisent également dans les eaux torrentueuses<br />
et très oxygénées <strong>de</strong>s fleuves<br />
<strong>corse</strong>s. Ainsi il n’est pas rare, en allant<br />
pêcher la truite en moyenne montagne,<br />
d’en rencontrer dans les parties hautes<br />
du Taravu ou du Rizzanesi.<br />
Solitaires et nocturnes, les anguilles<br />
sortent au crépuscule <strong>de</strong> leurs repaires<br />
(trou dans la vase, entrelacs <strong>de</strong> racines<br />
voire rebuts domestiques avec une<br />
prédilection pour les vieux pneus…).<br />
Elles font ventre <strong>de</strong> presque tout ce<br />
qu’elles croisent : poissons vivants,<br />
vers, mais aussi et surtout charognes en<br />
tous genres.<br />
Les anguilles changent volontiers <strong>de</strong><br />
nom et d’aspect tout au long <strong>de</strong> leur<br />
existence. Lorsqu’elles naissent dans la<br />
lointaine mer <strong>de</strong>s Sargasses, là-bas bien<br />
au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> Gibraltar, en plein milieu <strong>de</strong><br />
l’Atlantique, elles ne sont que larves et<br />
ressemblent à <strong>de</strong>s feuilles, il convient<br />
alors <strong>de</strong> les appeler leptospires. Arrivées<br />
en vue <strong>de</strong> nos côtes, alevins serpentiformes<br />
chétifs et transluci<strong>de</strong>s portés<br />
<strong>de</strong>puis plusieurs mois par les courants<br />
marins, elles sont pour les uns pibales,<br />
pour les autres civelles. Une fois dans<br />
nos eaux douces, elles sont anguillons<br />
ou aiguillettes et grandissent, elles sont<br />
dites alors « anguilles jaunes ». Puis,<br />
jusqu’à l’âge <strong>de</strong> 9 ans pour les mâles,<br />
12 ans pour les femelles, les adultes<br />
accumulent un maximum <strong>de</strong> graisse et<br />
atteignent un poids maximum <strong>de</strong> 5 kg<br />
et une longueur <strong>de</strong> 130 cm. Devenues<br />
ORDRE DES ANGUILLIFORMES FAMILLE DES ANGUILLIDÉS
9<br />
Les<br />
anguilles naissent <strong>de</strong>s<br />
vers que l’on appelle entrailles <strong>de</strong> la<br />
terre dans les lieux où la putréfaction est la<br />
plus abondante.<br />
Aristote<br />
Taille max<br />
150 cm<br />
Poids max<br />
5 kg<br />
Dans les eaux saumâtres <strong>de</strong>s lagunes<br />
On peut faire <strong>de</strong>s anguilles<br />
par artifice. On met <strong>de</strong>ux<br />
gazons (<strong>de</strong>s mottes <strong>de</strong> terre<br />
recouvertes d’herbe) l’un sur<br />
l’autre pour qu’ils se touchent<br />
par la partie herbue…<br />
là-<strong>de</strong>ssus quelques gouttes<br />
<strong>de</strong> rosée d’un matin <strong>de</strong> mai,<br />
quelques heures <strong>de</strong> soleil…<br />
il en sort une infinité d’anguilles.<br />
Mylius, savant anglais du xviii e siècle<br />
« anguilles argentées », ne mangeant<br />
plus, l’estomac et l’anus ayant disparu,<br />
elles sont tout entières prêtes au<br />
départ. Profitant <strong>de</strong>s crues d’octobre,<br />
elles commencent la dévalaison pour<br />
se reproduire et mourir à l’issue d’un<br />
périlleux retour vers les profon<strong>de</strong>urs <strong>de</strong><br />
la mer <strong>de</strong>s Sargasses qui les ont vues<br />
naître.<br />
Après avoir longtemps nourri<br />
partiellement notre humanité, la chair <strong>de</strong>s<br />
anguilles ne fait plus recette.<br />
Les anguilles se pêchent professionnellement<br />
dans étangs <strong>de</strong> la faça<strong>de</strong> est à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> filets<br />
ou <strong>de</strong>s nasses. Les amateurs les capturent<br />
au crépuscule à la ligne fixe eschée avec <strong>de</strong>s<br />
vers <strong>de</strong> terre ou <strong>de</strong>s vifs. Les anciens<br />
ont la nostalgie <strong>de</strong>s pêches au fagot, au<br />
parapluie ou aux lignes mortes.<br />
Depuis une trentaine d’années à cause <strong>de</strong> la<br />
pollution (métaux lourds) et <strong>de</strong> l’asséchement<br />
<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, les populations<br />
d’anguilles ont chuté <strong>de</strong> façon alarmante !
Dans<br />
les herbiers<br />
et sur les<br />
fonds sableux<br />
ou vaseux<br />
Depuis le rivage<br />
jusqu’au grand large
30<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Cavallu di mari<br />
Hippocampe<br />
Hippocampus guttulatus<br />
Hippo, le cheval a donné sa tête et<br />
campus, la chenille sa queue pour faire<br />
naître un ces animaux fantastiques :<br />
l’hippocampe. Celui qui, sur les eaux<br />
<strong>de</strong> la Méditerranée antique, servit <strong>de</strong><br />
monture aux tritons ou aux néréi<strong>de</strong>s et<br />
tira en alternance avec les dauphins le<br />
char <strong>de</strong> Neptune (il est encore cavallu di<br />
mari, le cheval <strong>de</strong> la mer en <strong>corse</strong>). Cet<br />
hippocampus est guttulatus, moucheté<br />
en latin, car constellé <strong>de</strong> petits points<br />
blancs.<br />
Ce poisson, il s’agit bien d’un poisson,<br />
étonne, bien sûr par sa tête chevaline<br />
formant un angle droit avec<br />
son encolure, par la rai<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> son<br />
corps recouvert en partie <strong>de</strong> plaques<br />
osseuses, par la souplesse <strong>de</strong> sa queue<br />
préhensile et aussi et surtout par son<br />
étrange habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> se tenir à la verticale<br />
dans les colonies <strong>de</strong> posidonies. Les<br />
hippocampes nagent très lentement et<br />
rampent même parfois à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> leur<br />
queue sur les fonds entre la surface et<br />
40 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur. Ils se nourrissent<br />
en siphonnant les petits animaux, vers,<br />
larves <strong>de</strong> poissons, crustacés, habitants<br />
<strong>de</strong> ces herbiers.<br />
L’espèce est dioïque avec un dimorphisme<br />
sexuel marqué. Le frai, au mois<br />
<strong>de</strong> mai commence par une para<strong>de</strong>, un<br />
ballet nautique lent et gracieux. Puis la<br />
femelle transmet ses œufs au mâle qui<br />
les stocke dans un organe incubateur<br />
où ils sont fécondés puis oxygénés et<br />
nourris pendant les 20 jours que dure<br />
la gestation. À la naissance, les petits<br />
parfaitement formés ne mesurent que<br />
10 mm <strong>de</strong> longueur, mais sont déja<br />
<strong>de</strong>s répliques exactes <strong>de</strong>s adultes. Les<br />
couples semblent être liés à vie mais<br />
il n’est pas rare qu’une femelle trop<br />
fertile confie ses œufs à plusieurs mâles<br />
et à l’inverse qu’un mâle fasse appel à<br />
plusieurs femelles pour emplir sa poche<br />
incubatrice.<br />
ORDRE DES SYNGNATHIFORMES FAMILLE DES SYNGNATHIDÉS
31<br />
Taille max<br />
15 cm<br />
Durée <strong>de</strong> vie<br />
Autour <strong>de</strong> 3 ans<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Il y a dans la mer beaucoup<br />
d’êtres monstrueux car<br />
les semences et les embryons<br />
s’y confon<strong>de</strong>nt et s’agglomèrent<br />
<strong>de</strong> multiples façons, roulés soit<br />
par le vent soit par la vague.<br />
Pline<br />
À la liste <strong>de</strong> leurs prédateurs naturels,<br />
raies, sars, rascasses, les hippocampes<br />
ont toujours dû ajouter les hommes.<br />
Pline rapporte que les cendres du<br />
cheval marin mélangées à <strong>de</strong> la graisse<br />
et du vinaigre étaient excellentes pour<br />
prévenir la calvitie. De nos jours, en plus<br />
<strong>de</strong> la pollution, alors que leur intérêt<br />
culinaire est reconnu comme étant nul,<br />
ils doivent craindre <strong>de</strong> se voir transformés<br />
en une poudre prétendue aphrodisiaque<br />
dont le prix est voisin <strong>de</strong> celui<br />
du caviar. D’autres finissent en bijoux<br />
<strong>de</strong> pacotille voire en porte-clefs…
38<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Cipolla, pesciu corda<br />
Cepola macrophthalma<br />
Cépole commune<br />
JARRETIÈRE<br />
Cepola, cipolla, sans doute à cause <strong>de</strong><br />
leurs couleurs allant du rouge au jaune<br />
rosé, les cépoles feraient penser à <strong>de</strong>s<br />
oignons, cepa en latin… ? Jarretière<br />
et pesciu corda montrent leur forme<br />
allongée, macrophthalma souligne la<br />
grosseur <strong>de</strong> leurs yeux.<br />
Les cépoles vivent sur les fonds du<br />
plateau continental entre 20 et 200 m<br />
<strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur. Elles creusent dans la<br />
vase, le sable ou les débris coralligènes<br />
<strong>de</strong>s terriers verticaux <strong>de</strong>puis lesquelles<br />
elles capturent le zooplancton et les<br />
petits crustacés. Elles peuvent être la<br />
proie <strong>de</strong>s poulpes et <strong>de</strong>s dauphins.<br />
L’espèce est dioïque sans dimorphisme<br />
sexuel marqué.<br />
Considérées comme ayant une valeur<br />
gastronomique nulle, les cépoles ne<br />
font l’objet d’aucune pêche spécifique.<br />
Relativement communes, on les retrouve<br />
fréquemment dans les poches <strong>de</strong>s<br />
chaluts <strong>de</strong> la côte est. Partout ailleurs, les<br />
amateurs peuvent les prendre lorsqu’ils<br />
pêchent les rasons à la dérive au-<strong>de</strong>ssus<br />
<strong>de</strong>s fonds sableux.<br />
Taille max<br />
70 cm<br />
ORDRE DES PERCIFORMES FAMILLE DES CEPOLIDÉS
39<br />
Pesciu di cazzu marinu<br />
Carapus acus<br />
Aurin<br />
FIERASFER, POISSON PERLE, POISSON THERMOMÈTRE<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Taille max<br />
20 cm<br />
Seul le nom <strong>corse</strong>, pesciu di cazzu<br />
marinu souligne les mœurs très<br />
étranges <strong>de</strong> ce fort discret petit<br />
poisson. Littéralement pesciu di cazzu<br />
marinu signifie le poisson <strong>de</strong> la verge<br />
<strong>de</strong> mer… soit plus trivialement et en<br />
y mettant les formes, le poisson d’une<br />
holothurie qui ressemblerait à la chose<br />
en question… soit le concombre <strong>de</strong><br />
mer (parastichopus regalis). Et on ne<br />
peut trouver rapport plus étroit puisque<br />
l’aurin en question ne quitte jamais son<br />
holothurie préférée au point <strong>de</strong> vivre et<br />
ORDRE DES PERCIFORMES FAMILLE DES CARAPIDÉS
44<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Trimasgionu, tremula, trimulenza<br />
Torpedo torpedo<br />
Torpille ocellée<br />
RAIE ÉLECTRIQUE<br />
Il est bien connu que ce poisson<br />
fait s’engourdir les êtres humains<br />
eux-mêmes.<br />
Aristote<br />
À cette antique observation, les Corses<br />
ajoutent un autre symptôme : les<br />
tremblements trimasgionu, tremula,<br />
ressentis par la victime lors <strong>de</strong> l’électrocution.<br />
Le contact volontaire avec une<br />
torpille vivante était un remè<strong>de</strong> contre<br />
les maux <strong>de</strong> tête persistants dans<br />
l’Angleterre ancienne.<br />
Cette torpille est ocellée car montrant<br />
4 ou 5 taches ron<strong>de</strong>s <strong>de</strong> couleur bleue<br />
cerclées <strong>de</strong> jaune pâle. Cette particularité<br />
permet <strong>de</strong> la distinguer <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
autres espèces <strong>de</strong> torpilles, beaucoup<br />
plus rares mais vivant dans les mêmes<br />
eaux : La torpille noire (torpedo<br />
nobiliana) et la torpille marbrée<br />
(torpedo marmorata).<br />
Le plus souvent solitaires et nocturnes,<br />
les torpilles ocellées vivent sur les fonds<br />
meubles <strong>de</strong>puis le rivage jusqu’à 200 m<br />
<strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur. Elles chassent à l’affût,<br />
enfouies dans le substrat, en attendant<br />
d’électrocuter leurs victimes à l’ai<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> leurs électro-palpes. Ces organes<br />
spécialisés, situés <strong>de</strong> part et d’autre<br />
<strong>de</strong> la tête, génèrent <strong>de</strong>s courants <strong>de</strong><br />
200 V capables <strong>de</strong> paralyser <strong>de</strong> grosses<br />
proies comme <strong>de</strong>s soles, <strong>de</strong>s rougets<br />
ou <strong>de</strong>s crustacés. L’espèce est dioïque<br />
et ovovivipare, le dimorphisme sexuel<br />
est marqué par la présence <strong>de</strong> ptérygopo<strong>de</strong>s<br />
chez le mâle et par un poids<br />
supérieur chez les femelles. La reproduction<br />
a lieu en hiver, la fécondation<br />
est interne. La gestation dure environ<br />
6 mois. Dès la naissance, les petits<br />
mesurant en moyenne entre 4 et 8 cm<br />
sont déjà capables d’utiliser leurs<br />
organes électriques.<br />
ORDRE DES RAJIFORMES FAMILLE DES TORPEDINIDÉS
45<br />
Torpedo, « la torpeur » en latin, celle<br />
que ressent celui qui est frappé par<br />
l’intense décharge électrique générée<br />
par le « taser » <strong>de</strong> ce poisson-torpille.<br />
Taille max<br />
80 cm<br />
Poids max<br />
4 kg<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Les torpilles, considérées comme nulles sur<br />
le plan culinaire, ne font l’objet en Corse<br />
d’aucune pêche spécifique.
62<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Gallina di mari, ghjallina<br />
Chelidonichthys lucerna<br />
Rouget grondin<br />
GRONDIN PERLON, GALINETTE<br />
Chelidonichthys, il est le poisson hiron<strong>de</strong>lle<br />
en grec sans doute à cause <strong>de</strong><br />
ses larges pectorales semblables à <strong>de</strong>s<br />
ailes à l’aspect étonnement fluorescent<br />
faisant penser à la lumière d’une<br />
lanterne (lucerna). Ce rouget est perlon<br />
du nom <strong>de</strong> son ancien provençal.<br />
Les grondins perlons fréquentent les<br />
substrats vaseux du plateau continental.<br />
Entre 50 et 80 m l’été, ils <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt<br />
jusqu’à 400 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur l’hiver.<br />
Solitaires ou en petits groupes, ils<br />
« marchent » sur le fond en utilisant les<br />
trois premiers rayons <strong>de</strong> leurs nageoires<br />
pectorales transformés en pattes<br />
rudimentaires. Ces organes sont munis<br />
<strong>de</strong> récepteurs sensoriels tactiles leur<br />
permettant <strong>de</strong> localiser les animaux<br />
cachés dans le sable (oursins, crabes,<br />
mollusques). Proies qu’ils débusquent<br />
ensuite à l’ai<strong>de</strong> d’un museau en forme <strong>de</strong><br />
rostre et recouvert <strong>de</strong> plaques osseuses.<br />
(La présence <strong>de</strong> ce rostre hypertrophie<br />
la tête <strong>de</strong>s grondins et leur vaut <strong>de</strong><br />
s’appeler capone, la tête en italien). Bons<br />
nageurs, ils se nourrissent également<br />
en pleine eau <strong>de</strong> petits poissons et <strong>de</strong><br />
céphalopo<strong>de</strong>s. En cas <strong>de</strong> danger, pour<br />
impressionner les prédateurs, se collant<br />
sur le fond, ils déploient leurs immenses<br />
pectorales et exhibent les bleus agressifs<br />
<strong>de</strong> leurs ocelles et <strong>de</strong>s liserés ourlant<br />
leurs nageoires. Les grognements émis<br />
par la contraction <strong>de</strong>s parois <strong>de</strong> la vessie<br />
natatoire semblent également être un<br />
avertissement à l’adresse <strong>de</strong>s intrus.<br />
La reproduction a lieu au cœur <strong>de</strong> l’hiver.<br />
L’espèce est dioïque sans dimorphisme<br />
sexuel marqué. La fécondation est<br />
interne. La ponte est fractionnée. Les<br />
œufs sont pélagiques. Les juvéniles sont<br />
<strong>de</strong> couleur noire.<br />
Le perlon est le plus grand <strong>de</strong>s grondins<br />
vivant en Méditerranée.<br />
ORDRE DES PERCIFORMES FAMILLE DES TRIGLIDÉS
63<br />
Pourquoi galinette et gallina di mari, la poule <strong>de</strong> mer en <strong>corse</strong> ?<br />
Car « les sons émis par ce poisson quand<br />
il se sent menacé ne seraient pas le grognement<br />
d’un cochon mais plutôt le caquètement d’une poule. »<br />
Docteur Chenu,<br />
Encyclopédie d’histoire naturelle,<br />
Paris, 1883.<br />
Taille max<br />
70 cm<br />
Poids<br />
6 kg<br />
Longévité<br />
15 ans<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Ces grondins sont capturés au chalut sur la<br />
côte est, au trémail et à la palangre sur la<br />
côte occi<strong>de</strong>ntale. Les amateurs les pêchent<br />
au posé, à la palangrotte, à soutenir<br />
ou en dérive, au vif ou au mort-manié.<br />
ORDRE DES PERCIFORMES FAMILLE DES TRIGLIDÉS
102<br />
Dans les herbiers, les fonds sableux ou vaseux<br />
Capupiattu, pesca vacca, sbrigliu<br />
Requin griset<br />
Hexanchus griseus<br />
Taille max<br />
5 m<br />
Poids max<br />
570 kg<br />
Longévité<br />
80 ans<br />
Hexanchus, <strong>de</strong> hexa « six » et anchus<br />
« branchie » en grec : le griset a six fentes<br />
branchiales au lieu <strong>de</strong> cinq comme chez<br />
la plupart <strong>de</strong>s requins. Sa robe allant<br />
du brun clair au gris foncé lui vaut le<br />
nom <strong>de</strong> griset. Ne pas le confondre<br />
pour autant avec le requin gris (carcharhinus<br />
plumbeus) peu commun en<br />
Méditerranée et inconnu en Corse. Les<br />
marins ajacciens le reconnaissent à son<br />
front plat et l’appellent capupiattu.<br />
Les grisets sont parmi les plus gros<br />
requins fréquentant les eaux <strong>corse</strong>s.<br />
Solitaires ou allant par <strong>de</strong>ux, ils se<br />
plaisent sur <strong>de</strong>s fonds s’étalant du<br />
proche rivage jusqu’à 2000 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur<br />
(ils remontent en surface les nuits<br />
<strong>de</strong> pleine lune). Nocturnes, ils chassent<br />
poissons osseux ou cartilagineux,<br />
céphalopo<strong>de</strong>s, coquillages et crustacés<br />
et peuvent à l’occasion se repaître <strong>de</strong><br />
charognes <strong>de</strong> mammifères marins.<br />
Les grisets sont matures sexuellement<br />
entre 10 et 35 ans pour les femelles et<br />
vers 12 ans pour les mâles. Malgré cela,<br />
l’espèce est considérée comme prolifique<br />
car pouvant avoir une centaine<br />
<strong>de</strong> petits par portée. Les grisets sont<br />
dioïques avec un dimorphisme sexuel<br />
marqué par la présence <strong>de</strong> ptérygopo<strong>de</strong>s<br />
chez le mâle. La gestation est<br />
interne mais sans échange placentaire<br />
(ovoviviparité).<br />
Très lents et inoffensifs, ces géants aiment<br />
aller aux <strong>de</strong>vants <strong>de</strong>s plongeurs pour faire<br />
admirer leurs dimensions imposantes.<br />
Les grisets, dont la chair n’offre aucun<br />
intérêt gastronomique, peuvent faire<br />
l’objet <strong>de</strong> rares prises acci<strong>de</strong>ntelles par<br />
les chalutiers <strong>de</strong> la côte est ou par les<br />
palangriers tout autour <strong>de</strong> l’Île.<br />
ORDRE DES HEXANCHIFORMES FAMILLE DES HEXANCHIDÉS
103<br />
Dans les zones rocheuses<br />
aaa<br />
Dans les zones<br />
rocheuses<br />
Depuis le littoral<br />
jusqu’au talus<br />
continental<br />
AAA AAA
106<br />
Capiciocciu, mazzacaro<br />
Dans les zones rocheuses<br />
Gobies<br />
Gobie marbré<br />
Pomatoschistus marmoratus<br />
Capiciocciu di rena<br />
Taille max<br />
6 cm<br />
Depuis la lagune sur la frange sableuse<br />
jusqu’à 3 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur. Bien que le<br />
plus abondant <strong>de</strong> la famille, il est jugé<br />
trop petit pour avoir le moindre intérêt<br />
gastronomique.<br />
Gobie panagel<br />
Gobius panagellus<br />
Capiciocciu testa nera, mazzacarò<br />
Taille max<br />
15 cm<br />
Partout dans les herbiers <strong>de</strong> faible<br />
profon<strong>de</strong>ur. Peut se confondre avec le<br />
gobie noir mais chez le panagel seule la<br />
tête est sombre. Les professionnels les<br />
pêchent aux verveux dans les lagunes,<br />
les amateurs au posé sur l’ensemble du<br />
littoral.<br />
ORDRE DES PERCIFORMES FAMILLE DES GOBIDÉS
<strong>Poissons</strong> vivant<br />
en pleine eau<br />
(pélagiques)<br />
<strong>de</strong>puis le rivage<br />
jusqu’au grand large
146<br />
Cagnacciu, pesciu elefante<br />
Cetorhinus maximus<br />
En pleine eau<br />
Requin-pèlerin<br />
Ce requin est doublement pèlerin,<br />
une première fois à cause <strong>de</strong> fentes<br />
brachiales dont les plis rappellent<br />
ceux du manteau <strong>de</strong>s voyageurs <strong>de</strong> la<br />
foi en chemin vers Compostelle et une<br />
secon<strong>de</strong> fois, plus récente, <strong>de</strong>puis que<br />
la science a constaté ses constantes<br />
pérégrinations à la suite <strong>de</strong>s migrations<br />
planctoniques. Cetorhinus (ketos la<br />
baleine) souligne la taille étonnante <strong>de</strong><br />
ce poisson maximus, ce pesciu elefante<br />
<strong>de</strong>s Corses. Attention et n’en déplaise à<br />
l’étymologie, le requin-pèlerin n’est pas<br />
un requin-baleine (Rhindodon typus).<br />
Ce <strong>de</strong>rnier n’est d’ailleurs pas non plus<br />
un cétacé mais bien le plus grand <strong>de</strong><br />
tous les poissons, qu’ils soient cartilagineux<br />
ou osseux (20 m pour 34 tonnes).<br />
N’aimant que les parages équatoriaux,<br />
le requin-baleine ne s’aventure jamais<br />
dans les eaux « froi<strong>de</strong>s » <strong>de</strong> la Corse.<br />
Les requins-pèlerins sont <strong>de</strong>s poissons<br />
cartilagineux pélagiques évoluant<br />
<strong>de</strong>puis les rivages en été jusqu’à <strong>de</strong>s<br />
ORDRE DES LAMNIFORMES FAMILLE DES CETORHINIDÉS
147<br />
Taille<br />
12 m<br />
Poids<br />
5 tonnes<br />
(c’est le plus gros<br />
poisson <strong>de</strong>s eaux<br />
méditerranéennes)<br />
En pleine eau<br />
Durée <strong>de</strong> vie<br />
50 ans<br />
profon<strong>de</strong>urs allant jusqu’à -2 000 m<br />
en hiver. Nageant à petite vitesse, ils<br />
filtrent à travers leurs branchies <strong>de</strong>s<br />
quantités énormes d’eau (2 000 tonnes<br />
par heure) pour en retenir le plancton,<br />
leur unique nourriture. Devant être<br />
constamment en mouvement pour ne<br />
pas interrompre leur oxygénation, les<br />
pèlerins se déplacent parfois sur le dos<br />
à la surface <strong>de</strong> l’eau. Cette habitu<strong>de</strong> leur<br />
vaut d’être surnommés requins flâneurs<br />
en français ou basking shark (requin qui<br />
prend <strong>de</strong>s bains <strong>de</strong> soleil), en anglais.<br />
Chez les poissons cartilagineux, contrairement<br />
aux poissons osseux, la fécondation<br />
est interne, le mâle déposant son<br />
sperme dans le cloaque <strong>de</strong> la femelle<br />
grâce à un ptérigopo<strong>de</strong>, un appendice<br />
né <strong>de</strong> la transformation <strong>de</strong> sa nageoire<br />
pelvienne. La gestation dure trois ans<br />
et <strong>de</strong>mi (c’est le record dans le mon<strong>de</strong><br />
animal). L’espèce est ovovivipare non<br />
placentaire. Les embryons abrités dans<br />
les voies génitales <strong>de</strong> la mère n’étant<br />
pas nourris par le placenta, doivent,<br />
pour se développer, ingérer les œufs<br />
non fécondés.<br />
Placi<strong>de</strong>s, débonnaires, dépourvus <strong>de</strong><br />
la moindre agressivité, ces géants ont<br />
fait l’objet d’une chasse facile pour leur<br />
chair, leur peau et surtout pour leur<br />
huile. Le foie d’un pèlerin adulte pesant<br />
une tonne pouvait donner jusqu’à 600<br />
litres d’une huile nécessaire à la trempe<br />
<strong>de</strong>s aciers, à la tannerie, à l’industrie<br />
pharmaceutique, etc. En Occi<strong>de</strong>nt, la<br />
chasse est maintenant remplacée par<br />
l’écotourisme au <strong>de</strong>meurant beaucoup<br />
plus rentable. Les marchés asiatiques<br />
eux continuent hélas à s’enrichir <strong>de</strong> ses<br />
ailerons, un aphrodisiaque incontournable<br />
vendu jusqu’à 1 000 euros le kg.<br />
Île-Rousse, golfe d’Ajaccio, Castagna,<br />
Isulella, Bouches <strong>de</strong> Bonifacio, Sulinzara…<br />
les pèlerins, sans être nombreux, sont<br />
régulièrement signalés, particulièrement<br />
au début du printemps, à proximité<br />
<strong>de</strong> tous les rivages <strong>corse</strong>s.
156<br />
Stomias boa boa<br />
En pleine eau<br />
Dragon <strong>de</strong> mer<br />
Taille max<br />
32 cm<br />
Malgré une présence avérée dans les<br />
poches <strong>de</strong>s chaluts à langoustines,<br />
ce petit monstre marin ne porte pas<br />
<strong>de</strong> nom en Corse. Pourtant sa gueule<br />
démesurée pleine <strong>de</strong> <strong>de</strong>nts (stomias,<br />
les <strong>de</strong>nts en grec), son aspect serpentiforme<br />
(boa, le serpent en latin) ainsi que<br />
son impressionnant barbillon terminé<br />
par une excroissance luminescente<br />
ren<strong>de</strong>nt sa rencontre difficilement<br />
oubliable. Les dragons <strong>de</strong> mer vivent<br />
entre 200 et 2 000 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur.<br />
Nécessairement adaptés à l’obscurité<br />
<strong>de</strong>s abysses, l’évolution les a équipés <strong>de</strong><br />
récepteurs et d’émetteurs <strong>de</strong> lumière.<br />
De nombreux photophores répartis<br />
<strong>de</strong> façon géométrique sur le front et la<br />
face ventrale peuvent être allumés ou<br />
éteints en fonction <strong>de</strong>s circonstances.<br />
Remontant la nuit vers la surface, les<br />
dragons <strong>de</strong> mer se nourrissent <strong>de</strong><br />
poissons et <strong>de</strong> crustacés proportionnellement<br />
démesurés puisqu’ils peuvent<br />
atteindre leur propre taille. Ils sont<br />
eux-mêmes les proies <strong>de</strong> grands prédateurs<br />
pélagiques (espadons et requins).<br />
Sans leur être directement apparentés,<br />
les dragons <strong>de</strong> mer ressemblent au<br />
saccopharyngiformes, <strong>de</strong>s « monstres »<br />
abyssaux exotiques, pouvant atteindre<br />
une longueur <strong>de</strong> 2 m, plus connus<br />
sous le nom évocateur <strong>de</strong> grands-gousiers,<br />
en référence à ce personnage<br />
<strong>de</strong> Rabelais réputé pour son appétit<br />
insatiable.<br />
ORDRE DES CLUPÉIFORMES FAMILLE DES STOMIIDÉS
157<br />
Anchjulu, acciuga<br />
Engraulis encrasicolus<br />
Anchois<br />
Taille max<br />
20 cm<br />
Poids<br />
35 g<br />
En pleine eau<br />
Longévité moyenne<br />
3 ans<br />
Anchois, en passant par le provençal<br />
anchoia, vient d’un mot grec aphuê<br />
désignant toutes sorte <strong>de</strong> petits<br />
poissons consommables en friture.<br />
Engraulis et encrasicolus, « qui a du fiel<br />
dans la tête », ce fiel qu’il convenait<br />
d’ôter pour préparer le garum. Le garum<br />
était une sauce faite à partir <strong>de</strong>s jus issus<br />
du pourrissement <strong>de</strong> petits poissons<br />
(anchois, sardines) dans le sel. Autrefois<br />
très apprécié sur tout le pourtour<br />
méditerranéen (il était nécessaire à<br />
Apicius pour sa fameuse recette <strong>de</strong> loirs<br />
farcis), on n’en trouve plus <strong>de</strong> traces sur<br />
nos tables contemporaines sauf dans<br />
la pissaladière <strong>de</strong>s Provençaux et <strong>de</strong><br />
manière plus exotique sous la forme du<br />
nuoc-mâm vietnamien.<br />
Les anchois sont pélagiques, ils vivent<br />
dans la colonne d’eau en suivant le<br />
plancton dans ses migrations saisonnières.<br />
Dans le large l’hiver à <strong>de</strong>s profon<strong>de</strong>urs<br />
variant entre 100 et 200 m, ils se<br />
rapprochent <strong>de</strong> la côte au printemps.<br />
Toujours en bancs (le nombre est la<br />
meilleure défense contre les prédateurs)<br />
ils suivent les déplacements<br />
quotidiens (entre le fond le jour et la<br />
surface la nuit) <strong>de</strong>s crustacés microscopiques,<br />
en particulier <strong>de</strong>s copépo<strong>de</strong>s,<br />
qu’ils capturent en filtrant l’eau à la<br />
manière <strong>de</strong>s requins-baleines.<br />
L’espèce est dioïque mais ne montre<br />
pas <strong>de</strong> dimorphisme sexuel marqué.<br />
La reproduction est fractionnée en<br />
une trentaine <strong>de</strong> pontes étalées d’avril<br />
à août, lorsque les géniteurs se sont<br />
rapprochés <strong>de</strong>s eaux riches en nutriments<br />
<strong>de</strong>s estuaires. Les œufs pondus la<br />
nuit à la surface <strong>de</strong> l’eau se développent<br />
très vite. Les juvéniles prennent les<br />
trois-quarts <strong>de</strong> leur taille la première<br />
année (15 cm).<br />
Malgré une chair très appréciée <strong>de</strong>s<br />
gastronomes et une relative abondance<br />
les anchois ne sont, du fait <strong>de</strong> la<br />
mévente, que rarement pêchés par les<br />
chalutiers <strong>de</strong> la côte est.<br />
ORDRE DES CLUPEIFORMES FAMILLE DES ENGRAULIDÉS
186<br />
Pesciu argentinu, pesciu sciabola<br />
Lepidopus caudatus<br />
En pleine eau<br />
Sabre d’argent<br />
Taille max<br />
210 cm<br />
Poids<br />
8 kg<br />
Lepidopus, <strong>de</strong> lepido les « écailles » en<br />
grec et pus le « pied » en latin, ce poisson<br />
n’a pas <strong>de</strong> pied mais bien <strong>de</strong>s nageoires<br />
en forme d’écaille. Sa silhouette et<br />
sa couleur gris acier en font un sabre<br />
d’argent en français et en <strong>corse</strong>.<br />
Bathypélagiques, les sabres vivent en<br />
bancs dans la colonne d’eau entre 30<br />
et 600 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur et peuvent<br />
être visibles à la surface à l’occasion <strong>de</strong><br />
chasses crépusculaires. Taillés pour la<br />
vitesse, dotés d’une gueule démesurée<br />
armée <strong>de</strong> <strong>de</strong>nts impressionnantes, les<br />
sabres excellent dans la poursuite et<br />
la capture en pleine eau <strong>de</strong> poissons<br />
fourrage (sardines, anchois) et <strong>de</strong><br />
céphalopo<strong>de</strong>s (calamars).<br />
L’espèce est dioïque sans dimorphisme<br />
sexuel marqué. En Méditerranée, la<br />
reproduction a lieu dans le courant <strong>de</strong><br />
l’été. La fécondation est externe.<br />
Les sabres, dont la chair est appréciée<br />
sont capturés principalement par les<br />
chalutiers sur la côte est.<br />
Les amateurs les pêchent tout autour<br />
<strong>de</strong> l’île aux leurres, <strong>de</strong>s jigs très lourds<br />
pouvant <strong>de</strong>scendre rapi<strong>de</strong>ment<br />
à gran<strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur.<br />
ORDRE DES PERCIFORMES FAMILLE DES TRICHIURIDÉS
187<br />
Tetrapturus belone<br />
Marlin<br />
<strong>de</strong> Méditerranée<br />
En pleine eau<br />
Taille max<br />
2,4 m<br />
Poids<br />
70 kg<br />
Maturité sexuelle<br />
1,5 m<br />
Le mot « marlin » est arrivé récemment<br />
dans les écrits halieutiques du vieux<br />
continent venant <strong>de</strong> l’anglais marlinspike<br />
(« l’épissoir » en français), cet outil<br />
pointu <strong>de</strong> forme conique servant à<br />
écarter les torons d’un cordage. Pointu<br />
et <strong>de</strong> forme conique c’est bien là la<br />
<strong>de</strong>scription du rostre <strong>de</strong> ce poisson.<br />
Cet appendice serait-il aplati comme<br />
une épée, ce marlin serait un espadon.<br />
Longtemps, la confusion entre ces <strong>de</strong>ux<br />
familles a perduré et les dictionnaires<br />
ont ignoré les marlins qu’ils fussent<br />
bleus, noirs, rayés, voiliers ou <strong>de</strong><br />
Méditerranée. En 1952, Jean Dutourd,<br />
ORDRE DES PERCIFORMES FAMILLE DES ISTIOPHORIDÉS
190<br />
En pleine eau<br />
carènes <strong>de</strong>s navires. Il cite Pline relatant<br />
le naufrage <strong>de</strong> bateaux coulés bas après<br />
l’attaque <strong>de</strong>s xiphias au large <strong>de</strong> la<br />
Mauritanie.<br />
L’espèce est dioïque sans dimorphisme<br />
sexuel apparent mais les femelles<br />
peuvent être beaucoup plus lour<strong>de</strong>s<br />
que les mâles. La reproduction, en<br />
pontes successives, est étalée sur une<br />
bonne partie <strong>de</strong> l’année, la fécondation<br />
est externe. Les larves, à peine ont-elles<br />
atteint la taille <strong>de</strong> 10 mm, sont déjà <strong>de</strong>s<br />
espadons miniatures aussi voraces que<br />
leurs géniteurs.<br />
La chair, pourtant susceptible d’avoir fixé<br />
<strong>de</strong>s taux importants <strong>de</strong> métaux lourds,<br />
jouit d’une excellente réputation. Soumises<br />
à autorisations spécifiques, les captures<br />
d’espadon sont réalisées au chalut sur la<br />
côte est et à la palangre tout autour <strong>de</strong> l’Île<br />
par les professionnels.<br />
Vous, pêcheur amateur, vous n’avez pas<br />
atteint le Graal s’il ne vous a pas été donné<br />
<strong>de</strong> vous mesurer à ce chevalier ! Pour cela<br />
il vous faudra maîtriser les techniques<br />
<strong>de</strong> traîne, soit avec <strong>de</strong>s appâts naturels<br />
(maquereau, orphie, etc.), soit aux leurres<br />
artificiels (rapallas, jupes à traîner,…)<br />
et avoir apprivoisé la chance, tant ces<br />
grands poissons savent se faire rares<br />
et se montrer combatifs.
191<br />
Pesciu luna, pesciu mula<br />
Mola mola<br />
Môle<br />
Taille<br />
3 m<br />
d’une nageoire<br />
à l’autre<br />
En pleine eau<br />
POISSON-LUNE<br />
Poids<br />
2 tonnes<br />
Môle, mola, rond et plat comme la<br />
meule du moulin. Poisson-lune, pesciu<br />
luna, rond et brillant comme une pleine<br />
lune, c’est un géant qui hante les eaux<br />
profon<strong>de</strong>s du mon<strong>de</strong> entier et du grand<br />
large <strong>de</strong> la Corse. C’est le plus lourd <strong>de</strong>s<br />
poissons osseux.<br />
ORDRE DES TETRAODONTIFORMES FAMILLE DES MOLIDÉS
192<br />
En pleine eau<br />
Hôte habituel <strong>de</strong>s grands espaces<br />
pélagiques, c’est un débonnaire aimant<br />
aussi se montrer à la surface <strong>de</strong>s eaux,<br />
couché sur le flanc pour emmagasiner<br />
la chaleur du soleil (il est l’ocean sunfish<br />
pour les Anglais) et se laisser voluptueusement<br />
déparasiter par les oiseaux.<br />
Totalement inoffensif, il arrive que <strong>de</strong>s<br />
plongeurs aient la chance <strong>de</strong> l’approcher<br />
même si sa nageoire dorsale en forme<br />
d’aileron <strong>de</strong> requin peut se montrer bien<br />
souvent dissuasive.<br />
La môle se nourrit <strong>de</strong> calamars, <strong>de</strong><br />
crustacés et en très gran<strong>de</strong> majorité<br />
d’une énorme quantité <strong>de</strong> méduses,<br />
on estime qu’un individu <strong>de</strong> 100 kg en<br />
ingère plus <strong>de</strong> 50 kg quotidiennement.<br />
L’espèce est dioïque sans dimorphisme<br />
sexuel marqué. Il semblerait qu’il existe<br />
<strong>de</strong> par le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s frayères où les<br />
moles se réunissent pour se reproduire.<br />
Une femelle peut pondre une<br />
quantité faramineuse d’œufs, jusqu’à<br />
300 millions, soit beaucoup plus que<br />
n’importe quel vertébré <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> !<br />
La fécondation se fait en pleine eau.<br />
Les larves mesurent 2 mm puis se transforment<br />
en alevins aux corps entourés<br />
d’épine.<br />
Adultes, les poissons-lunes n’ont pour<br />
prédateurs naturels que les otaries, les<br />
orques et les requins et pour véritables<br />
ennemis, les hélices, les filets dérivants<br />
et les déchets flottants qu’ils ingèrent en<br />
croyant avoir à faire à <strong>de</strong>s méduses.