Babel-Art-Juin - Juillet 2020

Michel Sabarthes - "Un roman inachevé ?" Julien Sansonnens - "Coup d'oeuil en cuisine" Malik "- a redonné vie à Archie Cash" Dominique Lin - Tempo de Santiago" Les découvertes de Gérard Glatt Le rédact est blanc comme un fromage Michel Sabarthes - "Un roman inachevé ?"
Julien Sansonnens - "Coup d'oeuil en cuisine"
Malik "- a redonné vie à Archie Cash"
Dominique Lin - Tempo de Santiago"
Les découvertes de Gérard Glatt
Le rédact est blanc comme un fromage

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Babel-Art

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Les Chroniqueurs

Ziska Larouge est bruxelloise, graphiste de formation. Son premier roman Le plus important (Basson éd. ; 2015) est salué

par une double mention (Prix de la critique et Prix Marc Galabru) au Salon International du Livre de Mazamet (Fr). Elle publie

ensuite Au Diable ! (Weyrich éd., nouvelles, 2017) ; Les Chaises musicales (Weyrich éd., roman, 2018) ; Le goût de tuer

(Lamiroy éd./coll. Opuscule, nouvelle, 2018) ; Les chaises roulantes (Acordacrolivres éd./coll. Livre au carré, nouvelle, 2019) ;

Hôtel Paerels (Weyrich éd., roman, 2019); La grande fugue (Weyrich éd./coll. Noir Corbeau, roman, 2019) et l'Affaire Octavia

Effe (Acrodacrolivres éd., roman, 2019).

Elle enregistre actuellement ses nouvelles, soutenue par les compositions originales de Ket Hagaha, qui crée également les musiques

de ses chansons, en lien avec ses romans.

Plus d’infos : ziskalarouge.wixsite.com/ziska - Photo Stan Arte Vizion

Sabine Dormond - "Traductrice de métier, Sabine Dormond a publié à ce jour sept ouvrages de fiction, le dernier chez l’éditeur

belge Luce Wilquin.

Un certain virus a occasionné le report de la parution de son prochain roman.

Elle a présidé pendant six ans l’Association vaudoise des écrivains (www.a-v-e.ch) et reste impliquée dans la promotion de la

littérature romande à travers l’animation de tables rondes et des interviews d’auteurs.

Sabine Dormond propose régulièrement des ateliers d’écriture et a cofondé en janvier 2011 le café littéraire des « Dissidents de

la pleine lune » (www.recits.ch)" . Photo Miguel Moura

Gérard Glatt, ou Le besoin d'écrire. Dès l'âge de sept ans, il écrit son premier poème. Depuis lors, ses plus fidèles compagnons

demeurent : le papier sous toutes ses formes, ainsi que le stylo, à encre ou à bille, et bientôt le clavier de son ordinateur.

En 1977, il publie son premier roman, Holçarté, chez Calmann-Lévy. Viennent ensuite, et entre autres, notamment publiés aux

Presses de la Cité : Retour à Belle Etoile, qui reçoit le prix www.salondulivre.net 2017, Les Sœurs Ferrandon, récompensé lors

du Concours littéraire international de Servon-sur- Vilaine 2017, Le Destin de Louise. En 2019, il publie L'Enfant des Soldanelles,

toujours aux Presses de la Cité, ainsi qu'un recueil de poèmes Nostalgie 89, aux Editions du Cygne. Lorsque le temps lui

reste, cela depuis plus de quarante ans, il chronique ses coups de cœur dans la Revue Littéraire Europe.

Philippe De Riemaecker, Chroniqueur littéraire, rédige de nombreux articles publiés dans différentes revues Belges et Françaises.

Animateur radio/télévision, il présente la littérature en provenance de toute la francophonie.

Son premier roman "Quand les singes se prennent pour des dieux" reçoit en 2014 le prix "Roman" de la ville de Mazamet. "Tant

de silences" est salué sur la scène internationale..

En septembre 2019 il est intronisé « Citoyen d’honneur de la ville de Rocamadour » - Photo HDlight Photography


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Notre Graphiste

José Mangano est en grande partie autodidacte et pourtant! Italien, il est venu en Belgique il y a une trentaine d'année.

Jeune adulte, il suit quelques cours de peinture et sculpture sur bois à l’Académie en cour du soir.

Graphiste de profession, il travail au sein d'un organisme humanitaire.

Poète, écrivain, marionnettiste et... clown. En compagnie de quelques amis, il crée une école de clown pour enfant et en est

actuellement, le président.

José Mangano est le créateur de notre logo et est le créateur de nos premières de couverture.

Notre plante fétiche

Le Romarin. Sous un éclairage artificiel, alors que la lune se dédouble, il faut avoir rencontré la Voie lactée sous le ciel de

« Campredon » pour comprendre toute la symbolique qui rejoint l’attraction terrestre.

Plante aromatique ou confidente ? Les intimes la baptisent amicalement : « Le gros marin ».

Devenue plante fétiche en raison de son influence artistique, elle guide la complicité de vos chroniqueurs même s’ils sont

arrosés de grenadine.

Cette plante nous rappelle que le talent n’est jamais une question d’égo, au contraire...

Cependant, rencontrer le romarin dans de telles circonstances ressemble à de l’amitié… Tous peuvent le prétendre, rares

sont les témoins de ces instants précieux.

Pour chaque nouveau membre qui nous rejoint,

Bel-Artitude s’engage à planter un arbre.

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Les larmes du Thoré

Michel Sabarthes & Olivier Fabre Maire de Mazamet

P

résident de l’association Culturelle du Tarn

Sud, pierre angulaire du Salon International

du livre de Mazamet, Michel Sabarthes, par

son opiniâtreté, allait marquer l’histoire de la

littérature mazamétaine. Il n’était pourtant qu’un

humble employé municipal, comptable durant de

nombreuses années au service de sa ville, la petite

ville de Mazamet.

Fréquenter ce personnage emblématique, faisait

rapidement comprendre que l’amitié n’était pas, pour

lui, une qualité usurpée. Elle était sans concession,

lien d’engagement, une sorte de sacrement de

réciprocité. Homme du vingtième siècle, il façonnera

son existence par la droiture et l’honneur. C’est en

raison de ces valeurs et de ses convictions qu’il fonda

l’AGTS (Association Gaulliste du Tarn Sud).

S’inclinant devant l’autorité sans trahir ses

engagements, il poursuivait sa route, curieux des

différences, revendiquant sans complexes son

attachement au souvenir du Général de Gaulle. Car

Gaulliste il l’était, en était fier, investissant énergie

et temps en devoir de mémoire, intransigeant sur le

respect du vivre ensemble.

Michel Sabarthes homme empreint d’humilité qui,

d’après certains témoignages, reflétait une forme de

complexe d’infériorité. Certes, il plaçait son énergie

à la réalisation d’une forme d’utopie, méprisé par

certains, trahi par d’autres, sans se détourner de ses

objectifs, il prouva contre vent et marée que ce qui

aurait pu n’être qu’une chimère se révéla grandiose.

Michel est né le 17 juin 1954. On le prétend bon

élève, un peu farceur comme le sont des générations

de gamins de son âge. Ses blagues de potaches

n’étaient jamais méchantes, suffisamment drôles

pour se graver dans ses souvenirs au point de le faire

sourire jusqu’aux portes de l’agonie. Il aimait

partager ces réminiscences, ponctuant ses récits par

de grands éclats de rire.

Les commémorations

C

ela se passait dans la petite commune de

« Labastide Rouairou » une cérémonie

commémorative devant le monument aux

morts venait de se dérouler, nous étions en

2019.

L’émotion de ces cérémonies était palpable. Ici se

réunissait la volonté de ne pas oublier, de saluer les

morts, les victimes terrassées par la barbarie,

sacrifice extrême au service de la liberté. On

pourrait croire que ces célébrations sont vaines,

qu’elles proviennent d’un autre temps et cependant, il

faut avoir été témoin des larmes versées par les

descendants de ces martyres pour comprendre qu’il

n’y a pas que la mort qui fut scandale. Les survivants

furent confrontés à des conditions parfois extrêmes.

La peur, la faim, la douleur que l’on ne peut montrer et

les traumatismes faisant plier ceux que l’on croyait

solides face à l’adversité. Parler de sacrifice n’est

pas expression usurpée, elle est peut-être en deçà de

la réalité, cependant, existe-t-il un autre mot qui

pourrait remplacer le premier ? C’est peut-être tout

cela qui motiva Michel Sabarthes à fonder l’AGTS.

Élisabeth Bigou, sa compagne, nous expliquera que

cette association portait le souvenir en saluant tel que

nous l’avons déjà souligné la personnalité qui restait à

ses yeux un dieu : « Le Général de Gaulle ».

Faisant suite à de longues minutes de commémoration

alors que l’écho des dernières notes de la Marseillaise

s’éteignait dans la vallée environnante, les participants

commencèrent à se disperser. C’est souvent l’occasion

de retrouver le fil des souvenirs, c’est souvent

l’opportunité de raconter une anecdote inlassablement

la même, réarrangée au fil du temps. Cette

redondance ne semblait lasser les oreilles attentives.

C’est normal quand on y songe, pour la plupart des


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gens qui l’entouraient ce sont des souvenirs auxquels

ils avaient, à défaut d’y avoir participé, été les

témoins. L’une de ces anecdotes si souvent

entendues resurgit inévitable à ma mémoire. C’est

vrai qu’il la racontait souvent au point que je devinais

par avance l’instant de son entrée en scène.

Michel ne racontait pas l’anecdote, il la vivait comme

si, au fil de ses narrations, il prenait les commandes

d’une machine à remonter le temps. J’adorais ces

échantillons de vie qu’il offrait à qui voulait

l’entendre, c’était des lucioles de bonheur.

Avec une bande de copains, ils avaient fait

l’acquisition d’une paire de lunettes munie d’essuieglace.

Cet accessoire était utilisé en classe derrière

le dos du professeur pour le plaisir des élèves

présents. À l’époque les professeurs étaient

extrêmement sévères ce qui explique que cette

exhibition demandait une certaine audace.

- Qu’est-ce qu’on a pu rigoler avec ce truc !

Et le voici parti dans de grands éclats de rire en

compagnie de ses complices de l’époque.

Michel Sabarthes m’entraina à ses côtés. Il me fit

faire une sorte de pèlerinage m’expliquant sans

détour ce qu’a dû être le calvaire d’une région

pendant les années sombres. Il me présenta au

Colonel Pourcel, figure emblématique du souvenir

français, me fit rencontrer quelques personnalités

marquantes que j’éviterai de citer ici pour ne pas

blesser les rencontres oubliées. Il insistait

systématiquement sur le rôle de chacun, il soulignait

le mérite des autres et c’est probablement par cette

attitude que l’on pourrait définir Michel Sabarthes.

Un homme qui s’efface, qui s’oublie, mais qui le fait

comme le ferait une lanterne au cœur de l’obscurité.

C’est quand elle s’éteint que l’on perçoit son

indispensabilité.

La littérature:

Tout a commencé par une rencontre.

E

t

cependant, alors qu’il mettait en place les

prémices d’un salon dédié aux livres anciens

et aux vieux papiers, qui aurait pu imaginer

que Michel Sabarthes deviendrait une

personnalité au sein du cercle fermé de la

littérature ? De nombreuses témoins partagent

l’impression que Michel Sabarthes ne prenait pas

conscience de sa notoriété.

Il y a quelques années en se rendant au centre

Culturel d’Albi, Michel Sabarthes, en compagnie de sa

compagne Élisabeth Bigou, se retrouve face à Marc

Galabru. L’opportunité d’approcher le frère du

célèbre comédien est une aubaine. La simplicité de

l’artiste médecin n’est pas à démontrer, pour l’avoir

rencontré je puis témoigner qu’il était de ces hommes

que l’on aime fréquenter. On discute un peu et

comme le destin sait vous offrir de belles surprises,

voici que Marc et Michel se lient d’amitié. Marc

offre ses conseils à Michel et suggère de

transformer ce qui n’était qu’un salon du livre

d’occasion et du papier ancien en salon du livre. Belle

opportunité d’offrir une vitrine aux auteurs de la

région. Michel Sabarthes est séduit par l’idée et

sans tarder met tout en œuvre pour la réaliser. Le

Salon du livre de Mazamet est né et au fil du temps,

il étendra sa réputation attirant des écrivains en

provenance de tous les coins de la francophonie.

Marc devient le mentor de Michel, homme

chaleureux, amoureux de théâtre comme l’était son

ainé, il offre par sa présence un charisme évident.

Malgré qu’il ne porte pas la même notoriété que son

frère, il est loin d’être anonyme. Michel se rend


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régulièrement chez Marc, rencontre l’autre Galabru,

partage une forme de fraternité à la Pagnol. L’un

aime s’épancher… Il est truculent, plein

d’enthousiasme et profondément humain. L’autre est

bon public, le duo se complète merveilleusement bien.

Malheureusement la vie met fin à cette rencontre.

La santé de Marc décline brutalement. Pour Michel,

un drame se prépare car le partage de cette

profonde amitié ne se prépare pas à la séparation.

Marc Galabru s’éteint le 6 octobre 2014. À partir de

cette date, Michel tronque sa joie de vivre par une

sorte de rôle qu’il faut jouer. Le spectacle se doit

de continuer quoiqu’il arrive, était-ce une leçon en

prémonition d’un avenir relativement proche ?

Régulièrement Michel se rend sur la tombe de Marc

Galabru. Il nettoie ce qu’il peut, arrache le lierre qui

envahit la pierre et fait graver quelques mots

rédigés à sa demande par la poétesse câline Henry

Martin. Face à l’adversité on montre bonne figure.

Jamais l’ami n’oubliera l’autre, jamais une journée ne

s’épuisera sans que le nom de Marc Galabru ne soit

prononcé dans la petite maison située rue Ampère,

car c’est là que Michel Sabarthes prépare le

Pour le Général

T

el que souligné en début de chronique,

Michel Sabarthes se proclamait gaulliste.

Œuvrant dans différentes associations

dont l’une des plus connues, « le souvenir

français », il participait au souvenir de mémoire sans

se laisser séduire par un parcourt en politique.

Convictions parfois sujettes à polémiques, qu’importe,

rien ne faisait fléchir sa volonté de poursuivre tout

en ouvrant la porte à tous ceux qui aimaient l’humain.

Car c’était probablement en cela que résidait son

engouement : opiniâtre à la réalisation de ses

objectifs, il n’oubliait personne qu’il savait en

souffrance. Il est important de souligner que sous

son costume d’homme-orchestre, Michel démontrait

une humilité quasi maladive lorsque ses amis

désiraient le placer sous le feu des projecteurs.

prochain Salon. Michel en accord avec l’unanimité

des membres du bureau de l’association culturelle du

Tarn Sud, après avoir reçu l’autorisation de la famille,

place Marc Galabru en qualité de membre d’honneur

perpétuel du Salon International du livre de Mazamet.

Les plus fidèles auteurs du salon applaudissent avec

enthousiasme. Beaucoup avaient fréquenté l’icône de

la région, chacun l’aimait à sa façon et malgré la

tristesse de l’absence, on remerciait ainsi la

générosité.

Homme discret, mais passionné il a, pendant plus de

dix ans, façonné l’un des Salons littéraires les plus

connus non seulement auprès des habitants de sa ville

natale ou de son département, mais débordant

largement des frontières françaises puisqu’il

résonnait sur d’autres continents. Il possédait

l’intelligence de comprendre combien l’ouverture

pouvait être une richesse. Sortir de sa zone de

confort, d’une certaine facilité pour offrir aux

auteurs une vision internationale. En choisissant

cette voie, le Salon du livre de Mazamet deviendra le

Salon International du livre de Mazamet.

Les écrivains firent rapidement écho, ils proviendront

de France, de Belgique, de Hollande de Suisse des

États-Unis, d’Afrique et j’en passe. Le succès est tel

que les places destinées aux exposants sont souvent

réservée plus d’une année à l’avance. Le Salon est une

réussite et comme dans toute réussite quelques

tensions se font sentir. Certains veulent récupérer


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l’évènement ou tout au moins tirer la couverture à

soi. Le Salon offre à la ville une vitrine de choix mais

la ville répond timidement. Pas de subside de la part

de la commune, juste le prêt de locaux. Certes, c’est

déjà ça, mais ce geste semblait minimaliste aux yeux

de la Culture. Michel Sabarthes s’il en est blessé

refuse la polémique. Il prend ce qu’on lui offre et les

liens qu’il a noués avec la Mairie le rendent peut-être

moins exigeant. Il connait tout le monde, tout le

monde le reconnait. Ou qu’il soit, il y a toujours une

personne qui vient le saluer.

Avec le temps, Michel dévoile ses qualités. Diplomate

pour certains, intransigeant pour d’autres, pathétique

aux yeux d’une minorité toujours prompte à

dévaloriser. Il élague les difficultés sans jamais faire

preuve de rancune excepté en de rares occasions,

lorsque la diffamation se dévoile pour salir l’un de ses

« protégés ».

Et soudain, le plus grand défi se présente

à lui ...

U

n

samedi matin, alors que le printemps se

faisait avare de soleil, il me prit à témoin.

Il était fier d’avoir maigri argumentant ce

fait par le refus du verre de vin, de l’apéro

entre copains. Faut-il l’avouer, à cette époque j’étais

admiratif. Pendant quelques mois nous avons continué

à fréquenter tantôt les évènements littéraires,

tantôt les cérémonies commémoratives. Avec le

temps, j’en viens à me demander s’il ne savait pas déjà

que la maladie se plaisait en sa compagnie. Michel ne

suivait pas de régime, il n’avait plus d’appétit, la

souffrance se faisait omniprésente. Attentif à

détourner mon attention, il me faisait découvrir sa

ville sous un jour que je ne connaissais pas. Il

m’entrainait pour saluer sa maman, pour visiter

Toulouse, pour un truc ou l’autre à ne pas manquer.

Jamais il ne se plaignait même si quelquefois il prenait

quelques minutes de repos que je croyais liées à ses

longues heures de travail. Tous ces petits signes qui

auraient dû m’alerter restèrent invisibles à mes yeux.

Il voulait m’inviter quelques jours à Collioure

malheureusement, à cette époque, trop pris par mon

travail je ne pouvais me permettre ces quelques jours

de repos. J’aurais dû être plus attentif, plus présent,

mais pour ce genre de choses l’aveuglement vous rend

bêta. C’est bien souvent trop tard que l’on réalise

l’erreur quant au choix de ses priorités.

Vint le 14 juillet 2019. C’est peut-être ce jour là que

j’ai pris conscience qu’un truc ne tournait pas rond.

Nous étions en compagnie de quelques amis

rassemblés dans le village « Les Martys » pour

célébrer la prise de la bastide. Michel pour la

première fois, appuyer contre le bar, m’a parlé de

douleurs. Il souligna des maux d’estomac, que ce

devait provenir du stress, quoi d’autre ?

Michel Sabarthes était Homme de caractère. Malgré

son charisme grandissant, s’il offrait son amitié il le

faisait sans limites, n’attendant rien en retour si ce

n’est le plaisir d’un sourire. D’une disponibilité

discrète, rien d’étonnant de le voir se mobiliser parmi

les premiers à la moindre occasion. Si Michel

Sabarthes était un homme généreux, il ne tolérait

aucun manquement aux principes qu’il s’était fixé.

Pour Michel Sabarthes l’honnêteté ne pouvait offrir

de concession.

Nombreux sont les témoignages confirmant que

Michel Sabarthes offrait son temps et ses

ressources à chaque occasion si le besoin s’en faisait

sentir. Il œuvrait en silence, sans vague, sans faire

de bruit. En date du 22 et 23 octobre 2019, l’Aude

fut touché par des inondations terrifiantes. Michel


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sa compagne et quelques amis prirent la route, récoltant des produits de première nécessité, les finançant de

leurs propres deniers avant que les sinistrés de l’Aude ne soient entourés par des structures organisées. Il

prétendait que ce n’était pas grand-chose, mais ce geste répondait à sa personnalité, celle de porter la main

tendue.

Michel Sabarthes infatigable, s’il était levé avant l’aurore, couché après les autres, c’est qu’il semblait prendre

plaisir à parfaire son travail jusqu’à ce que chaque détail soit modelé en parfaite harmonie. Il pouvait se

montrer inflexible sur certains points et pourtant terriblement timide en d’autres occasions. Certes, il était

un homme simple, mais jamais simpliste et pourquoi ne pas le dire, d’un caractère brut de décoffrage

Et puis, Michel ne s’est plus levé.

J’ai pris l’avion le plus rapidement possible, rejoint l’hôpital de Castre ou je l’ai vu pleurer. Il ne versait pas de

larme sur le départ, non, il pleurait sur ceux qui conjugueront le verbe « déserter ». Oui, les voiles du navire

ont été ramenées malgré que la bise ne demandait qu’à souffler. Loin des projecteurs, les désertions

trouvèrent de bonnes raisons pour auréoler l’abandon.

Je suis rentré en Belgique le cœur en forme de pluie. Plus tard une amie m’a averti que les heures étaient

comptées. L’avion que je voulais prendre n’était pas disponible, la France était en grève. Le lendemain le vol

était saturé et le jour suivant il n’y avait aucun avion de prévu. Michel s’est éteint. Michel endormi, pour la

première fois de mon existence j’ai compris la richesse que représente une belle amitié… J’avoue que j’en ai

été terrassé.

Dans l’église, le prêtre a refusé que l’on prenne la parole. En chaire de vérité il prononcera ces mots : « Ici

c’est moi qui parle »… Mais tout de même, la goujaterie a ses limites, il a tendu le micro au Maire Fabre qui fit

belle allocution. Inutile de relever l’orgueil de la soutane, tous les prêtres ne font pas preuve d’une telle

balourdise, vive la liberté, vive la démocratie.

Nous avons attendu la fin de l’office pour nous réunir dehors, face à la façade d’un bâtiment qui prétend

représenter la charité. Nous avons du sortir sous un ciel heureusement clément pour qu’enfin nous puissions

prononcer quelques paroles, dire au revoir, remercier Michel. Le cercueil, entouré de portes drapeaux,

semblait lumineux. Dehors, sous un ciel de fin d’hivers, les couleurs en berne offraient ce qui peut l’être quand

un héraut s’en va. Le Colonel Pourcel a salué sobrement celui qui le suivait chaque année pour saluer les

victimes des heures sombres. Pierre Gonzales, Président de l'OCDPC (Observatoire Citoyen de Défense

et de Protection Civiles ) s’est avancé, après quelques mots il a décoré Michel à titre posthume. Michel Tobal,

était également à nos côtés, ce dernier représentait le corps des pompiers. Il ne faisait pas chaud et malgré

le froid qui nous faisait trembler, l’assemblée ne songeait pas à se disperser.

J’ai regardé la foule à travers un brouillard de larmes. Mon Dieu, Michel, si tu avais pu voir tous ces gens

rassemblés pour toi... Ils venaient de tous les horizons ayant franchi pour certains des centaines de

kilomètres tandis qu’au même instant, fleurissaient autour de le francophonie, des centaines de bougies posées

devant les portes par les artistes qui n’avaient pu se déplacer.

Le lendemain, le soleil a laissé la place à la tempête. J’ose avouer que quelque chose en moi s’est brisé.

Que restera-t-il de son œuvre ? La vie continue et les pages se tournent tandis que l’histoire ne répond pas

toujours à notre attente.

Qu’écrire de plus? Michel faisait partie de ces géants, restera-t-il dans les mémoires ? Seule, l’avenir

confirmera si la reconnaissance peut germer quand le cultivateur s’en va… Ou pas ? Mais qu’importe l’avenir,

ici, le souvenir de Michel Sabarthes a fait jaillir une source étonnante, celle qui offre la possibilité de

rejoindre l’éternité en essaimant des paysages indescriptibles.

Michel se repose là-haut, sur une colline qui surplombe la ville. Un petit cimetière qui ressemble à tant

d’autres dans lequel, une tombe se fait discrète. La ville, le monde effaceront nos ombres, cependant de làhaut,

le souvenir de Michel observe la vallée creusée par le Torré. Que peut-il faire là-bas, couché sous le

poids nos regrets ? Peut-être écoute-t-il la rumeur des vivants, de ceux qui l’ont aimé ? D’ici un an, peut-être

dix, combien seront-ils encore à venir s’incliner en signe d’amitié ? Combien seront-ils ?

Sur le vent « Marin » se pose le parfum du romarin. Pour les enfants qui atteignent la majorité Le rosé

remplacera la grenadine . Le temps s’écoule inexorablement. Et quand on y songe, la valeur de notre existence

n’est jamais que le reflet de nos réalisations; si cette affirmation se vérifie, quand est-il devant l’éternité?

Philippe De Riemaecker


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Page 13 Babel-Art Juin—juillet 2020

Un nouveau roman sur le feu : coup d’œil en cuisine

Photo : David Zuber

À

quarante ans, Julien Sansonnens est déjà une voix qui compte dans le paysage littéraire romand.

Son quatrième roman, consacré à l’Ordre du Temple solaire, lui a valu le prix Édouard-Rod en

2019. Sitôt « L’enfant aux étoiles » paru aux éditions de l’Aire, il s’attèle au livre suivant.

Pourtant, Julien Sansonnens tique quand il entend parler de la jouissance de l’écriture. Lui la vit plutôt

comme un sacerdoce. Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’il s’installe à son bureau pour y consacrer

deux heures chaque soir, après une journée de travail. « Je passe déjà 43 heures par semaine assis,

le corps est sollicité. » S’il s’astreint néanmoins à une telle discipline, c’est qu’elle s’impose à lui

comme une obligation. « Dans la hiérarchie des frustrations et des souffrances, c’est encore pire de

ne pas écrire. À un moment, les choses doivent sortir. » L’auteur évoque ce besoin vital de s’exprimer

qui fait notre humanité. Ce besoin de donner du sens.

Julien croit au labeur plus qu’au talent. « Il n’y a rien de pire que les livres paresseux, quand on ne

sent pas la sueur sur le clavier. » Un travail qui consiste tout d’abord à se documenter, parce qu’un

roman doit, selon lui, apprendre quelque chose aux lecteurs.

Le livre en cours s’inscrit dans la tradition des écrivains voyageurs. Il y sera question du mouvement

des gilets jaunes. Et de la France, à travers le regard neuf et un peu naïf d’un commerçant qui la traverse

pendant une semaine pour en faire une sorte d’état des lieux.

Ce narrateur découvre un pays accroché à une idée de grandeur, nostalgique d’un passé glorieux révolu.

Un pays qui se pense à part et qui assiste dans la douleur à un déclassement économique et géopolitique.

L’insurrection dont il est témoin lui apparaît comme un évènement politique majeur. Pour

preuve, la violence sans précédent de la répression. « Quand tu es prêt à te faire matraquer, tirer

au flash ball à bout portant, priver de salaire, c’est qu’il y a vraiment un problème. »

Il y a certes une tradition de contestation en France, mais elle émane habituellement de la classe

moyenne instruite. Ce qui change avec les gilets jaunes, c’est la sociologie des participants. À travers

eux, on aperçoit le peuple invisible, la France périphérique, celle des petits patrons et des agriculteurs.

Une France prête à tout pour que survive le mythe républicain tel que la tradition monarchique

et la révolution l’ont façonné.

Sabine Dormond


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L’instant poésie

Les découvertes de Gérard GLATT

J

oë Bousquet, né en 1 897, à Narbonne, est mort en 1 950, à Carcassonne. En

1918, âgé de 21 ans, une balle allemande l’atteint à la colonne vertébrale. Le restant

de sa vie, il reste paralysé et demeure alité dans une chambre aux volets clos en

permanence. Écrivain, poète et romancier, il entretient jusqu’à la fin de son existence

de nombreuses relations épistolaires, notamment avec Paul Eluard, Max Ernst, Jean

Paulhan. Dans Traduit du silence, le livre de ses cahiers, publié chez Gallimard, dans la collection

L’Imaginaire, il écrit : « Seul, couché dans mon lit, j’ai atteint des hauteurs telles,

que j’ai creusé le ciel. Enfermé dans ma chambre, enfermé dans mon corps, je rayonne dans

cette lumière immobile… »

De son vivant, il publie des recueils de poésie, dont La Connaissance du soir, des romans,

dont Le Meneur de lune, chez Albin Michel, quelques nouvelles également.

L’essentiel de son œuvre est cependant posthume. Encore aujourd’hui, on en découvre, non

sans difficulté parfois, tant il y a de densité dans ses textes, toute la profondeur esthétique,

morale et mystique.


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Parce qu’il me touche particulièrement, voici Le Déshérité* :

On voit à peine son visage

Les malheureux n’ont l’air de rien

Son père dit qu’il n’a plus d’âge

Sa mère dit je l’aimais bien

Des jours brisés qu’il se rappelle

Il n’est pas sûr qu’il ait souffert

Tant sa douleur est naturelle

Son sourire est mort l’autre hiver

Il pleut des jours le jour en pleure

L’avril périt de ses parfums

Et comme lui les regrets meurent

Sait-on d’un mort s’il fut quelqu’un

Ils iront le voir à l’asile

Il a des frères il a des sœurs

Jouer aux sous dans sa sébile

Nul ne peut rien à son malheur

S’il a vécu comme personne

Souvenez-vous par charité

Qu’un monstre attend qu’on lui pardonne

L’affreux bonheur d’avoir été

* Extrait de La Connaissance du soir, Gallimard (1947)


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Page 17 Babel-Art Juin—juillet 2020

Malik a redonné vie à Archie Cash

Geoffroy Herens

Sur base d'un scénario de feu Jean-Marie Brouyère, Malik a dessiné le tome 16 des

aventures du célèbre baroudeur qui avait connu le succès tant en albums que dans les

pages de Spirou magazine, dans les années '70 et '80.

« À l'époque, nos albums étaient quelque peu censurés

par les libraires, se souvient Malik. Ceux-ci pouvaient

les vendre mais pas les mettre en vitrine. Il faut dire

que notre série a directement connu le succès, notamment

grâce aux nombreuses fois où nous avons eu

droit à la couverture du Spirou magazine (et au soutien

de Charles Dupuis). »

Les héros ne meurent jamais. Une preuve supplémentaire

? Le retour quasi inespéré d'Archie Cash. Le baroudeur

que les bédéphiles avaient appris à connaître

et à apprécier de 1973 à 1988 dans les pages de Spirou

Magazine ainsi qu'en albums vient en effet de revenir

par la grâce d'un seizième tome intitulé « Qui a

tué Jack London ? ». Un opus qui débarque donc 31 ans

après « Curare ».

Son come-back, Archie Cash le doit à Malik... et à ce

hasard qui fait parfois bien les choses. « C'est tout

simple, explique le dessinateur. J'ai un jour remis la

main sur un scénario de Jean-Marie Brouyère. J'allais

enfin pouvoir répondre de manière concrète aux lecteurs

qui me demandaient régulièrement lors de

séances de dédicaces quand reviendrait Archie Cash. »

Le résultat, paru en 1.200 exemplaires aux Editions du

Fourbe Chinois, ne décevra pas les amateurs. Le sosie

de Charles Bronson y est égal à lui-même : brave, idéaliste,

musculeux mais pas trop scrupuleux. Le tout

dans une atmosphère sombre, malsaine, où les planches

semblent avoir été trempées dans la moiteur ambiante...

Un milieu où les hommes n'inspirent pas confiance

et où les femmes... ne craignent visiblement pas

les courants d'air.

Aux manettes pour les quinze premiers tomes, le duo Brouyère-Malik. Le premier est décédé en 2009.

« C'était quelqu'un de très attachant, se souvient le dessinateur. J'ai toujours suivi ses scénarios à la lettre.

Idem pour « Qui a tué Jack London ? ». »

Techniquement parlant, Malik a choisi de troquer le bleu de coloriage pour la couleur directe. « Je préfère travailler

à l'encre de Chine, à la gouache et à l'aquarelle, précise-t-il. Passer à l'ordinateur ? Je suis trop vieux

pour ça... »

... mais pas pour envisager un tome 17. La réaction actuelle des bédéphiles a en effet tout pour convaincre

l'auteur installé à Huppaye (Brabant wallon) de remettre le couvert dès que possible. D'ici là, les nostalgiques

d'Archie Cash, Cupidon et toutes les autres créations de ce cycliste convaincu et grand connaisseur des choses

de la nature pourront continuer à croiser Malik régulièrement dans les foires et salons dédiés au neuvième art,

où l'intéressé aime rencontrer ses lecteurs, discuter avec eux et dédicacer ses albums.

Geoffroy Herens

Renseignements complémentaires et agenda des salons sur www.lefourbechinois.be


Page 18 Babel-Art Novembre — Décembre 2019


Page 19 Babel-Art Juin—juillet 2020

Tempo de Santiago – Dominique LIN ELAN Sud – EAN 9782911137723

C

’est l’histoire d’un petit garçon… Ben non, en fait c’est l’histoire

d’un réveil matin, un très vieux réveil, un réveil à ressort… Ben

non ! Ce n’est pas ça non plus… Alors quoi ? C’est l’histoire d’une

belle amitié, d’une confiance partagée sans que les protagonistes

ne s’aperçoivent de l’importance de cette relation. C’est l’histoire d’une

partition musicale, de l’intérêt qu’offre la ténacité à accomplir même si

ténacité nous semble un objectif très compliqué. C’est également la démonstration

d’une forme de vie cachée, une vie que les humains ne peuvent

que deviner sans y porter d’intérêt alors que c’est important d’aimer ce qui

nous entoure, de prendre soin, d’offrir sa tendresse à ce qui n’est pas

vraiment joli.

Le quatrième de couverture explique qu’ici un réveil aide son propriétaire à

remplir de musique les rêves de ce dernier… Je pense que c’est bien plus

que cela, j’ai l’impression qu’en rédigeant cette cinquantaine de pages, Dominique

LIN dévoile énormément de choses. Ce sont des mots très doux,

des mots soigneusement déployés qui, par la même occasion, bercent avec

tendresse la langue de Molière. Tic, tac, tic, tac, Tempo de Santiago efface

le temps, gomme les rides, approche petits et grands pour une lecture

avec ou sans symbole, cela dépendra de vos enfants, cela dépendra de

« vous », parents.

Je ne soulignerai jamais suffisamment le soin apporté à la qualité des ouvrages

proposés par la Maison d’édition « Élan sud ». J’ai suffisamment

fréquenté le monde de l’édition pour avoir rencontré tout et n’importe

quoi. J’entends encore certains éditeurs me confier que les auteurs sont

des gens compliqués et qu’ils devraient être contents d’être publiés.

Quelle erreur de jugement ! Quelle arrogance dans le propos ! La qualité

d’un ouvrage est avant toute chose une question de respect vis-à-vis du

lecteur. Publier certes, car justement le fait de publier n’est pas qu’un

simple geste d’impression, de reliure et puis… Et puis quoi ?

La maison d’édition « Élan Sud » offre un catalogue qualitatif (j’allais écrire caritatif) si l’on parle des textes proposés par

leurs auteurs. J’attire votre attention sur la qualité du papier choisi, le design épuré. Tous ces petits détails prouvent

que l’éditeur plonge les mains dans le cambouis pour que les œuvres deviennent de petits objets d’art, des livres que l’on

collectionne, qui fusionnent dans le décor comme le ferait de petits tableaux, quelques bibelots précieux.

Élan Sud n’est pas la seule maison à soigner sa collection, nous retrouvons dans un autre genre la même approche chez

« Noir d’Absinthe » et d’autres encore qui me pardonnerons de ne pas citer leur nom.

Mon travail consiste à vous parler d’ouvrages, vous pouvez comprendre que le nombre de livres qui m’entourent est considérable.

Pourtant, dans mon salon, à la vue des visiteurs ne se trouvent que quelques livres joliment présentés. J’ose

croire que je ne suis pas le seul à agir de la sorte. N’est-ce pas une sorte de vitrine ? N’est-ce pas une forme de publicité

que de relier en costume d’apparat ? Un lecteur qui achète un livre dépense une partie de son argent de poche. Ce n’est

pas rien, c’est de l’argent qui pourrait servir à autre chose. Offrir en échange un objet de qualité c’est une autre façon

de fidéliser ses lecteurs. On prétendra que je sors de ma réserve, que ce n’est pas mon rôle. Détrompez-vous, si vous

êtes éditeur et que vous pensez réellement que ce que j’exprime ici n’a pas lieu d’être c’est probablement que vous ne comprenez

pas ce que signifie « respect ». Le lecteur mérite cette attention, l’écrivain mérite que son travail soit présenté

sous ses plus beaux atours. Et si toutes ses considérations venaient à ne pas être comprises, j’imagine que l’éditeur n’a

aucune considération pour sa propre maison… Rassurez-vous, ils ne sont pas nombreux.

Philippe De Riemaecker


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Le rédact est blanc comme un fromage

I

l y a bien des années j’achetais 3 litres de lait entier auquel je rajoutais un litre de lait battu. Après quarante-huit heures de

patience il ne me restait plus qu’à égoutter pour obtenir un fromage frais d’une telle onctuosité que la famille finissait la dernière

cuillère à grand cris de revendication. Plaisir du cuisinier qui observe les noms d’oiseaux lancés sans méchanceté,

juste en raison d’une gourmandise justifiée par les offrandes de dame nature… Oui mais, la modernisation est passée par là,

règlementant le contenant et le contenu à grand coup de stérilisation. Hélas, par ce genre de traitement le lait battu a perdu de

son efficacité. Adieu le bon fromage maison,. J’ai bien essayé avec de la présure achetée en pharmacie cependant, le résultat

offrait une telle amertume que j’ai fini par faire le deuil de ce petit plaisir..

Il a fallu que le confinement s’en mêle. Obligé de m’occuper des commissions du ménage je tombe tout à fait par hasard sur une

petite boite qui aussitôt aperçue séduit mon attention.

Lactaline de Yalacta.

Et si nous testions l’efficacité de ce ferment qui selon toute vraisemblance serait spécialement conçu pour faire du fromage

Blanc ?

La boite contient six sachets de 2 grammes. Hm Hm, je demande à voir. Hop hop hop, je

dépose le contenu du premier sachet dans un saladier et ensuite, je verse trois litres de

lait achetés à la ferme voisine que je mélange, torture légèrement à l’aide d’un fouet sans

pour autant dépenser trop d’énergie. Il ne reste plus qu’à attendre.

Par le passé je comptais plus ou moins 48 heures avant transformation… Bingo, après 24

heures le lait s’est transformé en une pâte homogène. À l’aide d’une étamine j’égoutte le

résultat ensuite, après un temps plus ou moins long, suivant la consistance que l’on préfère,

il ne reste plus qu’à se régaler.

Le résultat ? 10 sur 10, rien à ajouter si ce n’est quelques fraises ou une poignée de groseilles

encore brulantes de soleil de saison.

Blinis salés ciboulette-fromage frais

Dans une casserole, chauffez le lait sur feu doux.

Cassez les jaunes d’œufs dans un saladier, incorporez

le lait tiède à l’aide d’un fouet. Ajoutez la levure

fraîche, la farine tamisée, sel et poivre. Laissez reposer

et lever la pâte 1 h dans un endroit tiède.

Montez les blancs en neige et incorporez-les délicatement

à la préparation. Ajoutez la ciboulette ciselée

et le fromage frais. Mélangez et vérifiez l’assaisonnement.

Dans une poêle légèrement beurrée, formez les blinis

en dessinant des cercles de pâte à l’aide d’une

louche ou d’une grande cuillère. Laissez cuire environ

2 min sur chaque face. Renouvelez l’opération

jusqu’à épuisement de la pâte.

25 cl Lait

2 Œufs

20 g Levure de boulanger

fraîche

170 g Farine

0,5 Bouquet de ciboulette

30 g Fromage frais

20 g Beurre demi-sel

1 cuil. à café Sel

Poivre du moulin

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