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La domination adulte - L'éducationnisme - Yves Bonnardel

Extrait de La Domination adulte. L'oppression des mineurs d'Yves Bonnardel.

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L’éducationnisme

une description du processus de socialisation et des rapports sociaux adultes-enfants

qui sévissent dans nos contrées. Elle ne peut en aucun cas prétendre expliquer

quoi que ce soit de façon universelle. Elle ne peut, tout particulièrement, prétendre

à quelque prescription que ce soit. Hélas, elle prétend pourtant, et fonde son audience

sur cette prétention.

Des enfants dans mon entourage ne sont pas éduqués ; la plupart des gens qui

les entourent ne cherchent pas à leur imposer de limites. Les adultes présents n’ont

jamais pensé se réunir pour discuter de « comment être ou comment faire avec

eux » : l’idée nous serait apparue saugrenue et obscène. On leur dit éventuellement

ce qu’on pense de leurs manières de faire, on leur fait remarquer plus ou moins

délicatement quand ils dérangent, on compose avec eux, on les accompagne lorsqu’ils

en manifestent le besoin, on tente de les avertir si on pense qu’ils se mettent

en danger (ce qui s’avère peu fréquent), comme on le fait avec des adultes. Ils vont

bien, Dieu merci. Ils sont plutôt plus assurés, plus entreprenants, plus vifs – plus

heureux assurément que nombre d’autres enfants.

Effectivement, qu’est-ce donc que les mineurs allemands de Kraetzae opposent

à l’idée d’éducation ? L’idée d’égalité, de rapports égalitaires. Martin Wilke, encore :

Dans les relations égalitaires entre parents et enfants, la question ne se pose pas du

tout de permettre ou d’interdire quoi que ce soit. Chacun est pris au sérieux avec

son intérêt et sa décision. L’autodétermination n’implique pas que chaque décision

est rationnelle, ou qu’aucune erreur n’est faite. Ce qui est réfléchi, c’est que

chaque personne peut décider pour elle-même ce qu’elle éprouve comme « son

bien » ou comme enviable et comment elle se conduit. Les parents n’ont pas à

apprécier le mode de vie de l’enfant. Si les parents croient que ceci ou cela serait

cependant mieux pour l’enfant, ils peuvent en parler avec lui, lui proposer des

renseignements concrets, l’informer des conséquences de ses actes, lui faire des

propositions. Il peut bien sûr y avoir des manifestations de sympathie ou d’antipathie

envers le comportement de l’enfant dans des situations déterminées, de même

qu’entre adultes. Seulement les parents n’ont pas à prescrire à l’enfant ce qu’il a à

faire ou à éviter – pas plus en tout cas qu’ils n’ont à le faire entre adultes.

Comment cela se traduit-il concrètement ?

Les interdictions ne sont pas compatibles avec le principe ci-dessus exposé,

concernant les limites, et elles ne constituent non plus aucune protection efficace,

puisque les enfants peuvent expérimenter à tout moment les choses interdites

lorsqu’ils sont seuls. Les enfants eux-mêmes ne veulent pas du tout se mettre en

danger. Les interdits peuvent provoquer au contraire des réactions par lesquelles

les enfants oublient leur propre sécurité, si bien qu’ils se trouvent seulement ainsi

241

DA Bonnardel BI.indb 241 04/11/2019 12:34

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