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La domination adulte - L'éducationnisme - Yves Bonnardel

Extrait de La Domination adulte. L'oppression des mineurs d'Yves Bonnardel.

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La Domination adulte

quelles pouvoir se heurter, on peut répondre qu’il y a suffisamment de résistances

auxquelles se confronter, loin des univers des certificats pédagogiques.

De la violence, des règles, des seuils, des limites

Quelques écoles parallèles, face à ces brutalités [d’enfants qui avaient été

scolarisés auparavant] se sont contentées de légiférer. Depuis que le monde est

monde, on n’a rien imaginé de pire, il est facile de s’en apercevoir. D’autres

cependant, celles – on ne saurait s’en étonner ! – qui ne se sont pas fait reconnaître

par l’État, ont refusé lois et punitions : les conflits ont été appréhendés

différemment à chaque fois selon les individus (adultes et enfants) qui en

étaient l’objet. Bien des pédagogues patentés ont vociféré contre cette absence

de règles et d’autorité qui « insécuriserait les enfants ». Sottise ! Ce qui insécurise

le monde, c’est la loi du plus fort (toutes les lois), les armées, les juges, les

polices ; ce qui insécurise quelqu’un, c’est de savoir que l’autre, en face de lui,

a en lui des lois, des armées, des juges, des polices...

Un enfant à qui l’on dit avec respect, avec confiance : « Fais ce que tu

veux », s’estime lui-même. C’est dans la juste estime de soi qu’on puise la vraie

puissance : celle de n’avoir pas besoin d’user de la force.

Quand une colère ou une ruse fait des victimes, la majorité des adultes,

dans ce genre de lieu, réagit par une discussion ou encore par des câlins consolateurs.

On tente d’exprimer sa désaprobation de manière non culpabilisante ;

dire son désaccord est toujours une marque de considération pour l’autre.

Parfois aussi, une question est réglée par un échange de coups ; qu’il jette la

première pierre, celui qui n’a jamais perdu son sang-froid.

1. Op. cit., p. 176.

Catherine Baker, Les Cahiers au feu, 1988 1

Cette question des limites revient comme un leitmotiv dans les discours sur

l’enfance. La nécessité de « fixer des limites à l’enfant » est invoquée pour légitimer

de sans cesse prescrire, proscrire. Elle s’est cristallisée dans la psychanalyse, qui l’a

justifiée « anthropologiquement » en en faisant un référent universel : « fixer des

limites » serait indispensable à une structuration saine de l’enfant, à un développement

social et moral harmonieux. Ce sont elles qui lui permettraient d’intégrer un

nécessaire « principe de réalité » qui ferait pièce à un supposé capricieux « principe

de plaisir ». Il s’agit donc là d’un lieu commun des discours psychologisants sur

l’enfance, qui vient légitimer les contraintes exercées en universalisant abusivement

un mode de développement de « l’enfant » : la psychanalyse au mieux constitue

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DA Bonnardel BI.indb 240 04/11/2019 12:34

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