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Family Stories about the rpg legend of the five rings

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CHAPITRE 1

Ce vingtième jour du mois du Lièvre resterait dans les

mémoires de tous les amateurs de théâtre kabuki et des acteurs

de l’école de comédie de la Famille Shosuro. En effet, tous les

ingrédients avaient été réunis pour que l’inauguration du tout

nouveau théâtre kabuki de la ville de Ryoko Owari soit un

triomphe mémorable ! Cette prouesse artistique serait bientôt

relayée à travers l’Empire par l’ensemble des courtisans des

Clans Majeurs, invités pour l’occasion. On prétendait même

que certains membres de la Cour Impériale, en particulier des

kuge 9 de la Famille Otomo avaient daigné faire le déplacement.

L’inauguration avait duré toute la journée. Le maître de cérémonie

Shosuro Shôta n’avait ménagé ni le temps, ni l’argent

pour que ce moment soit inoubliable. Il jouait sa réputation et

celle de sa Famille !

Le Champion du Clan du Scorpion et le daimyo de la Famille

Shosuro avaient annoncé que Shosuro Shôta ferait jouer sa nouvelle

pièce pour l’avènement de ce nouveau « temple » dédié

à l’art théâtral. La pièce intitulée Le Délice coupable des vrais

mensonges et des fausses vérités, intriguait déjà les critiques

d’autant qu’une cérémonie shūmei 10 était prévue à l’issue de la

première représentation. Devait-elle concerner le nouvel acteur

fétiche de l’École des Comédiens Shosuro, le brillant et fl amboyant

Shosuro Kōsuke ?

Ce dernier avait refusé toute entrevue pour ménager le

suspense. Les employés du théâtre avaient même tendu l’iwaimaku

11 pour marquer le caractère exceptionnel de cette journée.

Le public semblait déjà conquis avant même d’avoir assisté à la

pièce.

Du haut de ses trente ans, Shosuro Shôta n’avait jamais connu

de jour plus faste. On le disait inspiré par Benten, la Fortune de

l’Amour Romantique et des Arts. Tous l’adoraient et désiraient

s’attirer ses faveurs ou au moins lui soutirer quelques mots.

Mais derrière l’élégant demi-masque de tissu et sous le fard

du maquillage, Shôta affichait un sourire de façade et ne se laissait

pas griser par l’ivresse du succès. Intérieurement, il était las

9 Appellation de la haute noblesse parmi les samouraïs.

10 Shūmei (En japonais : 襲 名 littéralement « succession de

nom »).

Ce terme désigne une importante cérémonie de baptême dans le

milieu du théâtre kabuki. En général, un ou plusieurs acteurs participent

à cette cérémonie durant laquelle ils prennent de nouveaux

noms de scène. Dans la tradition du théâtre kabuki, les noms de

scène nouvellement portés sont souvent ceux du père de l’acteur, de

son grand-père ou de son maître. Ces noms se transmettent de génération

en génération au sein des lignées d’acteurs et revêtent une grande

importance tant sur le plan du prestige que de l’honorabilité. Souvent,

les acteurs portent au moins trois noms au cours de leur carrière, leur

participation à un shūmei constitue le passage dans un nouveau chapitre

de leur carrière de comédien.

11 Iwai-maku : Il s’agit d’un grand rideau employé dans les théâtres

kabuki spécialement réservé aux occasions ou célébrations importantes,

par exemple, lors d’une cérémonie Shūmei.

et ne se sentait pas d’humeur. Les compliments glissaient sur lui

au point qu’il les trouvait fades. Ses yeux, regardant le présent

comme une lointaine réalité, se cachaient derrière un regard

grave, paraissant contempler la mélancolie du passé.

Le dramaturge Scorpion avait pris congé de la foule de ses

admirateurs en prétextant un malaise. Il jouait la comédie à

la perfection, comptant sur la complicité de ses serviteurs de

confiance. Ces derniers l’installèrent dans son palanquin et

gagnèrent la demeure de leur maître sur la Colline de l’Excellence

au cœur du quartier noble. La demeure lui avait été

offerte par l’une de ses admiratrices fortunées de la Famille Doji.

Arrivé au seuil de sa maison, Shôta descendit du palanquin. Il

entra dans le tsuboniwa 12 puis observa la bâtisse endormie aux

fenêtres sombres. La petite cascade artificielle du bassin d’eau

jouait avec le roseau à bascule. Le lieu respirait la paix loin du

bouillonnement festif de la Cité des Mensonges.

Malgré cela, Shôta savait que ce soir, la sérénité le fuirait une

fois encore.

Le jeune disciple Shosuro Naoki se précipita vers son sensei 13

dès qu’il le vit entrer. Il s’agenouilla et le salua très respectueusement

: « Bienvenue dans votre demeure, Maître ! Au nom de

l’ensemble de vos disciples et de vos serviteurs, veuillez recevoir

nos compliments. Votre brillant succès d’aujourd’hui emplit

nos cœurs de joie ! »

En temps normal, l’accueil de son disciple favori aurait autant

réjoui qu’amusé Shosuro Shôta sensei, sauf ce soir. Le maître

répondit à son disciple d’un ton poli et sec : « Dōmo arigatō,

Naoki-san ». Puis il enchaina immédiatement : « Mon hôte

est-il arrivé ? » Le jeune disciple sentit toute joie s’évanouir de

son cœur et son ventre se contracta sous l’effet d’une sourde

inquiétude : « Hai sensei, je crois… ». L’agacement pointa chez

le maître : « Comment ça ? Tu crois ? ». Timidement, l’apprenti

s’expliqua : « Il s’agit d’un moine qui prétend venir à votre

demande. Mais pour être franc, il ne m’inspire guère confiance.

Il a tout l’air d’un errant un peu pouilleux et il m’a tendu un

courrier d’invitation que vous auriez envoyé à son monastère. ».

Shosuro Shôta le coupa de façon abrupte : « Baka 14 ! Tu ne sais

plus reconnaître mon écriture et mon môn 15 ? ».

12 Tsuboniwa (En japonais : 坪 庭 ) : Il s’agit d’un type de jardin

de petite superfi cie. En effet le mot tsubo 坪 désigne une unité de

mesure japonaise correspondant à la surface d’environ deux Tatami,

c’est à dire 3,24m ² . Le terme niwa, signifie jardin. L’origine des tsuboniwa

daterait de l’époque Heian (794-1185). Le tsuboniwa fait office

de jardin d’agrément ou de jardin d’accueil dans les entrées de maisons

japonaises. On y trouve des ornements tels qu’une lanterne, un bassin

et des pierres. Ce type de jardin est souvent enclos dans une cour intérieure,

ceint de murs ou de palissades.

13 Maître ou professeur, en japonais.

14 Idiot, en japonais.

15 Armoirie, dans L5A.

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