#1257 - Numéro 1 : Éclairages sur le cinéma
#1257 : la revue de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
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Produire <strong>le</strong> logement social<br />
Hausse de la construction, changements<br />
institutionnels et mutations de l’intervention<br />
publique en faveur des HLM (2004-2014)<br />
E<br />
n France, <strong>le</strong>s logements locatifs sociaux sont gérés par des organismes<br />
d'habitation à loyer modéré (HLM) ; <strong>le</strong>urs loyers sont encadrés<br />
et des ménages ne peuvent <strong>le</strong>s louer que si <strong>le</strong>urs ressources ne<br />
dépassent pas des plafonds prédéfinis. Si ces logements permettent d’abriter<br />
<strong>le</strong>s plus démunis, ils créent aussi de la mixité socia<strong>le</strong>, sont <strong>le</strong> support de services<br />
et contribuent à la réalisation de projets urbains.<br />
À partir du milieu des années 2000, la production de logements sociaux a été<br />
multipliée par trois : alors qu’environ 46 000 d’entre eux ont été financés en<br />
2000, plus de 144 000 l’ont été en 2010. Or, au cours de cette période, il a<br />
été de plus en plus diffici<strong>le</strong> de produire ces logements : <strong>le</strong>s prix fonciers et<br />
immobiliers ont connu une forte augmentation, tandis que l’État a réduit ses<br />
subventions directes à la production. Parallè<strong>le</strong>ment, il n’y a pas eu de réforme<br />
ambitieuse du secteur, mais une succession d’ajustements législatifs et de<br />
décisions ponctuel<strong>le</strong>s.<br />
Matthieu Gimat<br />
Géographie,<br />
sous la direction de<br />
Sylvie Fol<br />
La thèse de Matthieu Gimat vise à comprendre ce qui a permis la forte augmentation<br />
de la production en explorant <strong>le</strong>s évolutions de l’organisation institutionnel<strong>le</strong><br />
du système de production HLM. El<strong>le</strong> montre que, derrière <strong>le</strong>s oppositions<br />
politiques qui ont traversé la période (autour, par exemp<strong>le</strong>, de la vente<br />
des logements sociaux ou des attributions), un consensus s’est imposé autour<br />
de l’augmentation des objectifs de production et de la façon de la mettre en<br />
œuvre : en demandant aux organismes HLM de s’autofinancer (c’est-à-dire de<br />
dégager des marges d’exploitation pouvant être réinvesties dans la production<br />
neuve) plutôt qu’en augmentant <strong>le</strong>s subventions ; en concentrant la production<br />
dans <strong>le</strong>s marchés immobiliers des grandes vil<strong>le</strong>s attractives ; en favorisant<br />
<strong>le</strong>s partenariats entre <strong>le</strong> secteur HLM et <strong>le</strong>s opérateurs urbains à but lucratif.<br />
Si ces évolutions ont permis une hausse de la production, el<strong>le</strong>s reviennent à<br />
substituer à la solidarité nationa<strong>le</strong> une solidarité interne au secteur social, <strong>le</strong>s<br />
locataires HLM actuels contribuant de plus en plus directement au financement<br />
des logements des locataires HLM futurs. S’autofinancer implique aussi<br />
pour <strong>le</strong>s organismes HLM de trouver de nouvel<strong>le</strong>s ressources, par exemp<strong>le</strong> en<br />
vendant des terrains à des investisseurs ou des logements à <strong>le</strong>urs occupants.<br />
Enfin, ces évolutions posent la question de la capacité des organismes HLM à<br />
poursuivre <strong>le</strong>ur intervention au sein de marchés immobiliers peu attractifs,<br />
notamment ceux des centres-bourgs de vil<strong>le</strong>s petites et moyennes. Ainsi, <strong>le</strong>s<br />
dernières décennies semb<strong>le</strong>nt avoir dans <strong>le</strong> même temps renforcé <strong>le</strong>s capacités<br />
de production du secteur HLM et fragilisé son indépendance par rapport aux<br />
cyc<strong>le</strong>s économiques et aux dynamiques des marchés immobiliers.<br />
© Pascal Levy / Panthéon-Sorbonne<br />
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne / Juin 2019<br />
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