#1257 - Numéro 1 : Éclairages sur le cinéma

n’oublie pas l’approche humaniste qui irrigue normalement le droit d’auteur,
et qu’il est impossible de renverser puisque la preuve contraire est inadmissible.
Ne figurent pas dans cette liste de personnes favorisées – car dispensées de
la preuve de leur qualité d’auteur – le producteur, le directeur de la photographie,
le chef monteur ou le chef décorateur… Pour autant, le législateur n’exclut
pas qu’ils puissent être regardés comme des auteurs mais ces derniers
devront alors prouver en justice leur intervention originale dans l’univers
des formes de l’œuvre audiovisuelle. Suivant les hypothèses, ces personnes
pourront être regardées soit comme coauteurs de l’ensemble, soit comme
de simples créateurs de leur seule contribution, soit comme n’étant pas des
auteurs. La vérité oblige à dire que leur succès en justice est extrêmement
rare comme en témoigne la mésaventure du chef opérateur de La Marche de
l’empereur.
B – Titularité dérivée
De cette présentation, il ressort que le producteur français n’est pas, à l’inverse
de son homologue nord-américain, dans une situation a priori avantageuse.
Néanmoins, afin de compenser l’exclusion du producteur de la qualité
d’auteur, le législateur français a accordé à cet intervenant trois concessions
importantes.
D’une part, il a posé la règle suivant laquelle certains droits patrimoniaux
nés sur la tête des auteurs sont automatiquement cédés au producteur par le
biais du contrat de production audiovisuelle signé avec eux. La jurisprudence
se montre cependant très attentive à ce que cette solution ne dépossède pas
brutalement les créateurs de leurs droits originels.
D’autre part, il a attribué à ce producteur un droit voisin du droit d’auteur
qui l’investit d’une espèce de droit de propriété qui ne peut cependant pas
nuire aux droits des auteurs.
Enfin, pour éviter la paralysie de la réalisation de l’œuvre, la loi suspend le
droit moral – incessible – des différents auteurs pendant la phase de réalisation
de l’œuvre jusqu’à l’établissement de la copie définitive.
Par cette construction, on mesure bien que l’œuvre cinématographique –
fondue désormais dans la notion d’œuvre audiovisuelle – pose des règles
plus précises et un peu différentes de celles qui existent de façon générale en
droit d’auteur afin de mieux épouser la réalité de la création en cause et de ne
pas nuire à l’essor d’une industrie culturelle très importante.
Le producteur
français n’est pas,
à l’inverse de son
homologue nordaméricain,
dans
une situation a
priori avantageuse.
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne / Juin 2019
53